Secousses et tremblements

La fourmilière chaotique qu’étais devenue l’infirmerie se réorganisait lentement. Un premier groupe était déjà parti vers la salle des anneaux pour être transportés sur Terre. Nadira jeta un œil du côté d’Aeryn mais celle-ci jouait avec son téléphone et vu son sourire, venait soit d’avoir des nouvelles de sa famille, soit de battre son record à Candy Crush.

Nadira reprenait son travail lorsque Teoh vint lui donner quelques précisions.

« - Nous pourrions nous servir de la salle d’opération de l’Achille. Avec le téléporteur Asgard on peut y acheminer directement les blessés les plus graves. Qu’en pensez-vous ? »

Ce qui voulait dire confier des gens au docteur Foldingue. Ça ne lui plaisait pas beaucoup mais elle n’avait pas vraiment le choix. Elle aurait préféré savoir l’asiatique là-bas. Les deux femmes n’avaient pas toujours été d’accord mais Nadira lui faisait confiance pour organiser efficacement son infirmerie et garder la tête froide.

« - La zone 52 n’est, à ma connaissance, pas réouverte. Trouver du personnel compétent et du matériel va être compliqué. »

Teoh était leur meilleure chirurgienne. Qu’elle soit blessée était un coup dur. L’artefact de soin de Plume aurait été utile pour la remettre en état. Evidemment, elle n’était pas la quand on avait besoin d’elle. Sans doute occuper à tuer quelqu’un ou se faire plaindre.

Une infirmière lui présenta une liste constituée à la hâte de matériel à remplacer en urgence.

« - Basdufront, interpella-t-elle le sergent qui ne la quittait pas depuis son arrivée. Rendez-vous utile et allez voir le professeur Macoy à l’Hôpital militaire Letterman à San Francisco. J’ai déjà échangé avec lui et il est accrédité. Il devrait pouvoir nous aider. »

Ça lui coûterait sans doute un dîner, mais il fallait savoir donner de sa personne.

Mei s'approcha clopin-clopant de Nad avant de s'asseoir sur le brancard libre qui se trouvait là. Il ne le resterait vraisemblablement pas longtemps et elle le libèrerait dès que nécessaire, mais en attendant, elle préférait se ménager autant que possible. Elle l'écouta et réfléchit quelques secondes à sa proposition avant de donner son avis :

« Honnêtement, je ne sais pas si c'est une bonne idée. Nous ne savons pas même pas si l'Achilles a subi des dégâts ni dans quel état se trouve l'infirmerie. En plus, l'équipe médicale a été réduite à son strict minimum pour la durée des travaux à bord et la plupart du personnel a été redéployée sur Terre en attendant. Il faudrait donc commencer par vérifier si l'Achilles est en mesure ou non de recevoir des blessés et y rapatrier du personnel. Alors je dirais que quitte à téléporter les blessés quelque part, autant les envoyer directement sur Terre dans un hôpital militaire accrédité. Ils seront bien mieux équipés pour les prendre tout de suite en charge que nous actuellement. » répondit-elle avec un soupir.

Elle aurait donné cher pour pouvoir continuer à opérer et s'occuper des blessés, mais elle allait devoir se contenter de superviser les opérations, et encore. Dans tous les cas, ce n'était pas demain qu'elle allait remettre les pieds dans un bloc. Elle allait probablement en avoir pour plusieurs mois avant de pouvoir à nouveau manier un scalpel. Et cela la déprimait rien que d'y penser.

Le militaire que sa collègue avait interpellé semblait hésiter sur la marche à suivre. Elle le regarda ainsi que ses galons. Par chance, elle était plus gradée que lui. Elle allait donc pouvoir lui faciliter la tâche.

« Allez-y, sergent, c'est un ordre. J'en prends la responsabilité. » lança-t-elle au soldat qui sembla sur le point de protester avant de décider d'obéir à celle qui était sa supérieure d'un point de vue purement hiérarchique et d'aller faire ce qu'on lui avait demandé.

« Il paraît que votre symbiote et vous avez le plan le plus machiavélique qui soit pour prendre le contrôle des vaisseaux spatiaux terriens et de la station, enfin ce qu'il en reste puis réduire le monde en esclavage. Si tel est le cas, je viens de vous offrir une occasion en or de mettre ce plan à exécution en vous débarrassant de votre garde-chiourme, car ce n'est pas moi qui pourrais vous en empêcher… En fait, il ne devrait pas y avoir grand-monde tout court pour opposer une quelconque résistance. » dit-elle avec un sourire amusée avant de grimacer.

C'était du moins la théorie élaborée d'un soldat sous morphine. Deux autres blessés autour de lui l'avait rejoint dans son délire et s'étaient mis à surenchérir, ce qui avait abouti à une histoire abracadabrante. Bien sûr, elle n'y croyait pas une seule seconde, mais elle cherchait surtout un moyen de se distraire pour oublier un peu la douleur.