Everybody hurts

Violemment arraché à cauchemar, totalement désorienté, l’ex marine aurait basculée en avant s’il ne l’avait pas rattrapé. Sa poitrine lui faisait toujours mal comme si un projectile s’y était fiché. Non elle revoyait encore la pointe noire la traversant de part en part. L’image était figée avec un luxe de détails sanglants qu’elle aurait préféré ne pas imaginer.

Mais ce n’était qu’un cauchemar, pas vrai. Seul le goût de sang dans sa bouche était réel. Et les bras de Zander qui la serrait était le meilleur des remèdes. Elle le serra en retour un long moment, en silence. Finalement, elle se détacha a regret de lui et s’essuya la bouche pour constater qu’elle était effectivement pleine de sang.

« - Excuse moi un instant. »

Comme s’il allait disparaître… Calme tes angoisses, bordel !

Après s’être rincé la bouche et passé de l’eau sur le visage à la salle de bain, elle revint s’asseoir et remonta la couverture sur ses jambes. Elle était épuisée, vidée. La douleur n’avait pas disparue, juste atténuée pour n’être plus qu’un écho désagréable.

« - Je fais jamais rien à moitié, tenta-t-elle de plaisanter. Écoute, je suis désolée pour tout à l’heure… J’ai pas géré. Tu connais l’importance qu’a pour moi la famille. Quand tu m’a dis que tu partais, j’ai juste entendu mes propres démons, pas tes explications. Et j’ai réagit de la seule façon que je connaisse : en foutant par la fenêtre. »

Non, ça n’était pas malin et elle n’était pas très fière d’elle. Mais elle n’avait jamais prétendu être autre chose que ce qu’elle était : un sous officier des marines mal dégrossie plus prompte a chercher la bagarre que la discussion.

Blottie dans les bras du pilote, Nadja écouta cette fois ces explications. Au final, elle ne comprenait toujours pas ce besoin d’isolation, bien trop éloigné de son propre mode de fonctionnement. Mais elle pouvait l’accepter.

« - Tu sais que si tu m’avais demander de t’accompagner, je l’aurait fait sans hésiter, hein ? Ça m’aurait évitée de me ridiculiser. Mais ok, j’ai pigé, t’as besoin de t’isoler un peu. De toute façon passer un mois avec des moines, je crois que j’en tuerai un avant la fin. »

Elle essayait de prendre un ton léger mais la perspective d’un mois de solitude ne l’enchantait guère. Elle n’eut pas trop le temps de réfléchir de toute façon, tant le suite la pris de court. Quand il lui confia ses sentiments, ses yeux s’embuèrent sans qu’elle puisse y faire quoi que ce soit mais ça n’était rien comparé à ce qui suivit. Elle contempla longuement la boite, puis son contenu, les yeux agrandis de surprise.

« - Mais… que… quoi… Rah mais évidemment que je le veux ! bafouilla-t-elle. »

Sa pensées totalement grippée, elle ne put que l’attraper par le col et l’embrasser férocement. En arriver la après la crise d’aujourd’hui c’était pour le moins… inattendue. Mais un tour heureux des évènements. Elle tendit une main tremblante devant elle pour qu’il lui passe l’anneau, sans même essayer d’empêcher ses larmes de couler.

« - Tu reste la cette nuit ? »

Épuisée comme elle était, elle n’était pas certaine de pouvoir être attaque pour un marathon de plaisir, mais le souvenir de son cauchemar avait toujours ses griffes plantés dans ses tripes et elle ne voulait vraiment pas retomber dedans.

Zander vit que cette fois, elle écoutait et acceptait ce qu'il lui expliquait. Elle n'était pas forcément ravie de la chose, pas plus que lui d'ailleurs.

« Je sais que tu serais venue si je te l'avais demandé. Mais tu as aussi des responsabilités ici. Tu ne peux pas toujours tout abandonner juste pour moi. Et il y a des problèmes que moi seul peut régler, comme celui-là. » dit-il doucement.

La surprise de Nadja à sa demande était au moins aussi grande que la sienne pour l'avoir faite. Il se demanda une fraction de seconde s'il n'avait pas fait une erreur en posant la question à ce moment-là, mais elle lui était venue naturellement et il avait parlé avant de se rendre de compte de ses mots. Mais il ne le regrettait pas une seule seconde. Il sourit à sa réponse, cachant son soulagement et la soudaine peur qu'il avait ressenti à la possibilité qu'elle lui dise non.

« Désolé, c'est loin d'être la demande la plus romantique du monde ou celle dont tu rêvais... » dit-il en lui passant l'anneau à la main gauche, pointe vers le bout du doigt, avant de l'embrasser.

« Bien sûr que je reste. Mais donne-moi deux secondes veux-tu...» fit-il en se levant, n'ayant pas l'intention de dormir tout habillé non plus.

Il n'allait pas repartir maintenant après ce qu'il venait de faire. Puis dormir à ses côtés lui avait manqué et allait sans aucun doute lui manquer, alors il comptait bien en profiter. Une fois changé, il revint se blottir sous les couvertures. Il était trop épuisé à tous les niveaux pour faire quoi que ce soit d'autre que dormir et Nadja ne semblait pas non plus au mieux de sa forme, même sans tenir compte de ses mains blessées. Après quelques heures de sommeil sans doute… Mais rien que la sentir contre lui lui suffisait pour l'instant.

Il lui attrapa la main qu'elle portait encore une fois à sa poitrine, geste qu'elle avait fait plusieurs fois depuis qu'il l'avait tiré de son cauchemar et noua ses doigts autour. Peut-être un restant de celui-ci, mais il n'avait pas l'intention de lui poser la question tout de suite. Ça attendrait demain…

« - C’est une demande dont on se souviendra, s’amusa-t-elle, le rouge aux joues. Mais elle me convient parfaitement. »

Et elle était déjà mieux que la précédente qu’elle avait reçue. Au moins ne risquait-il pas de se faire capturer par des esclavagistes et finir sa vie comme sujet d’expérience d’un médecin fou à lier.

Elle soupira intérieurement quand il accepta de rester. Elle se voyait vraiment pas rester seule cette nuit, même s’il ne lui restait que quelques heures de sommeil. Quand il se releva pour se changer, elle le reluqua sans vergogne, tout en sachant que son corps ne suivrait sans doute pas s’ils se décidaient à pousser un peu leur marques d’affections.

Fort heureusement, il n’en fut rien. Zander n’était guère en meilleure forme qu’elle. Il se lovèrent l’un contre l’autre et lui lui prit la main, ayant sans doute remarqué qu’elle la portait souvent à sa poitrine toujours endolorie. Apaisée par ce contact, elle bascula dans le sommeil en quelques secondes, un sourire aux lèvres.

Quatre heure plus tard, le réveil les tira de leur sommeil. Toute la journée précédente revint à Nadja d’un seul coup et elle ne put s’empêcher de regarde sa main gauche et de faire un grand sourire imbécile. La main de Zander était toujours la ou il l’avait laissé dans la nuit et pour une des premières fois de sa vie, elle choisit de ne pas s’occuper de ces taches matinales.

Son bell était à portée de main. Elle s’en rempara délicatement pour ne pas le réveiller et photographia sa main gauche avant d’envoyer le cliché au médecin chef de l’Achilles avec la mention : « Tu m’excuses pour la matinée ? ».

On vous demande pas en mariage tous les jours âpres tout !

À 7 heures et quelques, Mei sirotait un thé dans l'infirmerie tout en discutant avec Jessie pour préparer la journée à venir qui ne s'annonçait pas particulièrement passionnante. Elle sentit son Bell vibrer et le sortit pour consulter le message en provenance de Nadja. Elle n'avait pas eu de ses nouvelles depuis la veille et se demandait si c'était bon ou mauvais signe et si elle devait s'en inquiéter ou pas.

En voyant la photo, elle faillit recracher son thé, causant un froncement de sourcil de la part de son infirmier en chef. Elle toussota et s'excusa. Comment un couple au bord de la rupture finissait-il le lendemain avec une bague au doigt ? En fait, elle n'était pas certaine de vouloir connaître tous les détails, mais elle soupira intérieurement de soulagement à cet heureux, mais inattendu, dénouement. Voilà un problème de résolu.

Mais était-ce une bague de fiançailles ou une alliance ? Avec ces deux-là et leur situation particulière et compliquée, c'était un peu difficile de le savoir… Elle secoua la tête. Elle tirerait ça au clair plus tard. Elle tapa sa réponse :

« Est-ce bien ce que je pense ? Mes félicitations ! Et je t'offre même ta journée. Profites-en ! Et je veux tout savoir !
N'oublie cependant pas de faire changer tes pansements. Je suis sûre que ton mari peut s'en charger, mais n'hésite à passer me voir pour que j'y jette un œil, ainsi qu'à cette bague, même après mon service. Et va falloir fêter ça dignement. »

*****

Le lendemain, Stella, avec Zander et Prius à son bord, qui n'en revenait lui aussi toujours pas de ce retournement de situation, mais heureux pour le couple, quittait la station pour un bon mois.