Bonnie and Clyde

Ce fut le soleil et et le bruit de la douche qui réveilla Zander. Il ne se sentait pas spécialement reposé, mais au moins n'était-il pas épuisé grâce aux quelques heures de sommeil qu'il avait réussies à grappiller.

Il se leva silencieusement et décida d'appliquer une partie de sa routine habituelle. Il avait besoin de ces rituels pour l'aider à rester plus ou moins calme. L'alternative était de prendre des comprimés, mais ce n'était pas forcément la plus recommandée et devait rester le dernier recours. Il n'était pas non plus certain que Nadja approuverait. Et cela ne résoudrait pas le problème à long terme.

En passant devant la table, il remarqua la note et reconnut l'écriture d'Az, mais décida de l'ignorer pour l'instant. Chaque chose en son temps. Il sortit sur le balcon et inspira un grand coup avant de froncer les sourcils et de grimacer. L'air était loin d'être aussi pur et vivifiant que sur Terre et il allait devoir faire un peu plus attention avec ses côtes. Il devait absolument aller faire un tour au bazar pour solutionner ça.

Il se mit à enchaîner quelques séquences de deux arts martiaux que lui avait appris Ethan et qui imposait des mouvements lents. L'instructeur lui avait expliqué que se défouler était certes une solution, mais qu'il fallait aussi qu'il apprenne à prévenir ce genre de situation en agissant avant que la coupe soit pleine. En somme, cela rejoignait ce que lui avait dit Nadja la veille sur le fait de garder la tête froide. Et ces exercices-là, comme la méditation, lui posait toujours des problèmes, car il se laissait facilement distraire et qu'il était parfois incapable de se concentrer.

Quand il rentra, il sourit à Nadja qui était sortie de la douche. Il était toujours un peu tendu, mais au moins il se sentait plus lui-même que la veille. Il lut rapidement la note et soupira.

« Az ne sera pas au bar avant deux bonnes heures... » dit-il simplement après avoir regardé l'heure.

Il alla prendre une douche puis grignota en guise de petit-déjeuner, rongeant son frein.

*****

Az les vit descendre sur les coups de 10 heures alors que lui-même venait d'arriver pour réceptionner les livraisons qui n'allaient pas tarder. Trixie n'était nulle part en vue. Elle ne prenait son service qu'en fin d'après-midi et c'était tant mieux. Vu la volatilité et l'instabilité que le pilote avait montré la veille, mieux valait ne pas trop le titiller, surtout qu'il avait l'air d'avoir retrouvé un minimum de self-control, et Trixie n'aurait pu s'empêcher de le provoquer.

« - Bonjour vous deux. Je vous sers un verre ?
- C'est un peu tôt...
- Pfff, tu n'es vraiment pas drôle. Avant ça ne te posait pas de problème.
- C'était avant. Tu as quelque chose d'autre ?
- Du thé ?
- Parfait. »

Az prit le temps de préparer la boisson en se servant du meilleur mélange qu'il avait en réserve. Il était tout aussi fin connaisseur d'alcools que de thé, même si rien ne le montrait. Au bout de quelques minutes, il les servit et entra dans le vif du sujet.

« - J'ai retrouvé la trace de votre type, mais pas de la fille. Mais quelque chose me dit qu'elle ne doit pas être loin de lui.
- Où ? »

Le barman hésita, se demandant comment le pilote allait réagir.

« - Allez, crache le morceau.
- Perdition... »

Zander se raidit avant de se lever pour faire les cent pas dans un coin du bar.

*Au moins ne s'en prenait-il pas au mobilier ou au messager...* se dit Az en secouant la tête.

Il regarda Nadja et se fit un devoir de lui expliquer.

« Perdition est une ville perdue au milieu des Badlands, à proximité de la mine la plus dangereuse de la planète. Les autorités y envoyaient autrefois une partie des condamnés purger leur peine là-bas. Mais la mine a été jugée trop dangereuse et peu rentable, alors elle a été fermée il y a environ cinq ans. Les autorités ont fait ce qu'elles pouvaient pour la population locale, mais, faute d'effectifs suffisants, elles ont perdu le contrôle de la ville à la faveur d'un gang qui gère désormais les lieux et tous les trafics illégaux de la planète. C'est devenu une zone plus ou moins de non droit où se réfugient la lie du secteur et ceux qui ne veulent pas être trouvés. Les autorités se contentent de confiner tout ce petit monde dans un périmètre bien précis et de contrôler les entrées et les sorties. De temps en temps, ils font une descente en force lorsque les activités illégales deviennent un peu trop… sanglantes ou voyantes. Ce fameux gang cherche désormais à étendre son influence sur Lamine et y a fait son apparition il y a un peu moins d'un an à peu près. Mais les Interlopes, les forces de sécurité, ainsi que la population, ne l'entendent pas de cette oreille et toutes leurs tentatives ont échoué jusqu'à présent. »

Soucieux, Az regarda le pilote qui s'était adossé les bras croisés à un mur à l'autre bout de la pièce, le plus loin possible du bar.

« Les chasseurs de primes ne se rendent à Perdition qu'en groupe et lourdement armés, jamais en solo, alors que c'était possible avant, même si cela demeurait risqué. C'est le seul endroit où ils collaborent pour remplir plusieurs contrats en même temps. La protection qu'est censée leur fournir leur statut et les mandats est pour le moins fluctuante. Un dernier détail… Les gars qu'il a corrigés de manière flamboyante hier soir ? Ils appartiennent à ce gang. Il va falloir qu'il surveille ses arrières. S'il y a une fois où il aurait mieux fait d'encaisser les coups et de riposter juste pour donner le change, c'était bien hier... Il s'est fait remarqué et ce n'est pas bon. » fit-il, fataliste.

En sortant de la douche, Nadja tomba sur Zander en plein exercice matinal. Sans vergogne, elle l’observa faire ses mouvement lent et un peu étrange que lui avait montré Ethan. Elle n’avait encore jamais vu ce genre des kata et son intérêt était donc purement académique... totalement…

« - Te gêne pas pour continuer hein, s’amusa-t-elle quand il revint. Je suis toujours curieuse de nouveaux art martiaux. »

Il déjeunèrent ensemble et pour l’aider à patienter elle lui demanda effectivement de lui montrer ses katas qui s’avérèrent bien plus difficile à maîtriser qu’elle ne l’avait supposée.

Finalement, ils descendirent et commandement un thé qui s’avéra étonnement bon. Elle laissa Zander mener la discussion et comprit leur prochaine étape ne serait pas de tout repos.

« - Ca a l’air charmant, commenta-t-elle quand il lui expliqua ce qu’était Perdition. »

Cependant, le détail sur le nouveau gang cherchant à étendre son influence lui fit froncer les sourcil.

« - Comment s’appellent-ils
- Jolly Rogers. Ne me demandez pas pourquoi.
- C’est le nom du drapeau pirate sur Terre. Je me demande bien comment c’est arrivé à leurs oreilles.
- Vous les connaissez ?
- Nous nous sommes déjà croisés… Ça n’a pas été le coup de foudre, on va dire.
- Personne ne les apprécie ici non plus.
- Rassurant, grommela Nadja... »

La suite lui plut encore moins. Non seulement ils allaient devoir se rendre dans une zone de non droit, mais en plus ils le feraient avec une cible dans le dos.

« - En quoi ce gars est lié est eux ? demanda-t-elle finalement."

Zander écoutait de loin et maudissait la tournure des événements. Il avait fallu que ce soit Perdition. Sa réputation y était probablement encore pire qu'ici et c'était cette ville qui avait failli avoir sa peau. Enfin, des locaux fort mécontents venus lui réclamer des comptes ici. Et visiblement, cela allait encore être le cas cette fois aussi, sauf qu'il allait se jeter lui-même dans la gueule du loup en allant sur leur territoire. Il fallait être fou ou suicidaire pour y aller dans ces conditions et il n'était ni l'un ni l'autre.

Il avait la même question que Nadja.

« - Mais quel rapport entre le petit-ami et Perdition ? Je croyais qu'il était originaire de Lamine ?
- D'après mes recherches, Jared Fox n'est pas son vrai nom. Il s'agit d'une fausse identité. Très bien faite. Il s'appelle en réalité Milo Blackstar, annonça Stella au pilote et à Nadja.
- Attends, Blackstar, comme le gang ?
- Affirmatif. Il a été arrêté à de multiples reprises depuis son enfance pour des faits allant du vol à l'étalage à la contrebande organisée. Quelques bagarres ou résistance à agent des forces de l'ordre, mais rien d'inhabituel. Son dossier indique que c'est un orphelin recueilli par Alister Blackstar...
- Le fondateur du gang en question et qui recueillait pas mal d'orphelins de Perdition pour étoffer ses rangs. » fit le pilote à l'intention de Nadja et nota qu'Az n'avait pas l'air surpris. Au contraire, celui-ci enchaîna.

« J'allais y venir, mais Stella m'a devancé visiblement. Mes salutations à elle. Comme tu le sais, les Blackstar étaient spécialisés dans la contrebande d'alcools et autres produits récréatifs, dirons-nous, commerce oh combien florissant et lucratif à Perdition. À Lamine, ils importaient illégalement des produits divers et variés de première qualité. Enfin, c'est ce qu'ils prétendent. Ils ont dû quitter Perdition après sa prise de contrôle et se sont refaits ici. Ils s'en sortent et sont plutôt bons dans leur branche. »

Zander regarda le barman, attendant la suite. Il lui manquait toujours une pièce du puzzle et il ne doutait pas une seule seconde que celui-ci l'avait et attendait qu'il pose la question pour lui la donner. Il décida de jouer le jeu, même s'il en avait de moins en moins envie.

« - Ça n'explique toujours pas pourquoi Milo s'en serait pris à la fille de Nyx.
- La rumeur court qu'il cherche à intégrer les Jolly. Il n'est pas satisfait de sa situation ici et il veut plus, même s'il était pressenti pour succéder au vieil Alister. Il trouve que le commerce n'est pas aussi lucratif que celui de Perdition. Mais pour parvenir à ses fins, il doit faire ses preuves. Étant donné sa... spécialité, il doit rapporter quelque chose d'unique et de valeur.
- Le rapport avec la fille de Nyx ?
- Combien crois-tu que vaut la fille de l'un des plus gros armateurs du secteur ? Je te parle aussi bien en valeur marchande en tant que possible danseuse de luxe qu'en potentiel d’extorsion... Par ailleurs, il ne s'est pas contenté de commettre un vulgaire enlèvement. Il l'a séduite sous une fausse identité et fait venir ici de son plein gré, ce qui démontre des talents de manipulateur et de charmeur. Tout à fait dans tes cordes si tu t'en donnais la peine, au passage. Tu pourrais devenir riche en ciblant la bonne clientèle. Bref, je ne serai pas surpris qu'il n'ait pas agi seul et que d'autres membres l'aident afin de gagner leur propre ticket d'admission. Monter une opération de ce genre n'est pas à la portée de tout le monde.
- Donc elle serait à Perdition ?
- C'est ce que tout laisse à penser en tout cas. Ce qui est certain, c'est que lui s'y trouve et que si vous voulez en apprendre plus, vous allez devoir y aller pour l'interroger.
- Je n'aime pas ça, mais alors pas du tout.
- Tu m'étonnes. Je n'aimerais vraiment pas être à ta place. Oh, il faut que j'aille m'occuper de ça. C'est la livraison que j'attends. Je reviens dans quelques minutes si vous avez d'autres questions. » lança-t-il lorsqu'un carillon retentit.

Le pilote resta adossé contre son mur à ruminer. C'était la première fois qu'il avait plus que jamais envie de plaquer un contrat pour rentrer chez lui. Cela ne lui était jamais arrivé avant, peu importe les situations bizarres dans lesquelles il avait pu se retrouver. Revenir à Lamine était déjà difficile, mais remettre les pieds à Perdition ? Ah ça, il risquait effectivement de se perdre...

Sitôt la réponse donnée, Nadja regretta de l’avoir posée. C’était de pire en pire. Mais imaginer cette pauvre fille aux mains des Jolly Rogers renforça sa détermination à aller la chercher.

Pendant qu’Az parlait, elle réfléchissait à des angles d’attaques. Évidemment, elle pouvait se téléporter au milieu de la ville avec Emy et faire un massacre. Il ne devait pas y avoir beaucoup d’armes sur cette planète capable de la blesser. Mais avec un tel niveau de violence, elle avait aussi toute les chances de faire des blessés innocents, à commencer par celle qu’ils étaient venu chercher.

Une fois Az sorti, elle resta songeuse un instant avant de regarder Zander qui ne semblait pas avoir apprécié plus qu’elle la nouvelle.

« - Rentrez la dedans et trouvez ce Blackstar va être coton. A plus forte raison si t’es connu. De toute façon, ni toi ni moi ne sommes doué pour l’infiltration. Il y a bien un moyen, mais tu vas pas aimer. »

Elle fit une pause en le regardant, un petit sourire navré aux lèvres.

« - L’un de nous doit livrer l’autre. Tu es connu et ca ne surprendra personne que tu vende ta garde du corps qui en plus d’avoir un cul de rêve est un officier de l’armée terrienne. Mais l’inverse fonctionne aussi, vu que tu semble avoir plus d’ennemi que d’ami dans le coin. »

Non, ce genre de plan n’allait pas lui faire plaisir. Peut être en avait-il un meilleur cela dit.

« - Je doute pas qu’ils connaissent notre présence et mon statut, mais une trahison ne devrait pas trop les surprendre, non ? »

Elle écouta le suite et fut effectivement surprise de sa vision des choses. Elle s’était imaginée une sorte de camp retranché avec des patrouilles armés jusqu’aux dents allant et venant sur les remparts. OK, elle en faisait peut être un peu trop.

« - C’est presque décevant, s’amusa-t-elle. Mais ok, je vois ce que tu veux dire. Si je suis bien ton plan, on va en plein milieu du nid de guêpe, tu négocies pendant que je montre les dents et on s’en va en tirant sur tout ce qui bouge. Je ne suis pas sure d’aimer ce plan. »

Ils auraient une autre porte de sortie, mais elle ne voulait pas en parler tout haut ici. Même à cette heure matinale, les murs pouvaient avoir des oreilles.

« - S’il arrive avec des gros bras, il trouvera à qui parler. »

Au vu de la description que Zander et Az venait de lui faire sur Perdition, il était probable que ca se passe plutôt mal. Mais coller une balle dans la tête d’un esclavagiste est un plaisir qui ne se boude pas, après tout.

« - Du coup, on y va comment ? »

Zander sourit doucement.

« Non, une trahison serait tout à fait plausible. On peut garder ça en plan B. Il faudra juste que tu prépares une bonne histoire à leur raconter. Et négocie bien ton prix. Je dois valoir un sacré paquet, tout comme ton joli cul, comme tu dis. Quelque chose avec la couleur de mes yeux. » dit-il.

Il hocha ensuite la tête. Il comprenait sa réaction, mais ils n'avaient pas trente-six options pour agir.

« Dans tous les cas, nous allons dans un nid de guêpes. Et je vais essayer de voir si on peut négocier, car rien ne garantit que ce soit possible et ensuite, il saura au courant de notre objectif. Mais cela se serait vite su de toute façon. Et je ne l'aime pas non plus. Mais je ne vois pas d'autre alternative. »

Se rendre à Perdition était une autre histoire. Heureusement pour eux, il était autonome pour ça aussi et ils n'auraient pas besoin de recourir à un tiers pour les y amener. Ils auraient pu s'y téléporter, mais cela aurait paru très suspect.

« Avec le quad dans la soute. C'est une balade de trois heures sur des pistes. Il y a une zone d'exclusion aérienne autour de la ville qui n'a jamais été levée. On pourrait probablement se poser dans la zone prévue à cet effet juste à l'extérieur grâce au mandat, mais il resterait encore une bonne heure par la route. Et je ne sais pas ce que vaut l'endroit en terme de sécurité pour les vaisseaux. » expliqua-t-il.

Avant leur départ, Az leur dit qu'à sa connaissance, il n'y avait aucun mandat ou contrat officieux sur la tête du pilote, mais réitéra son appel à la prudence. Il leur recommanda aussi d'être bien armés et de ne faire confiance à personne, sauf à l'une de ses connaissances, un certain Alvin, propriétaire d'un établissement semblable au Lux, qui pourrait leur fournir le gîte et le couvert, et tout ce dont ils pourraient éventuellement avoir besoin.

*****

Après être repassés sur Stella pour récupérer le quad et d'autres affaires, ils mirent en route cahin-caha. Les contrôles de sécurité ne posèrent pas de problèmes particuliers, mais le dernier s'avéra particulièrement pénible et long avec une fouille complète de leur véhicule et de ce qui se trouvait à l'intérieur. Zander finit par se demander s'il n'allait pas devoir allonger la monnaie pour passer, quand les agents décidèrent soudain de les laisser passer après avoir vérifié l'authenticité du mandat.

Perdition ne ressemblait pas à grand-chose. Des rangées de bâtiments bas et austères, héritage de temps pénitentiaire de la ville, avec des rues poussiéreuses dans lesquelles traînaient des hommes peu avenant et parfois ouvertement armés, d'un côté. De l'autre, la principale attraction était le bazar qui servait de devanture officielle à des commerces dont les produits étaient beaucoup moins légaux. Autour de celui-là, les bâtiments étaient un peu plus disparates. On y trouvait aussi des tentes de couleurs et tailles variées, mais le tout semblait un peu plus joyeux, avec une foule clairsemée et bigarrée. Tous les habitants n'étaient pas membres d'un gang. Certains étaient les descendants des premières familles qui avaient habités l'endroit pour en assurer l'administration et d'autres étaient venus là pour disparaître. Les principales activités légales du secteur était une carrière de pierres et une casse liée à un chantier de démantèlement de vaisseaux.

Ils se dirigèrent vers l'établissement recommandé par Az, tout en observant les lieux. Un mélange de bar et de boutique vendant de l'équipement en tout genre.

La chambre aurait pu être la jumelle de celle du Lux, mais elle était propre et fonctionnelle. Elle occupait aussi le coin du bâtiment avec une fenêtre donnant sur la rue principale et l'autre sur la ruelle à l'arrière. Cette dernière semblait menée tout droit vers la route qu'ils avaient empruntée. Le quad se trouvait garée dans la cour juste à côté des escaliers extérieurs.

« Je crois que nous ferions bien de partir en reconnaissance au bazar. Il faut que je vois si je peux trouver de quoi soigner mes côtes, sinon je ne serai pas utile à grand-chose en cas de combat. Et aussi un bar fréquenté par le gang, mais pas uniquement si possible. » fit-il.

Il était de nouveau extrêmement tendu, mais cette fois, il arrivait à rester concentré sur la tâche en cours.

La mention du quad qui encombrait une partie de la cale de Stella fit sourire l’ex marine. Elles n’avait encore jamais eu l’occasion de le tester mais supposait que ça saurait tout aussi amusant que les voitures terriennes qu’elle avait appris à conduire quelques mois auparavant.

« - Ok, on fait ça à ta manière. C’est presque dommage, je me demande combien j’aurai pu tirer de toi... »

Âpres quelques préparatifs sur Stella qu’elle passa essentiellement à contrôler l’intégrité et le niveau d’énergie d’Emmy, ils s’élancèrent sur la piste. Ce fut au départ, aussi amusant qu’elle l’avait supposé. La piste était cahoteuse et ils étaient brinquebalé en tout sens. Mais à la longue, les chaos de la route finirent par lui faire franchement mal au dos et aux fesses. En arrivant à destination, elle se déplia douloureusement et fit craquer la moitié de ses os.

« - Dire qu’il y en a a qui font ca par goût... »

Perdition ressemblait à une ville de western, en plus crasseux. Ils prirent leurs quartier dans un bar qui ressemblait à celui qu’ils avaient quitté quelques heures plus tot mais une fois installé, il était temps de se mettre au travail.

« - Allons y, dit-elle en versifiant que l’arme sur sa cuisse était prête. »

Le bazar se révéla être a la hauteur de ses espoirs. On pouvait y acheter et vendre tout et n’importe quoi, tant que c’était illégal. A plusieurs reprises, elle dut se faire violence pour ne pas dégainer en voyant le symbole des Jolly Rogers mais pour l’instant personne ne semblait faire attention à eux.

Demander à Nadja de faire quelque chose discrètement était sans doute mal la connaitre. Subtilité et délicatesse ne s’étaient pas penchées sur son berceau à sa naissance. Elle nota néanmoins l’idée dans un coin de tête. Elle aurait peut-être l’occasion de placer quelques éléments à l’occasion.
L’omni présence du symbole des esclavagistes mettait ses nerfs à rude épreuves. Même avec un demi-siècle de moins, ils avaient déjà l’air d’être les fumiers qu’elle connaissait. Si elle les éliminait ici et maintenant, elle rendrait un sérieux services à la galaxie.

Elle acheta quelques munitions également, mais les armes à disposition ne lui paraissaient vraiment pas assez fiable pour valoir un investissement. Elle faillit d’ailleurs en venir aux mains avec un vendeurs à qui elle prouva en la démontant que son fusil était totalement inutilisable et qu’il arnaquait ses clients.
Vu qu’ils ne devaient pas être discret, autant faire du bruit.

« - La caverne ? soupira-t-elle, de mieux en mieux. Allons-y je pense qu’on a assez attiré l’attention. »

Non elle n’avait pas remarqué la filature. Elle restait en terrain inconnu avec ce genre de mission et espérait que Zander se débrouille mieux qu’elle. Maintenant qu’il le lui avait dit, elle repéra sans peine le gros balaise qui les filait et surtout el symbole du poignard et du crane sur sa veste.

La Caverne était dans une petite rue et ne payait pas de mine extérieurement. Après avoir frappé, un panneau bascula dans la porte pour révéler une caméra. L’examen dura quelques secondes avant que la trappe ne se referme et que la porte s’ouvre. A l’intérieur, un videur qui n’avait rien à envier à un gorille leur expliqua que els armes restaient à l’entrée et que tout contrevenant serait exécuté sans sommation par le personnel et ses organes vendu au marché noir.  Sagement, Nadja déposa son pistolet dans une boite qui disparu dans un tiroir sellé.

Une fois les formalités accomplies, ils passèrent al porte suivante et la musique les frappa avec la force d’un train à grande vitesse. La majeure partie de la grande salle était une piste de danse ou s’agitait tout un groupe de gens. Au fond un bar immense semblait capable de servir a peu près toutes les boissons de la galaxie.

En avançant, Nadja comprit d’où l’endroit tenait son nom. Le sol était en verre transparent et le bar bâti au-dessus d’un gouffre impressionnant. En dessous se trouvait une autre piste de danse, elle-même sur du verre. Il lui était impossible de deviner combien de niveau comptait l’établissement, mais c’était au moins une demi-douzaine.

Il lui sembla distinguer tout au fond des salons privatifs sans doute pour les négociations dont avait parlé Zander. Encore fallait-il trouver comment descendre.

« - Heureusement que j’ai pas mis une minijupe, commenta-t-elle. »

Zander avait laissé Nadja agir à sa guise dans le bazar. Autant qu'elle fasse étalage de ses connaissances. Ça montrait qu'elle ne servait pas qu'à faire joli et qu'elle savait de quoi elle parlait. Sa démonstration arriva à point nommé et il ne manqua plus qu'une bagarre pour enfoncer le clou, mais cela ne se produisit pas.

« Oui. Maintenant, ils doivent savoir exactement qui nous sommes et aussi pourquoi nous sommes là. Ils ont sans aucun doute des contacts au sein des forces de l'ordre qui gardent le périmètre et qui ont dû les informer de notre arrivée. D'où le gorille qui nous suit pour savoir ce que nous faisons. »

Il finit sa boisson pas si mauvaise et jeta le gobelet dans la poubelle avant de se diriger tranquillement vers la Caverne. Il n'était pas spécialement pressé d'y aller, mais c'était la prochaine étape. Le gorille finit par disparaître lorsqu'ils longèrent la zone des anciens baraquements. Ils étaient toujours surveillés par les sentinelles qui devaient savoir où ils se rendaient.

Il se soumit sans protester aux règles de l'établissement et remit son arme. Leur politique devait être appliquée à la lettre, d'où leur réputation de lieu neutre. Tous les lieux comme Perdition avait besoin d'un tel endroit pour mener des négociations. Ça n'empêchait personne d'en venir aux mains, mais cela donnait le temps à la sécurité d'intervenir et ça évitait le massacre inutile de la clientèle.

Il s'arrêta un instant lorsqu'ils franchirent le seuil et entrèrent dans le bar proprement dit. Les lieux auraient rendu Az jaloux, à n'en point douter. Il n'avait jamais mis les pieds ici, l'endroit n'existant pas il y a dix ans.

« Impressionnant, déclara-t-il, les yeux rivés sur le bar avant de sourire à la remarque de Nadja. Tout dépend de ce que tu aurais mis en dessous… fit-il, amusé. Mais je crois que je préfère être le seul à pouvoir profiter de la vue. Et je suis certain qu'il est possible d'avoir des salons très, très privés pour ce genre de divertissement personnel. »

Il s'avança un peu et observa attentivement les lieux et les personnes, mais constata que Milo n'était pas dans la salle. Pas encore en tout cas. Par contre, leur gorille, oui, et il les gardait à l’œil.

« Allons prendre un verre au bar. À moins que tu veuilles danser ? Ou un salon privé rien que pour nous deux ? » dit-il sur un ton qui se voulait léger.

Mais son attitude trahissait sa nervosité. Tous ses sens étaient aux aguets et son instinct lui criait, comme souvent, de faire demi-tour, car il était vraiment pris au piège ici. Et c'était encore plus vrai s'ils allaient tout en bas. Il devait cependant exister des issues de secours pour permettre aux clients de fuir en cas de besoin.

« - Nous devons attendre que Milo arrive. Cela ne devrait pas être trop long. Enfin, je l'espère. Mais pour l'instant, il n'y a rien d'autre que nous puissions faire. S'il ne se pointe pas, il faudra improviser, expliqua-t-il à Nadja. Stella ?
- ...cation… mauvaise… brouilleur…
- Je m'y attendais. De toute façon, si nous descendons, je ne suis pas sûr que tu captes notre signal. Est-ce que tu peux cartographier les lieux et m'envoyer tout ça sur mon PDD ?
- Je… ...ayer. »

Tant qu'ils étaient à l'intérieur, ils étaient plus ou moins en sécurité. Enfin, en théorie. Il regarda Nadja et lui indiqua le bar. Traverser la piste de danse se révéla une épreuve pour lui qui nécessita quelques pas de danse, des contorsions et quelques frottements pour franchir le mur humain. Il eut du mal à réprimer quelques grimaces de douleur. Il s'assit avec soulagement et se mit à contempler le mur d'alcool devant lui.

« - Impressionnante sélection…
- Quand à vous, magnifiques yeux que vous avez là. Et nous tâchons de pouvoir satisfaire notre clientèle avec un petit goût de chez elle, peu importe d'où elle vient.
- Alors il vous manque un alcool de ma planète, répondit Zander avec un sourire, habitué à entendre ça.
- Oh, vraiment ? Lequel ? Si vous me dites son nom, je ferai vérifier s'il est dans notre réserve. Nous n'exposons ici qu'une sélection comprenant les alcools locaux, les plus demandés ou nos dernière nouveautés.
- La pourpraline… Mais en attendant, je prendrais une bière.
- Et vous, madame, vous prenez quelque chose ? demanda poliment le barman. »

Autant profiter des lieux pour tuer le temps…

« - Qui te dis que j’ai quelque chose, demanda Nadja d’un ton volontairement provocateur. »

Il leur fallait quasiment hurler pour s’entendre, s’était assez désagréable. Elle supposa que les salles en dessous étaient particulièrement bien insonorisée. Et leurs cloisons devaient pouvoir s’opacifier supposa-t-elle également, afin de garder l’anonymat des participants.

Ils progressaient au milieu dans des danseurs lorsqu’elle senti une main se poser ouvertement sur ses fesses. Ce genre de comportement n’était pas rare dans ces établissements et elle aurait d’ordinaire laisser passer. Masi la journée n’avait rien d’ordinaire.

L’ex marine se retourna d’un bloc et fit face à un colosse encore plus grand et plus large qu’elle.

« - T’as pas envie de laisser le gringalet et de… »

Il ne termina jamais sa phrase, interrompu par un coup de tête qui lui brisa le nez et le fit tomber au sol, complétement sonné. Comme si de rien était, Nadja reprit son chemin, sans aucun incident. Le message était passé.

Zander discutait alcool avec le barman et ne put s’empêcher de venter la pourpraline, ce qui fit lever au ciel de Nadja. La dernière fois qu’il en avait pris, ça ne lui avait franchement pas réussit. A moins qu’il ne tente de négocier un contrat commercial.

« - Va pour la bière, demanda-t-elle. »

Elle observa les étages en dessous qui semblait moins plein que celui-ci. On y faisait tout autant la fête pourtant.

« - Faut une invitation, expliqua le barman en leur tendant des verres pleins. Si quelqu’un du dessous vous remarque, il a droit de vous faire descendre.
- A chaque fois ?
- Non. Un droit gagné l’est définitivement. Enfin sauf si on vous renvoi évidemment.
- Je vois. Et il y a quoi tout en bas ?
- Vos rêves les plus fou et le prestige qui va avec. »

Quel étrange endroit, décidément…

Zander n'avait rien manqué de la mise au point de Nadja et avait un instant cru qu'ils allaient se faire jeter dehors en réponse à sa réaction brutale, mais il n'en fut rien. Maintenant qu'ils étaient au bar et qu'ils n'avaient plus besoin de hurler, il se pencha vers elle.

« La prochaine fois que tu portes une robe ou une jupe, mini ou pas, il faudra que je vérifie ce que tu as en dessous… » murmura-t-il avec un grand sourire avant de lever son verre en direction de leur garde et de boire une gorgée de bière.

« Pas mauvaise… Je sais que la discrétion n'est pas ton fort, mais la prochaine vas-y un peu plus mollo, on aurait pu se faire se faire expulser pour ce que tu as fait. Ou peut-être rien que toi, mais je ne serai pas allé dans ce nid de guêpes tout seul. Tu as remarqué que notre fan était dans le coin… Tiens, il a à nouveau disparu. » fit-il pensif avant de s'adresser au barman :

« Lorsque l'on gagne le privilège de descendre, est-ce qu'il est acquis uniquement pour l'étage où l'on a été invité et tous ceux au-dessus, ou est-on libres d'aller et venir à notre guise une fois qu'on l'obtient ? » demanda-t-il.

Il ignora le reste concernant la réalisation des rêves les plus fous. Il n'en doutait pas une seule seconde, mais il n'avait pas envie de tester. Le prestige en revanche, dans un lieu et sur une planète comme ça, c'était toujours bon à prendre.

Au bout d'une demi-heure et un deuxième verre de bière plus tard, le gorille revint et s'approcha d'eux.

« M. Blackstar veut vous parler. En bas. » ajouta-t-il à l'intention du barman qui hocha la tête.

Zander embarqua son verre et suivi le balèze jusqu'au dernier niveau. Il les fit entrer dans un confortable salon avec boisson, petits fours et hôtesses qui tentèrent de le débarrasser de son verre, sans succès, et les dirigèrent vers un immense canapé qui se révéla très confortable. Mais Zander ignora ces détails pour se concentrer sur le gringalet debout, tout sourire, en face d'eux. Tous les deux le dominait d'une bonne dizaine de centimètres, mais leur interlocuteur ne semblait pas le moins du monde impressionné. Il tendit la main et Zander la serra.

« - M. Hayes, enchanté
- M. Blackstar, je présume ?
- En effet. Je vous en prie, asseyez-vous, fit-il tout en tendant la main à Nadja. Madame Cook, ravi également. »

Pour un peu, le pilote se serait cru dans un véritable rendez-vous d'affaire avec un client ou un partenaire potentiel pour conclure un contrat tout ce qu'il y avait de plus légal. Cela était quelque peu déroutant, mais il n'en montra rien.

« - Quelque chose à boire ? Un peu de café hébridien peut-être ? Ou un verre de pourpraline peut-être ?
- Réservons plutôt la pourpraline pour la fins de ces discussions si jamais elles s'avéraient fructueuses. Et j'ai déjà ce qu'il me faut, merci, répondit-il en montrant son verre.
- Comme vous voudrez, répondit Milo avec un sourire. »

Il n'était pas question qu'il boive quoique ce soit qui lui serait servi par leur hôte celui-ci, par ses paroles, venait de prouver qu'il avait fait ses devoirs le concernant. Et si celui-ci était contrarié, il n'en laissa rien paraître.

« - Et si nous en venions au but de notre visite au lieu de nous faire des politesses. Cela nous fera gagner du temps à tous , vous ne pensez pas ?
- Certes. Et pourquoi êtes-vous là au juste ?
- Oh, je vous en prie, ne jouons pas à ce petit jeu. Vous savez très bien pourquoi nous sommes là, répondit Zander avec le même sourire mielleux que son interlocuteur.
- Clary Nyx, si j'en crois le mandat que vous avez présenté à la sécurité.
- Tout à fait, »

Cela confirmait certains de ses soupçons, ce qui n'annonçait rien de bon.

« - Je ne vois pas ce que je peux faire pour vous.
- Nous dire ce que vous voulez pour que nous puissions repartir avec elle sans violence. Ou nous dire ce que vous en avez fait. Sinon, nous devrons la récupérer par tous les moyens à notre disposition.
- Vous pensez que je veux une rançon ? Ou que je me suis débarrassée d'elle ? Mais pourquoi aurais-je fait une telle chose ?
- Parce que vous n'avez plus besoin d'elle et qu'elle n'était une fin pour parvenir à votre objectif d'intégrer les Jolly Rogers ? suggéra Zander, ce qui fit tiquer son interlocuteur.
- Hé hé. Je vois que vous en savez plus que je ne le pensais. Vous avez en partie raison, mais vous vous méprenez. Qu'est-ce qui vous fait penser que Clary a besoin d'être sauvée et qu'elle veut rentrer chez elle ?
- Pardon ?
- Contrairement à ce que vous avez l'air de croire, je ne l'ai pas enlevée. Je ne veux pas de rançon ou ne plus l'avoir dans les pattes, d'une manière ou d'une autre, au contraire.. Elle est venue ici de son plein gré pour échapper à la cage dorée de son père.
- Je ne vous crois pas une seule seconde.
- Eh bien, vous n'avez qu'à lui poser la question directement et vous jugerez par vous-même. »

Dire qu'il ne s'attendait pas à cela était un euphémisme. Si Clary ne voulait pas rentrer, cela allait singulièrement changer la donne et leur compliquer la vie, car ils devraient la ramener contre son gré et nul doute qu'on les laisserait encore moins faire.

« - Mais j’y suis allé mollo, grogna Nadja. Je pense pas lui avoir cassé quoi que ce soit, sauf son ego. »

La bière était honnête et, comme Zander, Nadja étudiait la salle tout en écoutant le barman leur expliquer le fonctionnement de l’établissement.

« - Si vous avez acquis le droit de vous rendrez au premier étage, vous pourrez y retournez a votre guise, mais pas plus bas. La plupart des clients vont jusqu’au deux ou trois. Ensuite, c’est bien plus sélectif."

Il regarda Nadja quelques secondes avant de sourire.

« - Il y a une autre solution pour descendre, c’est l’arène. Chaque niveau a ses champions et vous pouvez choisir de les affronter. Si vous gagnez, vous pouvez descendre. »

L’ex marine leva les yeux au ciel. Décidément tout ce réglait au combat ici, ou a l’influence. Ce qui revenait globalement au même. Elle n’avait aucune envie de se donner en spectacle pour cette bande de demeurés mais son petit doigt lui disait qu’elle ne pourrait pas l’éviter éternellement.

Finalement, le dénommé Blackstar les invita à une rencontre. Elle se mit en retrait en écoutant la conversation, laissant son mari gérer sa partie. En comprenant que la gamine était venue ici de son plein grès, elle ne put s’empêcher de soupirer. Leur statut de sauveteur venait soudain de passer à celui de kidnappeur potentiel.

Mais elle était curieuse d’avoir la version de cette jeune fille en effet. Était-elle ici ?

Zander était perplexe. Il ne s'était jamais imaginé que la fille de Nyx pourrait ne pas vouloir partir et qu'elle s'était faite manipulée par Milo. Mais qu'allait-il faire si ce n'était pas le cas ?

« Si elle est ici, ce sera avec plaisir. »

La dernière fois qu'il l'avait rencontrée, c'était une gamine âgée d'à peine une dizaine d'années. Il avait dû lui parler quelques fois, car Nyx prenait soin de garder sa famille à l'écart de ses affaires. Mais de temps à autre, sa fille s'invitait dans son bureau ou dans le salon. Il se souvenait d'elle comme d'une enfant vive et bien élevée, parfois effrontée et espiègle.

« Je suis vexée que tu ne m'aies pas reconnu, M. l'aventurier. »

C'était le surnom qu'elle lui avait donné. Il se retourna sur le canapé pour regarder l'une des hôtesses à la chevelure flamboyante. Il lui fallut quelques secondes pour la reconnaître. Il se leva pour aller à sa rencontre avant de s'arrêter à quelques pas d'elle.

« - Tu m'excuseras, mais la dernière fois que je t'ai vue, tu avais quoi ? Huit ans ? Tu m'arrivais à peine la taille et tu avais des couettes. Tu as bien grandi et beaucoup changé depuis. Comment vas-tu, Clary ?
- Très bien. Comme tu peux le constater, je ne suis pas enfermée dans une cage, maltraitée ou obligée d'assouvir les besoins ou fantasmes de clients ou morte.
- Effectivement. Alors, ce qu'il dit est vrai ? Tu es vraiment ici parce que tu le veux ?
- Est-ce si difficile à croire ?
- Un peu. Si tu voulais te libérer de l'emprise de ton père et vivre ta vie, il y a quand même des endroits et des fréquentables plus… recommandables que Perdition et Jheosmine.
- Ce ne serait pas drôle. Et mon père ne m'aurait jamais laissé faire. Il aurait fallu que je parte avec des gardes du corps, des assistants et dans des lieux uniquement choisis par lui et dans lesquels il pourrait continuer à surveiller le moindre de mes faits et gestes. Ce n'était pas ce que je voulais, mais ça il s'en contrefichait.
- Alors quoi ? Tu as monté ton enlèvement de toute pièce ? Pour passer ta vie ici en tant que hors-la-loi ? Sais-tu au moins à qui tu as affaire ?
- C'était ma solution de dernier recours quand il a refusé de m'écouter. Et puis pourquoi pas ? C'est une carrière comme une autre. Et oui, je sais parfaitement qui sont mes fréquentations et cela me convient parfaitement. Mais que veux-tu, j'aime l'idée d'agir en dehors des lois. Ça procure un frisson qui n'a nul autre pareil. Puis je suis libre d'agir à ma guise.
- Ton père savait que tu allais t'enfuir ?
- Oui, il le savait, je l'avais averti. Oh, papa t'a fait des cachotteries et ne t'a rien dit ? Mon pauvre Zander, tu es parfois bien naïf et trop serviable pour ton propre bien… Mon père t'a manipulé, mais ce n'est pas la première fois. Il savait que tu ne lui dirais pas non et que tu accourrais dès qu'il te sifflerait. »

Il se raidit au changement de ton et entendant les propos de Clary. Le pire, c'est qu'elle avait raison. Ne se trouvant plus dans le secteur, il n'avait aucune idée des relations pour le moins houleuses du père et de la fille. Et il avait cru Nyx sur parole.

« - Il m'a dit que tu avais fugué pour retrouver ton petit copain louche, voir qu'il t'avait enlevée ou manipulée.
- Je n'ai pas fugué, je suis partie. Je ne supportais plus de devoir faire ses quatre volontés et que je ne puisse pas choisir ce que je veux faire de ma vie. Et je ne rentrerai pas.
- Malheureusement, j'ai un mandat pour te ramener, peu importe les raisons qui font que tu n'es plus chez toi.
- Eh bien, cela n'arrivera pas. Il va falloir que tu fasses avec.
- Ce n'est pas aussi s… »

Clary s'était approchée et lui envoya soudain un coup de poing bien placé sur ses côtes meurtries qui le fit se plier en deux de douleur. À voir son regard, elle savait très exactement ce qu'elle faisait.

« Tu vois, je ne te demande pas ton avis, ni le sien. Et oui, papa, dans sa grande bonté, s'est assurée que je sois en mesure de me défendre au cas où je devrai me protéger moi-même. Très utile. Et je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer ta tendance à protéger tes côtes gauches. » lui dit-elle avant de le lâcher.

Il se retrouva à genou, en train d'essayer de reprendre son souffle. Les trois autres hôtesses, accompagnée de trois gorilles, s'interposèrent entre Nadja, Milo et Clary. Visiblement, tous la considérait comme la menace potentielle, bien plus que le pilote.

« - Tu vas te débrouiller comme tu veux pour que mon père annule son mandat, parce que je sais que c'est possible, et lui faire comprendre qu'il doit me ficher la paix.
- Il ne voudra jamais, Clary, grogna-t-il. Et je dois remplir mon mandat.
- Pas mon problème.
- On ne peut pas l'emmener ? Comme garantie ? Je l'aime bien, mine de rien mon aventurier, demanda Clary à Milo. Il a toujours été gentil avec moi et j'aimerais m'amuser un peu avec lui.
- Non, pas encore. Nous devons agir de manière civilisée et laissez une chance à ton père avant de prendre d'autres mesures. S'il échoue, on en rediscutera. Clary ? »

Clary soupira et se retourna vers Zander qui respirait laborieusement.

« Un petit cadeau. Ça devrait te faire oublier la douleur quelques heures et empêcher ta copine de nous suivre… fit-elle en lui plantant une seringue dans la cuisse avec un grand sourire. On se revoit bientôt, M. l'aventurier. »

Zander ouvrit de grands yeux affolés. Elle se releva et alla se poster à côté de Milo, l'air joyeux.

« Oh, ne vous en faites pas, ça ne va pas le tuer, juste le faire planer une heure ou deux. Par contre, la descente, ça ne sera pas forcément marrant. Mais mieux faut le surveiller au cas où il se mettrait à agir bizarrement. » dit-elle à Nadja.

Milo se leva et se dirigea vers un coin de la pièce, accompagnée de la rouquine, et encadrée par les quatre "hôtesses".

« Je crois que cela met fin à notre conversation. J'espère que celle-ci aura permis de lever les doutes concernant le statut de Clary ici. Voyez-vous, c'est une véritable magicienne avec les chiffres et les ordinateurs. Ses talents nous sont très utiles et elle apprend très vite. Elle a un avenir radieux à nos côtés. Il est donc dans votre intérêt de ne pas insister pour la récupérer et de faire entendre raison à son père. Pour l'instant, vous êtes libres d'aller et venir à Perdition. Nous vous donnons trois jours pour faire lever le mandat et quitter la ville. Sinon, nous devrons recourir à des méthodes plus… persuasives, voir radicales. Et vous pouvez rester ici le temps qu'il redescende. Ce salon est encore loué pour les trois prochaines heures, service inclus, alors n'hésitez pas à vous faire plaisir. » fit-il avant de sortir par une porte dérobée avec toute sa troupe.

Dernière édition par Zander Hayes le Mer 12 Juin 2019 - 15:16, édité 1 fois

Quand le « cible » se présenta finalement, l’instinct de Nadja lui hurla que quelque chose ne tournait pas rond. Pourtant, elle avait toutes les raisons d’apprécier cette gamine qui tentait de secouer sa condition sociale et tentait de s’en sortir par elle même. Évidemment, ses choix étaient contestables, mais au moins, elle essayait. Quelque part, ça lui faisait penser à Clara et sa famille de débiles. Elle aussi avait du les fuir et s'engager dans les marines avait été une voie de sortie salutaire.

Ça n’était pas le moment de se perdre dans ses souvenirs.

Tendue, elle suivit la discussion en se demandant à quel moment ça allait partir en vrille. Et elle ne devait pas être la seule. Lorsque la gamine frappa Zander, les trois garde du corps firent un pas en avant pour l’empêcher de s’interposer. Ce qui était mal la connaître…

Un coup de pied retourné atteignit le premier malabar à la tempe et l’envoya directement au pays des rêves, sinon plus, Nadja s’en moquait. Bien entraînés, les deux autres la repoussèrent contre le mur. Un second s’effondra, le larynx écrasé par un coup de coude furieux. Mais c’était trop tard. Elle vit du coin de l’œil une seringue s’enfoncer dans la cuisse de son mari.

« - Zander ! »

Son affolement lui fit perdre ses moyens un instant, ce qui suffit à son dernier adversaire pour l’envoyer au sol d’un uppercut qui lui fit voir des étoiles. Le temps qu’elle roule et se relève, Milo et Clary sortaient avec un ultimatum dont elle se moquait éperdument.

« - Zander tu m’entends ? demanda-t-elle en se ruant sur lui. Merde… Stella ? Stella ? »

Mais l’IA ne répondit pas non plus. Ils étaient trop profond. Nadja passa le bras du pilote autour de ses épaules et commença la remontée en montrant les dents à tout ceux qui s’approchaient de trop prés.

Le sergent chef Cook avait toujours été félicitée pour son sang froid, même dans les pires situations. Jamais elle n’avait paniquée sous el feu ennemi ou face à des forces clairement supérieure en nombre. Et elle avait vu son content de collègue ou d’ami blessé. Mais jamais elle n’avait dut s’occuper de son mari, seule en territoire hostile. Sans cesse, elle devait repousser les griffes de panique qui lui retournait l’estomac et se concentrait sur son objectif : sortir d’ici.

Enfin, elle fut dehors. Personne en faisait attention à eux. Elle bifurqua sur la droite, dans une ruelle et contacta immédiatement le vaisseau.

« - Stella, téléportation d’urgence à l’infirmerie ! »

Un instant plus tard, ils étaient à bord.

« - Que lui ait-il arrivé ?
- Il a été drogué, je ne sais pas avec quoi ! »

A présent au bon soin de l’IA, elle s’effondra sur une chaise, les mains et les jambes bien plus tremblante que ce qu’elle voudrait bien avouer plus plus tard.

Les paroles de Milo ne le rassurèrent pas le moins du monde. Il évitait les drogues, légales ou non, comme la peste. Les effets et ses réactions aux produits d'une autre planète étaient tout aussi imprévisibles que pour n'importe quel aliment qu'il goûterait pour la première fois. Et il n'avait jamais vraiment donnée dans ce genre de substances. Cela lui était arrivé quelques fois, pas forcément volontairement, et il n'avait pas du tout aimé, vu que cela le rendait vulnérable et incapable de réagir en cas de problèmes.

Terrifié, il se recroquevilla sur lui-même lorsque le monde chavira et devint flou. Au moins, il savait que Nadja allait veiller sur lui pendant ce temps et l'empêcherait de faire une bêtise. Il eut l'impression que le temps s'étira. Il ne réagit lorsqu'elle arriva près de lui, les effets de l'injection le frappant de plein fouet et lui faisant perdre le contact avec la réalité.

Il sentit soudain quelqu'un le soulever et une violente douleur lui traversa le côté gauche, manquant de lui faire perdre connaissance. Il voulut résister, mais il en fut incapable et décida de prendre son mal en patience et d'attendre qu'une occasion de se libérer se présente. Il en aurait forcément une, sinon il devrait la créer. Mais pas question d'attendre de voir ce que ces tortionnaires allaient lui faire subir. Le trajet lui sembla interminable Le décor changea brusquement, le désorientant complètement. Il n'avait pas la moindre idée d'où il se trouvait et comment il y était arrivé, mais il était maintenant allongé sur une une table et il entendait deux personnes discutées.

« Je pourrai t'en dire plus dans quelques minutes lorsque j'aurai effectué des analyses préliminaires. Cependant, je note une élévation importante et constante de son rythme cardiaque et de sa température depuis que tu l'as ramené. Et l'une de ses deux côtes est cassée pour de bon. L'autre l'est quasiment aussi. » ajouta-t-elle.

Le pilote ne bougea pas pendant un moment. Voyant que rien ne se passait, il décida qu'il était temps de tenter sa chance pour s'évader.

« Zander ! Reste tranquille ! Tu vas te faire mal ! » fit Stella.

Le pilote s'était relevé en titubant et en grimaçant. Il saisit un scalpel au passage et menaça avec la seule personne qu'il apercevait, Nadja. Perdu dans son hallucination, il était incapable de la reconnaître. L'occasion qu'il attendait s'était enfin présentée. Libéré de la poigne de son garde, il pouvait maintenant agir, car il n'était pas encore attaché et libre de ses mouvements.

« Je ne vais pas vous laisser me torturer encore ! Laissez-moi partir ! » lança-t-il à la recherche d'une arme plus efficace que son scalpel. Il devait sortir d'ici à tout prix et commença à se déplacer vers la porte qu'il apercevait.

La drogue, loin de lui faire voir des éléphants roses en train de danser, lui faisait vivre un cauchemar éveillé sans qu'il s'en rende compte. Tout avait l'air plus réel que d'habitude. Les couleurs étaient plus vives, les sons plus forts, la lumière agressive et la douleur lui semblait amplifiée, presque insupportable.

« Zander… Calme-toi, s'il te plaît. Personne ne te veut de mal ici. Tu es en sécurité. » fit doucement son IA.

Le pilote se retourna brusquement à la recherche de cette deuxième personne qu'il ne voyait pas. Où se cachait-elle ? Où l'avait-on emmené ? Que comptaient-ils lui faire ? Des expériences ? De la torture plus élaborée ? Il s'en fichait. Il n'avait pas l'intention de rester pour le découvrir.

« Nadja, on lui a administré de puissants hallucinogènes, mais je ne peux prédire les effets exacts, ni la durée pour l'instant. Au vu de son comportement actuel, il va peut-être falloir prendre des mesures drastiques comme restreindre ses mouvements ou le mettre sous sédatif pour le garder sous contrôle jusqu'à ce que la drogue se dissipe. Cela vaudra mieux pour tout le monde. Quoi qu'il en soit, il va falloir le surveiller étroitement une fois que tu l'auras neutralisé en douceur. » lui dit Stella via l'implant.

Zander manœuvrait, discrètement pensait-il, pour pouvoir atteindre le sas qu'il avait repéré. Avec un peu de chance, il pourrait l'atteindre et sortir sans encombre. Tout allait dépendre de son ennemi. Une fois dehors, il devrait improviser, mais ce ne serait pas la première fois.

En entendant la voix de Stella monter dans les tours, Nadja releva la tête qu’elle avait enfouie dans ses mains. Évidement, il fallait qu’il fasse une réaction agressive aux drogues. C’était le pompon. Elle regarda le scalpel que le pilote tenait en main et se souvint des paroles d’un instructeur sur les mauvaises réaction aux drogues.

« - Vous ne savez jamais comment va réagir le type. Alors restez au maximum hors de portée et neutralisez le vite et bien. Souvenez vous que c’est un camarade, pas un ennemi, mais que vous devez protéger le reste de votre unité, et vous même. »

Elle dégaina son arme et sélectionna les munitions non létale. Mais au moment de l’envoyer au pays des rêves, l’ex marine ne put se résoudre tirer sur son propre mari. Sans danger ou pas, le geste était décidément trop violent.

Avec un soupir, Nadja rangea donc son arme et franchit le seuil de la porte, une boule au ventre.

« - Stella. Téléporte le dans le sas et coupe l’arrivée d’oxygène. Je le ramènerai ici quand il sera dans les pommes.»

Avec l’IA qui surveillait ses rythmes vitaux, il ne risquait rien d’autre qu’une solide migraine… et elle pourrait continuer a se regarder dans le miroir.

Quelques minutes plus tard, elle ramenait le corps inanimé du pilote dans ses bras et le sangla sur le lit de l’infirmerie avant de lui mettre un masque à oxygène sur le nez.

« - Je suis désolée, chéri. Je devais te protéger et j’ai loupé mon coup. »

Elle sentait la colère monter en elle et se connaissait assez pour savoir que lorsqu’elle serait vraiment la, il n’y aurait pas grand-chose pour l’arreter.

« - Stella, Emy est prête ?
- Affirmatif et chargée a 100 %.
- Bien. A la prochaine descente, on va jouer avec mes règles. »

Entendre Zander tambouriner à la porte du sas fut une épreuve de plus pour Nadja. Intellectuellement, elle savait qu’il ne risquait rien et que c’était al méthode la plus « douce » pour le calmer.

Mais allez dire ça à son estomac…

Une fois le corps inanimé de son mari déposé à l’infirmerie, elle passa dans le salon pour boire une bière en quelques gorgée avides. Ça n’était pas le moment de se saouler mais elle avait bien besoin d’un remontant.

Il fallut plusieurs heures à Zander pour reprendre connaissance et évacuer la drogue de son système. Incapable de trouver le sommeil, elle étudia le plan de la ville fournit par Stella pour le mémoriser. Sa colère était bien là, comme prévue, vielle amie sur qui elle pouvait compter. Pour l’instant, l’ex marine la tenait sous contrôle avec la promesse de la laisser s’exprimer plus tard comme elle le méritait.

En entendant les premiers mots cohérents, elle faillit se précipiter mais attendit que Stella lui confirme la disparition de la drogue du corps de Zander avant d’aller à ses coté et de le détacher. Elle l’aida pour marcher jusqu’au toilette et attendit qu’il se remette un peu pour lui donner un verre d’eau.

« - T’as été sacrément secoué. Repose-toi un peu. »

L’inconscience du pilote leur avait permis d’immobiliser ses cotes. Avec les bons soins du vaisseau, il ne faudrait pas longtemps pour qu’il se remette.

« - Tu te souviens de quoi, demanda-t-elle d’une voix un rien embarrassée. »