[Mission 1] À la morgue de chez nous

Kaylee était en train d'effectuer un examen minutieux du corps quand l'annonce du confinement arriva. Elle continua sa tâche, s'attendant à être contactée pour être informée de la suite, mais rien ne se produisit. Elle se redressa vivement à l'annonce de la convocation de tout le personnel à l'infirmerie pour un soi-disant check-up d'arrivée.

Mais de quoi Blesswood parlait-il ? Ce "check-up" n'existait pas. Cela n'avait même jamais été envisagé en raison du bilan de santé draconien obligatoire dans les jours précédant le départ. Elle pouvait aisément imaginer le pourquoi d'un tel examen, mais une telle mesure était encore prématurée selon elle. Et pourquoi était-ce le responsable scientifique qui s'occupait de ça ? Et surtout pourquoi personne ne l'avait-elle contacté alors que c'était son domaine ? Ce n'était pas comme si elle était injoignable ou introuvable. Et quand bien même, il y avait des médecins disponibles et compétents pour s'en charger. Elle enleva ses gants et toucha son oreillette.

« Beckett à s'Fallen et Blesswood. Veuillez passer sur le canal des responsables, d'une voix glaciale. Qui a ordonné un check-up du personnel sans prendre la peine de me demander mon avis ? Je suis la responsable médicale et mener ce genre d'examens relève de mon autorité. Nous n'avons même pas encore la confirmation que nous avons bien affaire à un symbiote, goa'uld ou autre, et tout ceci pourrait être totalement injustifié. Oh, et félicitations ! Vous ordonnez le confinement du personnel pour l'annuler quelques minutes plus tard en convoquant l'ensemble de ce même personnel à l'infirmerie, sans la moindre organisation. Belle façon de générer angoisse et confusion et de donner l'occasion au symbiote, s'il y en a bien un, de changer d'hôte à sa guise et ainsi d'éviter d'être repéré… Si vous m'aviez contactée comme vous auriez DÛ le faire, vous auriez appris qu'il existe des protocoles spécifiques pour ce genre de situation. Je les aurais activés si nécessaire, parce que c'est MON travail. »

Le confinement aurait même joué en leur faveur. À ses yeux, tout cela était la preuve flagrante d'un amateurisme effrayant. Heureusement qu'il ne s'agissait pas d'une éclosion épidémique causée par un virus inconnu, sinon elle n'aurait vraiment pas donné cher de leur peau.

« M. Hayes et moi-même réaliserons les tests prévus par le protocole à la morgue où nous nous trouvons, si jamais cela vous intéresse. Beckett, terminé. » fit-elle, polaire, avant de couper la communication.

Même si elle décidait d'intervenir maintenant, comment rattraper la situation sans passer pour de parfaits incompétents ? Cela passerait nécessairement par une reprise en main, ce qui risquait fort d'en froisser plus d'un. Malgré tout, elle fulminait. À quoi bon embaucher des spécialistes si c'était pour ne pas faire appel à eux ? Elle n'était pas venue ici pour être reléguée au second plan et écartée des décisions, surtout relevant de son ressort, en cas de crise. Mais elle règlerait ça plus tard. Elle devait s'occuper de cette autopsie pour obtenir des réponses. Mais avant cela…

« M. Hayes, préparez deux kits de prise de sang. Vu que nous avons tout le nécessaire, nous allons faire les analyses ici-même pour confirmer que nous ne sommes pas devenus des hôtes sans le savoir. Pourriez-vous également surveiller la progression de ces… "check-ups" ? »

Elle restait une professionnelle jusqu'au bout des ongles et elle ne pouvait fermer les yeux sur ce qu'il se passait dans son infirmerie. Puis le personnel ne manquerait pas de se tourner vers elle en cas de pépin, alors autant garder un œil sur la situation.

« Un problème ? » demanda-t-elle en entendant le soupir de l'Hébridien qui se levait et qui secoua négativement la tête. Peut-être devrait-elle saisir l'occasion pour discuter avec lui et tâcher de découvrir ce qu'il lui arrivait.

Zander surveillait les écrans, mais il avait du mal à rester concentré et à ne pas piquer du nez. Heureusement que Kaylee lui demandait parfois un coup de main, ce qui lui évitait de s'endormir pour de bon. Quand il entendit l'annonce du confinement, il alla chercher dans la base de données le protocole associé et découvrit que le personnel médical de service en était dispensé et devait suivre les directives du responsable médical. Cette dernière ne lui disant rien, il resta où il se trouvait.

Il sursauta au mouvement brusque de Beckett suite à la convocation du personnel à l'infirmerie. Deux choses étaient très claires à ses yeux : elle n'était pas au courant et elle était contrariée. Il aurait aimé être ailleurs lorsqu'elle passa son appel radio et se fit tout petit, même si elle n'était pas aussi terrifiante que Mei. Il en profita pour chercher le protocole auquel elle faisait référence et le lire rapidement avant d'être interrompu par sa propre radio.

Il répondit brièvement avant de reporter son attention sur la médecin qui lui parlait. Il ne put retenir un soupir en se levant. Une énième prise de sang. Il avait fait toute une batterie de tests et d'examens il y avait moins de 24 heures pour se plier au protocole de la Terre avant le départ.

« - Ce n'est rien. Juste l'idée de devoir encore faire des examens médicaux ne me ravit pas.
- Je peux comprendre. Mais ça devrait être rapide.
- Jessie m'a aussi contacté pendant que vous étiez en communication et il m'a dit que leur plan était de faire passer une IRM à tout le personnel.
- Une IRM ?! fit-elle, consternée, avant de lever les yeux au ciel et de secouer la tête. Voilà ce qu'il se passe quand des personnes prennent des décisions dans des domaines auxquels ils ne connaissent strictement rien sans contacter d'expert... Une perte de temps fou qui aurait pu être évitée.
- J'aurais plus vite fait avec un petit scanner médical des Anciens qu'eux, s'il y en avait un… » dit-il.

Ou même avec son PDA, ce qu'il ne précisa pas. Cela allait effectivement leur prendre des jours et des jours, vu qu'ils ne pouvaient examiner qu'un seul patient à la fois avec un examen d'au moins trente minutes. Bien loin des quelques heures que nécessitait le protocole idoine pour dépister l'ensemble du personnel…  Beckett lui lança un regard courroucé et il s'empressa d'aller chercher ce qu'elle avait demandé.

Il déposa le tout sur le comptoir avant de s'asseoir en réprimant un bâillement. Les techniques et le matériel terriens lui semblaient tellement obsolètes… Pourquoi n'y avait-il pas de matériel plus avancé depuis le temps avec tous les alliés extraterrestres qu'ils avaient ? Il s'apprêtait à en faire la remarque, mais il s'interrompit, surpris par sa cheffe qui lui passait un brassard de tensiomètre autour du bras et un oxymètre de pouls sur le doigt.

« J'ai une question à vous poser. Souffrez-vous d'insomnies ou de tout autre trouble du sommeil ? Il n'y a rien de tel dans votre dossier, mais vous semblez épuisé. » demanda-t-elle.

Donc elle avait remarqué. En même temps, cela devait être difficile de ne pas le remarquer. Il ne tenait toutefois pas particulièrement à ce que les gens en sachent la raison, mais il ne pouvait pas s'abstenir de se taire devant sa supérieure.

« - C'est le médecin qui demande ou c'est juste pour faire la conversation ? tenta-t-il.
- Le médecin. Quoi que vous me disiez, cela restera confidentiel. Il est évident que vous luttez pour ne pas vous endormir et que vous êtes également moins attentif et moins réactif. En somme, vous vous mettez en danger et vous mettez aussi en danger les patients et la base. Il est probablement possible de remédier au problème, mais pour cela, il faut en connaître la cause.
- Oh, elle est parfaitement identifiée et ce n'est pas de l'insomnie, je vous l'assure. C'est juste… un bébé de trois mois à la maison.
- Oh ! Je ne savais pas. Cela explique tout en effet… Dois-je vous présenter mes félicitations ou mes condoléances ? dit-elle avec un sourire.
- Là tout de suite, je vais prendre les condoléances pour mon sommeil, plaisanta-t-il.
- J'imagine que votre épouse n'a pas dû être ravie de vous voir partir alors.
- C'est un euphémisme… Elle a menacé de venir me chercher par la peau du cou si je ne rentrais pas en temps et en heure, entre autres choses, répondit-il légèrement amusé.
- Et je ne doute pas une seule seconde qu'elle le fera. Et voilà, c'est terminé. » fit-elle en posant une boule de coton et un sparadrap au creux de son coude.

Elle se leva et entra les informations dans le système avant de s'asseoir sur le tabouret voisin pour qu'il puisse faire son travail.

« - Je vais vous mettre en service réduit pendant quelques jours pour vous permettre de récupérer un peu. Et n'hésitez pas à venir me voir si vous avez des problèmes pour retrouver un rythme de sommeil normal, lui dit-elle pendant qu'il lui faisait la prise de sang.
Merci. Et j'ai terminé. » répondit-il.

Il saisit à son tour ce qu'il fallait sur l'ordinateur puis observa Beckett lancer les analyses dans la machine puis reprendre l'autopsie tandis qu'il se rasseyait à son poste. Cependant, une inquiétude tournait en boucle dans sa tête et il ne pouvait pas vraiment en parler à quelqu'un d'autre, du moins sans risquer que cela soit répété.

« - Je peux vous parler d'autre chose toujours en tant que médecin ?
- Bien sûr.
- Cette histoire de symbiote m'inquiète un peu. Vous n'ignorez sans doute pas que j'en porte un, même s'il est catatonique depuis un bon bout de temps.
- Ah oui, le symbiote des Anciens de Prométhée, si je ne m'abuse.
- Exact. Je ne peux m'empêcher de me demander comment il cohabiterait avec un symbiote goa'uld. Les scientifiques hébridiens ont spéculé sur le sujet. Soit cela ne changera rien et le symbiote prendra possession de moi, soit le symbiote de Prométhée interférera d'une façon ou d'une autre avec le processus et là tout est possible, ou il y aura une réaction de rejet du goa'uld, ou du symbiote de Prométhée, avec des conséquences allant de rien du tout à ma mort…
- Toutes ces hypothèses sont plausibles effectivement, fit-elle après quelques secondes de réflexion. Mais il n'y aucun moyen laquelle s'avérera exacte avant que cela se produise, ce que je ne souhaite en aucun cas. Tâchez de ne pas trop vous inquiéter pour l'instant et concentrez-vous sur notre travail.
- Oui, madame. Mais je doute que cela m'aide à bien dormir la nuit. » conclut-il alors qu'elle entrait littéralement dans le vif du sujet avec l'incision en Y, ce qui le fascina et le répugna à la fois.