Sea, sex and sun

Zander hocha la tête à sa réponse concernant son projet.

« Tant mieux, parce que je n'en serai pas capable là tout de suite. » répondit-il.

Il ne mangea que la moitié de sa soupe et de sa salade de fruits, mais au moins, il avait avalé quelque chose, ce qui le requinqua un peu. De retour à leur chambre, il retourna se coucher et dormit d'une traite jusqu'en fin d'après-midi. Quand il finit par se lever, il ne se sentait pas vraiment reposé et pas encore tout à fait dans son assiette. Il savait aussi que cela prendrait du temps avant qu'il ne fasse plus de mauvais rêves sur Harlan, maintenant que ses souvenirs étaient remontés à la surface. Il soupira en pensant que cela sera un bon sujet de discussion la prochaine fois qu'il verrait le Dr de Bressignac. Cela lui vaudrait certainement même plusieurs sessions supplémentaires avec le psychologue.

Il sortit sur la terrasse, une tasse de café local dans une main et ce qui ressemblait à une brioche dans l'autre. Il s'assit là et contempla silencieusement la mer au loin. Toujours d'humeur taciturne, il appréciait le fait que Nadja ne lui pose pas de questions pour l'instant. Il se doutait qu'elle devait en avoir. Bien sûr, il lui répondrait si elle lui demandait quoi que ce soit, mais il préférait que cela attende le lendemain, ou mieux jamais, ce qui n'arriverait pas.

Ils repartirent au restaurant pour le repas du soir et là encore, il se contenta d'une autre soupe, d'un peu de salade et d'une part de tarte aux fruits. Il mangea un peu plus qu'à midi, mais toujours sans beaucoup d'appétit.

Il la laissa ensuite l'emmener jusqu'à la plage et sourit doucement à sa requête. Voilà un défi qui allait être intéressant et qui requérait son attention complète. Il mit donc de côté ses problèmes pour se consacrer à Nadja.

« D'aller dans l'eau ? Et pour le baiser, je peux t'en donner d'encouragement tout de suite. » en l'embrassant et la plaçant dos à la mer.

« Maintenant, tu as le choix. Tu me regardes et on recule ensemble ou tu fais face à la mer et on y va un pas à la fois, à ton rythme, et on voit jusqu'où on peut aller. Avec un peu de chance, on y arrivera. Mais en aucun cas, je ne te lâcherai. » dit-il en faisant quelques petits pas vers l'eau, les mains sur sa taille.

Elle était libre de se retourner à tout moment si elle le voulait. Il ne la forcerait pas à aller jusqu'au bout ce soir si elle ne s'en sentait pas capable. Ils avaient encore la journée de demain pour parvenir au but. Et chaque pas qu'ils feraient maintenant ne serait pas à faire demain. En tout cas, c'était une bonne distraction pour lui et il en avait besoin.

Zander sourit un peu plus à la remarque de Nadja.

« Profiter ? Moi ? Jamais ! » rétorqua-t-il, sur un petit air faussement offusqué.

C'était le mieux qu'il pouvait faire vu les circonstances. Ils se mirent à avancer doucement, pas après pas. Il la sentait se crisper de plus en plus à chaque mètre parcouru. À mi-chemin, elle s'arrêta. Il posa sa main sur la sienne et la serra.

« D'accord, on attend un peu. Prends tout ton temps. Et tu t'en sors très bien jusqu'ici. » dit-il sur un ton encourageant en lui rendant sur son regard. Il vit qu'elle se calmait un peu et elle décida de reprendre son chemin et elle finit par atteindre son objectif.

Sa réaction lui tira un autre petit sourire qui s'étira un peu en l'entendant parler de la température de l'eau.

« Et rater la tête que tu viens de faire ? Oh non, je ne t'aurai prévenue pour rien au monde ! » fit-il.

Lui appréciait d'avoir les pieds dans l'eau de la sorte. Il avança encore un peu et se retrouva avec de l'eau jusqu'aux genoux. Il regarda au loin et son regard se perdit quelques secondes dans l'immensité d'eau devant lui.

« Bien sûr que tu la mérites cette récompense. » répondit-il en revenant au moment présent.

Il se rapprocha en l'embrassa longuement.

« Est-ce que cette récompense te satisfait ? Alors, contente d'avoir réussi à mettre les pieds dans l'eau ? » lui demanda-t-il.

Il se moqua gentiment d’elle quand elle sursauta à cause de la température de l’eau et elle rit en retour, ravie de son petit exploit personnel. Elle se laissa guider un peu plus loin et finit par admettre que c’était plutôt agréable de patauger ainsi, au gré des vagues.

Finalement, il l’embrassa longuement, ce qui la fit fondre et brûler en même temps.

« - Quand j’étais gosse, j’ai vu un film ou un couple s’embrasait sur une plage, comme ça, au soleil couchant. J’ai toujours voulu faire pareil, même si je pensais que ça ne serait jamais possible. Comme quoi, tout arrive. »

En fait, elle aurait aimé faire bien plus, mais ne se sentait vraiment pas prête à ça. Elle se contenta donc de rester dans les bras du pilote. Sur une impulsion, elle enleva son chapeau et laissa cascader ses longs cheveux dans le vent. C’était terrifiant mais tellement exaltant.

Finalement, une vague un peu plus grosse que les autres vint leur chatouiller le haut des cuisses. Nadja poussa un petit cri surpris qui la fit rire.

« - Allez rentrons. J’ai assez poussé comme ça ce soir. Merci de m’avoir aidé. Et si quelqu’un apprend un jour qu’il y a toujours une petite fille romantique sous ma carapace de marine, je saurai à qui demander des comptes. »

En rentrant, la nuit était tombée et ils profitèrent à nouveau d’un feu d’artifice. Nadja avait l’impression que le spectacle en plein air la dérangeait un tout petit moins que précédemment. Peut-être s’habituait-elle enfin à ne pas avoir de plafond au-dessus de la tête. Il y avait du travail, mais les progrès étaient nets.

« - Bordel, je ressemble à rien... »

Dans ses quartier de l’Achille, la panique menaçait de submerger le sergent chef Cook. Elle avait choisit, grâce aux bons conseils du médecin de bord, une robe écarlate à bretelles, décolleté profond et jambe nues. Des bottines de la même couleurs complétait l’ensemble. Mei lui avait jurée que tout cela lui allait superbement mais à bien se regarder, ce soir, elle se trouvait juste ridicule, engoncée et un peu pathétique.

* Qui espères-tu tromper ? Tu n’es qu’une fille de rien qui se prend pour Blanche Neige… non l’autre… C’était qui déjà ? On s’en fou ! *

Comme à chaque fois que ses doutes l’étreignaient, le spectre de Mei passa derrière elle pour lui botter les fesses et elle se ressaisit. Après avoir dépensé une petite fortune pour arranger cette soirée et passer deux heures chez un coiffeur pour donner à ses cheveux une tenue correcte, elle n’allait pas se débiner maintenant.

Elle termina ses préparatifs en se maquillant légèrement les yeux et les lèvres et se sentant aussi prête que possible, contacta le caporal responsable des téléportations. Le pauvre garçon, tiré au sort la veille, allait passer la soirée à téléporter des membres de l’équipage vers la Terre avant de les ramener.

« - Ici Cook. Autorisation de transport vers la Terre Charlie, Oscar, Oscar, Kilo 012.
- Reçu Chef, amusez vous bien. 
- Je vous ramène des chocolat, Mike. Merci. »

Un instant plus tard, elle se retrouva au sol, dans une chambre d’hôtel du cente ville louée pour l’occasion. Un regard par la fenêtre lui appris que la nuit était déjà tombée et qu’il tombait quelques flocons épart.

« - Adieu ballade romantique, grommela-t-elle en songeant à ses jambes et ses bras nus. »

Zander grimaça en se regardant dans la glace. Avec l'aide de Stella et d'Internet, il avait enfin réussi à mettre le nœud-papillon tant bien que mal. Il n'était cependant pas certain de l'avoir fait correctement.

« Qui est l'imbécile qui a eu l'idée d'inventer un truc pareil… » grommela-t-il en tirant dessus et sur le col. Il se mit à faire les cent pas à travers le vaisseau.

Il regarda l'heure. Il était grand-temps qu'il descende. Son IA l'informa de la météo locale, ce qui le fit râler encore une fois, car il savait qu'il allait perdre quelques minutes de plus. Il fouilla dans son placard à la recherche de son long manteau noir qu'il réussit à extirper par miracle et plus rapidement qu'il ne l'avait pensé.

« Allez Stella, envoie-moi en bas. Je ne vais pas faire patienter Nadja plus longtemps… » lança-t-il. Il se sentait nerveux, sans savoir pourquoi. Il avait hâte d'y aller en fin de compte.

Quelques secondes plus tard, il apparut dans la chambre qui leur servait de point de rendez-vous et point de téléportation, comme prévu. Il la vit face à la fenêtre.

« Quelle vue splendide. Et la femme devant l'est encore plus. » dit-il avec un sourire. Il s'avança vers la fenêtre en déposant son manteau au passage et passa un bras autour de sa taille.

« Bonsoir. Tu es magnifique. » lui fit-il avant d'admirer l'extérieur. Il était sur Terre, enfin. Et il neigeait… Voilà qui était beaucoup moins drôle en revanche. Un coup à tomber malade.

« On y va ? Il ne faudrait pas être en retard. Tu as un manteau ? » lui demanda-t-il, tâchant de cacher son impatience de sortir dehors. Mais il ne pouvait pas partir sans elle, car il n'avait aucune idée d'où aller ensuite.

En entendant la voix de son mari, Nadja sourit en se tournant et prit une profonde inspiration en le découvrant. Elle s’était habitué à le côtoyer au quotidien et avait donc relégué ses souvenirs d’enfance au fil des jours. Mais la, en le voyant ainsi habillé, tout lui revint en plein figure. Le président Hayes se tenait devant elle, avec ce sourire charmeur qui lui avait valut sa réputation sulfureuse.

* Maman, si tu me voyais… *

Le compliment la fit rougir jusqu’aux oreilles -elle était maintenant assortie avec sa robe- et elle balbutia une réponse à base de « wow » de « merci » et de « t’es pas mal non plus ». Il la prit par la taille et observa l’extérieur, ce qui laissa à Naja le temps de se reprendre.

“- Non pas de manteau, mais on est à deux pas, ca ira.”

Quelle courge de ne pas avoir vérifié la météo... Le Space Needle n’était cependant qu'à quelques centaines de mètres et le trajet ne durerait que quelques minutes à peine. Pas de quoi fouetter une marines. Du coin de l’oeil, elle observa Zander qui contemplait l’extérieur, l’oeil pétillant.

Depuis la fin de leur séjour à l'hôtel, il était morose et dormait mal. Elle essayait de lui laisser un peu de champ pour l’instant mais comptait bien revenir à la charge d’ici quelques jours. Et ce foutu prêtre qui ne la recontactait toujours pas.

“- Allons-y oui et il parait que la vue de la haut est à couper le souffle.”

Et avec un toit au dessus de sa tete, elle pourrait en profiter autant que les autres.

Avant de sortir, elle vissa son chapeau sur sa tête et inspira profondément avant de sortir dans le froid glacial.

Zander ne put s'empêcher de répondre à la remarque de Nadja.

« Mais la vue que j'ai ici est déjà à couper le souffle. » dit-il en la regardant avec un grand sourire. C'était le premier du genre depuis plusieurs jours, mais il n'en avait pas conscience.

Il la suivit pour quitter la chambre et récupéra son manteau au passage.

« Tu pourras remercier Stella de m'avoir informé du temps avant de descendre… » dit-il en le lui posant sur les épaules.

« Ce serait bête que tu tombes malade… Et je survivrai, je suis un peu plus habillé que toi. » finit-il.

Une fois dans la rue, il s'arrêta net. Il avait été sur beaucoup de planètes différentes au fil des ans, pas toutes au même niveau de développement technologique, mais la Terre avait quelque chose de particulier à ses yeux. Il prit quelques secondes pour regarder autour de lui et s'imprégner de l'ambiance : très bruyante, beaucoup de monde et des odeurs déroutantes. Il avait beau être habitué à ce genre de chocs, il y avait des fois plus difficiles que d'autres et c'était le cas ici.

« Allons-y… » dit-il, perturbé par ce qui l'entourait. Il y avait un monde entre les films et la réalité et il se sentait soudain submergé par toutes ces nouveautés. Il ignorait aussi une bonne partie des règles à respecter au milieu de ce chaos ambiant. Il se laissa donc guider par Nadja, essayant de se souvenir de ce qu'on lui avait expliqué.

Avant d'entrer dans le Space Needle, il leva les yeux et regarda le ciel. Malheureusement et à son grand regret, il n'y avait aucune étoile à voir en raison des nuages. Peut-être que la prochaine fois qu'il viendrait, il pourrait les observer.

Zander leva une nouvelle fois la tête pour observer leur destination. Il remarqua que le sommet de la tour tournait, ce qui l'intrigua. Une deuxième chose attira son attention : le chien de la policière, s'il en croyait l'écusson sur son uniforme. C'était la première fois qu'il en voyait un en vrai. Il se retint de le caresser, ne sachant pas s'il le pouvait, alors qu'il en mourrait d'envie. Une fois à l'intérieur, il laissa Nadja déposer le manteau au vestiaire, comme le faisait tout le monde.

Entendre le serveur les appeler M. et Mme Hayes lui fit encore une fois tout drôle. Il s'y habituait petit à petit, mais tout de même. Il suivit le jeune homme jusqu'à une table et alla tirer la chaise pour que Nadja s'assoit. Leur guide leur tendit des cartes et les laissa le temps qu'ils fassent leur choix.

Il regarda la carte et la liste de cocktail se demandant quoi boire avant de se rabattre sur la section des bières. Il opta pour une bière brassée localement du nom de Pike Old Acquaintance, n'ayant pas spécialement envie de quelque chose de très fort. La dernière fois qu'il avait un peu trop forcé ne lui avait pas du tout réussi, aussi avait-il décidé de rester très raisonnable afin d'éviter une autre mauvaise surprise au réveil. Il ne jeta qu'un coup d’œil rapide au menu sans y porter un réel intérêt, n’ayant pas spécialement faim, comme d'habitude depuis quelques jours.

Il regarda par la fenêtre. La vue de la ville qui s'étendait à leurs pieds le captiva instantanément, en particulier le port qu'il devina plus qu'il ne le vit. Il sourit à l'idée de pouvoir observer l'intégralité de celle-ci au fil de la rotation de la tour. Cependant, il regrettait qu'il fasse nuit et de ne pas pouvoir aller se balader en ville, mais cela n'avait guère d'intérêt pour le moment, surtout avec le temps qu'il faisait.

« J'espère que j'aurais l'occasion de revenir visiter cette ville en plein jour... Il y a un programme particulier pour la soirée ? » demanda-t-il. Il ne s'était pas renseigné au préalable, histoire que la surprise soit totale. Et cela tombait très bien, car il avait besoin de distraction, et pour l'instant, cette soirée commençait très bien pour ça.

Une fois installée (mais pourquoi lui avait-il tire la chaise ?), Nadja se perdit elle aussi un instant dans la contemplation de la ville. C’était vraiment un spectacle impressionnant. Pour l’instant la vue donnait sur le port mais la rotation les amènerait bientôt de l’autre côté où se trouvait un lac. Elle avait lu, en choisissant cet endroit, que cette vision était particulièrement impressionnante.

Quand la carte des alcools se matérialisa devant elle, sa bouche s’arrondit légèrement en découvrant la diversité des boissons proposé.

« - Ok, j’ai pas la moindre idée de ce que peuvent être tous ces trucs… Va pour une Pina Colada. Je crois que j’ai vu un film ou tout le monde buvait ça. »

Les consommations arrivèrent rapidement et elle leva son verre coloré avant de gouter.


« - A nous… Oh mais c’est vrai que c’est bon. Sucré, tout doux, presque du jus de fruit… »

Il y avait des sortes de gâteaux pour accompagner cet apéritif qu’elle trouva également particulièrement à son gout.

« - On mange, on boit, on danse… il doit y avoir des musiciens normalement. Oh et la chambre d’hôtel dans laquelle nous sommes arrivé est louée jusqu’à demain matin au fait. »

Elle se rendit compte qu’elle avait avalé la moitié de son verre en trois gorgées et que l’alcool lui brulait le fond de la gorge. Ce breuvage était largement plus fort qu’il n’en avait l’air. Un coup d’œil alentour lui montra que la salle se remplissait rapidement. Elle remarqua qu’une fillette de sept ou huit ans était perdu dans la contemplation de ses tatouages avec un mélange de répulsion et de fascination sur le visage. Nadja lui adressa un clin d’œil amusé auquel elle répondit par un sourire timide avant de sursauter à une remontrance de ses parents. Au vu de leurs vêtements chic mais stricts, on ne devait pas rigoler tous les jours chez eux.

« - C’est moi ou les tatouages ne sont pas aussi rependu à cette époque qu’a la mienne ? »

Zander leva son verre pour trinquer avec Nadja puis goûta sa bière et eut un sourire appréciateur. Le goût était intéressant. Il mangea un ou deux petits fours, comme les avait appelés le serveur, mais sans plus.

« Oh ? J'avais cru comprendre que nous étions cantonnés à cette tour. Et il n'y a pas de couvre-feu non plus ? Je pensais que nous devrions être rentrés sur la station à une certaine heure sinon un détachement viendrait nous chercher pour nous ramener de gré ou de force… » dit-il, surpris, quand elle parla de la chambre d'hôtel réservée jusqu'au lendemain matin.

Ce choix comme point d'arrivée lui avait déjà paru un peu étrange, mais il s'était dit que c'était plus pratique et plus simple pour des questions de sécurité. Mais la réception n'allait-elle pas trouver bizarre de voir des gens qui ne s'étaient pas présentés à eux en arrivant aller et venir ainsi ? Puis il réalisa que ce n'était pas vraiment son problème. Il était ici pour profiter de la soirée et rien d'autre.

Il sourit et fit un petit signe de la main à la petite fille qui observait les tatouages de Nadja à distance avant que celle-ci ne se fasse rappeler à l'ordre par ses parents.

« Je ne suis pas sûr pour la Terre. Visiblement, c'est assez courant que les militaires en aient quelques-uns. Après, il me semble que dans les films, ce sont souvent des personnages peu recommandables qui sont couverts de tatouage. Ailleurs dans la galaxie, ça marque souvent l'allégeance ou l'appartenance à un clan ou un groupe spécifique. Certains ont des sens très précis et reflètent les actions réalisées par leur porteur au fil de sa vie. Mais j'avoue que je ne suis pas un expert en la matière et que je ne me suis jamais vraiment intéressé au sujet jusqu'à présent. » fit-il en haussant les épaules. Il n'envisageait d'ailleurs pas d'en porter un un jour.

La salle se remplissait petit à petit et presque toutes les tables finirent par être occupées. Les musiciens finirent par venir s'installer et commencèrent à jouer de la musique douce pour mettre un peu d'ambiance. Les serveurs rapportèrent les menus pour le dîner qu'il ne regarda que d'un œil. Il mangerait ce qu'on lui présenterait ou du moins, il goûterait à tout et aviserait en fonction de son appétit.

Elle sourit quand il s’étonna de ne pas être confiné à la tour. Il n’avait pas totalement tort mais son statut leur avait obtenu un peu plus de liberté.

« - Nos puces de repérages sont tracées. Tant qu’on ne s’éloigne pas trop, personne n’y trouvera à redire. Quant au couvre-feu… j’ai expliqué que je ne comptais pas me rhabiller avant neuf heure du matin et que s’il ne voulait pas un incident majeur, il n’avait pas intérêt à me téléporter avant. »

Son sourire à ses mots aurait fait fondre de la glace. Elle aussi était heureuse de se retrouver ici et comptais bien en profiter au maximum.

Il lui donna quelques explications sur les tatouages et elle hocha la tête, comprenant parfaitement ce qu’il voulait dire sur les gens « peu recommandables ». Les parents de la fillette avaient dû juger qu’elle ne l’était pas. Ils n’avaient peut-être pas tort.

« - J’ai trouvé qu’ils t’intéressaient particulièrement, l’autre soir, plaisanta-t-elle. Tu as raison, quand tu parles des militaires. C’est une sorte de tradition chez les marines, à mon époque. Ça raconte notre histoire. Ici, c’est le premier vaisseau pirate que j’ai arraisonné. Ça un Ha’Tak abordé. C’est ce jour-là que j’ai perdu une jambe. Ça, c’est la destruction du Schwarzenegger… Et ainsi de suite. »

Elle s’arrêta un moment quand le serveur vint récupérer l’assiette d’amuse-bouche et les prévenir que le repas allait débuter, tous els convives étant arrivés.

« - En fait, il faudrait que je m’en face faire un nouveau. La destruction de la base de Tonatiuh et mon arrivée sur Terre, c’est une sacrée étape dans ma vie après tout. En haut du dos, je pense. »

Si elle comptait bien réaliser le modèle, il lui faudrait trouver un tatoueur… et donc revenir sur Terre. Elle se souvenait avoir vu une boutique dans le centre commercial ou l’avait emmené Mei quelques mois plus tôt.

« - T’es sûr que t’en veux pas ? plaisanta-t-elle. Je pourrais écrire mon prénom sur tes fesses, si tu veux. »

Zander ne put s'empêcher de rire doucement à sa réponse sur le couvre-feu.

« J'avais oublié qu'ils pouvaient nous suivre à la trace avec leurs puces. Ceci explique cela, j'imagine. » répondit-il en grimaçant. Il n'avait jamais aimé ces puces et le fait que le moindre de ses mouvements puissent être épié de la sorte.

« Et je ne suis pas contre une grasse matinée non plus. » ajouta-t-il avec un sourire.

*Et une nuit complète de sommeil, mais je ne pense pas que ce soit au programme…* pensa-t-il, vu que c'était la soirée du nouvel an.

En réalité, vu le peu d'heures qu'il dormait en ce moment, il serait déjà bien content de faire une nuit de plus de quatre heures d'affilée. Il appréhendait d'ailleurs un peu son retour au travail, car il allait littéralement mourir d'épuisement à ce rythme. Il devrait se résoudre à en parler à un médecin si cela ne s'arrangeait pas assez vite.

Il sourit quand elle parla de ses propres tatouages et lui en désigna certains.

« Ah, mais c'est différent. Ce n'est pas parce que je n'en veux pas et que jusqu'à maintenant le sujet ne m'attirait pas plus que ça, que ceux que tu as sur le corps ne m'intéressent pas. C'est normal que je les regarde de près, non ? Et puis surtout, c'est toi qui les as dessinées et que tu es plutôt douée. Ils sont vraiment jolis et réussis. » dit-il en souriant. Lui ne serait certainement pas capable d'en faire autant si on lui mettait un crayon dans les mains.

« Le Scharwenegger ? Sérieusement ? Comme l'acteur américain dans les films d'action ? » lui demanda-t-il.

Il reprit le menu et vit que la thématique du repas était la France. En dehors du homard, il n'avait aucune idée de ce qu'était le reste. Il releva la tête quand elle parla d'en faire ajouter un autre.

« Ah ça, ton arrivée ici est clairement une énorme étape sans parler des changements qui ont suivi pour toi. Ça en mérite clairement un. » fit-il.

Et elle aurait probablement d'autres occasions d'en ajouter d'autres. Elle lui demanda à nouveau en plaisantant s'il n'en voulait vraiment pas.

« Sûr et certain. Et je ne crois pas que si jamais un jour je voulais en avoir un, ce serait ce que tu proposes. Je veux bien poser pour un dessin, mais ne compte pas sur moi pour les tatouages. »

Il regarda le premier plat arrivé d'un air douteux. La salade passait encore, mais le reste… Il s'interrogeait sur comment manger ce que le menu appelait un camembert grillé. Le serveur leur proposa proposa également un verre de vin blanc pour accompagner le plat et il l'accepta. Il n'y connaissait pas grand-chose et se dit que ce serait l'occasion de goûter.

« Bon appétit ! » lança-t-il gaiement en français, heureux de pouvoir ressortir l'une des rares expressions qu'il connaissait dans cette langue.

« - Vu le menu annoncé, je pense qu’on aura bien besoin d’une nuit entière pour nous remettre. Et la soirée va se finir tard de toute façon. »

Il paraissait bien plus détendu ce soir que ces derniers jours et c’était agréable à voir. Depuis l’incident de la plage, il n’avait été que l’ombre de lui-même, malgré les efforts de Nadja pour le distraire.

Quand il lui fit des compliments sur ses tatouages, elle dissimula sa sourire de plaisir derrière son verre avant de s’apercevoir qu’il était déjà vide. Il allait falloir qu’elle ralentisse si elle voulait voir la fin du repas.

« - Le président Schwarzenegger, oui. Il a dirigé une des premières colonies après la diaspora et a été l’un des piliers de l’unification. Il n’en a vu que les débuts, malheureusement, il était très âgé. »

Elle se souvenait de la vidéo du premier discours du nouvellement élu président Hayes. Le vieil acteur était non loin de lui, dans un fauteuil lourdement médicalisé. C’était sa dernière apparition publique de ce qu’elle en savait.

Il lui confirma qu’il n’avait aucune envie de se faire tatouer, ce qui la fit rire. Elle aimait bien le taquiner sur le sujet mais savait qu’elle ne le changerait pas sur ce point. Tant mieux, d’ailleurs, elle aimait bien sa peau ainsi.

Le serveur arriva à point nommé pour chasser des images érotiques qui se formait dans sa tête. Il portait des entrées particulièrement étranges et leur servi un vin blanc légèrement sucré pour les accompagner.

Elle goûta le plat crémeux, légèrement circonspecte et laissa échapper un juron appréciateur.

« - La vache ce que c’est bon. J’ai pas la moindre idée de ce que c’est, mais c’est terrible. Et le vin aussi. »

Elle avait dû parler un peu fort, comme souvent, et c’était attiré plusieurs regards amusés, sauf de la famille Coincée à côté d’eux qui ne semblait pas apprécier ses jurons.

« - Je crois que je ne suis pas faite pour ce genre d’endroit, murmura-t-elle, gênée. »

« Je me doute qu'on ne va pas se coucher avant minuit au moins. » dit-il sur un ton légèrement amusé.

Et ce ne serait probablement pas avant une heure très avancée de la nuit non plus. Mais cela n'avait pas grande importance. Il pourrait dormir le reste de la journée quand il serait rentré. En tout cas, il était vraiment content d'être là, ses soucis remisés dans un coin de son esprit pour le moment, et il comptait bien en profiter autant que possible.

« Et pour la nourriture, je ne connais pas la moitié des mets écrits sur le menu. Mais c'est ce qui fait tout le charme de ce repas. Nous allons découvrir plein de nouvelles choses. »

Il hocha la tête une fois qu'elle lui eut expliqué le rôle de Schwarzenegger à son époque. Il trouva cela difficile à croire, mais l'acteur s'était bel et bien reconverti dans la politique après le cinéma, alors cela ne semblait pas pour autant totalement inconcevable.

Il goûta le camembert et ne sut pas trop comment réagir. Le goût et la texture était plutôt étranges. Il trouvait ça un peu trop fort, sans pour autant savoir s'il aimait ou non.

« Je ne sais pas trop quoi en penser, en fait. Mais je suis d'accord pour le vin. » fit-il après avoir repris une bouchée de l'entrée avant de hausser les épaules à sa remarque.

« Chaque endroit a ses propres règles et codes. Une fois que tu les connais, c'est plus facile pour se fondre parmi eux. Mais tu sais, là tout de suite, on s'en fiche. Nous sommes deux jeunes mariés qui profitons d'une belle soirée et d'un bon repas. Peu importe ce qu'ils pensent de nous et si nous ne répondons pas à leurs standards et que nous passons pour des gros rustres. Nous ne les reverrons pas après ce soir, alors je ne vois pas pourquoi on s'en inquiéterait. »

Il mangea à peu près la moitié de son plat avant de s'arrêter. Cette chose lui laissait comme un poids sur l'estomac. Il avait l'impression qu'il serait incapable de manger quoi que ce soit après ça s'il le finissait et il voulait garder de la place pour la suite.

Le homard arriva et il fit un grand sourire à Nadja, se rappelant sa réaction pendant leurs vacances. Là encore, le serveur leur proposa un verre de blanc, mais différent du précédent, qu'il accepta également avant de s'attaquer gaiement au monstre à pinces dans son assiette.

Zander secoua la tête quand il vit Nadja échanger leurs assiettes pour finir son entrée. Mais comment faisait-elle pour avaler tout ça ? Cela lui donnait la nausée rien que d'y penser.

« D'accord, je note. Et je crois qu'il nous faudra la journée pour nous remettre de ce repas, si nous ne sommes pas malades… » fit-il, ce qui ne serait pas une première pour lui suite à la consommation d'aliments dont il n'avait pas l'habitude sur une planète inconnue.

Il sourit quand elle expliqua son sentiment sur la situation.

« C'est un peu ça, en fait. Il y en a qui parmi l'assistance ont l'air aussi rigide qu'un capitaine. Mais tu ne risques aucun blâme ou remontrance parce qu'ils estiment que tu te tiens mal à table. Et tous ne le sont pas. Et puis je trouve que la spontanéité, c'est beaucoup mieux que de se plier à un protocole rigide pour chaque réaction possible. C'est beaucoup moins drôle. Surtout pour une occasion comme celle-là. »

Il rit puis fronça les sourcils en regardant son homard après sa remarque sur les Goa'ulds.

« Honnêtement, je ne trouve pas. Tout ce que je sais, c'est que c'est délicieux et que le jeu pour récupérer la chair en vaut la chandelle. Et si tu n'en veux pas, tu as un volontaire en face de toi prêt à affronter et dévorer ce monstre. » dit-il avec un grand sourire.

Il décida de commencer par décortiquer entièrement le homard avant d'en manger la chair en s'attaquant d'abord aux pinces puis aux pattes et enfin à la queue. Mais avant de procéder, il regarda comment Nadja s'y prenait et dut faire un effort pour ne pas éclater de rire.

« Oui, il faut se servir les pinces normalement. Mais là, tu viens de faire clairement passer le message que mieux vaut de pas t'embêter et que ceux qui ne t'approuvent pas feraient mieux de s'occuper de leur assiette s'ils ne veulent pas finir comme la carapace de ce pauvre crustacé. » répondit-il, hilare.

Le serveur revint pour leur proposer du vin, mais il refusa poliment. Il devait tout de même faire un minimum attention à la quantité d'alcool qu'il avalait et décida de ne boire qu'un verre avec chaque plat, ce qui serait déjà amplement suffisant, et plus que ce qu'il avait prévu au départ. Une fois son homard terminé, il attendit la suite.

Quand celle-ci arriva, leur serveur leur annonça qu'il s'agissait d'un magret de canard et de pommes de terre confites dans la graisse de celui-ci, le tout accompagné d'un verre de vin rouge, un Saint Émilion, s'il avait bien retenu le nom.

Nadja soupira en songeant à la journée du lendemain. Elle serait sans doute bien moins joyeuse que ce soir. Raison de plus pour profiter de ce soir.

Elle ne put s’empêcher de sourire à sa remarque sur la spontanéité. Heureusement qu’il aimait çà. La discrétion et la distinction n’était pas vraiment son genre. Elle avait du rater quelque chose avec cette bestiole. Elle se nettoya la main et grogna d’appréciation en gouttant la chair tendre et fraîche de l’animal.

« - C’est vrai que c’est bon. Mais faut le mériter. »

Elle se servit de l’outil adéquat pour casser la seconde pince et réussit à la manger  peu prés correctement. Le reste du corps de l’animal, par contre, continua à lui résister et elle finit par le briser en deux en contenant un juron.

« - Tu disais quoi sur la spontanéité ? demanda-t-elle en terminant l’animal.»

Elle avait moins apprécié le vin et n’en redemanda pas non plus. Le serveur disparu à nouveau en emportant les restes du massacre avant de ramener la suite du repas : une viande rouge et odorante accompagnée de pomme de terres.

Simultanément, les musicien entonnèrent un air un peu plus guilleret et quelques couples se levèrent  pour profiter de la piste et sans doute digérer un peu. En entendant les premières paroles, Nadja pouffa et tendit la main au pilote face à elle.

« - Celle-la, mon grand, tu n’y coupera pas. »

Elle n’avait pas la moindre idée de comment danser sur cette chanson, mais s’en moquait éperdument, tant qu’il s’envolait vers la Lune, Jupiter et Mars.