Laureen délaissa la lecture d'un dossier sur sa tablette lorsque des éclats de voix se firent entendre à l'accueil puis de plus en plus proches. Elle fronça les sourcils lorsqu'elle entendit le prénom "Thomas" et se hâta d'aller voir ce qu'il se passait. Elle n'eut pas besoin de faire plus d'une dizaine de pas avant qu'une furie rousse déboula sur elle et lui débita une série d'ordres sans le moindre ménagement.
La virologue passa son regard du visage de la jeune puis sur ses mains couvertes de sang avant de terminer par le bandage qu'elle venait de jeter à terre. Elle fronça ensuite les sourcils pour bien marquer sa désapprobation avant de lever une main qui se voulait apaisante en direction de la nouvelle venue.
"Avant toute chose vous allez commencer par vous calmer, d'accord?" fit-elle avec fermeté. "Vous êtes dans une infirmerie ici, pas dans un champ de foire! Et la poubelle est sur votre droite s'il vous prend l'envie de jeter des trucs! Le personnel est payé pour sauver des vies, pas pour ramasser les déchets des autres!"
La jeune femme était à deux doigts de demander une seringue de tranquillisant, peu encline à se faire marcher dessus. La psychologie, ce n'était pas du tout son domaine. Elle laissait ça à ceux qui voulaient perdre leur temps. Laureen balaya des yeux les personnes qui s'étaient agglutinées pour assister à la scène et poussa un soupire d'agacement:
"C'est bon, je m'en occupe! Si vous voulez retourner travailler, ne vous gênez surtout pas!"
Puis elle fit un signe de tête pour demander à la furie de la suivre dans une salle d'auscultation adjacente. Elle prit soin de se positionner à côté du chariot médical lorsqu'elle y entra, de manière à pouvoir se saisir d'un outil tranchant en cas de besoin.
"Alors de un, Monsieur Sincet vient de sortir d'opération et il est hors de question que je lui fasse passer un scanner tout de suite et dans ces conditions. De deux et sans vouloir vous offenser, aux dernières nouvelles c'est à cause de vous qu'il est ici alors vous m'excuserez si j'ai un peu de mal à prendre au sérieux vos... recommandations au sujet de sa santé. Et si on imaginait que je décidais malgré tout de les suivre, il faudrait déjà que je sache ce que je suis sensée chercher avant de faire quoi que ce soit! Et pour terminer, si vous souhaitez contacter ce Smith, vous pouvez très bien le faire vous-même!" fit-elle en lui lançant sa radio.
Laureen se rendit compte que rester calme était un exercice plus difficile que prévu. Elle prit donc sur elle-même tout en gardant à l'esprit que son interlocutrice était une victime elle aussi, d'une certaine façon. La virologue avait été marquée par l'air qu'affichait la jeune femme rousse lorsqu'elle était arrivée en salle de réunion. Et puis si elle était libre, elle avait sûrement été innocentée. Ou, du moins, qu'elle avait le bénéfice du doute...
"Faites-moi voir votre mains!" lâcha-t-elle enfin, radoucie, en s'approchant de la femme.
Elle les saisit délicatement et commença à les nettoyer à l'aide d'un désinfectant.
"En fait je m'appelle Laureen Stanford! Et vous, vous êtes qui? Je veux dire, quand vous ne passez pas votre temps à courir partout les mains pleines de sang?" fit-elle sur le ton de la plaisanterie pour détendre un peu l'atmosphère. "Vous pourriez peut-être m'expliquer calmement ce que vous craignez au sujet de Monsieur Sincet?"
Même si elle avait un doute quant à la santé mentale actuelle de sa vis-à-vis, Laureen n'allait pas laisser sa fierté la faire passer à côté d'un élément important pour la santé du patient. Elle se devait d'écouter son avis, ne serait-ce que par professionnalisme.