Ange et démons

Une mission de routine, une simple mission de routine.

C'est ce que Nadira se répétait en s'équipant. C'était la première sortie de l'équipe depuis plus d'un mois. Plume était censé aller mieux, d’après son psy (ce qui en soit n'était pas vraiment rassurant). Et un nouveau militaire avait remplacé Paul. Celui-ci avait été brutalement réaffecté sur Terre et elle  n'avait quasiment pas eu l'occasion de lui reparler. Dire qu'elle s’inquiétait était un euphémisme.

Elle chassa ses idées noire d'un haussement d'épaule, finit de lasser ces chaussures de marche, vérifia que son arme de poing était bien chargée, puis prit la direction de la salle de la porte pour rejoindre ses équipiers.

Parker était déjà là, évidement. Charlie de son prénom. Avec un nom pareil, comment voulez-vous qu'elle ne le choisisse pas ? Elle se demandait s'il jouait du saxophone…

« -  Prêt à partir ?
- Prêt, docteur… madame… Nadira. »

Il allait lui falloir du temps pour se détendre… Pour cacher son amusement, l’égyptienne se retourna pour voir arriver ses deux autres équipiers.

« - Bon mission simple. On fait un tour d'horizon, on prend le temps d'un pique nique et on revient. »

Mais ca ne se passait jamais comme ca, pas vrai ?

Une sonnerie stridente retentit,  annonce l'ouverture de la porte, alors que les chevrons se mettaient en place aux coordonnées prévues. L'horizon des événement bleuté se forma et les quatre équipiers le franchirent d'un pas décidé.

P8X-927 était une planète à l’atmosphère sèche mais respirable. Tout autour de JP1 se trouvait une foret de conifères maigrichon et d'herbes rases. Au dessus d'eux, un soleil rougeoyant dispensait une lumière étrange. La porte en elle même était en haut d'une petite bute. Tout autour, une trentaine d'humains étaient a genoux et levaient des bras implorants vers le petit groupe.

« - Ok, murmura Nadira en enlevant ses lunettes de soleil. Et maintenant ? »

Jp1 avait été mis sur la touche pendant quelques mois dû à la condition de Plume et au départ précipité de Paul. Noa ne s'en était pas plaint. Il ne se sentait pas très bien depuis ce jour d'Avril où Sarah s'était révélé être parasité par un goa'uld. Ce qui s'en était suivi l'avait profondément affecté et il redoutait le jour où il devait de nouveau être affecté à une mission. Il avait même pensé à démissionner. Il avait écrit plusieurs lettres et puis les avaient jetées, hésitant. Il n'en avait pas parlé à Nadira car il savait que la situation avec Plume et Swagger avait remis en cause le départ de JP1, ce qui lui faisait gagner du temps.
Et puis un jour de juin, ce temps était arrivé à échéance. JP1 venait de recevoir un ordre de mission et le jeune homme prit la nouvelle amèrement.

Dans l'armurerie, Noa resta figé pendant de longues secondes face aux Glock rangés les uns à côtés des autres. Finalement il détacha son regard des armes et longea l'allée pour choisir un Zat. Il prit également deux grenades flash et une fumigène qu'il rangea dans son sac à dos avec son ordinateur, une petite trousse à outil, une radio, une gourde et des rations de survies.
La boule au ventre, le jeune homme remonta jusqu'à la salle de la porte des étoiles. C'est alors qu'il se rendit compte qu'il allait traverser l'anneau pour la première fois. Cette idée n'alla pas pour le rassurer, mais il s'efforça d'afficher un sourire sur son visage et salua ses coéquipières avant de s'approcher de Parker, le remplaçant de Swagger.

Noa lui tendit la main:
" Noa Pakeha, heureux de faire votre connaissance Parker. "
Il se rappela mentalement le dossier du militaire qu'il avait vu passer. Son expérience sera un atout indéniable pour l'équipe.

Nadira leur fit un petit speech rassurant alors qu'une sonnerie stridente indiquait le début du processus d'ouverture de la porte. L'anneau central se mit à frémir puis à bouger en un roulement sourd. Le néo-zélandais leva les yeux pour apprécier le spectacle. Certes, il le connaissait à présent. Ce n'était pas la première fois qu'il la voyait s'ouvrir, il réalisait souvent lui même la manipulation. Mais la vue depuis le centre de contrôle était toute différente d'ici bas. Le geyser bleuté éclaira la pièce et un sourire éclaira le visage du jeune homme. Noa sentit des papillons dans son estomac en s'approchant de la surface bleutée. Cette fois-ci c'était l'excitation et la curiosité qui couvraient le stress et la peur. Il s'approcha doucement jusqu'à effleurer la surface et prit une grande inspiration avant de traverser la tête la première.

Le froid fut la première sensation qu'il ressentit. Puis la lumière lui brûla les yeux et il trébucha et failli tomber. Il se rattrapa en agrippant le sac à dos de Parker qui se plia pas d'un centimètre sous l'impact. Noa reprit son équilibre en s'excusant auprès du militaire et se frotta les yeux avant de regarder autour de lui. Il étaient au dessus d'une petite butte devant un paysage végétal. Mais ce qui frappa Noa en premier lieu fut la trentaine d'hommes et de femmes à genoux au pied de la butte tendant vers eux des bras implorant. Certains récitaient des louanges, d'autres lançaient des cris qui ressemblaient à de la joie. Ils étaient habillés simplement avec des toges de tissus qui ressemblaient à du lin. Noa regarda derrière lui, mais il n'y avait rien d'autre, personne à part eux quatre.
Nadira à ses côtés semblait aussi perplexe que lui et demanda quelle allait être la suite.

Noa se rendit compte qu'il ne connaissait aucun langage extra-terrestre. Pourquoi diable Thomas avait-il quitter l'équipe ? Une équipe ne devrait-elle pas être équipé d'un linguiste d'office ? Le jeune homme se tourna vers Plume.
" Tu connais beaucoup de langages étrangers ? "
" Bon de toute façon, on a pas le choix, va falloir faire avec ce qu'on a..." en déduit-il rapidement.

Noa s'approcha d'un pas lent avec l'équipe. Il balaya la foule du regard tout en se demandant à qui ils pouvaient essayer de s'adresser. Lorsqu'ils arrivèrent à cinq mètres des habitants, trois jeunes femmes se levèrent et avancèrent à croupies en baissant la tête. Elles posèrent à leurs pieds des fruits en répétant des mots incompréhensibles. Elles repartaient alors en gloussant.

" Bonjour ... " tenta de glisser Noa alors qu'une des filles s'approchaient. Mais celle-ci se contenta partir en gloussant.
" Hallo ?! " tenta t-il en allemand avant d'ajouter " ... Bon je vous avoue que à part l'anglais et les différents langages informatiques.... "

Le petit groupe descendit les marches et fut accueilli par trois jeunes filles visiblement très impressionnée par Noa. Les fruits qu’elles déposèrent étaient malingres mais c'étaient apparemment les plus beaux à leurs dispositions.

« - J’aimerai bien être accueillit comme ça plus souvent, marmonna l’égyptienne. »

Par contre, leur langage était incompréhensible. Ça ne ressemblait pas à de l’anglais ou de l’arabe, et pas à du Goa’uld non plus apparemment, d’après Plume. Si cette peuplade avait évoluée en autarcie pendant des millénaires, c’était assez logique.

Un homme d’une quarantaine d’années, musclé et sans la moindre pilosité apparente s’avança vers le petit groupe et s’agenouilla en prononçant quelques mots.

«-  Je rêve ou c’est nous qu’ils vénèrent ? »

Voyant qu’il ne se faisait pas comprendre, Poil de Caillou leur fit signe d’avancer et les guida vers un village non loin de là. Ils ne devaient être guère plus avancés que les civilisations antiques terrestres. Des bâtiments en pierres, quelques rues pavées, des vêtements en lin simple pour la plupart. La nouvelles de leur arrivé avait dû les précéder  car une foule respectueuse s’était massé le long de la route et tombait à genoux au fil de leur passage.

Leur guide les mena jusqu’à ce qui était sans doute un temple, à l’entrée circulaire ressemblant furieusement à une porte des étoiles. Sur les cotés, des statuts représentaient ce qui étaient sans doute des divinités sortant de la porte, éclairs en mains.

Noa se passa une main sur la nuque devant ce spectacle quelque peu dérangeant. Un homme aux muscles saillants se leva et s'approcha d'eux avant de s'agenouiller à nouveau devant l'équipe en baragouinant quelque chose d'incompréhensible.
" Mouais... ça devient gênant... " lâcha Noa en réponse à Nadira.

L'homme leur fit alors signe de le suivre. Parker ouvrit la marche, sur ses gardes, la mine sombre. Noa marchait en fin de file et jeta un regard à la foule qui les accueillit dans le village. Ce peuple semblait vivre simplement de manière traditionnelle sans technologie moderne. Le jeune homme n'était pas vraiment à l'aise par l'attitude de ces gens. Mais qu'aurait-il pu bien leur dire ?

Finalement ils arrivèrent devant un grand bâtiment qui devait être un temple. La porte, représentant l'anneau de la porte des étoiles, était flanquée de plusieurs statues portant des éclairs en main. Le type leur ouvrit les portes et les invita à entrer en tendant son bras vers l'intérieur.
En pénétrant à l'intérieur, on sentait que toute la richesse du village, bien que maigre, avait fini ici. Les murs étaient peints avec des fresques guerrières et deux lustres en bois avec chandelles étaient accrochés au plafond vouté. La seule source de lumière naturelle venait d'une rosace en vitrail sur le mur opposée à la porte. Elle représentait la porte des étoiles ouverte. Au centre de la pièce une table basse toute en longueur avait été dressée et rapidement des femmes vinrent la garnir de nourriture. La saison ne devait pas être bonne car les fruits étaient maigrichons et peu abondant et la viande cuite présentait plus d'os que de chair. Les femmes apportèrent également des jarres d'un liquide transparent qui s’avérait être de l'alcool d'orge distillé. Tout autour de la table des coussins avaient été disposés pour garantir une assise confortable au sol.

Noa regarda ses coéquipiers.
" Garett, c'est vous qui nous aviez parlé d'un picnic ?! " lâcha t-il avec un sourire en repensant à son briefing rapide avant de passer la porte. Noa était instinctivement repassé au vouvoiement avec sa supérieur devant Parker.
Finalement, si leur mission s'en tenait à cela, il s'était vraiment fait du soucis pour rien !

La vénération de ces gens était un brin gênante. Agréable certes, surtout le regard d'adoration que lui lançait un grand costaux à moitié nu, mais elle finissait par se demander si il n'y n'avait pas anguille sous roche. Par politesse, elle goutta un fruit qui s’avéra un peu trop amer à son goût et la boisson la fit tousser.

« - OK, ça j'en ramène… Ça fera un antigel parfait pour ma voiture. »

Poil de caillou les regardait à tour de rôle, visiblement anxieux de la qualité de l’accueil qui leur avait été réservé. L'égyptienne se leva et s'inclina légèrement face à lui, tout sourire.

« - Merci de votre accueil, ajouta-t-elle »

Si elle s'inquiétait de ne pas être comprise, elle fut vite rassurée. Le frisson qui agita l'assemblée fut quasi immédiat et des cris de joie retentirent. Plus détendus les habitants se rapprochèrent et s’attablèrent, tout sourire. Il restait extrêmement respectueux du bien être de leurs hôte mais n'hésitait plus à s'approcher voire même, pour les plus hardi, à les toucher. « Gros balaise » s'était installé à coté de Nadira et lui épluchait des fruits avec application, sans s’arrêter de la couver de son regard brûlant.

Des musiciens arrivèrent rapidement et se mirent à jouer des airs entraînants, accompagnées par des danseuses qui virevoltaient entre les coussins. Il n'en fallait guère plus à l’égyptienne pour se lever et se joindre à elles, geste qui fut accueillit par de nouveau cri de joies et de nombreux applaudissements.

Ces gens savaient faire la fête, c’est le moins que l’on puisse dire. Et Nadira n’était pas en reste. Elle avait enlevé ces épaisses chaussures de marches pour être à l’aise, et le haut de son uniforme avait suivi, révélant un simple t-shirt siglé « I am the Doctor ».

Elle se déhanchait entre deux costauds, dont elle avait déjà oublié le prénom, sans la moindre gêne. On aurait pu arguer qu’ils n’étaient pas là pour ça, qu’en tant que chef d’équipe, elle se devait de donner le bon exemple… Elle s’en fichait éperdument. Depuis le départ brutal de Paul, quelques mois auparavant, elle n’avait plus réussi à vraiment s’amuser. L’anglais avait été sa première aventure importante depuis Peter et elle devait bien admettre qu’il avait plus compté pour elle que ce à quoi elle s’était attendue au départ. Elle n’avait pas su quoi penser lorsqu’il avait quitté le JPS en ne lui laissant que quelques mots lapidaires d’explications.

Et si elle ne savait toujours pas vraiment comment interpréter cette rupture, au moins ce soir avait-elle décidé de l’oublier, définitivement si possible. Ces gens voulaient la vénérer ? Qu’ils la vénèrent, elle comptait bien en profiter.

Plus tard, dans la soirée, alors que l’égyptienne s'était éclipsée avec ces deux nouveaux amis et que Parker était sorti « faire une reconnaissance », Poil de Caillou revint vers Noa et Plume. Il portait un épais rouleau de parchemin qu’il leur tendit religieusement.

Dessus était dessiné, dans un style proche des gravures du temple, une assez longue histoire. Deux groupes se faisait la guerre, comme l'avait compris Plume et l'un d'eux priait la porte des étoiles. Des dieux en sortaient et anéantissaient les ennemis avant de repartir.

Le chef du village désigna le groupe de croyant et les qualifia de « Dran », avant de se toucher la poitrine et de répéter le même mot. Puis il indiqua les adversaires et murmura « Firen ». Enfin, il tapota sur le dessin des dieux en prononçant le mot « Balo'dran», avant de désigner ses visiteurs.

« -  Balo'dran ! »

Noa soupira. Il aimait rencontrer de nouveaux peuples, de nouvelles cultures, et était plutôt heureux de ne pas s'être embarqué dans une nouvelle mission dangereuse. Seulement voilà, depuis maintenant trois bons quart d'heure, l'alcool semblait désinhiber tout le monde et deux jeunes filles assises à ses côtés commençaient à le tripoter un peu trop. Bien qu'il n'ai rien contre en général, il était toujours en mission.... en plein travail donc ! Alors qu'il se demandait toujours ce que ces gens attendaient d'eux et pour qui ils les prenaient, il vit Nadira s'éloigner avec deux hommes à chaque bras. Noa fronça les sourcils et se leva provoquant un soupir de frustration chez une de jeunes femmes qui semblait apprécier son épaule droite. Le jeune homme se fraya un passage dans la foule qui s'était amassée pour danser. Quelques bras tentèrent de le retenir pour l'inviter à danser mais il les repoussa sans quitter des yeux son objectif. Une fois la foule traversée, il rattrapa Nadira et es deux bonhomme à petites foulées. Aussitôt il attrapa le bras de la jeune femme et la tira doucement en arrière pour qu'elle lui fasse face.
" Nadira, qu'est ce que tu fais ? "
Cette phrase était stupide, il avait compris, mais n'osait l'imaginer.

" Ne t'éloigne pas comme ça, seule. "
Le jeune homme leva les yeux vers les deux gaillard qui regardaient l'égyptienne avec des yeux plein de dévotion.
Nadira le tira alors vers elle et lui glissa quelques mots à l'oreille.

Noa resta figé avec de gros yeux lorsque Nadira s’éloigna aux bras des deux hommes. Une image se forma dans l'esprit du jeune homme et il se frappa le front en faisant demi-tour, les joues légèrement rougies par cette vision.
Noa tourna la tête derrière lui et vit dans quelle pièce le petit groupe s'engouffra. Il était vraiment mal à l'aise avec la situation. Mais que pouvait-il faire ?

Noa passa une main sur sa nuque et décida de retrouver ses deux autres coéquipiers.

Le jeune homme se laissa tomber sur un coussin aux côtés de Plume, la mine sombre. Parker avait perdu patience et s'était dégagé de l'emprise des deux femmes. Il s'était levé et lançait un regard circulaire sur la salle.
" Où est Garett ? "
Noa baissa les yeux sans répondre.
Parker laissa un long silence puis, semblant saisir l'idée, déclara:
" Bon, je vais faire un tour de ronde dans les environs."

Noa hocha la tête pour approuver cette idée.
" Ne vous éloignez pas. On reste en contact radio. Toutes les dix minutes. " lui dit-il.

Parker s'éloigna et Noa soupira.

Le temps passa et le néo-zélandais ne pouvait s'empêcher de jeter des regards frénétiques à sa montre. Il n'aimait pas cela... Il s'était levé plusieurs fois et avait fait quelques pas vers le couloirs où s'était éclipsé Garett avant de revenir s'asseoir.
C'est alors que le type qui les avaient accueilli s'approcha d'eux avec un rouleau de parchemin. Il les tenaient comme une relique et Noa croisa le regard de Plume, étonné. Il s'en saisit et commença à les étudier de plus près. Le jeune homme se concentra pour suivre ce que le type essayait de leur dire. Puis il saisit enfin.
" Il nous prends pour des gens qui les ont aider dans leur guerre ? " dit-il à Plume.

Noa tapota le groupe des Balo'dran puis sa poitrine avant de balancer son index de droite à gauche pour signer la négative.
" Espérons que ce geste soit universel." dit-il.
Puis Noa tapota le groupe ennemi et fit une rotation du poignet pour demander des nouvelles. Étaient-ils toujours en guerre ? Étaient-il toujours là ? Avaient-il été décimés ?

Noa et Plume s’acharnaient à démentir la croyance de Poil de Caillou. A l’inverse, celui-ci souriait toujours. Il désigna la porte des étoiles puis le dessin des suppliants et enfin les deux membres de JP1.
"Balo'dran !" conclut-il fermement.
Parker, qui venait de revenir murmura quelque mots.

« - Je pense qu’il nous prend pour ses divinité parce qu’ils priaient lorsque nous sommes arrivés. Ce qui voudrait dire que leurs ennemis ne sont pas bien loin. »

Conscient d’enfoncer une porte ouverte, il enchaina avec un rapport de situation.

« - Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond, ici. Tout est calme dehors, je n’ai rien vu ou entendue de spécial… et c’est sans doute ce qui me dérange. J’ai fait pas mal de patrouilles de nuit dans ma vie, et je n’ai jamais rencontré un environnement aussi silencieux. C’est comme si rien ne vivait à l’extérieur de ce village. Ce n’est pas normal. »

Il regarda autour de lui, cherchant sans doute Garett, puis haussa les épaules et alla s’installer dans un coin pour le reste de la nuit. Il gardait serré contre lui son P90 ce qui sembla surprendre une jeune fille qui se coula près de lui pour lui tenir compagnie.


******

Plume n’avait quasiment pas fermé l’œil de la nuit, attentive aux bruits autour d’elle. Le militaire avait dit la vérité. Le silence était pesant à l’extérieur. Pas un souffle de vent, pas un cri d’animal. Le peu de chaleur accumulée pendant la journée s’était évacué rapidement et un froid mordant avait envahi la plaine ou se trouvait le village.

Finalement, les premiers rayons rouges du soleil balayèrent le village colorant les murs en pierre d’une couleur sinistre. Alors que la jeune femme faisait quelques pas à l’extérieur, un hurlement retentit soudain un peu plus loin. Rapidement en émoi le village se réveilla. Un mot courrait sur toutes les lèvres : « Firen “

Le type en face d'eux persistait à les appeler " Balo'dran ". Parker arriva dans le dos de Noa et fit une remarque intéressante. En effet, s'ils étaient arrivés au moment où ils priaient, difficile de leur faire changer d'avis à présent...
Le militaire enchaina sur son rapport concernant les alentours et sa méfiance trouva echo chez Noa. Il se passa une main sur le visage et jeta de nouveau un oeil à sa montre.


Au final, il se fichait bien des activités de Nadira... mais il voulait au moins s'assurer qu'elle aille bien, qu'elle n'ai pas servit de repas (au sens propre) aux deux gaillards qui l'accompagnait. Aussi, Noa attrapa sa radio et lança un appel.
" Garett, tout va bien ? "
Le silence accompagna sa réponse avant d'être rompu par une série de jurons.
Pour la première fois depuis le début de la soirée, Noa sourit, enfin un peu rassuré.
Finalement, il semblait que leurs hôtes n'avaient pas de mauvaises intentions cachées et ne souhaitaient que leurs bien être.
Noa se rassit en tailleur sur les coussins et sortit une barre de rationnement alors que son estomac criait famine. Il n'avait mangé qu'un ou deux fruits depuis le début. Il n'avait rien voulu toucher d'autre, de peur d'être en présence d'arachide ou d'un composé similaire. Faire une crise d'allergie en mission était hors de question, et il se félicita d'avoir fait attention depuis que leur médecin avait décidé de s'éclipser. Noa sourit en croquant dans sa barre. Une des jeunes filles vînt s'asseoir de nouveau à ses côtés et lui tendit un coupelle qu'elle porta à sa bouche. Le jeune homme refusa poliment, mais la jeune fille insista. Après trois refus, il ne pu qu'accepter d'y tremper les lèvres. Sans surprises, il s'agissait de l'alcool fort qu'il avait gouté précédemment. Il se racla la gorge en clignant des yeux.

***********

Ce fut un long hurlement qui réveilla Noa. Il sursauta en ouvrant les yeux et regarda autour de lui. Il couché sur des coussins dans la pièce principale, mais dans une alcôve un peu éloignée de là où il s'était assis la veille. La jeune fille de la veille dormait couchée sur sa poitrine. Paniqué, Noa se redressa et baissa les yeux. Il constata avec soulagement qu'il était toujours habillé et soupira. Il leva une jambe et posa un coude sur son genou. Il lova alors son visage dans le creux de son coude comme pour faire taire le mal de crâne. Il essaya de rassembler ses souvenirs, en vain. La dernière chose dont il se souvînt, c'était d'avoir bu une ou deux gorgée de cet alcool répugnant... peut-être que ce n'était pas seulement de l'alcool. Noa souffla et attrapa son pull, sa veste et son sac qui gisaient à ses côtés. Il se leva et traversa la pièce principale. Au bout de la longue salle, Parker était debout, le visage tourné vers la porte d'entrée.
" Vous avez entendu ? " dit-il lorsque Noa approcha.
Le néo-zélandais n'eut pas le temps de répondre que le militaire avança à grands pas vers l'extérieur, son P-90 bien en main.
Noa le suivit en se frottant énergiquement l'oeil droit avec la paume de sa main en grognant. Non il n'entendait pas.

Arrivé dehors, l'air frais lui fit l'effet d'une claque. Plume était là et il comprit ce que Parker avait voulu dire...
Il y avait une sorte de murmure généralisé ampli de panique qui enflait.
" Qu'est ce qu'il se passe ? " dit-il à Plume en enfilant sa veste.

C'est l'agitation qui éveilla Nadira. Ainsi qu'un mal de crâne qui lui faisait penser à une descente de coke et de LSD mélangés. Sa tête reposait sur une poitrine inconnue, et un souffle chaud sur sa nuque lui rappela l'existence d'une autre personne. Son corps était encore endolori mais un sourire passa sur ses lèvres alors que les souvenirs de la nuit lui revenaient. Voilà ce qu'elle appelait une fête ! Et au regard plein d'adoration que lui lança son partenaire qui s'éveillait lui aussi, elle n'était pas la seule à avoir apprécié.

Elle se redressa en s'étirant, en récupérant son sac pour y piocher de quoi faire passer son mal de tête. Quatre pots de cet alcool local gisait au sol. Pas étonnant qu'elle est une gueule de bois de compétition.

Mais que se passait-il dehors ?

Elle se rhabilla rapidement et sorti, en essayant de dompter ses cheveux récalcitrants. Il faisait un froid de canard à l'extérieur et elle frissonna en rejoignant son équipe.

« - Bonjour. Que se passe-t-il ? »

Rapidement, Poil de Caillou leur fit signe d'approcher et les conduisit à une petite maison au abord du village. A l'intérieur, une seule pièce et des meubles qui avaient sans doute été réparés à maintes reprises. Une impressionnante tache de sang marquait le sol et un des murs blancs. Il n'y avait aucun corps de visible.
Dans un coin, un berceau vide gisait au sol.

« - Firen, répéta une nouvelle fois l'homme chauve d'un air désespéré. »

Nadira fit son apparition et Noa lui jeta un rapide coup d'oeil. Il fut rassuré de la revoir mais son visage resta impassible. Plume avait dégainé son couteau et Noa sortit son Zat de son sac ainsi que le holster qu'il accrocha à sa cuisse. Le type qui les avaient accompagné la veille fit son apparition et les guida vers une petite maison non loin de là.

Sur le chemin, Noa ferma la marche aux côtés de Nadira. Il ralentit volontairement le pas et glissa quelques mots à l'oreille de l'égyptienne.
" Écoute, tu fais ce que tu veux, c'est cool, je m'en tape, mais la prochaine fois, si tu pouvais éviter de te barrer seule en pleine mission sur une planète inconnue avec un peuple qu'on vient à peine de rencontrer, je préférerais. J'étais inquiet. "
Son visage était grave et fermé.

Il accéléra le pas pour rattraper les autres et entrer dans la masure. Là, dans la petite pièce principale une tâche de sang couvrait le sol et le mur. Noa eut un haut le cœur en voyant le berceau renversé. Était-ce l'enfant qui ... ?
Le type répéta le mot Firen en montrant le sang. il semblait désespéré.

Noa indiqua le berceau du doigt puis la tache de sang, demandant implicitement si le sang était celui de l'enfant ou d'une tierce personne.
" Parker, vous pensez que ça a été.... fait.. avec quel type d'arme ? " demanda Noa hésitant.

Puis en écoutant la réponse, le jeune homme s'accroupit au sol, et dans la poussière dessina quelques maisons autour d'un temple, représentant le village, puis il dessina la porte des étoiles un peu plus loin séparée par le chemin qu'ils avaient emprunté pour venir jusqu'ici. Enfin il leva de nouveau les yeux vers le type et demanda: " Firen ? Où ? Où sont-ils ? "
De son doigt il pointa plusieurs zones autour du village, le nord, l'est, le sud, et l'oust en espérant avoir une indication un peu plus précise.

Puis Noa se leva et regarda le type droit dans les yeux. Il leva un doigt en répétant le mot "Firen", puis deux, trois, quatre... et ainsi de suite. Il voulait savoir combien ils étaient.

Évidemment, la remarque de Pakeha fit voir rouge à l’égyptienne qui n’appréciait pas beaucoup qu'on remette en cause sa liberté d'action.

« - J'étais à deux mètres, dans une pièce fermée. T’exagère pas un peu ? Ces gens nous ont accueillit, nourrit avec le peu qu'ils ont, hébergé. Ils sont prêts à tout pour se mettre dans nos petits papiers. Franchement, s'ils nous voulaient du mal, ça se serait vu bien avant. Je sais pas trop ce qu'ils attendent de nous, mais regarde-les : Ils sont désespérés, ils crèvent de faim et de froid. Rien de plus. »

Elle avait tort sur ce dernier point et s'en rendit compte en arrivant devant la maison. Les habitants de cette planète avaient aussi peur. Et il n'était pas difficile de comprendre pourquoi, au vu de la scène macabre dans la maisonnette.

Alors que ces coéquipiers menaient des investigations, elle récupéra un échantillon de sang séché qu'elle emballa soigneusement. Elle n'avait pas de matériel pour l'analyser ici, mais l'envoyer par la porte ne prendrait que quelques minutes.

Noa avait dessiné dans la poussière une carte rudimentaire et tentait de se faire comprendre de Poil de Caillou. Ce dernier sembla saisir rapidement le concept et dessina un cercle plus large englobant le village et la colline ou se trouvait la porte.

« - Firen, murmura-t-il en insistant sur le cercle avant de montrer tous ces doigts écartés.

Parker, de son côté avait écarté le lit sous lequel Plume avait trouvé quelque chose d'étrange. Il se releva finalement et revint vers ses deux coéquipiers.

« - Il y avait un tunnel la dessous, mais il a été rebouché à la hâte. J'ai trouvé des traces de sang également. Ils ont dû passer par la, à l'aller comme au retour.»

De son côté Plume pouvait contempler les environ et voir la foret à perte de vue. Elle avait croisé quelques champs presque secs, ainsi que des arbres fruitiers malingres. Il n'y avait rien d'autre aux alentours que ces arbres a moitié sec. Aucun cours d'eau, et très peu d'animaux à l’exception d'insectes et de petits rongeurs.

Nadira protesta fermement à la remarque de Noa mais ce dernier resta silencieux, gardant les yeux rivés en face de lui et accélérant le pas pour rejoindre les autres. Il ne voulait pas rentrer dans un conflit.

Arrivé dans la maison, Noa découvrit avec stupeur la scène et il commença par s'inquiéter pour le sort du bébé qui avait été dans cette pièce. Plume le rassura (mais finalement était-ce vraiment rassurant ?) en lui disant que la quantité de sang déversé ne pouvait pas correspondre à celle d'un enfant. Elle n'épargna aucun détail et Noa se retroussa son nez, légèrement dégouté par l'image qu'il se faisait dans sa tête.

Le néo-zélandais essaya alors de communiquer avec leur guide. Le type entoura alors tout le village et décrêta "Firen". Noa hocha la tête. Avait-il compris sa représentation ?
Le jeune homme montra le cercle et dit " Balo'dran ". Le type hocha la tête et répéta: " Balo'dran " puis " Firen".
Noa fronça les sourcils. Ce fut Parker qui interrompit ses réflexions. Il avait dégagé le berceau et indiquait un emplacement en dessous, en expliquant qu'un tunnel avait probablement été creusé. D'après lui, les coupables étaient passés par là. C'est alors que l'explication de leur guide fit sens.
" Ils sont sous terre. Les Firen. Ils sont sous terre ! " lâcha t-il comme une évidence soudaine.

Noa blêmit. Si sa théorie était vraie, les Firens étaient-il humains ? Ou étaient-ce des créatures, des animaux ?
Le jeune homme se rendit alors compte de l'absence de Plume.
" Plume ? Elle est où ? "
" Elle est allé faire un tour. " répondit Parker.
" Et vous l'avez laissé aller seule ? Vous auriez dû aller avec elle ! Quel est l'intérêt d'être 4 dans une équipe si ce n'est de faire des groupes de 2 lorsqu'on se sépare ? " dit-il en fronçant les sourcils.
Deux fois en quelques heures que ça arrivait ! C'était un peu trop pour lui.
Parker ne répondit pas et tourna le regard.
* Plume, reviens s'il te plait, je crois qu'on trouvé quelque chose * dit-il en allumant sa radio.