La personne qui venait chercher les deux médecins était particulièrement... intriguant. Baraqué, plutôt antipathique, il ne prêtait pas à la confiance et Doug n'était pas attiré par ce genre d'individu. Les militaires n'étaient d'ailleurs pas vraiment sa tasse de thé mais il prendrait sur lui et garderait le sourire aujourd'hui. Il suivit donc son guide et entra dans une pièce qui lui était plutôt familière. Scalpels, pinces, moniteurs chirurgicaux, scialytiques plafonniers, bocaux d'aspiration... Il était dans son élément. Au milieu de la pièce trônait un passe malades garni d'un corps inanimé. Le grand militaire leur posa alors un ultimatum et le cœur du chirurgien s’emballa soudainement. Tout ceci pour se faire dire qu'on le testerait, et que le risque d'exclusion était même envisagé. Il n'en revenait pas, et se cru tout droit retourné en internat. S'il fallait passer par un test, il le réussirait, il n'avait pas pour habitude d'échouer, sa vie était couronné de réussite, surtout professionnelle, alors en ce jour si particulier, il se devait de prouver son potentiel et se mit au travail de suite.
Il approcha du corps sans vie, vérifia ses pupilles et commença à observer l'orifice central. Le chirurgien n'avait jamais vu cela. L'homme avait une énorme entaille en forme de X sur l'abdomen, personne ne pouvait survivre à une telle mutilation. Avoir son intérieur à l'air libre n'était pas le choix de Darwin pour l'humain, et l'homme avait du souffrir le martyr avant de succomber à ses blessures. Mais Doug n'était pas un bleu, il ne se laisserait pas avoir à un tel diagnostic hâtif. Il fallait quelque chose de plus constructif et il s'empressa de se saisir de l'écarteur chirurgicale posé sur une table à instruments. Il posa l'outil sur la zone puis écarta la peau pour mieux observer l'intérieur. Le choc fut intense... *Mais que...*
Doug resta bouche bée. Il resta immobile, les yeux ouverts quelques secondes. Il crut son cœur s'arrêter. Il avait participé à de nombreuses expériences en laboratoire, avait tenté certaines limites du corps humain. Il avait même travaillé, à la limite de la déontologie, dans un labo Argentin, sur l'avancé du clonage humain. Mais là, dans cette base retranchée et secrète du gouvernement, tout dépassait son entendement. Le corps renfermait en lui une sorte de parasite en forme d'anguille, un corps étranger, assez long et plutôt ragoutant. Il semblait inactif - Doug le piqua avec un scalpel pour en être certain - et avait visiblement succombé au même moment que son hôte. Pourtant le parasite semblait être ici depuis un moment. Comme s'il avait grandi à l'intérieur de l'individu. Ce qui surpris plus particulièrement Doug était la place de l'insecte dans le corps de l'homme, il était situé dans une sorte de poche centrale et y demeurait comme si la nature avait prévu cet emplacement pour un corps étranger.
Doug continua son auscultation pendant une dizaine de minutes, Le militaire n'avait pas bougé d'un iota. Le chirurgien se retourna vers lui pour lui faire son premier compte-rendu.
"Bon, et bien nous avons un parasite d'origine inconnue, il est apparemment entré il y a fort longtemps mais les tissus sont intacts. On a l'impression que les deux corps ne font qu'un et que l'homme a vécu sa vie avec son parasite. C'est très étrange, je ne saurais l'expliquer. Je dirais que le ver est entré lorsqu'il n'était que larve et qu'il a grandi ensuite dans une poche centrale inhabituelle. Le parasite est mort au même moment que son hôte mais je ne saurais pas dire de quoi. Ce que je peux vous dire par contre, c'est que je n'ai jamais vu une telle chose de toute ma vie et que je demande quelques explications avant de continuer"