Enfin une piste ...

Jeremy regarda l'activité en contrebas, perdu dans ses pensées. Il était incapable de se concentrer sur la moindre des choses qui s'empilait sur son bureau. Il n'avait pas besoin qu'un des autres médecins lui disent qu'il était au bord du burn-out et qu'il avait besoin de vacances. Et il aurait donné n'importe quoi pour prendre ne serait-ce qu'une demi-journée qu'il aurait passé à dormir, ce qu'il avait beaucoup de mal à faire ces derniers temps.

Les nuages noirs s'étaient amoncelés au fil des mois, à commencer par la perte d'une équipe lors de l'exploration de l'épave. Cela faisait partie des risques, mais cet accident avait durement affecté deux de ses principaux bras droits. Il y avait ensuite l'état de santé du commandant Cook, préoccupant, qui avait repris le service il y avait seulement quelques semaines après un arrêt pour faire son deuil et se rétablir, tout comme le Dr Teoh qu'ils avaient sortie du camp et qui en avait ramené avec elle un nourrisson aux origines douteuses. Cette rare victoire n'avait pas eu l'effet escompté sur leur moral, au vu de ce qu'ils avaient appris sur l'état de la Terre. Quand à son second, aussi endeuillé, il déprimait, malgré le retour de Sarah. À cela s'ajoutait des tensions internes qui ne faisaient que croître, provoquant des bagarres régulières.

Sur le front, les nouvelles n'étaient pas meilleures. Ils étaient traqués, sans surprise, mais ils n'avaient pas trouvé d'autres alliés, la plupart des planètes se soumettant volontaire au joug de Tonatiuth et aux conditions avantageuses qu'il proposait. Il avait beau se démener comme un beau diable, rien d'y faisait. Et ils ne pourraient rien faire pour tenter libérer la Terre sans effectifs et soutiens supplémentaires.

C'était la Saint-Valentin aujourd'hui, mais personne n'avait vraiment l'esprit à la fête. Pourtant, il avait fait de son mieux pour tenter d'égayer un peu le quotidien morose des troupes avec un repas sortant de l'ordinaire et une décoration minime de circonstance, grâce à l'aide de Celestia. Il avait autorisé plusieurs groupes à se rendre sur le continent. En fait, il s'était débrouillé pour que tous les résidents puissent passer une journée dehors dans le courant de la semaine Même l'équipage de l'Achilles pourrait s'en prévaloir à leur retour de mission.

Il se retourna en entendant, et en sentant, quelqu'un arriver dans le bureau. Le travail ne s'arrêtait pas pour lui.

« Je vous en prie, entrez et asseyez-vous. Je vous sers quelque chose ? » fit-il avec un sourire.

Il se rassit à son bureau et l'écouta. Voilà qui était intéressant. Tout ce qui ressemblait à une bonne nouvelle était bon à prendre.

« Oui, nous allons aller voir. Toute piste, aussi infime soit-elle, doit être explorée. Beau travail, Eva. Autre chose ? » demanda-t-il avant de prendre sa radio.

« M. Pakeha ? Vous pourriez me rejoindre dans mon bureau s'il vous plaît ? »

Station kéronique (Mélancolie) -->

Noa avait rapidement remballé ses affaires et avait quitté la station de son pas rapide, le dos légèrement courbé, la tête rentré dans les épaules. Sa longue silhouette filiforme grandement amaigrie depuis quelques mois traversa le couloir, en silence, comme un fantôme. Après un passage par le téléporteur, Noa vînt frapper à la porte du bureau de Jérémy et entra dès qu'on l'y invita.
" Bonjour, Vous souhaitiez me voir ? " dit-il simplement, en entrant.

Il y avait déjà quelqu'un dans le bureau avec Jérémy et Noa reconnu Eva Launbrum. Il salua poliment la jeune femme avant de reporter son attention sur Doyle. Les cernes sombres sous les yeux de l'informaticien s'étaient encore agrandies depuis la dernière fois qu'ils s'étaient vu mais Noa arborait le masque de sérieuse concentration, légèrement grave, qui ne quittait jamais son visage. Lui, autrefois si souriant, chaleureux, et loquace, avait bien du mal à présent de se dérider et ne parlait que si nécessaire. Pour ceux qui le connaissait de longue date, ces changements physiques et de comportements n'étaient certainement pas passé inaperçus.
" Je viens de terminer un diagnostic complet de toutes les stations kéroniques. J'avais découvert une anomalie dans la tour sud mais c'est à présent réparé. Vous aurez mon rapport sur cet incident, somme toute, mineur, avant midi." ajouta t-il prestement.
Noa était bien conscient qu'il aurait pu déléguer ce travail à un technicien ou à n'importe qui d'autre, mais il cumulait les tâches et les devoirs, se surchargeant volontairement pour remplir ses journées de travail de plus en plus. Il n'avait plus de temps libres, plus de pauses. Chaque minute de battement était destiné au travail. Il n'avait pas le choix. Il en avait besoin. Besoin pour éviter de penser. Surtout, éviter de penser. Jusqu'à maintenant cela marchait plutôt bien.

Noa arriva dans son bureau quelques minutes plus tard. Il faisait peine à voir. Son second se noyait dans le travail, mais Jeremy n'y pouvait pas grand-chose. Ce n'était pas faute d'avoir essayé, mais ce dernier n'était pas du tout réceptif. Il se contenta de hocher la tête à son annonce.

« Parfait, mais le rapport peut attendre. Quelque chose de plus important vient d'être porté à mon attention. » dit-il en désignant un siège.

« Eva ici présente a peut-être une piste pour les Tok'ra. Est-ce que la planète P4X684 vous évoque quelque chose ? » demanda-t-il.

La question s'adressait aussi bien à lui qu'à Xinan. Il attendit une réaction avant de poursuivre.

« Le chef d'un village serait un ancien hôte Tok'ra qui aurait survécu à la mort de son symbiote. D'après la base de données, il serait resté en contact avec eux par la suite. Je sais que c'est léger, mais c'est le premier début de piste que nous avons depuis des mois les concernant. Alors, je crois que cela vaudrait la peine envoyer une équipe sur place pour creuser un peu et voir si nous pouvons trouver quelque chose de plus solide. Qu'en pensez-vous ? »

Cela devrait l'intéresser. Peut-être même qu'il se porterait volontaire pour y aller. Cela lui ferait peut-être du bien, mais est-ce vraiment une bonne idée vu son état d'esprit, et physique, actuels ? Il n'en était pas persuadé, mais son compatriote restait cependant le meilleur candidat pour cette mission. Il n'avait en tout cas pas l'intention de lui forcer la main s'il la refusait. Lui donnerait cher pour pouvoir quitter son bureau cinq minutes et changer d'air.

Noa hocha la tête en écoutant les informations tout en prenant place sur le siège que Doyle lui désignait. Son regard s'éclaira à mesure que la nouvelle piste lui était présentée. Si c'était effectivement une piste, c'était la seule qu'ils avaient depuis bien longtemps. Noa laissa la place à Xinan. Ce dernier se massa un instant les tempes, laissant couler le silence. Il semblait lui aussi fatigué, bien que la raideur dans son corps laissait paraître une meilleure maîtrise de soi que Noa. Avant qu'il ne puisse prendre la parole, Eva Launbrum s'était faufilée hors du bureau en bafouillant d'étranges inepties. Xinan la suivit du regard, laissa de nouveau passer un long silence avant de se tourner vers Doyle.

" Il faudrait que je puisse voir l'emplacement de la planète. P4X684 ne me dit rien mais la désignation que vous leur donner n'est pas universelle. "
Xinan ouvrit l'ordinateur de Noa et lança le logiciel de navigation interstellaire qui y était installé. Après quelques manipulations, il trouva l'emplacement de la dite planète et ses doigts s’immobilisèrent sur le clavier. Après cette brève hésitation, il referma l'ordinateur et releva la tête vers Doyle.
" Je suis désolé, je ne connais pas cette planète, et cette piste me semble plutôt vague. Je ne voudrais pas que nous gâchions notre énergie à poursuivre d'incertaines rumeurs. " dit Xinan.
Il se leva alors d'une manière très raide, militaire et s'apprêta à prendre congé. C'est alors que Noa repris le dessus. Cela se voyait au maintien de son corps, mais également à son regard qui se fit plus doux. Il baissa la tête et fronça les sourcils comme si il était en pleine réflexion ou en intense dialogue interne.
Il releva ensuite les yeux vers Jimmy.
" Mais si vous souhaitez toujours envoyer une expédition, je voudrais pouvoir la mener." dit Noa sur un ton plus doux que Xinan.

[15 février 2020]

Jeremy avait convoqué Mei et Nadja pour une réunion en fin de matinée. La première tenait Isaac sur ses genoux, auquel il sourit. Il avait plusieurs sujets à aborder et tenait à s'en occuper assez rapidement. Il aurait aimé que Thaïn Cook soit présent pour une partie, mais celui-ci n'était actuellement pas sur Atlantis et il ne pouvait pas vraiment l'attendre. Le Dr Teoh risquait de tomber sur les résultats à un moment ou un autre et il préférait éviter que cela se passe ainsi. Mais il allait d'abord parler de l'autre point.

« J'ai vu que le Dr Stamos avait donné son feu vert pour que vous repreniez votre poste suite à l'épisode d'hier, docteur. C'est parfait. Je sais que vous voulez retourner sur le terrain, mais que ce n'est pas forcément évident. Alors j'aimerais vous proposer de partir sur la prochaine mission de ravitaillement sur Celestia. Ce sont des missions de routine tranquilles normalement. Et oui, vous pourrez l'accompagner et diriger les opérations, capitaine, à moins que vous ayez autre chose en tête, auquel cas je vous laisse vous en charger, puisque techniquement, le Dr Teoh est sous vos ordres. » fit-il.

Il n'était pas toujours d'accord avec les psys qui semblaient avoir tendance à surprotéger leurs patients. Il comprenait les inquiétudes des professionnels et le fait qu'ils ne veuillent pas précipiter les choses et bousculer leurs patients au risque de causer des dégâts irréparables. Mais dans le contexte actuel, ils ne pouvaient pas se permettre de les garder confiner sur la Cité indéfiniment et il n'y avait pas d'autres moyens que de les renvoyer à leur poste avec toutes les précautions requises et voir comment cela se passait. Il avait cependant parfaitement conscience que certains ne retourneraient jamais sur le terrain. Mais ce n'était pas le cas ici, d'autant que l'Achilles disposait de ses propres psychologues et qu'ils pourraient gérer la situation si les choses dérapaient.

« Il y a aussi un autre point dont j'aimerais discuter. J'ai reçu les résultats des derniers tests ADN d'Isaac. J'ai obtenu une correspondance avec la base de données du personnel du SDT. Je les ai vérifiés. Deux fois. » annonça-t-il.

Il s'arrêta un instant pour sortir une tablette, car il ne doutait pas que Mei voudrait les voir de ses propres yeux. Il se demandait aussi de quelle manière les deux allaient prendre la nouvelle.

« Il présente des marqueurs communs avec les deux Cook présents sur la Cité, fit-il en la lui tendant. Il n'est pas directement lié à eux, mais il est clair qu'il a des liens familiaux avec vous. En d'autres termes, son père fait certainement partie de la famille Cook, mais je ne peux pas vous dire qui il s'agit exactement, car je l'ignore. » laissa-t-il, guettant les réactions des deux femmes.

Apres un bref passage en salle de contrôle pour saluer le personnel et s’assurer que tout allait bien, Nadja monta vers le bureau du chef de base. Elle fut surprise d’y trouver Mei et se demanda soudain si elle ne s’était pas trompé sur la raison de cette réunion.

Une fois installée, elle écouta le premier point et souri franchement. Avoir l’autorisation de retrouver son médecin principal était une bonne nouvelle.

« - Voyons, laissez moi réfléchir… accompagner une amie sur une planète paradisiaque pour une mission ou je ne risque pas de me faire tirer dessus… Je pense que je devrais m’en accommoder oui. »

La suite la prit par contre totalement par surprise et son esprit se mit à tourbillonner à toute vitesse. Pas directement relié mais avec des liens familiaux… Ça pouvait dans son cas prendre pas mal de significations mais aucune qui lui plaisait réellement.

« - Ban merde alors, se contenta-t-elle de murmurer. »

Elle regarda l’enfant sur le genoux de sa mère adoptive, secoua la tête puis se leva, légèrement groggy.

« - Désolée, il va me falloir un peu de temps pour digérer un truc pareil. Çà sera tout doc ?»

Elle posa une main légèrement tremblante sur l’épaule de Mei puis sortit dans le couloir en essayant de calmer la crise d’angoisse qui menaçait de la submerger.

Jeremy regarda Nadja en souriant.

« Je vous rappelle que cela reste une mission, pas une excursion d'agrément, mais je suis certain que les Célestiens vous dérouleront le tapis rouge quand ils sauront que vous êtes là. Et vous me voyez vraiment désolé de devoir vous demander ça, mais s'ils le font, je vous serai gré de bien vous plier à toute demande qu'ils formuleraient pour vous recevoir, même si cela implique une longue et ennuyeuse réception protocolaire. Nous ne voudrions pas froisser l'un de nos alliés, n'est-ce pas, capitaine ? » fit-il sur un ton amusé.

Il n'avait jamais bien comprit pourquoi les Célestiens les tenaient en si haute estime elle et feu son mari, mais il ne pouvait pas nier que cela jouait en leur faveur.

Il observa la nouvelle de la parenté d'Isaac faire son effet sur ses deux interlocutrices.

La réaction instinctive de Mei envers l'enfant en disait long sur son attachement à celui-ci. Elle avait beau répéter à qui voulait l'entendre et à longueur de temps qu'elle n'était pas sa mère, son attitude prouvait le contraire. Il s'inquiétait des répercussions que cette nouvelle allait avoir sur elle, alors qu'elle commençait à peine à se remettre de sa captivité. Tout dépendrait en partie des Cook et s'ils réclamaient ou non la garde de l'enfant, alors qu'elle avait été confiée à Mei, aussi légalement qu'ils avaient pu le faire au vu du contexte.

Nadja fut aussi visiblement très secouée par la nouvelle. Il ne s'y attendait pas vraiment, mais à tout bien y réfléchir, elle avait aussi beaucoup souffert sur le plan personnel au cours des derniers mois avec la perte de son mari, sans compter ses problèmes de santé. Elle se leva pour partir avant qu'il ait le temps de dire quoi que ce soit et il ne la retint pas.

Oui, il aurait voulu aborder la question de la garde de l'enfant, ou du moins leur demander de réfléchir à la question, mais il avait compris que cela n'allait pas être possible tout de suite. Il allait d'abord devoir les laisser digérer la nouvelle avant de pouvoir discuter posément des conséquences avec elles.

Il regarda Isaac. Il y avait aussi son intérêt à considérer et il n'était pas certain que chambouler sa vie en le confiant à quelqu'un d'autre soit une bonne chose. Et il ne voulait pas devoir se poser en juge et trancher la question en cas de litige au risque de créer des tensions entre la médecin et son commandant. En somme, il venait d'hériter d'un autre sac de nœuds dont il se serait bien passé.

« Si seulement tu pouvais donner ton avis et nous dire ce que tu en penses… » dit-il à l'enfant.

Il entendit l'appel de Larry et retint un soupir. Rien ne s'arrêtait jamais ici. Il n'avait pas très envie de mettre Mei dehors et décida de n'en rien faire. Il pouvait bien lui accorder quelques minutes de tranquillité.

« - Dr Teoh ?
- Qu'est-ce que cela signifie pour Isaac ? Qui va s'en occuper maintenant ? demanda-t-elle.
- Je ne sais pas. C'est quelque chose dont nous allons devoir discuter un peu plus tard. Je suis navré, mais j'ai une autre réunion qui m'attend et je dois partir. Vous pouvez rester ici le temps qu'il vous faudra si vous en avez besoin.
- Ça va aller. Il faut que j'aille voir Nadja. Je dois passer aussi à l'infirmerie voir comment vont les membres de l'Achilles puis je crois que je vais retourner dans mes quartiers.
- Malheureusement, je crains que vous deviez attendre pour le capitaine Cook. Elle doit assister à cette réunion aussi. Allez prendre des nouvelles de votre équipage et prenez le reste de la journée.
- Merci. » répondit-elle en se levant et en déposant Isaac qui voulait marcher.

Il fit de même et la raccompagna jusqu'à la porte avant de sortir à son tour et de voir Nadja contre le mur. Il jeta un coup d’œil à Mei.

« Allez-y, docteur. Je m'occupe d'Isaac. Nous nous voyons dans quelques minutes en salle du conseil, capitaine. Tu viens mon grand ? On va voir Larry ! » dit-il en prenant la main du garçon et en traversant la passerelle vers le centre de contrôle. Il pouvait s'en charger deux minutes, le temps que les deux jeunes femmes échangent quelques mots, ou pas, mais elles n'auraient clairement pas le temps de régler le problème maintenant.

Les yeux fermé et le dos appuyé contre la paroi, Nadja essayait de ne pas se laisser submerger par ses émotions. L’univers avait une fois de plus décidé de lui jouer un tour à sa façon et elle ne trouvait vraiment pas ça drôle.

« - Reprend toi, Nadja, c’est pas le moment de craquer. »

Mei et Jeremy sortirent quelques minutes plus tard et le second s’effaça rapidement, emmenant Isaac avec lui tandis que Mei restait près d’elle.

« - J’arrive, Docteur »

Laissez moi juste le temps de faire un trou dans le mur a coup de tête et je vous rejoint faillit-elle ajouter mais elle n’était pas sure que tout le monde trouve ça tres drôle. Elle non plus en fait.

L’ex marine regarda son amie un instant et vis le malaise dans ses yeux, ce qui l’agaça plus qu’elle ne l’aurait cru possible.

« - Si tu crois que je vais te le prendre, tu te trompe, murmura-t-elle. Je finirai pas l’année, on le sait toi et moi. Pourquoi je lui infligerais un truc pareil ? Tatie Nadja aura peut être un autre sens à présent mais ça ira très bien jusque la. Il est même pas obligé de savoir en fait. Pas plus que mon grand pere.»

Finalement, c’(était plus simple qu’elle ne le pensait. Elle inspira longuement et reprit un ton encore plus bas.

« - Tu es sa mère adoptive, Mei. Il commence à peine à s’y faire, après tout ce qu’il a traversé. Reste en la, je t’en pris. »

Mei regarda Nadja qui avait l'air sur le point de craquer. Les derniers mois n'avaient pas été faciles pour elle et elle se retrouvait à nouveau avec un chambardement sur le plan personnel. Elle savait que la famille était quelque chose d'important pour elle.

Mais le soulagement, et la douleur à l'idée de la perdre, qu'elle éprouva en entendant ses paroles la surprirent. Elle ne s'était pas rendu compte jusqu'à il y avait quelques minutes à quel point elle s'était attachée à l'enfant.

Elle avait prévu au départ de le remettre à sa famille lorsqu'elle aurait été localisé parmi les les autres prisonniers du camp qu'ils avaient sauvés. Mais ils n'avaient trouvé aucune personne liée à la mère, ou personne n'avait décidé de ne pas se manifester et de ne pas réclamer l'enfant. Elle avait fini par accepter le fait qu'elle devrait s'en occuper jusqu'à nouvel ordre.

Elle serra son amie dans ses bras, faisant fi des conventions et des gens autour avant de se reculer. Elle devait faire un immense effort pour se laisser submerger par ses émotions et fondre en larmes. Elle ne protesta même pas quand Nadja lui dit qu'elle était sa mère adoptive. Puis elle secoua la tête.

« Nadja. Ce sont ses origines et il est en droit de les connaître. Il les apprendra en temps voulu, mais je refuse de lui mentir et de les lui cacher s'il me pose des questions. Quand à ton grand-père, s'il nous arrive quelque chose, il sera sa famille la plus proche. Il vaudrait mieux qu'il soit informé pour que cela ne lui tombe pas dessus à l'improviste et pour pouvoir refuser toute responsabilité. Il faut qu'on le sache pour prendre d'autres dispositions, si nécessaire. Et merci. » dit-elle doucement.

Elle éprouvait des sentiments conflictuels sur la question. La médecin en elle bataillait ferme avec la gardienne. Oui, elle souhaitait ne rien dire, mais pouvait-elle sciemment dissimuler ce genre d'informations ?

Mei n’avait jamais du genre à montrer ses émotions, surtout en public. Son mouvement surprit Nadja même si celle-ci se garda bien de la repousser. Il y avait peut-être de l’espoir pour le médecin après tout.

« - Bien sur qu’il a le droit de les connaitre. Attend qu’il grandisse un peu avant de lui expliquer… je sais ca va aller vite. Et tu me remercieras sans doute moins quand il sera ado, s’il tient bel et bien de moi. »

Ou l’inverse, mais elle ne voulait pas songer aux implications pour l’instant.

Le problème de Thain était sans doute moins simple qu’elle ne voulait le croire et ne se règlerait pas à coup de pied aux fesses… même si elle en rêvait.

« - Tu as sans doute raison, il faudra lui en parler. Mais s’il commence à avoir je ne sais pas trop pourquoi des allégations, je t’assure qu’il me trouvera sur sa route. «

Ca n’était peut-être pas très juste mais l’avis qu’elle s’était fait sur son grand père, portée au nues pendant des années, étaient plus que sévère. Elle ne l’avait plus revue depuis leur fameuse rencontre un eu après son arrivée. Elle l’avait même consciencieusement évité depuis. Sa disparition soudaine l’avait bien aidé pour cela et il se faisait très discret depuis son retour, ce qui arrangeait bien tout le monde.

« - Je dois y aller. Je passe te voir ensuite si tu souhaite reparler de tout ça, ok ? »

Doyle s'assit à son bureau après s'être préparé une tisane des Bergers. Il avait été sceptique au départ quand à leur efficacité, mais il avait vite réalisé qu'il se trompait et que cela fonctionnait relativement bien. Il était en plus possible d'ajuster les dosages et la composition en fonction des patients. Pour couronner le tout, elles étaient plutôt agréables à boire, mais loin de valoir les bières et les alcools que les prêtres brassaient. Alors il préférait recourir à ça quand il en ressentait le besoin, plutôt que d'utiliser les médicaments restants afin de les réserver à ceux à qui ils étaient vraiment nécessaire.

Il écouta Larry et survola les dossiers qu'il lui indiquait, se promettant de lire tout cela en détail et de faire des recherches dès qu'ils auraient fini de discuter.

« Donc il ne sait pas où nous sommes exactement ni même sûr que nous soyons là, je me trompe ? Il a juste lancé son message et attend de voir si nous mordons à l'hameçon ? Dans tous les cas, ne lui répondez en aucun cas. Je refuse de lui donner notre position exacte, surtout avec son passé et les liens de son peuple avec Tonatiuth. Cela pourrait être un piège. Pas très subtile, je vous l'accorde, mais hors de question de prendre le moindre risque. Y a-t-il quelqu'un sur la Cité qui a déjà eu affaire aux Hanulans et qui pourrait nous renseigner dessus ? » lui demanda-t-il.

Il préférait discuter de vive voix avec quelqu'un qui les avait déjà rencontrés et qui pourrait lui faire part de ses impressions et lui dire ce qui pourrait intéresser ces gens pour d'éventuelles négociations. S'ils travaillaient vraiment pour leur ennemi, il était probable que les anciens prisonniers du JPS en avaient vu, mais il doutait qu'ils aient pu les distinguer des autres Humains ou qu'ils aient eu des contacts avec eux. Ou si cela avait été le cas, ils n'avaient certainement pas été amicaux.

Il regrettait que Noa ne soit pas là et il avait besoin de l'avis d'un militaire sur la marche suivre. Ce qui était sûr, c'est qu'il n'accueillerait pas cet inconnu sur la Cité. Les risques étaient trop grands. Tout contact devrait se faire indirectement, peut-être en envoyant un C-101, voir carrément l'Achilles, et toute rencontre devrait avoir lieu ailleurs, de préférence loin d'ici et sur une planète sans porte. Mais ce n'était pas le genre de décision qu'il pouvait prendre seul.

« Doyle à Cook. Veuillez me rejoindre dans mon bureau je vous prie. » fit-il sur sa radio après un court moment de réflexion.

Seule en salle de briefing, Nadja avait fini par fermer les yeux. Souvent, ses rêves l’emmenaient dans des couloirs inconnus ou elle errait sans fin. Cette fois, cependant, ce fut différent. Elle était sur Atlantis mais la cité semblait morte et parcourue de fantômes qui lui firent dresser les cheveux sur la tête. Elle était poursuivie, assiégée, acculée… elle leva les yeux vers le gargantuesque trou noir au dessus d’elle et hurla en se réveillant.

La douleur dans sa poitrine était plus forte que jamais et la plia en deux tandis qu’elle essayait de reprendre son souffle. Voilà exactement ce à quoi elle pensait tout à l’heure. Dans ce genre de moment, elle n’avait qu’une seule envie, en finir au plus vite.

L’appel radio de Jeremy la fit sursauter. Pas le temps de s’apitoyer sur son sort, une fois de plus. Ca n’était sans doute pas plus mal.

« - J’arrive Docteur ! »

Elle n’avait pas loin à aller mais le trajet lui permit de se recomposer un visage et une attitude professionnelle. Si quelqu’un avait entendue son cri depuis le couloir, il avait préféré prendre la tangente plutôt que de s’enquérir d’un éventuel problème.

Elle frappa et rentra dans le bureau sans attendre pour découvrir Larry en compagnie du dirigeant de la cité. A croire que ce type ne dormait jamais.

« - Que se passe-t-il ? demanda-t-elle sans plus attendre. »