Passage de témoin

Alors que Jimmy écoutait les échanges puis les ordres de Nadja et sa proposition de Jimmy à la tête de l'équipe il hocha la tête, elle avait compris.

Visiblement Mei n'avait pas comprit la raison de cette organisation.
Elle voyait le côté hiérarchique, biensûr que Jimmy aurait prit la place de Nadja bien que ça ne intéressait pas du tout.
Mais son grade l'aurait obligé.
Il regarda Nadja puis Mei.

"Mei, tu ne comprends pas, Nadja a besoin de quelqu'un au sol qui dirige l'équipe et qui ait des connaissances en technologie des Anciens suffisamment avancées pour couper l'arme et Max pour pouvoir trouver ou fabriquer des pièces pour réparer efficacement l'Achilles. J'ai beaucoup travaillé sur ce sujet lors de nos différentes missions, la mission n'est pas une mission d'attaque ou de défense, c'est de l'infiltration, neutralisation technologique et exfiltration."

Puis il fit informer l'équipe par des soldats en faction.

Il s'éclipsa lui-même à son tour pour s'équiper et prendre le matériel adapté à cette mission particulière avant de rejoindre la salle des anneaux de transport.

En entendant la réponse de Jimmy, Mei fit demi-retour et revint se planter devant lui, piquée au vif. Dire qu'elle n'appréciait pas sa réponse était un euphémisme. Le simple fait qu'il la tutoie et l'appelle par son prénom sur la passerelle en pleine situation de crise l'horripilait au plus haut point. Mais en plus, il semblait être passé à côté d'un point essentiel concernant sa remarque et elle n'était guère convaincue par ses explications.

« Le lieutenant Cook est une marine. Les opérations au sol, quelles qu'elles soient, sont sa spécialité, même si elle peut parfois manquer de subtilité. Vous n'avez ni son expertise ni même son expérience dans ce domaine, comme elle n'a pas les vôtres en matière de pilotage et de connaissances techniques de l'Achilles. Et cette équipe manque cruellement d'un soldat de ce genre pour assurer nos arrières et nous couvrir en cas de combat. Alors excusez-moi de me soucier de notre sécurité et de vouloir augmenter nos chances de survie en cas de présence ennemi en voulant avoir la spécialiste dans ce domaine avec nous. Cela me semble d'autant plus vital que nous serons dans l'incapacité de contacter le vaisseau pour demander des renforts si les choses tournent mal. Parce que ce n'est pas moi qui pourrais remplacer un tel soldat pour protéger et défendre le groupe, surtout s'il y a des blessés à gérer. Ce n'est pas mon travail ni mon domaine de prédilection. » rétorqua-t-elle à voix basse.

Loin s'en fallait, même avec l'entraînement supplémentaire auquel la soumettait Nadja. Elle restait une piètre tireuse, malgré une légère amélioration.

« Et au fait, comment comptez-vous justement avertir le Lieutenant Cook qu'elle peut nous ramener à bord lorsque nous aurons accompli notre mission si nous ne pouvons pas communiquer avec le vaisseau ? Mais vous avez raison, capitaine. Je ne suis qu'une pauvre médecin militaire qui ne comprend rien à rien. Je vais donc retourner faire ce qui est attendu de tout bon soldat : la boucler et obéir aux ordres, qu'ils lui plaisent ou non, comme à chaque mission. » finit-elle froidement avant de le planter là.

Elle se retint de lui dire qu'elle espérait ne pas finir encore une fois à l'infirmerie, car elle n'avait pas oublié que c'était au cours d'une mission d'infiltration en territoire ennemi sous ses ordres qu'elle avait failli y passer lors de sa première sortie en tant que membre de l'Achilles. Et en ce qui la concernait, au sol, il n'y a avait pas meilleure que Nadja pour mener une mission à bien tout en protégeant tout le monde, peu importait le contexte. Elle l'avait vu à l'oeuvre et savait jusqu'à quelle extrémités elle était capable d'aller pour parvenir à ses fins, aussi effrayant que cela puisse parfois être, et elle avait une totale confiance en elle.

Elle quitta la passerelle sans un mot, le visage fermé. Elle alla récupérer son équipement à l'infirmerie et y donna rapidement ses instructions avant d'aller chercher un gilet de protection, un casque, son beretta et deux chargeurs supplémentaire, ainsi que le P90 qu'on lui tendait, mais de très mauvaise grâce, à l'armurerie. Elle rejoignit ensuite la salle des anneaux, dans laquelle elle attendit le départ en silence.

Et voilà, tout le monde était parti. Et son cul était rivé sur un fauteuil, ce qu’elle avait toujours détesté par-dessus tout.

*Ces fesses, Nadja, ces fesses. Tu es capitaine à présent, tu peux plus jurer comme si tu venais du trou du c… d’un coin perdu de la galaxie. Et plus de café non plus. Du thé, Earl Grey dans une tasse en porcelaine, avec le petit doigt levé… Oh bordel, que quelqu’un me file un flingue ! *

Du doigt, elle frôla le symbole de son nouveau grade. Mais qu’est ce qui lui avait pris d’accepter ? Elle n’avait rien d’un officier commandant. Sa place était sur le terrain. Et apparemment, Mei était d’accord avec elle. Son échange avec le CAG était resté discret mais les regards qu'elle lançait étaient significatifs.  Oui, il fallait qu'elle discute avec Bolger à leur retour de mission pour éclaircir leur champ d'action respectif s'ils voulaient que ca fonctionne correctement.

Elle observa les techniciens en train de mettre en place le système de morse à base de lumière. Déjà que la moitié du vaisseau lui paraissaient obsolètes. Là, on nageait en plein moyen âge.

Dans un coin de l’écran, les chiffres d’altitudes s’égrenaient doucement. Tout était prêt pour sauver el vaisseau, grâce au lieutenant Mac Loyd mais il leur fallait du matériel qu’ils ne trouveraient que sur la planète… avec de la chance.

« - Des nouvelles de l’expédition en surface ?
- Ils ne sont parti que depuis trois minutes, madame.
- Oui bon ca va… »

L’attente allait être très longue.

Nadja avait abandonné le siège de commandement. Elle allait et venait sur la passerelle, jetait des regards sur des écrans au hasard, n’y comprenait rien et reprenait son manégé. Elle savait pertinemment qu’elle communiquait son stress au personnel mais c’était ca ou se mettre à hurler dans les cinq minutes.

Finalement, quelqu’un retrouva le capitaine, mais les nouvelles n’était pas très bonne mais au moins était-elle en vie. Ensuite il l’informa que plusieurs chasseurs avaient été remis en fonction. Enfin une bonne nouvelle. Mais bien sur, le karma vint mettre son grain de sel.

« - Faites décoller deux chasseurs en protection. Qu’ils se servent de l’Achille comme d’un bouclier autant qu’ils le pourront. Il va y avoir d’autres menaces dans les heures à venir et nous avons besoin de couverture ainsi que d’yeux à l’extérieur. »

En espérant qu’ils ne se fassent pas encore toucher par ce rayon EMP. Mais elle n’avait pour l’instant aucun contrôle la dessus.

Ces ordres donnés, elle se rapprocha de Barry pour lui souffler quelques mots.

« - Faites préparer un troisième chasseur avec un missiles nucléaire et les coordonnées de ce canon EMP. Et oui, je sais que nous avons une équipe sur zone. C’est une assurance, pas un ordre de lancement. Nom de code : Vulcain»

Si un nouveau tir frappait l’Achille, ils ne s’en remettraient sans doute pas. Sans nouvelles de l’équipe au sol au moment ou il faudrait redémarrer les moteurs, il lui faudrait faire un choix entre la sécurité du vaisseau et celle de ces amis. Et le choix était simple en terme d’enjeu mais bien plus compliqué émotionnellement. Espérons qu’elle n’ait pas à le faire.

Un sourire de prédateur s’afficha sur le visage de l’ex marine quand les deux chasseurs décollèrent puis abattirent le débris qui venait dans leur direction. Ils n’étaient plus totalement sans défense.

La suite fut finalement moins ennuyeuse qu’elle ne l’avait craint. Etant au centre de tout, on venait lui poser beaucoup de questions. Le plus grand défi était de ne pas envoyer paitre les plus idiotes. La chute continuait pour l’instant et aucunes nouvelles de l’équipe au sol pour l’instant ne leur était arrivées.
Finalement, une autre info lui parvint et la fit réfléchir.

« - Ni l’un ni l’autre. Que nos ennemis nous croient infirme le plus longtemps possible. Tant que nos chasseurs peuvent nous offrir une couverture, restons-en la. »

Elle désigna le compteur du doigts.

« - Si je me souviens plus des quelques explications de mécanique orbitale que j’ai pu recevoir, nous ne risquons pas grand-chose tant que nous n’aurons pas passé en dessous des deux cents kilomètres. Fixons-nous trois cents comme limite. Si nous tombons en dessous, vous activerez les moteurs pour nous placer sur une orbite au moins, nous extraire du puit de gravité si nous avons assez de jus. Pour l’instant, économisions nos réserves au maximum. Essayez de remettre en fonction les communicateurs. Au moins à courte portée avec nos chasseurs. »

Plusieurs plans lui tournaient dans la tête, certain complètement fou ou désespérés. Mais au moins ne se sentait-elle plus impuissante ou inutile.

Satisfaite de comment les choses évoluaient, Nadja serra les dents en voyant la fusée de détresse. Evidemment tout ne pouvait pas être aussi simple.

« - Equipe Bleue et équipe Or, rejoignez-moi en salle de téléportation avec votre paquetage dans trois minutes, ordonna-t-elle. »

Deux groupes de huit soldats armés jusqu’aux dents et entrainés par ses soins. De quoi capturer un petit pays terrien.

« - Barry faites décoller le chasseur de l’opération Vulcain. Si vous n’avez par de nouvelles d’ici quinze minutes, vous déclencherez l’opération et mettrez les gaz ici. La survie du vaisseau passe avant tout. Je testerai les communications une fois en bas, mais ne comptons pas trop dessus. Si j’envoie une fusée verte, cela signifiera que tout va bien. Si elle est rouge, vous nous ramenez à bord et ouvrez le feu. Compris ?
- Vert, ok. Rouge, on fait sauter. Compris madame.
- Parfait. Bonne chance. »

En rentrant dans l’armurerie, elle regretta que son armure ne soit pas réparée. Mais il y avait eu d’autres priorités. Elle vissa soigneusement un chapeau sur sa tête et s’équipa d’un pistolet automatique, d’un P90 et d’une machette, ainsi qu’un gilet pare-balle. C’était vraiment le moyen âge ! L’ex marine ressortie et rejoignit ses hommes qui l’attendaient, prêt à en découdre.

« - Quatre des nôtres sont au sol et ont des soucis. Ils étaient partis chercher des informations sur cette planète, il semble qu’ils aient trouvé des problèmes au lieu de ça. Notre priorité est de les récupérer sans casse. Tout le reste est secondaire.
- Excusez-moi, lieutenant mais pourquoi ne pas les téléporter directement à bord ?
- Parce que je ne veux pas risquer un autre tir qui nous laisserai à nouveau infirme. Nous sommes trop près de la planète pour nous en sortir. D’autres questions ? »

Le silence se fit et elle termina son briefing d’une voix assurée.

« - L’équipe Or sera en soutien. Prenez une position surélevée et couvrez-nous. Equipe bleue avec moi nous irons au contact. En cas de contacts hostiles, souvenez vous que la survie des nôtres est prioritaire. Donc frappez vite et fort. Et vu qu’il y a trois officiers parmi eux, ce sont eux qui payent ce soir au bar ! »

Un concert de grognement approbateur accueillit ses dernières paroles alors que le petits groupe disparaissait du pont de l’Achille

Flanquée de Mei qui tempêtait Nadja se retrouva sur la passerelle ou la situation était plus que critique.

« - Qu’un des C101 prennent la direction de la Terre sans attendre, commanda-t-elle. »

Plus vite les secours seraient en route, mieux ca serait.

La question de Mei la fouetta au sang et l’ex marine se retourna d’un bloc avant de répondre d’un ton sec.

« - Fais ce que t’as à faire, je ferai de même ! »

Sans plus s’occuper de l’asiatique, elle se rapprocha du navigateur et lui posa la main sur l’épaule.

« - Ralentissez notre chute tant que vous pourrez. Chaque seconde gagnée permettra de sauver des membres d’équipages. Lancez la procédure d’évacuation !»

Celle-ci avait été prévue au tout début de leur chute et elle avait attendue jusqu’au dernier moment, peut-être même trop, pour la mettre en œuvre. Ils ne pourraient sans doute pas tous quitte le bord à présent et elle avait déjà décidée de rester jusqu’au bout. On ne se refait pas.

Une course s’engagea entre le nombre de membre d’équipage encore présent sur le vaisseau et l’altitude qui se cassait la figure à toute vitesse. Ne pouvant guère aider, elle s’était réinstallée dans le fauteuil de commandement et attendait, aussi impassible qu’elle le pouvait. Machinalement, elle jouait avec son bracelet en pensant à son mari. Il devait se la couler douce dans son infirmerie en ce moment.

Et soudain, un champ de force incroyablement puissant engloba l’Achille et le repoussa en orbite. La passerelle resta silencieuse pendant toute la montée puis une fois confirmée, Nadja rugit comme un lion un cri de victoire et des applaudissements fusèrent un peu partout.

« - Merci à tous, soupira-t-elle. Beau boulot. »