Sea, sex and sun

Tout en l’écoutant, Nadja approuvait sa décision de s’entrainer un peu plus sérieusement. De son point de vue, ça ne pouvait que lui faire du bien, tant en cas de coup dur en mission et pour sa confiance en lui.

La remarque suivante lui arracha un sourire de prédateur.

« - La meilleure défense, c’est l’attaque. Quand tu seras prêt, inutile d’attendre. Choisit ton terrain, ton heure et frappe vite et fort. »

L’entrainement des marines n’était jamais bien loin. La suite, par contre, elle ne l’avait pas appris à l’école militaire.

Elle le regarda enlever sa chemise et serra les dents en voyants les ecchymoses sur son torse. Il n’y en avait pas tant que ça au final, il s’en sortait bien. Elle se concentra d’abord sur la plus importante, sans doute due à un coup de pied, au niveau des côtes. Avec une douceur inattendue chez elle, elle passa le baume du bout des doigts et le fit pénétrer.

« - Tu m’excuses si je chante pas en même temps, dit-elle doucement, je n’ai pas en plus envie de faire fondre tes oreilles. »

Le massage eut finalement l’effet escompté et il se détendit visiblement. Ces mots d’excuses la surprirent alors qu’elle l’aidait à se retourner.
« - Désolé de quoi ? »

Une fois allongé sur le ventre elle s’attaqua à ses épaules puis descendit lentement vers les reins. Elle n’était pas une masseuse experte mais avait suffisamment pratiqué pour savoir y faire et détendre efficacement son partenaire.

Zander se crispa lorsqu'elle toucha la contusion sur les côtes, anticipant la douleur, mais finalement, ce ne fut pas aussi terrible qu'il le craignait.

« C'est pas grave. Je saurais apprécier tout autant le silence que le son de ta douce voix mélodieuse. Mais l'un de mes sons préférés reste celui des vagues... Ou de l'eau en général... » dit-il doucement, se demandant ce qu'il racontait et pourquoi au juste.

En fait, il appréciait particulièrement la sérénité qui régnait dans la chambre. Il n'avait pas l'habitude qu'on s'occupe de lui ainsi. Il se retourna avec son aide avec une étrange sensation. Il avait l'impression de flotter. Il se laissa glisser un peu plus dans cet état et laissa son esprit dérivé tranquillement. Pourquoi s'était-il excusé déjà ? C'était une bonne question. Il ne se souvenait pas d'une raison particulière. Les mots étaient sortis tout seuls, comme ce qui suivit.

« Que tu te retrouves mariée à moi sans l'avoir voulu, de t'entraîner dans mes problèmes, de te faire te mettre en colère, de t'obliger à me tirer les vers du nez parce que je ne te parle pas et pour tout ce que je peux faire de travers et dont je n'ai pas conscience. Je m'en veux pour ce qui est arrivé, même si je sais que je n'y suis pour rien et que c'était imprévisible. Mais quand même... Je n'arrête pas de me dire que j'aurais pu faire ci ou ça ou ce que j'aurais dû ne pas faire... » commença-t-il, essayant d'organiser un peu ses idées désordonnées.

« Puis je n'ai jamais envisagé de me caser avec quelqu'un ou de me ranger quelque part. Je crois pas être le mari idéal, loin de là. La vie de couple, comment dire... C'est une notion qui m'est étrangère… Je vis seul depuis longtemps maintenant. Autant par choix que par obligation. J'ai peur de ne pas être à la hauteur ou de découvrir que je ne suis vraiment pas fait pour ça une fois que les effets du bracelet commenceront à s'estomper… Et de te blesser et de te faire souffrir par la suite. Ce n'est pas quelque chose que je souhaite particulièrement... » continua-t-il d'une voix lente et ensommeillée, luttant pour ne pas sombrer complètement.

C'était une sorte d'angoisse sourde qu'il ressentait depuis le début, mais il arrivait enfin à l'exprimer devant elle. Peut-être était-ce les événements de la journée conjugués à l'état de relaxation induit par le massage et le fait que sa colère se soit évanouie un peu plus tôt qui lui permettait de mettre des mots dessus et de les prononcer. Il n'en savait rien et cela n'avait au final aucune importance. Ce qui comptait, c'était qu'il le lui ait dit.

Silencieuse, Nadja continuait son massage tout en l’écoutant parler. C’était la première fois qu’il s’ouvrait ainsi et elle ne voulait surtout pas l’interrompre. Au final, il se posait autant de question qu’elle. Plus même, sans doute. Il ne voulait pas la blesser, ce qui la fit sourire un peu tristement. Il était peu probable qu’il lui fasse aussi mal que lors de son précèdent mariage. Mais il ne pouvait pas le savoir et elle ne comptait pas lui en parler avant un moment.

« - Je sais bien que tu ne comptais pas te marier avec… »

Elle allait ajouter « une fille comme moi » mais le spectre de Mei passa à côté d’elle et lui envoya une claque derrière la tête avant de ressortir en bougonnant.

« - … avec moi. Moi non plus en fait. Je trouvais ma vie bien assez compliquée comme ça. Mais voilà, ça nous ait tombé dessus et on peut se torturer tout ce qu’on voudra, ça changera rien. »

Elle se mordit la lèvre un instant en se demandant comment continuer et si c’était une bonne idée.

« - Je ne sais pas plus que toi comment ça va se passer dans quelques mois. Mais j’essaie de pas y penser et d’apprécier ce que j’ai maintenant. Venir ici le soir plutôt que passer mes soirées à regarder les murs de ma cabine est un vrai bol d’air. Entre autres avantages… »

Elle sentit la respiration du pilote se faire plus régulière et profonde et elle comprit qu’il s’endormait. Elle n’était même pas sure qu’il ait entendu ce qu’elle lui disait. Plutôt fière d’elle, elle se releva aussi doucement que possible et déposa un baiser sur son front avant de sortir sur la pointe des pieds.

« - Il semblerait qu’on soit tous les deux pour la soirée, Stella. Pourrais-tu m’afficher des paysages de montagne, s’il te plait ? Impeccable merci. »

Elle s’installa sur le canapé, un carnet en main et se mit à reproduire ce qu’elle voyait à l’écran. Soirée paisible en perspective.

[Trois jours plus tard, le 25 décembre, Celestia, complexe Forestia]

Assis sur une banquette de la terrasse couverte, pieds nus et en short, Zander buvait une boisson s'apparentant au café terrien tout en contemplant l'océan un peu plus bas et en écoutant les bruits autour de lui. Voilà un spectacle qu'il aimerait bien observer tous les matins et dont il ne se lasserait pas. 

Cela faisait un peu plus d'une heure qu'ils avaient pris possession de leur chambre. Celle-ci se trouvait au rez-de-chaussée à l'extrémité d'un des bâtiments secondaires. Le complexe principal se trouvait à 200 mètres derrière eux et les accès pour s'y rendre étaient abrités pour protéger les clients des averses qui arrosaient périodiquement l'endroit. La plage était à même pas dix minutes à pied et la forêt s'étendait derrière eux. Un hamac était suspendu et il avait bien l'intention d'en faire usage pendant son séjour.

Ils avaient assisté la veille à la fête de Noël organisée sur la station. Il avait tenu le temps du repas puis avait regagné son vaisseau. Même si les choses s'étaient nettement améliorées depuis trois jours. D'abord, il n'avait pas revu ses tourmenteurs. Puis il se sentait beaucoup plus apaisé, même s'il avait toujours des limites et s'il savait aussi qu'il n'était pas à l'abri d'un autre mauvais tour des bracelets. Puis Stella lui avait rendu ses accès de capitaine, mais il était en quelque sorte en probation.

Il essayait aussi d'adopter la philosophie de Nadja dont il avait entendu les mots avant de s'endormir et de vivre un jour à la fois, mais c'était plus facile à dire qu'à faire et il ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter pour l'avenir. Il était étonné de voir à quel point ce qu'elle pensait était proche de ce qui lui avait seriné Prius à une époque. Ces deux-là devraient probablement bien s'entendre, au moins à son sujet, si jamais ils se rencontraient un jour. Il avait d'ailleurs pris le temps d'écrire à son ami pour lui relater les péripéties des derniers mois. Et il imaginait déjà le prête mort de rire en train de lui répondre de profiter de ce que la vie lui offrait sur un plateau et d'arrêter de s'en faire pour le lendemain.

« Foutu prêtre... » murmura-t-il, un sourire sur les lèvres.

Après un repas de noël agréable, le couple s’était éclipsé rapidement, sous les regards égrillards des autres convives. Une fois à bord, Stella les avait conduit sur Celestia pour enfin profiter de quelques jours de vacances bien mérités. Fallait-il appeler cela un voyage de noces ? Nadja ne détestait pas l’idée même si les circonstances étaient tout sauf ordinaires.

Zander avait bien fait les chose et leur avait dégotté un hôtel confortable et plein de passages abrités. Bien décidée à ne pas se laisser gâcher le séjour par son agoraphobie (ni gâcher celles de son compagnon) elle avait opté pour un look décontracté loin de ses vêtements habituels. Un paréo simple et coloré sur son maillot de bain et de simple sandales aux pieds. Elle se débattait encore contre son sentiment de vulnérabilité qui lui tordait le ventre mais essayait de ne pas en faire cas.

Elle revint prés de Zander et lui passa les bras autour des épaules.

« - Un prêtre ? taquina-t-elle. Tu veux déjà te remarier ? J’espère qu’au moins tu me feras une demande en bonne et due forme ce coup ci. »

Elle s’installa prés de lui et jeta un regard vers la mer non loin de la. Cette immense étendue d’eau lui donnait des frissons. Elle mourrait d’envie de s’en approcher mais sentait son cerveau se congeler à chaque fois quelle caressait l’idée d’un peu trop prés. Les ballades sur la plage étaient sans doute encore un peu prématurées.

Son sourire s'étira en voyant Nadja arriver et il la laissa s'installer. Mais sa question le fit se figer quelques secondes. Il savait qu'elle plaisantait, mais il ne put s'empêcher de considérer cela sérieusement. Il n'était pas capable de prendre le sujet à la légère.

« Je ne sais pas si le prêtre en question fait ce genre de cérémonie. Il faudra que je lui pose la question à l'occasion. Mais s'il peut, je suis certain qu'il sera ravi d'officier si jamais on décidait de, hum, renouveler nos vœux dans un an. Et oui, on fera ça dans les règles de l'art cette fois. » répondit-il, se demandant quelles coutumes il allait devoir respecter pour se faire, car il n'en avait aucune idée.

Attirer Prius ne serait pas bien compliqué, surtout si cela lui donnait l'opportunité de visiter une nouvelle planète et de rencontrer un nouveau peuple. Le plus difficile serait probablement de le faire partir. Il se perdit quelques secondes dans la contemplation de l'océan.

« C'est beau, n'est-ce pas ? Et c'est calme… Je n'en pouvais vraiment plus d'être enfermé. » avoua-t-il doucement. Il savait que pour elle, être dehors n'était pas facile, mais pour lui, cela avait fini par devenir vital. Il avait le sentiment que l'enfermement ne faisait qu'exacerber son problème du moment et il espérait qu'une semaine à l'extérieur l'aiderait à retrouver son équilibre un peu plus vite.

« Alors, on fait quoi aujourd'hui ? On reste ici à contempler le paysage ? Moi, ça ne me dérange pas en tout cas. » dit-il, sachant qu'il était peu probable qu'ils ne fassent que ça s'ils restaient dans la chambre.

Un peu surprise, Nadja écouta le pilote lui répondre. Décidément, ces tentatives d’humours ne passait pas. Elle nota néanmoins intérieurement qu’il ne disait pas non, ce qui était plutôt rassurant.

« - Le prêtre en question ? Le prend pas mal, mais j’aurai jamais cru que tu en connaissais. Il est d’Hébrida ? Je ne savais même pas qu’il y avait des religions la-bas. »

Elle même avait toujours eut une vie spirituelle plutôt pauvre, malgré quelques discussions avec des aumôniers de bord.

La conversation dériva sur leur lieu de villégiature et elle ne put qu’approuver l’avis de Zander.

« - Oui, j’aime beaucoup, répondit-elle franchement. Ça va te paraître idiot, mais je n’avais jamais vu la mer auparavant. Enfin seulement en image. Ça me fout une trouille de tous les diables, mais je crève d’envie de m’en approcher quand même. Mon coté maso, sans doute. »

Elle sourit à la question qu’il posa enfin, parfaitement consciente du sous entendu.

« - Il y a une piscine, il me semble. Si j’ai bien vue, elle est couverte mais ouverte sur l’extérieur d’un coté. Et il y a un bar juste à coté. Tu sais que les boissons sont comprise dans le prix de la chambre ? »

Un bar ouvert en permanence et gratuit, de quoi faire du sport, une chambre spacieuse et climatisée, ainsi qu’un homme pour chauffer le lit… Voilà des vacances qui s’annonçaient bien, décidément.

Zander rit à sa remarque puis son regard se voila quelques secondes. Il ne tenait pas particulièrement à parler des circonstances qui avaient mené à sa rencontre avec Prius, mais il pouvait sans problème parler de ce singulier personnage qui était devenu un ami au fil du temps.

« Non, il ne vient pas d'Hébrida. Tu as raison quand tu dis qu'il n'y a pas de religion là-bas, à part la science elle-même. Il vient d'ailleurs et c'est le seul prêtre que je connaisse. Il est un peu spécial, d'ailleurs, et il ne correspond pas vraiment à l'image que les gens se font d'un prêtre. Il a été l'un de mes clients, parce que figure-toi que même les prêtres ont besoin d'être transportés parfois. Il m'a un peu secoué à un moment où j'en avais besoin et depuis, nous sommes restés en contact. Il a même essayé de me recruter pour son ordre, si tu veux tout savoir. » lui expliqua-t-il avec un sourire, avant de finir son café.

Il fut surpris d'apprendre qu'elle n'avait jamais vu la mer. Il n'y avait jamais été lui-même avant d'avoir quitté sa planète natale et ça avait été le coup de foudre au premier coup d'œil. Si un jour il devait s'installer quelque part, ce serait au bord d'un océan.

« Oh, vraiment ? Alors, je te propose un petit défi. D'ici à la fin du séjour, on va tenter de te faire aller jusqu'à là-bas et que tu y trempes au moins les orteils. Et si tu n'y arrives pas cette fois, eh bien, nous reviendrons autant qu'il le faudra jusqu'à ce que tu y parviennes. Ça marche ? » lui proposa-t-il.

Il hocha la tête pour la piscine. Il était content de voir que le choix de l'hôtel lui convenait.

« Oui. Ils peuvent même l'ouvrir complètement, en ne gardant que le toit. Et je suis au courant pour les boissons, même si je n'ai pas spécialement l'intention d'en abuser. On ira y faire un tour plus tard, si tu veux. Mais avant… Il y a quelque chose que nous avons oublié de faire hier soir... » dit-il en se levant et en s'éclipsant dans la chambre quelques secondes.

« Joyeux Noël ! » lança-t-il en lui tendant deux paquets-cadeaux lorsqu'il revînt.

Cette fête ne signifiait pas grand-chose pour lui, mais cela n'était certainement pas le cas pour Nadja, aussi avait-il décidé de respecter la tradition terrienne à son égard.

« - Te recruter ? Je suis ravie qu’il ait échoué. IL comptait faire de toi un prêcheur itinérant ? Pour quel genre de religion du coup ? »

Elle avait du mal à le voir s’entendre avec un prêtre et ça l’intriguait grandement. Et c’était une des premières fois qu’il évoquait une anecdote personnelle, il fallait en profiter.

« - Ca me va, répondit-elle au défi lancé. J’en meurt d’envie en fait. Mais ça me fou une trouille bleue. Tu crois qu’ils ont des drogues de combat dans le coin ? »

Si Nadja n’avait pas non plus l’intention de boire plus que de raison, elle avait bien l’intention de profiter de profiter des boissons à volonté. Intriguée, elle le regarda s’éloigner puis revenir avec deux paquets. Un sourire de gamine illumina son visage quand elle découvrit des paquet cadeaux et elle embrassa longuement le pilote.

« - Merci, j’adore Noël tu sais. Ca me rappelle ma famille et maintenant tu es… »

Elle s’interrompit, craignant de dire une bêtise sous le coup de l’émotion, et ouvrit le premier, découvrant un nécessaire à dessin qui lui arracha un couinement de joie.

« - Tu te rend compte que tu vas devoir poser, à présent… Mais comment tu as sur que j’aimais ça ? »

Dans le second se trouvait un chapeau noir, large aux bords blancs légèrement ondulés.

« - Wow… pas à dire, ça a plus la classe que ma casquette. Plus d’excuse maintenant, pas vrai ? »

Elle s’empressa de le poser sur sa tete et se leva en riant avant de finir sur ses genoux et de l’embrasser à nouveau.

« - Merci, vraiment. Ça me fait penser… Stella, il y a un paquet que j’ai laissé à bord sous le lit, tu pourrais le téléporter prés de nous s’il te plaît. »

Un instant plus tard, un paquet volumineux se matérialisait sur la table, surmonté d’un enveloppe.

« - L’enveloppe ensuite, recommanda-t-elle. »

Zander sourit à sa question. Il n'avait jamais été question qu'il devienne prêtre. Si cela avait été le cas, il aurait immédiatement refusé la proposition et Prius en était conscient. Non, il avait été beaucoup plus subtil que ça.

« C'était peut-être son objectif à long terme. Et je ne sais pas si on peut parler de religion. C'est plutôt une congrégation fondé sur le savoir et le partage, mais les gens les considèrent comme des prêtres. Ils s'appellent les Bergers et sont divisés en trois grandes branches : les archivistes, les guides et les soigneurs. Les premiers consignent l'histoire des planètes et des peuples sur lesquels ils se rendent, les seconds se chargent d'enseigner les choses de bases comme lire, écrire, compter et l'histoire de leur planète aux habitants. Les derniers, eh bien, s'intéressent à la santé et aux moyens de soigner les gens et les blessures de tout ordre. Les prêtres sont tous spécialisés dans un rôle, mais sont en mesure de remplir les deux autres également. Prius appartient aux soigneurs et c'est aussi un découvreur. C'est le titre qu'ils donnent à ceux des leurs qui explorent la galaxie et de nouvelles planètes. Évidemment, ils prêchent certaines valeurs comme le respect, la tolérance, la paix, l'entraide... Leur crédo est d'accepter ce que la vie vous offre et que cela doit vous suffire. Et il faut en profiter, car on ne sait jamais de quoi demain sera fait. Enfin ce genre de trucs… » lui expliqua-t-il.

C'était du moins ce qu'il en avait retenu, n'étant pas forcément réceptif à la religion en temps normal. Mais à cette époque-là, il se contrefichait à peu près de tout et il n'avait pas trop fait attention aux explications sur la philosophie de la congrgation.

« Il y a ensuite une quatrième branche dite de soutien pour tout ce qui touche à l'organisation. Les membres ne sont pas des prêtres et ont juste besoin d'adhérer à leurs principes et de s'engager à les respecter pour l'intégrer. C'est celle-là qu'il voulait que je rejoigne. Comme ce sont des prêtres itinérants pour la plupart, ils ont souvent besoin de se déplacer ou qu'on les ravitaille, donc un pilote avec son vaisseau travaillant pour eux de manière permanente leur aurait été fort utile. C'est ce que j'ai fait pendant un moment, mais sans jamais vraiment entrer dedans. Il m'arrive encore à l'occasion de faire quelques missions pour eux. » termina-t-il sur un ton pensif.

Il soupçonnait aussi Prius d'avoir voulu garder un œil sur lui pour s'assurer qu'il avait bien ramené la brebis égarée qu'il était sur le droit chemin et qu'il ne ferait rien de stupide une fois qu'il se retrouverait tout seul. Il occultait sciemment tout une partie de l'histoire, car cela aurait fait remonter beaucoup de souvenirs douloureux qu'il préfèrerait voir rester enfouis.

« Non je ne pense pas qu'ils aient ce genre de produits ici. Et on se débrouillera sans. » lui dit-il à propos des drogues de combat.

Il sourit de plus belle quand elle lui parla Noël et la tête qu'elle faisait le réjouit. Il avait eu raison de lui chercher des cadeaux, même si cela c'était révélé quelque peu compliqué vu le peu de temps depuis lequel ils se connaissaient. Il la regarda les ouvrir l'un après l'autre.

« Oh ? Moi ? Servir de modèle ? Avec ou sans vêtements ? » demanda-t-il sur un ton amusé, mais qui ne laissait aucun doute sur ce qu'il avait derrière la tête.

« Et c'est Stella qui a vendu la mèche pour le dessin. Je ne l'aurais jamais su sinon. Il faudra que tu me montres tes œuvres, un de ces jours. Et ce chapeau te va à ravir. Tu as vraiment l'air d'être une civile en vacances comme ça. » lui répondit-il en lui passant les bras autour de la taille et lui rendant son baiser.

Il lui faudrait remercier le Dr Teoh pour le chapeau. Sans son aide, il n'aurait jamais su lequel choisir, ne connaissant pas encore les goût de Nadja en la matière.

« Pour moi ? » fit-il, un peu surpris en voyant les cadeaux apparaître. Cela faisait très longtemps que personne ne lui avait rien offert et il ne s'attendait donc pas à recevoir quoi que ce soit. Il la déposa sur la banquette et s'approcha de la table. Il mit l'enveloppe à côté du paquet et se mit à le déballer, se demandant ce qu'il y avait à l'intérieur. Il fit des yeux ronds en voyant le smoking. Il se retourna, un air interrogateur sur le visage.

« Tu prépares déjà notre mariage dans un an ? Ou alors tu rêves de me voir habillé comme cette espion secret de sa majesté dans les films ? »

Il prit ensuite l'enveloppe et l'ouvrit pour en tirer un carton d'invitation pour le réveillon quelque part à Seattle. Mais ce n'était pas possible, c'était une ville sur Terre. Il dut le lire plusieurs fois pour s'assurer qu'il ne rêvait pas puis regarda la tenue qu'il avait soigneusement reposée dans la boîte.

« Attends, est-ce que cela signifie que tu as réussi à m'obtenir l'autorisation d'aller sur Terre ? En portant ça ? Comment tu as fait un truc pareil ? » demanda-t-il doucement, incrédule et ne sachant pas trop comment réagir. Il ne s'attendait pas du tout à ça.

La description de la congrégation était étrange et ne ressemblait à rien de ce que Nadja connaissait. Leur philosophie lui semblait étrange pour un ordre religieux, mais le terme était peut-être un peu fort du coup.

« - Si tu avais accepté, tu aurais perdu ta liberté. C’est pour ça que tu as refusé ? »

Elle avait souvent l’impression de lui avoir coupé les ailes, et culpabilisait un peu à ce sujet. Combien de temps serait-il resté sur la station si elle n’était pas rentrée dans sa vie ? Et combien de temps y resterait-il une fois cette année écoulé ? Ils auraient tous les deux un choix important à faire ce jour-là. Enfin s’ils arrivaient encore à se supporter une fois l’influence du bracelet terminé.

Servir de modèle sembla l’amuser et elle rit quand il lui proposa de poser nu.

« - T’es vraiment impossible. Et tu as déjà vu certain de mes dessins, en fait… et de très près. »

Elle tapota son épaule nue ou se trouvait un de ces tatouages en formes de fleur. Plutôt fière d’elle, elle se leva pour faire quelques pas avec le chapeau sur la tête, ravie du compliment. Pour une fois qu’on ne lui reprochait pas d’être une marine 24h sur 24.

Elle sourit mystérieusement quand il inspecta le smoking. Stella lui avait donné ces mesures et elle était raisonnablement sure qu’il aurait vraiment fière allure là-dedans. Il faudrait qu’elle demande de l’aide à Mei pour ne pas ressembler à un sac à côté.

« - Une autorisation pour la soirée, oui. L’avantage d’être bosco. On finit par connaitre du monde aux bons endroits. Nous n’aurons pas de chaperon mais ne pourrons pas nous éloigner du bâtiment. De toute façon c’est une soirée dansante. On ne devrait pas avoir besoin de nous éloigner. »

Et personne ne les connaitrait et pourrait les juger. Ils ne seraient qu’un couple parmi d’autres en train de s’amuser.

« - Ca va ? demanda-t-elle, un peu inquiète de s’être trompé. »

Zander réfléchit quelques secondes à la question de Nadja. Il avait beaucoup apprécié son temps avec eux et aurait pu continuer à travailler pour eux un bon moment, sans pour autant être bloqué, comme elle le pensait.

« Pas nécessairement. J'aurais pu aussi travailler avec les découvreurs, ce qui m'aurait permis de continuer à explorer et ainsi, je n'aurais pas été limité à faire des voyages entre les différents chapitres. Mais cela aurait certainement signifié travailler en permanence avec Prius. Je ne crois pas que j'aurais supporté. Plus sérieusement, autant j'adhère à ce qu'ils font, autant leur discours à longueur de journée a fini par me taper sur les nerfs. » dit-il en haussant les épaules

Ce n'était bien sûr pas la raison principale de son départ, mais plutôt les événements qui avaient mis Prius sur sa route. Il avait eu besoin de s'éloigner pour éviter le rappel constant et douloureux de ceux-ci.

Il lui lança un regard étonné quand elle désigna la fleur sur son épaule.

« Oh ? C'est toi qui a dessiné tous tes tatouages ? Il va falloir que je les observe de beaucoup plus près et beaucoup plus attentivement alors... »

Il suivit les contours du tatouage du doigt qu'elle lui avait montré.

« Très joli, en tout cas. » fit-il en déposant un baiser dessus.

Il s'aperçut qu'il contemplait l'invitation depuis plusieurs secondes et dut se secouer un peu pour réagir. Il ne pouvait pas rester planter là sans rien dire. Il se demandait si elle réalisait ce que cette invitation signifiait pour lui. Les quelques restrictions imposées n'avaient aucune importance à ses yeux.

« Désolé, ça va bien, très bien même. J'ai juste du mal à croire que tu as réussi à obtenir ça avec mon comportement ces derniers temps. Je pensais que ça prendrait des mois rien que pour qu'ils envisagent ne serait-ce que de réfléchir à cette possibilité... » expliqua-t-il.

Un sourire se dessina lentement sur ses lèvres et ses yeux se mirent à pétiller, comme un gamin.

« Une soirée sur Terre... c'est énorme... » dit-il d'un ton rêveur en rangeant l'invitation avec le smoking.

« C'est parfait. Vraiment. Merci beaucoup... » dit-il avant l'enlacer et de l'embrasser.

« Une soirée dansante donc ? Je crois qu'il va falloir qu'on s'entraîne un peu tout de même, histoire de ne pas avoir l'air complètement ridicule... » fit-il, amusé, se rappelant qu'aucun des deux n'était vraiment doué dans ce domaine.

Zander l'observa avec un regard interrogateur quand elle parler des tatouages.

« Tatoueuse ? Voilà un choix original. Pourquoi au juste ? L'aspect artistique ou juste parce que tu aimes planter des aiguilles dans les gens ? Et ont-ils une signification au fait ? » demanda-t-il, curieux. C'était une activité que l'on retrouvait sur toutes les planètes, sous une forme ou une autre, en fonction de la technologie disponible. Il n'avait jamais été attiré par ce genre de choses.

« Et non merci, c'est pas trop mon truc en fait. Mais je suis certain que tu pourrais trouver des clients sans trop de problèmes sur la station. Par contre, tu peux tout à fait décorer Stella avec tes œuvres. Ça égaiera un peu les lieux. » fit-il, espérant que Stella n'y verrait pas d'inconvénient.

Il sourit en entendant que les différents médecins de la station avaient été consultés pour son cadeau.

« Intérêt thérapeutique, hein ? C'est marrant, ils ont dit la même chose pour ces vacances... À croire qu'ils préfèrent me savoir ailleurs que sur la station. » dit-il en secouant la tête.

Il devrait certainement prendre sur lui plus que d'habitude pour cette soirée, mais le jeu en vraiment valait la chandelle.

« Et c'est pas ce que j'ai entendu dire. Apparemment, tu passes pas mal de temps en bas avec ta doc. Je devrais m'en inquiéter ? » demanda-t-il pour la taquiner. 

Les rumeurs allaient bon train à leur sujet, autant que pour lui, d'ailleurs. Du moins, avant les bracelets. Les choses ne semblaient pas encore se calmer sur ce front-là pour l'instant et commençait à prendre une tout autre tournure.

« Des cours de danse ici ? Tu es sûre que ça va nous être utile sur Terre ? On peut essayer pour voir. Sinon, je suis certain que Stella a bien dû télécharger un truc ou deux sur le sujet. Et pour les soirées, j'avais d'autres activités en tête, mais oui, pourquoi pas profiter de ce qui est proposé ici. Mais par contre, je ne sais pas si ce sera tous les soirs… Et non, je n'ai peur. Je devrais ? » répondit-il avec un sourire.

Nadja leva les yeux au ciel quand il exprima sa surprise. Il n’était pas le premier et ça ne la vexait plus.

« - Ben tien… je suis juste bonne à taper sur des gens, c’est ça ? En fait, quand tu arrêtes ta carrière militaire, y a pas beaucoup de choix. La sécurité privée, la police pour certain chanceux et pas grand-chose d’autre à part faire des bébés pour les femmes.  Du coup, quand j’ai vu que ma sœur et pas mal de ses amis me demandaient des modèles originaux, je me suis posé la question assez sérieusement. Mais bon, finalement, j’ai préféré ressigner. »

Et elle serait morte aujourd’hui si elle ne l’avait pas fait. Penser à sa famille défunte n’étant pas une bonne idée, elle en revint à ce qu’il disait et éclata de rire quand il évoqua sa relation avec Mei.

« - T’inquiéter ou te réjouir. Elle est plutôt jolie et te retrouver entre nous deux ne te déplairai sans doute pas. Mais non, tu n’as pas à t’en faire. Je n’ai jamais été attirée par les femmes, et elle non plus de ce que j’en sais. Par contre, si tu connais un célibataire, bien sous tous rapport, on pourrait le lui présenter. »

Aillant envie de se dégourdir les jambes, elle se leva et lui pris le bras avant de vérifier que son nouveau couvre-chef était bien vissé sur sa tête.

« - Viens, allons découvrir l’hôtel. Et réserver une table pour ce soir. Même si les danses locales n’ont rien à voir avec celle de la terre, ça nous fera travailler notre coordination. Et ensuite, à l’eau. Je n’ai pas mis ce maillot que pour que tu puisses me l’enlever ensuite. »

Elle déposa un baiser rapide sur ses levers puis se laisser guider dans les allées couvertes de l’hôtel.

Dernière édition par Nadja Cook le Jeu 26 Avr 2018 - 9:38, édité 2 fois

Zander leva les mains en signe d'apaisement suite à sa réaction.

« Je n'ai jamais sous-entendu cela et c'est bien pour ça que je disais que c'était original. Peu de militaires arrivent à se reconvertir dans des métiers qui ne sont pas liés à la sécurité une fois revenus à la vie civile. Alors que toi, tu as déjà réfléchi à la question et que tu as un projet. C'est d'autant mieux que tu as choisi un métier qui te permet de faire appel à un autre de tes talents pour en vivre et pas un truc imposé par la force des choses ou par les autres. Et ça, ce n'est pas donné à tout le monde. » expliqua-t-il.

La suite le fit rire doucement.

« Je n'osais pas le dire, mais être entouré de deux jolies femmes, c'est très tentant. Peut-être qu'elle n'a rien contre ce genre de pratiques après tout… » dit-il avec un très large sourire.

Il poussa un grand soupir de déception quand elle proposa d'aller visiter le complexe.

« Rhooo, tu n'es vraiment pas drôle… Tu es plutôt du genre le réconfort après l'effort, c'est ça ? » demanda-t-il en faisant une tête de chien battu.

Ils firent le tour des lieux et purent ainsi découvrirent les nombreuses activités proposées par l'établissement. Il y en avait pour tous les goûts. De nombreux sports étaient proposés comme de l'escalade, des balades, de la natation en mer et toutes sortes de sports aquatiques, mais aussi des activités centrés sur le bien-être et la santé comme de la relaxation et des massages, et des activités artistiques et manuelles comme du dessin ou de la cuisine. Et bien sûr, des activités destinées aux couples, comme la danse, qu'ils essaieraient un peu plus tard.

****

Quelques heures plus tard et un passage dans la piscine puis des bains chauds relaxants, il ressentait déjà les effets positifs de cette journée. Personne pour le surveiller, pas de murmures ou de regard en coin sur son passage... C'était précisément pour ça qu'il avait voulu quitter la station quelques jours. Tous les deux n'étaient qu'un couple anonyme parmi d'autres. Et du coup, il avait l'impression qu'une partie du poids qui l'étouffait depuis le malheureux incident du mariage avait été levé. Il se sentait bien plus détendu qu'il ne l'avait été ces derniers temps.

Pour l'heure, ils étaient attablés dans l'un des restaurants de l'hôtel dont la spécialité était un plat à base de poissons et autres fruits de mer de la planète. Il consultait la carte par curiosité en sirotant une boisson sans alcool à base de fruits locaux, pas mauvaise, tout en sachant qu'il allait opté pour la spécilaité.

La journée avait filé à toute vitesse et Nadja s’était appliqué à démontrer qu’elle savait donner autant de réconfort qu’elle savait pousser à l’effort. Le jeune couple avait passé un long moment dans la piscine ou l’ex marine s’en était donné à cœur joie. Peu de gens de son époque savait seulement nager mais elle avait découvert avec délice ce sport à l’école militaire et y avait passé une grande partie de son temps libre.

Les activités proposées dans l’hôtel étaient nombreuses et elle en nota quelques-unes à essayer. La plongée par exemple ou une sorte d’avion sans moteur aux larges ailes capable de planer pendant des heures. Elle arriverait bien à convaincre son pilote de mari de les amener faire un tour.

Fourbus mais souriant, ils se trouvait à présent au restaurant et contemplait la carte avec curiosité. Nadja regardait passer les fruits de mer en se demandant si elle se risquerait dans ces trucs bizarres à l’aspect peu ragoutant mais dont la plupart des clients semblaient se régaler.

Demain peut-être.

Elle sirotait une bière locale étonnement sucrée et se décida finalement pour un poisson grillé et reposa son menu. En face d’elle, Zander était presque méconnaissable. Bien plus détendu qu’elle en l’avait jamais vu, à l’exception du soir ou elle l’avait endormi en lui malaxant le dos.

« - Je suis vannée, dit-elle en lui prenant la main. Ne pas respirer d’air en conserve toute une journée me tournerait presque la tête. Mais ça fait du bien de s’arrêter un peu. »

Un serveur vint prendre leur commande et en entendant Zander commander les fruits de mer, elle ne put s’empêcher de lever un sourcil.

« - Tu vas manger ces trucs bizarres ? demanda-t-elle une fois de nouveaux seuls. Tu es plus aventurier que moi, la. »

Zander aussi était fatigué, mais pour une fois, il considérait cela comme de la bonne fatigue. En plus de la piscine, il était allé faire un tour sur la plage respirer l'air marin et réfléchir un peu. Il sourit à sa réflexion sur le fait que ça faisait du bien de souffler. Il était d'accord avec ça.

« Ça et voir autre chose que les parois du JPS et de Stella. Je n'aime pas rester enfermer indéfiniment. J'ai besoin d'aller prendre l'air, littéralement, régulièrement. Et c'est d'autant plus vrai ces derniers temps. Ça commençait vraiment à sérieusement me peser d'être entre quatre murs en permanence. » dit-il d'un air décontracté en observant la salle autour de lui.

Il rit à la description qu'elle fit de son repas. Cela faisait longtemps qu'il ne se fiait plus à l'allure d'un plat pour l'essayer ou non. Et puis vu la tête des autres convives qui en mangeaient, ça avait l'air d'être bon, alors pourquoi s'en priverait-il ?

« Il faut avoir un minimum l'esprit d'aventure pour faire ce que je fais. Faire honneur à la cuisine, aux us et coutumes d'une planète et de ses habitants est aussi une habitude. Je ne peux pas faire autrement en fait, car c'est souvent un moyen de gagner leur confiance. Et il faut savoir prendre des risques parfois et ne pas se fier aux apparences non plus. Bon, j'avoue parfois avoir eu quelques mésaventures à manger des plats inconnus ou boire des boissons étranges. Puis je dois dire que j'adore tout ce qui est poissons et fruits de mer. » répondit-il joyeusement, d'humeur plutôt bavarde.

Et il avait toujours été curieux de nature. Ça lui jouait parfois des tours. C'était aussi l'un des principes prêchés par les Bergers et qu'il avait appris et retenu auprès de Prius. Au fil du temps, il s'était aperçu que, souvent, les contacts avec les populations locales se passait beaucoup mieux en montrant un minimum d'intérêt et de respect, alors qu'avant, il ne s'en souciait pas vraiment. Cela donnait une autre dimension à son travail et le rendait plus intéressant.

« Est-ce que tu as quelque chose en tête pour après le repas ? Sinon, j'ai repéré une activité qui a l'air sympa et qui populaire ici, mais ça se passe dehors. C'est un genre de sons et lumière le long d'un sentier qui raconte une légende sur l'île et de l'esprit qui habite la montagne. » proposa-t-il, ayant parfaitement conscience que cela ne serait peut-être pas possible en raison de son problème avec le ciel. Mais peut-être était-ce moins pire la nuit quand il faisait sombre...

Pour sa part, il avait toujours trouvé ce genre d'histoires fascinantes et ne perdait jamais une occasion d'en écouter. Chaque planète et chaque peuple avaient les siennes. C'était probablement dû à sa curiosité et au fait qu'Hébrida n'en possédait pas vraiment. Son peuple était bien trop terre-à-terre et rationnel pour ce genre d'élucubrations, comme ils les appelaient. Il se souvint aussi que certains bergers étaient spécialisés dans la collecte de ce genre de récits et certains guides se chargeaient de les transmettre. Il se dit que c'est un rôle qui ne lui aurait certainement pas déplu, à bien y réfléchir. 

« Sinon je suis sûr qu'on trouvera quelque chose à faire dedans, à commencer par aller danser. Ce ne doit pas être les possibilités qui manquent, de toute façon. » fit-il remarquer en terminant son verre.

Il espérait que la nourriture allait bientôt arriver, car il mourrait de faim après toutes ces activités.

Nadja avait grandi entre quatre murs de métal. Pour elle, se retrouver à l’extérieur était anormal, dangereux, contre nature. Mais elle faisait ce qu’elle pouvait pour sortir, depuis son arrivée et admettait sans peine que l’air libre était bien plus agréable à respirer que celui, recyclé d’un vaisseau ou d’une station.

Elle rit quand il mentionna ses mésaventures avec la cuisine extraterrestre et ne put s’empêcher de regarder son bracelet. Niveau mésaventure, elle était pas mal celle-la.

« - Moais… grommela-t-elle sans pouvoir s’empêcher de sourire, le type à qui je dois d’avoir mangé des chips de protéine la moitié de ma vie me vante les mérites de la cuisine extraterrestre… Y a décidément un truc qui colle pas. »

Les plats arrivèrent sur cette plaisanterie et elle le regarder attaquer ses coquillages avec un mélange de dégout et de fascination.

« - Apres t’avoir vu ingurgiter ces bestioles, je ne suis pas sûre d’avoir envie de t’embrasser ce soir… putain mais ca te regarde en plus… »

Son dégout se transforma en fou rire en le voyant se débattre avec la carapace rosâtre d’un animal doté d’impressionnantes pinces. Plusieurs têtes des tables voisines se tournèrent vers elle, ce qui la fit un peu rougir mais ne calma en rien son hilarité. Pour la discrétion, ils pouvaient repasser. Mais les regards ici n’avait rien de curieux ou scrutateur. Simplement bienveillant et compréhensif. Elle venait sans le vouloir d’allumer l’enseigne « jeunes mariés » au-dessus de leurs têtes.

« - Désolée, finit-elle par articuler en essuyant ses larmes. Te voir contempler ce truc en te demandant par quel bout attaquer, c’était vraiment trop drôle. »

Elle fut surprise par sa proposition suivante. Cela voulait dire aller dehors, sans la protection d’un toit. Il savait l’effort qu’il lui demandait mais semblait avoir très envie de voir ce spectacle et elle n’avait aucune envie de l’en priver.

« - Tu as affronté ton plat sans frémir devant les pinces de ce truc, je refuse d’être moins courageuse. Avec mon nouveau chapeau et si tu me tiens bien serrée contre toi, je suis sûre que ça ira. »

Non, elle n’avait pas du tout l’intention d’en profiter… du tout.

Zander prit un air faussement offusqué quand elle l'accusa d'être responsable de sa consommation de chips.

« Mais peut-être que je n'y suis pour rien dans ton régime alimentaire, d'abord. Vu l'amour que je porte à ces blocs protéinés, je serai probablement le dernier à les recommander comme nourriture de base quotidienne à quiconque, peu importe à quel point elles auront été améliorées... » répondit-il.

Puis il secoua la tête avec un sourire.

« C'est d'ailleurs bien pour ça que je vante les mérites de la cuisine extraterrestre. Ce sera souvent meilleur que ces machins aux protéines sans goût, même si tu trouves de tout dans ces cuisines étrangères, du bon à l'immangeable. Et ça, crois-moi, ça a l'air bien plus que mangeable que certaines choses que j'ai pu essayer. » dit-il en désignant son plat et en piochant joyeusement dedans sans aucune hésitation.

Il rit franchement à sa remarque sur l'un des crustacés dans son assiette.

« Tant pis pour toi. Mais je ne me priverai pas de nourriture pour autant. Et ça pourrait être pire, il pourrait être vivant et tout frétillant. Ça par contre, ça m'aurait vraiment dérangé. » répondit-il avec un large sourire.

Le monstre en question avait des pinces, ce qui le laissait perplexe. Il se demanda comment le manger et surtout, ce qu'il y avait à manger dessus. Il fit les gros yeux à Nadja quand elle éclata de rire et regarda autour de lui avec un sourire un peu crispé avant de se détendre en comprenant que personne ne leur en voulait de cet éclat. Un couple assis un peu plus loin fit quelques gestes pour lui indiquer comme s'y prendre avec la bestiole et il hocha la tête avec un grand sourire pour les remercier avant de s'attaquer gaiement à la bête. Visiblement, il n'était pas le seul à se heurter à ce problème.

« Oh ? Donc tu ne veux pas m'embrasser, mais tu ne verrais aucun inconvénient à t'accrocher à moi en dépit de ce que je viens de manger ? Et on peut aussi y aller un autre soir, si tu préfères. Il y a plusieurs présentations par soir, tous les jours. » fit-il en souriant. Il appréciait sa bonne volonté, mais il ne tenait pas à ce qu'elle se force juste pour lui faire plaisir au risque qu'elle n'apprécie pas trop la sortie.

Nadja continuait à regarder les crustacé d’un air peu amène. Non seulement l’apparence la révulsait, mais en plus cela semblait particulièrement difficile à attraper et tant Zander que les convives aux tables autour d’eux semblait tout autant en difficulté.

Elle vit que son éclat d’hilarité avait perturbé le pilote et elle cru l’avoir froissé un instant. Mais elle le vit se détendre et sourire aux convives autour d’eux, ce qu’il n’aurait jamais fait sur la station.

D’une main hésitante, elle se saisit d’un coquillage dans l’assiette de son mari et le regarda d’un air peu amène.

« - Allez marine. Tu as affronté des esclavagistes, des jaffas, des mutants, des saloperie à tentacules… Tu vas pas craquer devant une limace. Dame Koomi, donne moi ta force !»

Elle récupéra la chair comestible et après avoir pris une grande inspiration, la mit dans sa bouche.

« - Oh mon dieu, avala-t-elle convulsivement… c’est absolument… c’est répugnant. Tu… tu aimes vraiment ca ou tu voulais juste me faire partager ta douleur ? »

Elle but une longue gorgée de bière pour faire passer le goût saumâtre dans sa bouche et gloussa.

« - Bon, ben je vais en rester au poisson hein. »

Cette mésaventure n’avait pas entamée sa mauvaise humeur et elle fit un clin d’œil quand il la confronta a ses contradictions.

« - Je n’ai jamais prétendue être logique. Et on va essayer ce soir, si tu veux bien. Je viens d’affronter ton plat, je peux affronter n’importe quoi maintenant, même le vide au dessus de ma tête. Mais tu me lâche pas et je veux un massage dans le jacuzzi en rentrent. »