Vertige de l'amour

Comme souvent depuis qu’elle était ici, elle se sentait un peu ridicule. Comment pouvait-elle espérer quoi que ce soit avec quelqu’un qui avait été élevé par des parents ingénieurs capables de créer un tel vaisseau ? Elle n’avait jamais eut honte de ses parents mais elle savait dans quel milieux social elle avait été élevée. Comme elle venait de l’expliquer, elle n’avait jamais terminé le lycée, et son niveau d’instruction générale était sans doute ridicule par rapport à l’homme en face d’elle.

« - Protectrice comme une grande sœur… C’est assez vrai. J’étais comme ça avec mes sœur aussi. J’espère qu’elle m’autorisera à te fréquenter. »

C’était probablement le cas vu que Stella avait toujours été cordiale avec elle et l’avait appelé à laide quand il y avait eut besoin mais sait-on jamais. Elle n’était pas forcement la meilleure fréquentation du monde.

A la fin de son histoire, il fit exactement ce dont elle avait besoin et elle se sera contre lui, nichant sa tête contre son épaule. Elle resta un moment ainsi et senti un barrage céder brutalement. Elle éclata en sanglot et s’accrocha à lui un peu plus fort. Après quelques minutes ainsi elle retrouva suffisamment de calme pour murmurer quelques mots, sans bouger.

« - Pardon… je voulais pas, mais j’en peux plus de faire la forte… La dure à cuire qui mange du jaffa au petit déjeuner par botte de douze. La vérité c’est que je suis terrifiée, en permanence, que ça recommence, que ma présence ne change rien… Je ne veux pas que ce cauchemar se réalise à nouveau.  Pas maintenant que je sais tout ce que nous avons à perdre.»

Elle frissonna puis se recula en s’essuyant les yeux, se sentant un peu ridicule mais aussi soulagée. C’est elle qui avait professée la sincérité, tout à l’heure. Elle s’excusa et alla se passer un peu d’eau sur le visage pour reprendre un peu contenance. En revenant, elle détacha ses cheveux et baissa légèrement l’intensité lumineuse.

« - Stella, tu as un peu de musique douce s’il te plaît, demanda-t-elle. Ton petit frère m’a promis une danse. »

Zander réfléchit quelques secondes par rapport à Stella. Elle ne lui avait encore rien dit sur ce qu'elle pensait de Nadja ou de la situation, à part pour lui faire part de son irresponsabilité et de l'abus d'autorité dont il avait fait preuve à son encontre. Elle lui en voulait et ne lui parlait pas si cela n'était pas nécessaire. Et elle restait très discrète.

« Je pense tu n'as pas de souci à te faire. Si elle n'était pas d'accord, crois-moi, tu le saurais. Enfin, elle nous le ferait savoir. Pour commencer, tu n'aurais pas le droit de mettre les pieds ici et elle ne te parlerait pas. Si jamais les choses devaient changer, elle nous en informerait, j'en suis certain. » dit-il en haussant les épaules.

Il se garda cependant de poser la question directement à son IA. Il supposait que Stella n'avait pas assez d'informations pour émettre un avis sur Nadja et pour l'instant, elle devait se contenter d'observer les choses.

Il ne bougea pas et ne dit rien quand elle craqua, se contentant de la serrer dans ses bras en attendant que cela passe. À dire vrai, il ne savait pas vraiment comment réagir. Il n'avait pas l'habitude de gérer ce genre de réaction, donc il préféra laisser faire, de peur de dire ou de faire quelque chose de mal. Puis il l'écouta et récupéra la boîte de mouchoirs qui était posée pas loin et la lui tendit.

« Ne t'excuse pas… Je ne vais pas t'en vouloir, parce que tu laisses s'exprimer tes émotions. Parfois, c'est le meilleur remède qui soit. »

Il se fit la réflexion que ces mots auraient pu sortir tout droit de la bouche de Prius. Décidément, le prêtre avait un peu trop déteint sur lui. Mais peut-être que vu les circonstances, c'était une bonne chose.

« Et ici, tu peux laisser tomber le masque et être toi-même. Il n'y a que moi. Et Stella. Personne ne saura que la super marines de l'espace est une humaine parfaitement normale à qui il arrive de pleurer, comme n'importe qui. Pour le reste, personne n'est capable de prévoir l'avenir malheureusement. C'est la triste réalité. Tu peux que t'employer à essayer d'empêcher que cela se produise. Et je crois que c'est déjà beaucoup. »

Il ne savait pas si c'était possible. Personne ne pouvait prévoir quelles allaient être les conséquences à long terme de ses actions et si les choses allaient être pires ou non. Il la regarda partir, pensif. Quand elle revint, elle demanda de la musique. Il ne put s'empêcher de rire à ses propos et à cette perspective. Il se leva et s'approcha.

« Madame, me feriez-vous l'honneur de m'accorder cette danse ? » lui demanda-t-il en lui tendant la main.

Il ne savait peut-être pas danser, mais il en allait tout autrement quand il s'agissait d'être galant.

Zander essaya de ne pas écraser les pieds de Nadja puis finit par laisser tomber cette idée, se contentant d'écouter la musique et de suivre le mouvement. C'était un peu plus facile comme ça. Il se sentait bien comme ça et finit par se détendre un peu.

Les derniers mots que Nadja prononça se fichèrent en lui et il se figea une fraction de seconde, manquant un pas. Presque les mêmes que ceux que lui avait inlassablement répété Prius à une certaine époque.

*Accepte ce qu'on t'offre et ça doit être suffisant.*

Il ne savait pas s'il était capable d'en faire autant. Une partie de lui rechignait toujours en raison du bracelet et des sentiments qu'ils induisaient. Les choses auraient été bien différentes s'il l'avait un peu mieux connue. Pour l'instant, il marchait sur des œufs.

« Je peux au moins t'offrir un endroit comme ça. Je ne remplacerai jamais ta famille, mais je peux au moins être là pour toi quand tu en as besoin. Je ne peux rien faire de plus. Et je ne sais pas non plus ce qui va nous arriver au cours de cette année ni comment les choses vont évoluer entre nous. Et tu veux que je t'avoue quelque chose ? Je n'ai jamais partagé ma vie avec quelqu'un… Et me voilà marié... ça me fait terrifie au plus haut point. » répondit-il doucement.

Il n'avait envisagé cette possibilité de vivre avec quelqu'un une seule fois auparavant, mais cela n'avait jamais eu lieu. Il étouffa la pointe de tristesse qu'il ressentait. Il ne le dit pas non plus, mais le fait de ne pas être certain qui de lui ou du bracelet parlait le dérangeait. Mais pour ce soir, il était prêt à ne pas se poser la question et à accepter les choses telles qu'elles étaient. Un jour à la fois... Prius aurait été fier de lui.

Il sourit à Nadja et lui rendit son baiser. Oui, pour ce soir, il pouvait se laisser aller...

Zander sourit. Non, vivre avec quelqu'un ne pouvait pas être aussi simple que ça. Pas sur le long terme en tout cas… Quand aux avantages, pour l'instant, ils ne lui sautaient pas tous aux yeux. Enfin, il verrait bien en espérant que ça collerait entre eux.

Quand elle mentionna le fait de devoir changer ses papiers d'identité, il lui fallut quelques secondes pour comprendre ce qu'elle voulait dire. Et il s'arrêta net et la fixa, complètement pris au dépourvu, incapable de répondre quoi que ce soit. Puis il se laissa entraîner par la suite et oublia ses propos.

Il ouvrit les yeux en la sentant bouger légèrement. Il trouvait cela étrange de se réveiller avec quelqu'un à ses côtés. Cela faisait longtemps que ça ne lui était pas arrivé. Enfin, pas avec quelqu'on dont il était censé être très proche en tout cas.

Il n'avait pas du tout envie de bouger et préféra rester là à profiter de ce moment de quiétude. Il se sentait trop bien pour briser le moment. Et puis il n'avait aucune obligation de se lever et pouvait donc traîner autant qu'il le voulait, ce qui n'était pas son cas à elle, il le savait. Il déposa un baiser sur sa nuque.

« Bonjour, toi. Pas moyen que tu te fasses porter pâle, j'imagine ? » demanda-t-il.

« Tu prends quoi le matin pour déjeuner ? » dit-il en s'asseyant au bout de quelques minutes.

Le baiser léger mais fort bien placé lui envoya une décharge électrique qui la fit grogner de plaisir.

« - Faut que j’aille voir Mei, pour ça, mais j’avoue que je serai pas contre non plus. En attendant, continue un peu. Un peu plus haut, oui hum voila… t’as intérêt à me faire ça tous les matins maintenant."

Quelques minutes plus tard, le réveil se rappela à nouveaux à eux et il fallut bien se lever.

« - Une douche pour commencer, maugréa-t-elle. Mais je ne serai pas contre du café et si tu avait un jus de fruits, ça serait encore mieux. »

Elle passa donc à la salle de bain et se regarda quelques secondes dans le miroir. Quoi qu’elle fasse, elle n’arrivait pas à retirer le sourire idiot du son visage. Les valises sous ses yeux et ses cheveux en bataille n’y faisait pas grand-chose.

*Ah t’as l’air maline tien… *

Une fois douché et habillée, elle revint dans la salle à manger ou elle fut accueillit par l’odeur agréable du café. Elle s’installa sur une chaise en face de Zander et posa ses mains sur la tasse pour profiter de la chaleur

« - Je pourrai vite prendre goût à ça, tu sais… Et je ne parle pas que du café…  »

Elle se demanda soudain comment ils allaient gérer au quotidien cette relation, ce mariage.

« - Du coup, ce soir, on fait comment ? Hésita-t-elle. Je te rejoint ici ? »

Zander sourit dans le dos de Nadja et suivit ses indications. Il espérait qu'elle arriverait à obtenir l'accord de son médecin pour revenir ici au plus vite. Il secoua la tête. Non mais à quoi il pensait là...

« Avec plaisir... » répondit-il à sa requête de la réveiller ainsi tous les matins.

Il écouta ensuite ce qu'elle voulait pour déjeuner. Voilà autre chose dont ils allaient devoir parler. Que de détails à régler…

« T'as de la chance, j'ai tout. Je vais te préparer ça pendant que tu prends ta douche. » dit-il en se levant.

Il ne buvait pas de café, mais il en avait à bord, il ne savait plus pourquoi. Lui se contenterait d'une tasse de thé vert pour se réveiller, d'une petite brioche et d'un fruit. Il la regarda entrer alors qu'il finissait de déposer la nourriture sur la table puis prit place.

Il sourit à sa réflexion. Peut-être le pourrait-il lui aussi, en fin de compte. Puis elle demanda comment ils allaient faire le soir.

« J'imagine que oui. À moins que tu préfères que je vienne te chercher peut-être ? Parce que c'est possible aussi. Sauf si tu préfères que ce soit moi qui te rejoigne et qu'on dorme sur le JPS ou l'Achilles, bien entendu... »

Aucune de ces deux options ne le ravissait particulièrement, mais encore une fois, il estimait qu'il devait lui laisser le choix en la matière et ne pas lui imposer de vivre sur son vaisseau.

« Il faudra repasser par le réfectoire pour manger, par contre. Et cette fois, il faudra y rester autant que possible. J'ai promis à Bressignac de ne pas m'isoler, même si je n'ai envie que de ça pour le moment. Mais je dois m'habituer à la situation et aux regards des autres et ce n'est pas en restant enfermer ici que j'avancerai sur ce point. » expliqua-t-il.

Dire que cette perspective ne le réjouissait pas était un euphémisme et rien qu'y penser faisait grimper son niveau de stress en flèche. En dehors de cela, il était parfaitement capable de cuisiner de temps à autre, mais il ne se voyait pas faire ça au quotidien.

« Et il faudra que tu me dises ce que tu aimes manger et s'il y a des choses que tu tiens particulièrement à avoir à bord pour que j'en commande lors de mon prochain ravitaillement. » rajouta-t-il.

« Oh, et par rapport à ce que tu as dit hier soir pendant qu'on dansait... Si tu veux vraiment changer ton nom pour prendre le mien... Eh bien, ça me semble un peu prématuré pour l'instant. Je crois que tu devrais attendre un an avant de le faire, que nous soyons sûrs de ce que nous voulons… » dit-il doucement.

Ces paroles de la veille lui étaient revenues alors qu'il préparait le café. Qu'elle ait suggéré cela, même en plaisantant, l'avait secoué et touché d'une certaine manière. Mais si elle le faisait maintenant, il aurait l'impression que leur situation deviendrait définitif sans possibilité de revenir en arrière. Et il n'était pas prêt pour cela. Il devait déjà s'habituer au fait qu'il était marié et apprendre à vivre avec elle, ce qui constituait deux changements majeurs soudains à gérer. Il préférait ralentir un peu le rythme et avancer plus lentement, un pas à la fois.

Une fois installée pour prendre son petit déjeuner, la discussion, plus sérieuse que la veille, s’engagea. Étrange de faire ça maintenant, mais sans doute aussi logique. Ils avaient hier la soir la tête pleine d’hormone et de désir et n’étaient pas du tout prés à parler de leur avenir.

« - Honnêtement, j’aime autant être ici. Nos quartiers sont petits, pas forcement adapté à deux personnes ni forcément très bien… insonorisés. Je ne suis pas la fille la plus pudique du monde, mais il y a des limites. »

Elle hocha la tête quand Zander évoqua les conseils du psy de la station. C’était plutôt logique.

« - Les gens vont finir par s’y habituer tu sais. Et nous aussi. Il y a d’autres couples après tout et personne ne les met au banc. »

Évidemment, l’histoire de ces couples n’était pas aussi improbable que la leur. Mais ca finirait quand même par se tasser, elle en était à peu prés sure. L’avantage des petites communauté. Un nouvel événement viendrait vite remplacer le leur.

« - Je ne suis pas difficile. Je dois juste faire attention au sucre qui ne me réussit pas. C’est fou ce que les terriens peuvent en consommer. Mais sinon, je n’ai encore rien vu ici que je n’aime pas. »

Elle manqua recracher son jus de fruit quand il évoqua le changement de nom. N’avait-il pas compris qu’elle plaisantait ? Si, il le savait sans doute mais c’était une question qui se poserait un jour. Sauf que maintenant elle était prise à son propre piège et elle ne pouvait plus reculer sans risquer de le blesser.

« - Non rien ne presse. Ne t’en fait pas je garde les pied sur Terre. J’attendrai que tu m’aie présenté tes parents, termina-t-elle, les yeux pétillants de malice. »

Dernière édition par Nadja Cook le Dim 1 Avr 2018 - 14:11, édité 1 fois

Zander sourit à sa réponse concernant le logement. Ce qu'elle disait était vrai. Stella était ce qui pouvait s'assimiler le plus à une maison leur garantissant assez d'espace et de confort pour vivre à deux et pouvoir faire ce qu'ils voulaient, quand ils voulaient, sans que tous les environs soient au courant de leurs activités.

Il soupira en entendant la suite. Il savait tout ça. Il avait besoin d'encore un peu de temps pour s'habitue à tout ça. Quand il aurait lui-même accepter la situation, tout serait plus facile.

« Je sais. C'est juste moi qui ne supporte pas pour l'instant d'être regardé comme une bête de foire ayant commis le pire crime au monde. J'ai l'habitude qu'on m'observe, mais pas comme ça et ça me met les nerfs en boule. Et je ne sais pas si ça vient uniquement de moi ou si le bracelet y joue un rôle. »

Il hocha la tête concernant la nourriture. Voilà un problème de réglé et en plus, très simplement. Il se fit déjà une note de commander plus de café et de jus de fruits et d'augmenter un peu les quantités à commander.

« On évite juste les pizzas, c'est ça ? Ou alors, pas d'alcool en même temps, peu importe son origine. Mais si jamais tu as envie de quelque chose de spécifique, dis-le-moi. »

Sa réaction quand il parla du nom de famille le fit sourire, mais il le perdit en entendant sa réponse. Il n'avait pas pensé à ses parents dans l'histoire et se demandait comment il allait pouvoir leur annoncer ça.

« Oui, il faudra qu'on prévoit un voyage sur Hébrida. Ça fait un moment que je n'y suis pas retourné. Je n'ai aucune idée de comment ils vont prendre la nouvelle... » dit-il, pensif. Il était cependant certain qu'ils seraient très intéressés par l'histoire de Nadja et en particulier son armure ou toute autre technologie qu'elle avait emmenée avec elle.

Son explication sur le regard des autres lui fit mal au cœur. Elle lui prit la main et lui sourit gentiment.

« - Bah si quelqu’un te regarde d’un peu trop prés, dis le moi et je casserai les rotules en douce. Sérieusement, on ira à ton rythme ok ? Je me fiche éperdument de ce que les autres en pense. Et si tes admiratrices pensent que je te garde pour moi… ben ça sera vraie et qu’elles aillent se faire voir."

Elle ne put s’empêcher de rire à la mention des pizzas. Il avait raison, il fallait etre un minimum prudent.

« - Arrête, j’adore ca, les pizzas. Je pense que t’en qu’on s’en tien à des produits terriens, on aura rien à craindre. Ensuite,j’ai envie de tout goûter de toute façon. Alors te casse pas la tête pour moi.»

D’un autre coté, elle était très curieuse de le voir cuisiner. Elle même ne valait absolument rien dans une cuisine et était même capable de faire brûler un plat de salade.

Non seulement il ne saisit pas sa plaisanterie sur ses parents mais en plus la prit-il au mot. Au fur et a mesure, elle se décomposait et finit par terminer son café convulsivement.

« - Je… si tu le dis. Je veux dire, ok si tu crois que c’est nécessaire. »

Elle avait l’air d’une cruche la… Elle respira profondément puis se reprit en essayant d’avoir un discours un peu plus cohérent.

« - Excuse-moi, tu m’as prise par surprise. J’irai avec toi sur Hebrida avec plaisir, c’est évident. Pour tes parents, si tu veux les mettre au courant pour nous, je serai évidement à tes cotés, mais je pensais que, la aussi, tu trouverais ça… prématuré. »

Elle était un peu confuse sur le coup, mais ça lui apprendrais a raconter des bêtises de bon matin. Une fois le petit déjeuner terminé elle se leva et vint se coller au pilote pour l’embrasser passionnément.

« - Juste un avant goût de ce soir, ronronna-t-elle. Je vais essayer de me libérer plus tôt, je te tien au courant. A tout à l’heure. »

Pour éviter toute nouvelle tentation, elle se téléporta rapidement vers l’Achille et soupira en sentant le pincement de séparation induit par le bracelet. La journée allait être très longue.