Double Face

Dire que Nadira avait mauvaise mine serait rester très largement en deçà de la vérité. Elle était d’une pâleur de vampire, ces cheveux avaient été quasiment rasés et des machines ronflaient sourdement autour d’elle. Quant aux valises qu’elle avait sous les yeux, elle lui aurait valu un supplément salé auprès de n’importe quelle compagnie aérienne.

Alors que Noa se penchait vers l’égyptienne, celle-ci ouvrit les yeux et un éclair lumineux le fit sursauter.

« - Monsieur Pakeha, ravi de vous rencontrer, fit une voix monocorde et métallique qui ne ressemblait que de loin a celle de la jeune femme. Je suis Xinan. Otez moi d’un doute, c’est bien  Pakeha ? Je n’accède encore à la mémoire de madame Garett que partiellement. »

Le sourire aurait pu ressembler a celui de Nadira si les yeux n’avaient pas reflétés une conscience ancienne et inhumaine.

« - Je suppose que vous souhaitez lui parler ? Elle est encore très faible, faite vite. »

Il ferme les yeux et Nadira les rouvrit. Aussitôt elle leva la main pour prendre celle de son ami, ce qui lui valut une grimace de douleur.

« - Salut. T’as une mine affreuse. Tu devrais voir un médecin. Je suppose que si tu es la, c’est qu’on a gagné ? Tu as pu faire sauter tout ce bazar ? Tout le monde va bien ? »

Elle plaisantait mais Xinan n’avait pas menti. L’épuisement était aisément discernable derrière les paroles légères.

Dernière édition par Nadira Garett le Lun 20 Mar 2017 - 17:51, édité 1 fois

Les yeux de l'égyptienne s'ouvrir et se mirent à fixer Noa, mais les expressions faciales et la voix qui lui parla n'avaient rien à voir avec celles de Nadira. Le néo-zélandais opéra un léger mouvement de recul et lâcha la main de son amie, surprit par la lumière qui traversa le regard de la jeune femme.
Il fronça les sourcils. Le symbiote qui se présenta comme étant Xinan connaissait déjà son nom. L'idée qu'il puisse avoir accès à tous les souvenirs, les pensées et l'intimité de Nadira lui fila la nausée. Dès les premiers mots prononcés par le symbiote, Noa ressentit comme une aversion pour lui. Son visage se ferma et il fronça les sourcils tandis que son regard se durci.
Il n'aurait pas du réagir de la sorte, c'était stupide. C'était bien ce Tokra, ce symbiote qui avait offert une seconde chance à son amie et lui avait ainsi sauvé la vie. Il aurait dû être reconnaissant...
Xinan enchaîna et expliqua que Nadira était très faible et qu'il ne lui permettrait pas de discuter longtemps.

Les yeux de l'égyptienne se fermèrent et les traits de son visage changèrent. Lorsqu'elle ouvrit de nouveau les yeux, Noa reconnu enfin Nadira. Elle lui attrapa la main et le jeune homme se rapprocha. Les mots qu'elle lui sortit étaient typiques de la jeune femme et Noa sourit. Bien qu'elle usait de son humour habituel, la fatigue se lisait dans tout son corps.

" Oui, on a réussi. Tout le monde est rentré.. à part.... à part Parker, mais tu le sais... " dit-il, hésitant.

Il se mordit la lèvre inférieur avant de continuer.
" Et toi... je .... c'était la seule solution. Je suis désolé que tu n'ai pas eu ton mot à dire... "

Noa serra la main de son amie. Malgré la difficulté de ce choix, il le referait sans hésiter une seconde. Au moins était-elle vivante.

Alors qu’il la rassurait sur l’état de santé de ces coéquipiers, Nadira observait le néo-zélandais. Les derniers événements l’avaient visiblement éprouvé, physiquement et moralement et il semblait épuisé.

Le rappel de la mort de Parker la fit soupirer. Elle ne l’avait pas assez connu à son goût et sa mort avait été brutale. L’image du militaire se détendant après l’injection qu’elle lui avait fait lui revint en tête et elle ravala des larmes amères. Quel fiasco !

Noa lui présenta des excuses pour ce qui lui était arrivé et elle lui sourit.

« - Tu as fait ce qu’il fallait pour qu’il y est de l’espoir. Je peux difficilement te le reprocher. Et puis regarde... »

Elle souleva légèrement son drap pour lui permettre d’apercevoir un artefact tok’ra posé sur son ventre

« - Je vais avoir un foie tout neuf. T’imagines tous les excès que je vais pouvoir faire ? Comme si j’avais à nouveau vingt ans. Dommage qu’ils aient pu sauver mes reins... »

Elle du se rendre compte du sinistre de ces paroles, car elle se mordit les lèvres avant de reprendre, les yeux rivés à ceux du barbu.

« - J’ai quelque chose à te demander. T’es pas obligé d’accepter, je sais que ça sera pas facile. Tu pourrais aller voir mes parents ? Je veux pas qu’ils apprennent ça par lettre, tu comprends ? Je ne suis pas sûre qu’Aeryn fasse le déplacement, et tu es celui qui me connaît le mieux de toute façon. »

Un instant, un court instant, le contrôle qu'exerçait Nadira sur elle même craqua. Son visage refléta l’horreur de sa situation et sa profonde détresse. Puis son visage redevint serein et souriant.

"- J'espère revenir sur Terre, mais c’est tout sauf certain. Et même dans ce cas, comment veux tu que je retourne les voir, avec cette chose en moi…"

Le souvenir de sa dernière visite au Caire lui revint en mémoire. Tout cela paraissait si vieux, si futile.

"- Paul m’a poussé à reprendre contact avec eux, il y a quelques mois. J’étais heureuse de les revoir, mais leur mentir sur ce que nous faisons était presque insupportable. Alors tu imagines maintenant. La simple question : comment vas tu, va m'être insupportable."

Elle tenait toujours la main du néo-zélandais et la serrait inconsciemment. Elle inspira profondément, rassemblant son courage pour continuer.

"- Nadira Garett est morte dans ce crash, reprit-elle. Je ne sais pas encore bien que je suis aujourd’hui, mais j’ai plus de pièce de rechange que d’origine dans le corps, à présent. Sans parler de nouvelles capacités dont je n’ai pas encore vraiment conscience. Qui sais, je vais peut être devenir un super héros parcourant la galaxie pour défendre la veuve et l’orphelin."

Le rire sonnait un peu faux et la peau café de la jeune femme était couverte de chair de poule. Il y eut petit temps d'arrêt avant qu’elle ne reprenne la parole, d’un ton bien plus assuré.

"- Navré, monsieur Pakeha. Madame Garett est épuisée, physiquement et mentalement. Elle vit assez mal notre symbiose pour l’instant. Vous savez sans doute à quel point elle est indépendante."

S’il y a bien une chose que Xinan avait appris au fil des ans, c’est que la plupart des gens ne comprenaient pas comment fonctionnaient la symbiose Tok’ra. Il sourit à son visiteur et approuva.

“- Elle vous a entendu. Je doute qu’elle change d’avis, mais nous vous le ferons savoir le cas échéant.”

Il sentait le malaise de l’homme en face de lui et à quel point cela pènait son hôte. Ca n’était jamais facile pour les proches de voir changer quelqu’un aussi drastiquement, avec toujours ce doute enraciné que le symbiote soit toujours aux commandes et mente sur sa prétendu bienveillance. C’était usant, à la longue.

Alors que les médecin du SDT venait l’ausculter, son garde chiourne revint et engagea la conversation avec Noa. Un homme étrange, que Nadira n'appréciait que modérément, mais qui avait plu à Xinan. Un soldat, comme lui. Droit et franc. Ses avertissements n’étaient guère utile, par contre, il était déjà bien conscient, via Nadira, de la xénophobie des terriens. Ces gens avaient peur de tout, y compris d’eux mêmes. C’était un miracle qu’il ne se soient pas encore fait exploser… Enfin cela pouvait encore arriver si ces enfants continuaient à jouer avec des bâtons de dynamite.

L’équipe de soin était professionnel mais il sentait leur gêne. Nadira avait été leur responsable, et pour certain leur amie. Elle se souvenait de leur soucis, de leur joie, et, la plupart du temps, de leurs escapades amoureuses. “Ce qui s’est passé à Vegas reste à Vegas” lui souffla soudain la mémoire de son hôte. Mais dans quoi s’était-il embarqué?

Noa ne pu s'empêcher de réprimer un frisson lorsque le symbiote lui répondit. Et il fallait qu'il le croit sur parole ?
Hunter arriva et ce fut le moment pour Noa de s'éclipser, laissant les médecins exécuter leur travail en paix. Le militaire le guida à travers le dédale des couloirs jusqu'à un endroit qu'il semblait avoir aménagé.
Noa se laissa servir du thé et écouta John d'une oreille alors qu'il plongeait son regard dans la tasse bouillante devant lui. Tout à coup, le néo-zélandais leva la tête comme si quelque chose venait de le piquer.

" "Très bonne santé ?" Non mais vous vous foutez de moi ? Vous avez vu sa tête ? Vous avez vu ses yeux ? Au cas où vous ne vous en êtes pas rendu compte, il y a un serpent dans sa tête et elle est si faible qu'elle n'a pas pu discuté plus de deux minutes. Et puis si vous la connaissiez, vous sauriez que plus elle blague, plus elle veut cacher sa douleur. " lâcha t-il d'une traite avec un regard dur.

Noa tourna alors les yeux et se concentra de nouveau sur son thé. Il battit des paupières puis soupira. Ce n'était pas de la faute de Hunter et sa réaction était aussi puérile qu'inutile.

" Excusez-moi " finit-il par murmurer.

" Normalement un psychologue devrait nous rejoindre d'ici un jour ou deux maximum, quand Nad.. le docteur Garett aura un peu plus récupéré. Il pourra faire une analyse de son cas. " dit Noa.

La suite de la journée passa avec une lenteur atroce. Noa accompagna le diplomate dans ses rencontres avec la Tokras où les discussions étaient aussi longues que soporifiques. Il passa une bonne partie de la soirée dans la pièce où était soignée Nadira. Au début, assis au fond de la pièce à plusieurs mètres du lit, il regardait ses constantes et les aller-retours qui étaient faits dans la pièce, les bras croisés sur son torse. Il n'échangea pas un mot, ni avec elle, ni avec le symbiote. Il voulait qu'elle se repose, qu'elle récupère, rapidement.
Ce ne fut qu'à minuit que Hunter vînt le secouer. Noa s'était assoupi sur sa chaise depuis deux bonnes heures. Il avait le dos et les fesses cassées et ne se fit pas prier lorsque Hunter lui indiqua le chemin de son lit.

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Le lendemain, Noa se réveilla tôt. Il se rendit compte qu'il partageait une chambre avec Hunter. Il avait été tellement épuisé la veille qu'il ne s'en était pas rendu compte. Ce dernier était déjà éveillé. Noa se frotta les yeux.
" J'espère que j'ai pas ronflé ! " lâcha t-il avec une voix rauque.
Il sortit de son sac de couchage en caleçon et commença à enfiler son pantalon.
" Et comment elles sont les douches ici ? " demanda t-il distraitement.
C'est alors qu'il tourna brusquement la tête vers Hunter.

" Et ils ont un petit dej ? " demanda t-il, presque inquiet.
Le néo-zélandais se baissa pour attraper son tee-shirt et l'enfila.

Après une douche et un petit déjeuner rapide, les deux hommes retournèrent au chevet de Nadira.
Noa arbora de nouveau un visage grave lorsqu'il s'approcha de son amie. Il ne s'habituerait décidément jamais à ses cheveux ras et ne pouvait que faire le rapprochement avec ces femmes suivant une chimiothérapie.
Le jeune homme prit délicatement la main de l'égyptienne.

" Nadira ? " murmura t-il.

Jonathan se contenta de sourire distraitement face à l’énervement de Noa. Sa perception des choses était compréhensible, mais à la différence de Noa, Jonathan avait eu le temps de discuter avec quelques membres de la To’kra. Lui parlait de la Garett du passé, alors que Jonathan parlait de la Garett présent.

Même si leurs deux consciences étaient liées, cela ne voulait pas dire que cette épreuve n’allait pas avoir de conséquence. Nadira Garett avait frôlé la mort de très près. Elle s’était attendue à mourir. Et brutalement, on lui donnait une nouvelle vie.

« Vous etes vous demandé comment certaines personnes arrivaient à devenir quelqu’un d’autre ? Changer leur comportement, leurs attitudes et leurs gestes afin d’être une autre personne ? »

Il posa sa tasse sur le côté, avant d’attraper une lame dans son sac.

« Ils tente de comprendre le personnage, le devenir entièrement tout en trouvant cet équilibre, cette limite entre les deux personnalités. Nadira va avoir besoin de trouver cette équilibre… Et ça je le sait d’expérience… »

Pendant un court instant, un court éclat se réveilla dans les yeux de Jonathan. Celui du personnage du criminel qu’il s’était créer, l’homme qui négociait avec ceux les plus dangereux de la planète.

Mais l’éclat disparut, et Jonathan se contenta de sourire. 

« Même s’il n’y a rien dans mes résumés, j’ai vécu trois ans sous couverture, libre à vous d’écouter mes indications, mais elle va avoir besoin de soutient… »

Il se contenta d’accrocher son couteau a sa hanche avant de reprendre sa tasse de thé et terminé sa boisson.
 
 
Jonathan était déjà debout lorsque Noa ouvrit les yeux. Ou plutôt, les poings serrés, supportant le poids de son corps dans une position de pompe. Dormir de manière irrégulière et dans les pires conditions était une véritable nécessitée pour lui. Il se contenta de sourire sans rien dire avant de terminer sa série. Une fois la douche acceptable et le petit déj avalé, le duo retourna en salle de réveil.

Jonathan se contenta de prendre une chaise dans un coin avant de fermer ses yeux.

Ce n’était pas son job de faire la discussion, de toute façon s’ils avaient besoin de lui ils n’avaient qu’à le chercher.

Les analyses furent finalement assez brèves. Ses anciens collègues avaient conscience de sa condition physique défaillante et ne lui imposèrent donc que des examen superficiels. Elle tenta d’engager la conversation mais en fut pour ses frais. A part quelques rares paroles, elle n’eut droit qu’à un mur de silence et des regards lourds de sous-entendu. Elle parvint néanmoins à saisir les résultats préliminaires, ce qui lui confirma à quel point elle était mal en point. Dans des conditions normales, elle ne se serait donné que peu de chance de survie.

Une fois seule, elle s’assoupit rapidement et ses pensées dérivèrent vers ses souvenirs d’enfances au Caire, puis dans une ville inconnue à l’architecture étrange et aérienne. Combien le symbiote avait-il de collection de souvenirs d’enfance? Cinquante, cent ? Les siens ne serait-il bientôt qu’une rangée de plus dans cet étrange bibliothèque? Déprimant…

Des larmes amères coulaient sur ses joues alors qu’elle sombrait dans un sommeil plus profond.

C’est Noa qui la réveilla le lendemain et lui fallut quelques secondes pour se souvenir où elle était et pourquoi. Elle hoqueta puis se reprit et sourit du mieux qu’elle put.

- Qui voilà? Tu sais que les gens du cru on faillit déclencher l’alerte général en croyant à une attaque d’ours, cette nuit ?

Rire lui fit du bien et elle serra la main du Neo-Zelandais avec tendresse.

La veille.

Noa était légèrement sur les nerfs et le sourire de Hunter alors qu'il s'emportait était aussi condescendant que déplacé. Mais le néo-zélandais tenta de se calmer et s'excusa pour ses propos. C'est alors que Hunter se mit à lui parler mais Noa fronça les sourcils, incapable de suivre le raisonnement du militaire. Ce dernier sortit une lame de son sac et joua un moment avec tout en discutant. Noa suivit l'arme des yeux tout en écoutant l'américain. Il comprit enfin le cheminement de pensées de Hunter lorsqu'il lui parla de ses trois ans sous couverture. Ainsi il comparait la possession d'un symbiote à un ... jeu de rôle ? Pas étonnant que Noa ai eu du mal à suivre.
Le militaire accrocha alors la lame à sa hanche. Noa fronça les sourcils encore un peu plus en se demandant finalement s'ils n'avaient pas fait une erreur en envoyant Hunter en tant que représentant du SDT chez les Tokras.

" Faites moi le plaisir de ranger ça immédiatement." lui dit-il sur un ton autoritaire en désignant la lame qui pendant à sa hanche, à la vue de tous. " Notre alliance avec les Tokras est précaire et la survie ainsi que l'avenir de l'un des nôtres en dépend. D'où vous vient cette idée de vous promener avec une lame de la sorte à la vue de tous, ici ? Cet acte n'est pas anodin, il est symbolique, il montre que vous n'avez aucune confiance en eux, que vous vous sentez menacez et que vous êtes près à l'utiliser. Ce n'est définitivement pas le message que nous souhaitons faire passer. Alors rangez ça, et je ne veux plus revoir aucune arme ! " acheva Noa sur un ton froid.

Ce n'était pas la première fois que Noa lui faisait cette réflexion. Il se souvenait d'un repas dans un village himalayen où le militaire avait jugé bon de faire valdinguer sa lame à proximité de leurs hôtes et des enfants. Noa l'avait alors vivement repris. Ce type n'avait donc aucun savoir vivre ou tout du moins aucune jugeote ?

Noa se leva alors et prit congé du militaire.

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Jonathan et Noa était en train de se diriger vers la salle de réveil où se trouvait Nadira. Le militaire prit alors une chaise et ferma les yeux. Noa s'approcha de Nadira et lui prit la main. Le contact réveilla la jeune femme qui sembla déboussolée pendant quelques secondes puis afficha un sourire et lui lança une pique digne de l'égyptienne.
Noa ria en hochant la tête d'un air de dire "mais c'est pas vrai, rien ne t'arrête toi !".
Le jeune homme ravala alors sa prochaine question qui aurait consisté à lui demandé à qui il parlait.

" Comment tu te sens ? Comment tu gères... l'autre ? " demanda Noa alors que son sourire s'effaçait progressivement.
" Est-ce qu'il entend tout ce que je dis là ? " finit-il par demander.
C'était ça qu'il aurait aimé savoir. S'il y avait des zones de flous l'un pour l'autre. Bien sûr, il aurait aimé que leur conversations ne restent qu'entre eux, mais il ne savait pas eu final ce qui était le plus rassurant. Si Nadira était capable de bloquer certaines parties à Xinan, peut-être que ce dernier était capable d'en faire de même ? Etait-il capable de prendre le contrôle de son corps sans que Nad en soit en courant ?

Noa s’inquiétait. Encore. Ca devait ressembler à ça d’avoir un grand frère. Ça n’était pas désagréable, évidemment, bien qu’un peu pesant pour quelqu’un d’indépendant comme Nadira. Elle le rassura d’un sourire qu’elle espérait ne pas être trop sinistre et répondit.

« - Au moins, je n’ai plus mal au crâne. Et on m’a enlevé ce machin de sur mon estomac. Il semble que mon corps soit en bonne voie de guérison, ce qui ne devrait pas autant me surprendre vu la technologie ambiante. C’est a vous dégoutter d’être médecin... »

Visiblement le sujet du symbiote inquiétait le Néo-zélandais.

« - Oui il entend. Comme moi j’entends quand il est aux commandes. C’est assez étrange comme relation, tu sais. Je ne me l’explique pas encore bien, mais je partage ses pensées, comme il partage les miennes… Et si tu savais depuis quand il vit… Il y a tellement de souvenirs que je pourrai passer des semaines entières à les explorer… ou m’y perdre complètement. »

Ses explications n’étaient sans doute pas du genre à rassurer Noa. Après tout, il n’était jamais possible de deviner qui parlait, de l’hôte ou du symbiote.

« - Et maintenant, qu’est ce qui va se passer ? Est-ce que je reste un membre du JPS ? Une terrienne ? Ou est que je serai persona non gratta si je reviens, comme le suggérait Hunter ?

Nadira le rassura sur son état de santé, mais concernant l'état mental, le constat était un peu plus préoccupant. Noa ne pouvait s'empêcher d'imaginer le symbiote, tapis au fond de Nadira, en train de le regarder à travers les yeux de l’égyptienne. Dans cette image peu flatteuse, Xinan était un sourire carnassier. Le jeune homme tourna les yeux une seconde pour chasser cette pensée. Il repensa aux paroles de son amie. Comment ne pas devenir skyzophrène de la sorte ? Comment pouvait-elle gérer cela ? La fin de sa phrase était d'ailleurs loin d'être rassurante. Était-ce ce qui allait se passer ? Allait-elle se perdre ? Perdrait-il son amie ?

C'est alors que Nadira lui posa des questions sur son avenir. Noa fronça les sourcils et jeta un regard par dessus son épaule, foudrayant Hunter du regard. Définitivement, l'envoyer avait été une regrettable erreur. Il aurait du s'y opposer. Quels dégâts avait-il encore fait ?
Noa tourna de nouveau la tête vers Nadira, les sourcils toujours froncés.
" Il t'a dit ça ??! Quel ab... " Noa retînt l'insulte qui lui chatouillait la langue.
" Bien entendu que tu seras toujours la bienvenue ! Tu es toujours terrienne, tu es toujours membre du JPS. " répondit-il.

Noa baissa encore le ton lorsqu'il continua, se penchant encore un peu plus vers Nadira poru s'assurer que personne d'autre n'entende ses paroles.
" Et .. tu es encore plus précieuse pour le SDT à présent... Ton .. lien avec la Tokra fait de toi quelqu'un d'unique et le SDT espère créer une alliance plus forte avec eux grâce à toi... "
Il marqua une pause avant de continuer.

" Le SDT te veux sur le JPS, la Tokra voudra que tu restes dans leurs rangs... Les discussions ont déjà commencées hier, mais ce sera long, très long... Ça prendra surement plusieurs mois le temps que les deux parties tombent d'accord. Tu es au centre de tout cela Nadira... " lui dit-il avec un air très sérieux.

Elle n’aurait pas dû parler de Hunter. L’avertissement qu’il lui avait délivré n’était rien d’autre que cela, même si tant Nadira que Xinan se doutait déjà de l'accueil qu’ils recevraient en revenant sur la station.

“-Laisse tomber, Noa, souffla-t-elle… Ce n’est pas comme si c’était une surprise. Et Rick n’a fait que mettre les points sur les i.”

A la reflexion, ca ne devait pas être Rick. Oups, espérons que sa maladresse passe sur le compte de la fatigue. Mais évidemment, le militaire avait senti le poid du regard furieux du Neo Zelandais et il vint s’enquérir du problème.

“- Tout va bien, ne vous en faites pas, répondit Xinan. Nous expliquions à monsieur Pakeha la courtoisie professionnelle dont vous avez fait preuve à mon réveil.”

Il n’y avait pas la moindre trace d’ironie dans la voix du symbiote, juste l'énonciation d’un fait brut. Il ne lui en voulait pas, et aurait peut être fait le même chose à sa place.

Noa ne l’entendais visiblement pas de cette oreille et il lui donna sa version des faits dans des termes très clairs, ce qui fit monter les larmes aux yeux de l’egyptienne. Se sentant incapable de gérer cette bouffée d’émotion, le symbiote lui avait déjà rendu le contrôle. Un instant désemparée, elle se redressa et se blottie contre le géant tatoué

“- Tais-toi, s’il te plait. Tu ne peux pas savoir comment ca se passera, d’un côté comme de l’autre… ni pour moi. Je ne peux pas te promettre de revenir un jour. Quand je ferme les yeux, je vois des planètes inconnues, des villes étranges, des civilisations dont la terre n’a jamais entendue parler. Je dois en voir par même, et faire le tri. Cela peut prendre du temps.”

La dernière chose qu’elle voulait était le blesser. Mais il devait réaliser, comme elle, la barrière qui les séparait à présent.

Nadira lui souffla de laisser tomber. Le jeune homme acquieça d'un mouvement de tête et puis, il sourit lorsqu'elle l'appela "Rick". Le prénom de Hunter n'était jamais rentrée dans la tête de l'égyptienne et son surnom-aide-mnémotechnique était resté.

Alors qu'il s'apprêtait à passer à autre chose, la voix de Hunter dans son dos, le fit se retourner. Apparemment, le militaire n'avait pas apprécié son regard et souhaitait des explications.
Xinan répondit à sa place et Noa jeta un regard étrange à son amie. Il n'arrivait pas à déceler de l'ironie dans sa voix. Le néo-zélandais enchaina ensuite en se tournant de nouveau vers Hunter.

" On en parlera plus tard. Mais j'aurais préféré que vous vous absteniez de dérouler un discours alarmiste et éminemment erroné au docteur Garett alors qu'elle était encore loin d'être sauf. Je vous avais demandé de veiller sur elle. De la soutenir moralement. "
C'est alors que Nadira se redressa et se blottit contre lui. Noa se tût, surpris et baissa les yeux vers elle. Sans hésiter une seconde, il la serra contre lui alors qu'elle le pria de se taire. La suite lui fit terriblement mal et il prit conscience que la suite des évènements ne serraient pas aussi faciles qu'il l'avait espéré. "Je ne peux pas te promettre de revenir un jour." avait-elle dit.

" S'il te plait... ne dis pas ça... " murmura t-il. " Nad... tu vas revenir... s'il te plait. Reviens... "
Noa continuait de la serrer contre lui, comme s'il ne voulait pas la laisser s'échapper.

Hunter pris mal la remarque et parti dans une longue explication pour se justifier. Visiblement, on ne lui avait jamais expliqué qu’on ne devait pas crier dans un hôpital.

- Repos soldat, finit par trancher Xinan du ton de vieux militaire qu’il maîtrisait parfaitement. Vous avez fait ce que vous pensiez devoir faire. Inutile d’en faire trop maintenant. Vous supérieur vous débrieferons en temps utiles.

Le militaire finit par sortir et Nadira se détendit. Xinan n’avait aucun droit de donner des ordres au terrien, évidement, mais il était trop militaire dans l’âme pour laisser passer un tel éclat. Comment allait-elle cohabiter avec un être si différent d’elle ? Pas comme si elle n’en avait pas côtoyé un certain nombre au fil des années, mais en avoir un dans la tête était quand même différent.

Une fois Hunter sorti, la discussion avec Noa se fit plus intime et elle se retrouva bien vite dans ses bras, le cou chatouillé par la barbe du Neo Zelandais. Ça, ça n’était pas réglementaire, mais loin d’être désagréable.

« - Je reviendrais, finit-elle par dire. Je ne sais pas trop quand, mais je te promets que je reviendrais. »

Elle n’avait évidement pas précisé l’année… avec la longévité que lui accordait maintenant son symbiote, son retour pouvait se faire le mois ou le siècle prochain. Elle redressa soudain la tête et déposa un rapide baiser sur ses lèvres, ce qui provoqua un grognement mental de désapprobation chez Xinan.

« - Rentre rassurer nos supérieurs. Je ne trahirais pas nos petits secrets. »