Ding dengue dong

Enfin de retour chez sois. Enfin, elle s’était téléporté ici à plusieurs reprise pour récupérer des affaires et régler les détails administratifs pour leurs absence. Mais essentiellement, Nadja était restée auprès de son mari tout au long de son hospitalisation, se faisant un sang d’encre la première semaine et manquant de faire un scandale par la suite.

Finalement, on lui avait trouvé une chambre dans un hôtel proche de l’hôpital et elle avait pu s’y reposer un peu et surtout ne plus être sur le dos de l’équipe médicale en permanence. Un infirmier lui indiqua même un club de boxe ou aller se défouler, ce qui lui fit le plus grand bien.

Finalement, ils avaient pu rentrer chez eux, même s’il lui restait deux semaines de convalescence. Il allait falloir qu’il se trouve quelque chose à faire s’il ne voulait pas tourner chèvre !

Docilement, elle poussa le fauteuil roulant dans l’entrée avant d’aider Zander à s’installer sur le divan. Au moins avait-elle pu négocier de pousser elle même la chaise plutôt que de laisser rentrer chez eux les infirmiers. Ca n’était sans doute pas leur faute mais elle ne pouvait plus voir en peinture le personnel médical terrien.

« - Je vais rendre ce truc à l’ambulance et je reviens. Tu veux quelque chose ? »

Elle n’insista pas trop, sachant pertinemment que ses attentions allait le rendre fou également. Une fois la voiture partie elle revint vers leur maison et se mit en devoir de préparer des boissons chaudes sans faire tout exploser. Ca aurait été un comble qu’elle mette le feu à la maison aujourd’hui.

Enfin… Il rentrait enfin à la maison après deux semaines à l'hôpital. Il était encore affaibli, mais il avait été jugé suffisamment remis pour aller poursuivre sa convalescence à domicile. Bien sûr,  il serait soumis à des visites médicales régulières au cours des deux prochaines semaines et devrait subir un examen complet avant de pouvoir reprendre le service, mais il était désormais libre.

Une fois la phase critique terminée, il avait passé cinq jours supplémentaires en soins intensifs avant d'être transféré dans une chambre les trois derniers jours lorsque sa fièvre avait fini par tomber, toujours sous surveillance, mais plus légère. La maladie avait cependant laissé des traces. Il n'avait jamais été aussi malade. Pire que la grippe d'Harlan qui pourtant ne l'épargnait pas. Il était vidé de toute énergie et l'hôpital l'avait obligé à utiliser un fauteuil roulant quand il voulait sortir de sa chambre et même pour rentrer chez lui. Ceci dit, ce n'était peut-être pas plus mal. Puis il passait aussi son temps à dormir depuis une semaine et ne remangeait que depuis quelques jours. La nourriture de l'hôpital n'était pas franchement des plus attrayantes pour lui ouvrir l'appétit, malgré l'insistance du personnel médical.

Il laissa Nadja l'aider à s'installer dans le canapé. Elle l'avait veillé pendant tout son séjour ou presque. Sa présence avait été réconfortante et l'avait aidé, jusqu'au moment où le personnel avait fini par décider qu'il valait mieux pour tout le monde qu'elle passe quelques heures par jour ailleurs. Cela restait tout de même étrange de la voir agir ainsi et était très loin de l'image de Marine endurci qu'elle se donnait.

« Non, ça va. Merci. » lui répondit-il quand elle lui demanda s'il voulait quelque chose. Là tout de suite, il n'avait besoin de rien.

Il ferma les yeux pour profiter du silence de la maison, le temps qu'elle aille rendre le fauteuil aux ambulanciers qui l'avaient ramené. Voilà qui était reposant comparé à l'hôpital. Plus de bips constants des machines, plus de va-et-vient régulier dans la chambre pour s'assurer qu'il boive ou qu'il mange ou de brouhaha permanent dans les couloirs… juste le silence et les bruits de l'extérieur. Peut-être qu'il arriverait à avoir une vraie nuit de sommeil…

« Ça fait du bien d'être rentré et de ne plus être branché à 50 appareils médicaux… Ce sera encore mieux quand je serai capable de me déplacer par moi-même. Il faudra d'ailleurs que j'aille faire ma promenade tout à l'heure. » fit-il en soupirant quand elle revint.

Et après ça, il dormirait trois bonnes heures comme s'il venait de courir 10 kilomètres. Mais cela faisait partie du protocole qu'il devait respecter. Au moins deux promenades par jour de dix minutes ou plus, alors qu'il ne voulait qu'une chose, dormir.

Fière d’elle (rien n’avait brûlé ou explosé ou disparue dans une dimension parallèle) Nadja déposa le plateau sur al table du salon, chargé d’un théière, de tasse et de quelques gâteaux qu’elle avait acheté.

« - Ca fait du bien de te voir ici. Je devenais folle à te voir dans cet hôpital du moyen age. Au moins sur le JPS, tu aurais été soigné convenablement. »

Elle n’en dit pas plus, consciente que qua n’était pas le moment, mais elle n’en pensait pas moins. Sur la station ou a la rigueur en zone 51, on aurait prit en compte son origine « exotique ». Et elle n’aurait pas été à deux doigt de défenestrer la moitié des médecin de l’hôpital quand il était reparti aux soins intensifs.

« - Tu pourras vite marcher. Mais il va falloir te remplumer. Je sais pas trop combien tu as perdu mais tu flottes dans tes vêtements. »

Elle essayait de garder un ton léger mais le voir ainsi lui fendait le cœur. Lui qui avait gagné en masse musculaire toute l’année passée… tout était à refaire. Préférant rester silencieuse, elle servit le thé en réfléchissant à comment ils allaient pourvoir s’organiser.

« - Je reprend le boulot après demain. Une nouvelle fournée de recrue à mâchonner. J’essaierai de passer te voir le midi. Enfin sauf si çà t’agace de trop me voir te materner. »

Elle plaisantait mais savait que ca lui taperait sur les nerfs à un moment ou un autre. Autant prendre les devants.

Zander retint un soupir en la voyant arriver avec le thé et des biscuits. Elle n'avait pas dû entendre sa réponse, mais il n'allait pas la contrarier, surtout vu que rien n'avait explosé. Il se demanda si elle avait reçu des instructions de la part de l'hôpital pour s'assurer qu'il buvait et mangeait correctement, comme le personnel de l'hôpital.

« Je n'aime pas être à l'hôpital non plus, surtout pas dans un état pareil. Mais tu sais, le JPS n'est pas prévu pour des soins de longue durée ou pour prendre en charge des cas comme le mien. Ils auraient sans doute pû le faire, mais ils auraient dû mobiliser du personnel spécialisé juste pour moi. Je pense qu'eux auraient pris ma requête de faire appel à Hébrida ou à des médicaments hébridiens plus sérieusement. L'équipe terrienne n'en a pas vu l'intérêt vu que la maladie a évolué normalement chez moi comme chez n'importe quel Terrien. Cela ne leur a pas traversé l'esprit que mon peuple aurait pu fournir des médicaments pour me soulager et accélérer mon rétablissement bien plus adaptés et efficaces que les leur. Mais ils ont l'air de penser qu'ils savent mieux que mon propre peuple, pourtant plus avancé, comment me soigner. » dit-il sur un ton teinté de rancœur.

S'il avait était à l'article de la mort sans qu'ils ne puissent rien faire, auraient-ils pris la peine de contacter sa planète pour demander de l'aide et voir si eux pouvaient le sauver ? Ou auraient-ils juste décrété qu'il était perdu parce que eux étaient impuissants ? Il n'en était même pas certain et il était décidé à donner des instructions précises pour qu'ils fassent appel à Hébrida la prochaine fois qu'un événement de ce genre se produirait.

Il grimaça quand elle évoqua son poids. Il ne s'en était pas vraiment rendu compte jusqu'à ce qu'il s'habille pour partir, mais il avait effectivement maigri, et pas qu'un peu. Et par conséquent, il était considérablement plus faible. Il lui faudrait du temps pour récupérer son poids et sa forme et en attendant, il devrait faire attention à ne pas trop forcer et adapter son entraînement, d'autant qu'il s'épuisait rapidement et dormait beaucoup pour compenser.

« Je suis sûr que maintenant que je vais pouvoir manger de façon décente, ce sera plus facile de récupérer les kilos perdus. Parce que la nourriture de l'hôpital est infecte et me donnait des nausées à chaque fois que je devais l'avaler. Et c'est certain que je ne pourrais rien faire de physique tant que je n'aurai pas récupérer un minimum. » dit-il, un peu dépité.

Il sourit doucement quand elle parla de le materner.

« Ça ne me dérange pas que tu passes me voir à midi. Au contraire. Les journées risquent de me paraître longue à rester tout seul ici. Tu pourras me materner en m'apportant un plateau repas, t'assurer que je le mange et en allant marcher avec moi, quitte à me botter les fesses pour que je sorte. Et je suis persuadé que tu ne manqueras de me concocter une bon petit plan de remise en forme une fois que je serai un peu plus en état. » répondit-il avec un plus large sourire.

Stella pouvait lui tenir compagnie, mais ce n'était pas la même chose. Il contempla sa tasse de thés quelques secondes. Il avait été seul pendant les dix dernières années, alors à part les médecins qu'il était parfois contraint de consulter, il devait se débrouiller par lui-même quand il allait mal. Et quand cela n'allait vraiment pas, Stella trouvait toujours un moyen de lui trouver de l'aide et de mettre la main sur Prius ou un Berger, le temps que celui-ci arrive.

« Mais tu sais, je n'ai pas l'habitude qu'on s'occupe de moi ainsi quand je suis malade… » fit-il doucement avant de s'arrêter, cherchant soudain ses mots.

Il n’était pas très content du traitement qu’il avait reçu ainsi que de la politique de soins terriens. Et vu ce que Nadja en pensait de son coté, elle ne pouvait être que d’accord.

« - S’il n’y avait pas eu une semaine de voyage vers Hebrida, j’aurai sérieusement considéré l’option de t’y emmener, qu’ils soient d’accord ou non. »

Mais quasiment une semaine de voyage avait tué ce plan dans l’œuf et elle avait dû se contenter de ronger son frein en essayant d’insulter personne.
« - J’ai bien vu ce qu’on te servait… Mais impossible de te faire passer quoi que ce soit de plus gros qu’un paquet de gâteaux. »

Paquet qui disparaissait toujours mystérieusement dès qu’elle avait le dos tourné.

« - Bien sur que j’ai un plan pour te remettre en forme. Mais il faudra attendre un peu pour débuter que tu es retrouvé un peu d’énergie. Mais compte sur moi pour te botter les fesses régulièrement. »

S’il retrouvait l’hygiène de vie qu’il avait avant d’être malade, il n’aurait sans doute aucun mal à retrouver la forme.
La suite la surprit un peu. Il semblait chercher à mettre des mots sur des sentiments vaguement conflictuel, ce qui était assez rare chez lui.

« - C’est nouveau pour moi aussi. Enfin non, pas totalement. Quand mes sœurs étaient malades, j’étais aux petits soins pour elles. Je suppose que j’avais déjà ce coté ultra protecteur avant d’entrer dans les marines… Cela dit, c'est le première fois que je me retrouve dans cette position pour quelqu'un d'autre. Dis-moi si j’en fais trop, d’accord ? »

Zander hocha la tête. Il ne doutait pas un seul instant que Nadja l'aurait emmené sur Hébrida et que Stella aurait fait de même.

« Stella t'aurait aidé si la situation l'avait exigé. Quand aux médecins terriens, il leur suffisait d'utiliser la Porte pour contacter Hébrida et discuter cinq minutes avec un médecin là-bas ou m'y envoyer... Je compte bien faire une demande officielle pour que l'obligation de contacter un expert médical de ma planète soit incluse dans les procédures à suivre lorsque je contracte une maladie grave de ce genre. » fit-il.

Il n'était pas question qu'il meure en raison de l'incompétence des équipes médicales locales, surtout si sa planète pouvait le sauver, contrairement à eux. Il pouffa concernant les gâteaux et en prit un dans l'assiette devant lui.

« C'est parce qu'ils font attention à ce que les patients mangent. Ça peut être important dans le cadre des soins. Il faut toujours leur demander avant de donner quoi que ce soit. Mais j'apprécie beaucoup que tu aies essayé de me sauver de ces choses infâmes qu'ils osaient appelées nourriture. » lui expliqua-t-il.

Il ne put s'empêcher de rire franchement quand elle lui annonça qu'elle avait un programme de remise en forme déjà prêt pour le remettre sur pied.

« Pourquoi ne suis-je pas le moins du monde surpris... Je te remercie de m'accorder, dans ta grande générosité, un peu de temps pour récupérer avant de me botter les fesses. » dit-il avec un large sourire.

Il se contenta de hocher la tête à la suite, cherchant toujours à exprimer pour dire ce que cela lui inspirait.

« Je n'ai jamais dû veiller sur quelqu'un jusqu'à présent. Sur Harlan, quand j'étais malade, je devenais un patient comme un autre. Leïla passait un peu plus de temps auprès moi sans pour autant rester en permanence à mon chevet, comme tu l'as fais. Mais le contexte était très différent. »

Il se demanda soudain si cela avait une signification ou non. Leur façon de se comporter était tellement différente à son égard qu'il ne pouvait s'empêcher de s'interroger. Mais il savait que Leïla se souciait vraiment de lui. Cependant elle était dévouée corps et âme à ses patients et elle ne les aurait jamais abandonnés pour s'occuper uniquement de lui. Ce n'était juste pas son genre, sans pour autant signifier qu'elle ne l'aimait pas ou moins que Nadja.

« Prius m'a aussi veillé à plusieurs occasions, mais ce n'est pas la même chose. Il a aussi un rôle médical dans ces cas-là. Même maintenant, il agirait autant comme ami que médecin. Sinon, j'ai toujours été seul, avec Stella en guise de garde-malade. Alors c'est assez étrange de voir quelqu'un d'autre qui reste à mon chevet pendant, mais aussi après. C'est réconfortant et rassurant de savoir qu'il y a quelqu'un qui sera là que je me réveille, autre qu'une jolie infirmière, dit-il pour la taquiner, même si c'était déjà arrivé. Et j'apprécie... beaucoup. Mais t'en fais pas, si j'avais j'en ai marre, je te le ferai savoir. »

Il ne croyait pas que cela arriverait, mais savait-on jamais. Il finit sa tasse de thé et grignota un autre biscuit, même s'il n'avait pas vraiment faim pour l'instant.

« Et si on allait faire un tour ? Ça fait deux semaines que je suis cloué au lieu et cloîtré à l'intérieur, à part hier où j'Ai été autorisé à aller visité la cour cinq minutes, et encore, en fauteuil. Alors je t'avoue que j'irai bien prendre l'air et bouger un peu, ne serait-ce que quelques minutes. » dit-il.

Il ne savait pas combien de temps il pourrait marcher, mais il s'estimerait heureux s'il arrivait à faire ne serait-ce que le tour du quartier ou à aller jusqu'au lac en face. Après tout, il était accompagné, donc pas besoin d'autorisation pour sortir du périmètre sécurisé...

« J’aurai dû penser à t’apporter des barres de protéines, répondit-elle d’un ton faussement acide. Ça t’aurait peut-être convaincue de guérir plus vite. »

Le sujet de son programme sportif l’amusa ce qui était plutôt une bonne nouvelle. Être à la maison lui faisait décidément du bien.

« - J’espère que tu garderas cet humour quand tu auras couru dix kilomètre et nagé trois. »

La suite la surprit. Non seulement il semblait avoir du mal à trouver ses mots, mais il était rare qu’il évoque Leila aussi naturellement. C’était sans doute une excellente chose mais c’était presque dérangeant à présent.

« - C’est justement parce que les infirmières étaient un peu trop jolies que j’étais là, maugréa Nadja en essayant de cacher son trouble. »

Ne sachant pas trop quoi répondre qui serait complètement neuneu, elle se contenta de lui sourire en lui serrant doucement la main. Mine de rien, elle était rassurée que son caractère de maman ours ultra protecteur ne le rebute pas. C’est un trait de sa personnalité qu’elle aurait bien du mal à atténuer.

La proposition de ballade tomba à pic pour chasser son trouble et elle sauta sur ses jambes comme un démon à ressort.

« - Tu as raison, allons y. »

Elle lui tendit la main pour l’aider à se relever et le guida lentement vers l’extérieur après avoir posé un de ces sempiternels chapeaux sur sa tête. Sortir au bras de Zander lui fit du bien. Un retour à la normale après quasiment un mois de cauchemar.

Zander grimaça à la mention des barres protéinées.

« Quoi ? Les trucs immondes que produit ma planète ? Je ne sais pas ce qui est le pire entre ça et ce qu'ils osent appeler nourriture à l'hôpital… Ça aurait plutôt servi à m'achever qu'à me soigner et ça n'aurait pas rendu meilleur les repas qu'on me servait. » répondit-il avec un air faussement outré.

Il continua à sourire concernant son programme de remise en forme.

« Trop facile ! Je ferai ça les doigts dans le nez… dans quelques mois. » fit-il en soupirant, conscient du chemin qu'il avait à parcourir avant de retrouver la forme et de pouvoir faire ce qu'elle annonçait.

Parler de Leila lui était toujours aussi douloureux et difficile. Mais le faire faisait partie du processus d'acceptation de sa mort et de son travail de deuil. Il savait que cela finirait par s'atténuer au fil du temps. Il n'attendait pas de réponse particulière, mais le simple fait d'arriver à l'évoquer à haute-voix sans fondre en larmes était pour lui une petite victoire. Il se retint d'éclater de rire à sa réaction concernant les infirmières.

« Il n'y en avait aucune de plus jolie que toi, alors tu n'as pas de souci à te faire. Mais ce n'était peut-être pas plus mal que tu sois là pour les dissuader de tenter quoi que ce soit. » fit-il avec un petit sourire taquin.

Il se leva avec l'aide de Nadja avant de sortir. Il faisait relativement chaud pour la période et le soleil était de sortie, malgré quelques nuages. Pour avoir suivi les bulletins météo à la télé, il savait que les températures allaient chuter dès le lendemain et qu'il ne serait probablement pas aussi enthousiaste pour sortir dans deux jours.

À cette heure-là, le quartier était désert et cela lui convenait. Il n'avait pas forcément envie de discuter tous les trois mètres. Il s'attendait à voir quelques personnes qui savaient qu'il sortait. Ethan l'avait déjà averti qu'il passerait le voir le soir-même ou le lendemain et il ne serait pas surpris de voir Nadira débarquer non plus à un moment ou à un autre. Il avait d'ailleurs hâte que son dossier soit transféré au JPS et que ce soit elle qui s'occupe des contrôles, et non plus l'hôpital. Il y avait assez traîné pour un bon bout de temps.

Il marchait lentement, appuyé sur Nadja, mais après deux semaines alité, cela n'avait rien d'anormal et il avait été averti par le rééducateur qui était passé le voir ces derniers jours pour lui faire faire de l'exercice, en l'occurrence faire le tour de l'étage... C'était toujours mieux que le fauteuil roulant. Au bout de cinq minutes, il avisa un banc.

« Est-ce qu'on peut s'asseoir deux minutes ? J'aimerais profiter un peu du soleil. »

C'était en partie vrai. L'air frais lui faisait du bien et il était content d'être à l'extérieur, mais ces quelques minutes de marche le fatiguaient déjà.

« Qu'est-ce que c'est bon d'être dehors... surtout avec un temps pareil. » fit-il avec un petit sourire, les yeux fermés, tout en lui prenant la main.

Il était cependant un peu dépité de ne pas pouvoir pleinement profiter du temps en faisant une longue promenade dans le parc principal de la ville, bien qu'il s'en sache incapable. Il se demandait donc ce qu'il allait faire le reste de la journée, en dehors de dormir.

« - On verra ca, beau gosse, on verra ca... »

L’idée n’était pas et n’avait d’ailleurs jamais été de faire de Zander un athlète. Juste lui donner une forme physique correcte et l’y maintenir.

Elle ne répondit rien au sujet des infirmières. Le compliment l’avait touché bien sur, mais elle n’aimait pas ce rôle de femme jalouse qu’elle endossait parfois. Elle avait beau savoir consciemment que rien ne se passerait, ses tripes la poussait à montrer les dents à chaque fois qu’une jolie femme s’approchait de lui. Il faudrait un jour qu’elle travaille la dessus et sur sa confiance en elle.

Une fois dehors ils marchèrent un moment, lentement. Elle le sentait luter et trembler pour avancer. Elle ne fit donc aucune remarque quand le banc apparu miraculeusement devant eux et elle l’aida à s’y asseoir.

« - Sur que ça fait du bien. J’avais peur que tu sois dégoutté de la nature pour un moment après cette foutue jungle. »

Dire qu’ils s’étaient porté volontaire pour cette escapade. Pas sur que ça leur reprenne de sitôt, l’un et l’autre.

« - A propos, j’ai eu des nouvelles de la fille qu’on a récupéré. Sa demande d’asile à été refusée et elle a du repartir dans son pays. J’espere que tout ira bien pour elle. »

Elle n’y croyait pas une seconde. Si leur poursuivants étaient probablement tous morts, le reste de la population du camp avait pu fuir. S’ils apprenaient qu’elle avait refait surface, Nadja ne donnait pas cher de sa peau. 

Zander regarda autour de lui.

« On n'est pas tellement perdu dans la nature, là… Mais non, je ne déteste pas la nature, seulement la jungle. J'aime trop être dehors, probablement parce que je passe beaucoup de temps enfermé dans des boîtes de conserve. Ce n'est pas un événement de ce genre qui va m'arrêter. Mais la prochaine fois qu'on veut faire de la randonnée, on organisera tout nous-même. Il paraît que la Nouvelle-Zélande est un super coin. » dit-il en souriant.

Il se fit soudain un peu plus sérieux.

« Ce qui est arrivé là-bas fait partie des risques, même pour les Terriens. Et encore, j'estime avoir eu de la chance, parce que j'ai réagi comme eux. Je redoute plus de réagir à quelque chose d'inattendue et censé être inoffensif ou qu'une de leur maladie se révèle mortelle pour moi. Mais cela aussi fait partie des dangers à se balader sur d'autres planètes. C'est quelque chose dont j'ai pris conscience sur Harlan avec leur grippe. Et je l'accepte, sinon je serais resté sur Hébrida. » lui expliqua-t-il sérieusement.

Quand elle lui annonça que la fille qu'ils avaient sauvé avait été renvoyé dans son pays, il se tendit une seconde avant de soupirer sur un air agacé.

« Je ne suis pas surpris. J'espère aussi que ça ira pour elle. D’ailleurs, un peu sur le même sujet... Un agent du SDT est passé l'autre jour. Il m'a dit qu'on leur avait fait savoir officieusement que les États-Unis ne m'accorderaient aucun papier. Leur source leur a dit qu'apparemment, ils ne voulaient pas non plus que je mette les pieds dans le pays et que je devrais me cantonner aux enclaves du SDT. Ils n'ont pas encore reçu de notification officielle, mais c'est une question de semaines avant que ça arrive. Ils essaient de négocier pour que je puisse au moins circuler en ville, ou au minimum dans le quartier, mais ce n'est pas gagné. Ils vont regarder d'autres solutions. Ils vont probablement essayer de trouver un pays plus accommodant envers le SDT et voir s'ils peuvent me fournir des papiers de l'organisme qui chapeaute le SDT et qui devraient m'assurer une certaine protection à ce qu'ils ont dit. Mais il faudra que je fasse profil bas ici. » dit-il sur un ton résigné.

Cette situation le frustrait, même si en réalité, il se fichait un peu d'avoir une nationalité ou non. Il voulait seulement avoir une autorisation pour circuler librement sur Terre sans avoir à systématiquement remplir quinze formulaires d'autorisation détaillant ce qu'il allait faire et sans avoir à être escorté. Mais visiblement, l'un n'allait pas sans l'autre et il devait être rattaché à un pays spécifique pour avoir une existence officielle.

« Et si on rentrait ? Par contre, je crains que ça prenne encore plus de temps que de venir ici. Et est-ce qu'il y a quelque chose à manger dans le frigo pour ce soir ou est-ce qu'on va devoir commander ? » demanda-t-il.

Il ne se sentait pas capable de cuisiner quoi que ce soit aujourd'hui, ne serait-ce qu'un paquet de pâtes, et il était probable que cela dure quelques jours. Ils allaient donc devoir trouver une alternative, qui consisterait probablement à acheter du surgelé, des boîtes ou aller chercher des plateaux-repas au réfectoire du JPS, voir commander à emporter.

« - Curieusement, avoir des arbres immenses au dessus de la tète me convenait plutôt bien. Je n’avais pas besoin d’un chapeau vissé sur la tête en permanence. Je crois même que dans la mêlée, à la fin, je l’ai perdue et ne m’en suis même pas aperçue. J’ai du piquer une casquette à un gars dans l’hélico en rentrant. Cela dit, je crois que je commence à m’habituer a ne pas avoir de plafond au dessus de la tête. Je n’ai pas tourné de l’œil tout de suite. »

Elle ne serait peut être jamais à l’aise à l’air libre mais au moins ne se roulait-elle plus par terre des qu’elle voyait un coin de ciel.

Quand il parla du sujet de sa nationalité refusé, elle se retint de partir dans une bordée de juron dont elle avait le secret. Les terriens étaient vraiment des andouilles de première. Dire qu’elle avait idéalisé cette planète la majeure partie de sa vie…

« - Ils te mérite pas, voila tout. Tu devrais essayer le Canada. j’ai entendu dire qu’ils acceptaient n’importe qui. De toute façon, pour les semaines à venir on va pas se carapater en vacance à l’autre bout du monde.»

Quand il proposa de rentrer, elle se releva et lui prit la main.

« - Oui il y a de quoi et je me suis arrangée avec le cuistot du JPS pour qu’il nous envoi les menu a l’avance. S’il y a des plats qui nous intéressent on pourra se les faire livrer directement sur la table. »

Ils savaient tous les deux qu’il valait mieux qu’elle ne se mette pas derrière les fourneaux. Et elle supposait qu’il préférerait éviter la foule du réfectoire pour un petiot moment encore.

Zander sourit.

« Je note que si nous repartons faire de la randonnée, il faudra privilégier un endroit avec de la forêt. Je suis sûr que ça ne doit pas être très compliqué. »

Il vit qu'elle n'était pas ravie concernant la nouvelle sur ses papiers. Lui non plus ne l'était pas, mais malheureusement qussi frustrant que la situation puisse être, il n'y pouvait strictement rien.

« Ce n'est pas moi qui gère ça. Le SDT finira bien par trouver, mais cela risque de prendre du temps, surtout qu'ils ont d'autres problèmes plus importants à régler que mes papiers. Tout ce que je veux, c'est au moins pouvoir aller au centre commercial du coin et si possible, me balader en ville sans avoir de problème. Si je ne peux pas aller ailleurs dans ce pays, soit, je m'en accommoderai. Je ne pense pas que j'aurai de souci ailleurs. Alors le Canada ou un autre pays... Tiens, il n'y a pas plein de forêts là-bas ? Ce serait parfait. »

Il se leva et hocha la tête concernant les repas. C'était vraiment une excellente idée. Il ne se sentait pas capable d'affronter le brouhaha du réfectoire pour le moment, et surtout pas alors qu'il venait tout juste de sortir de l'hôpital.

« Oh, mais c'est parfait ça. Les repas du réfectoire sont d'une qualité bien supérieure à ceux de l'hôpital. Ça devrait m'aider pour me remplumer, même si je n'ai pas encore retrouvé tout mon appétit. »

Le chemin du retour lui sembla interminable et il laissa Nadja le guider, se concentrant uniquement sur mettre un pied devant l'autre. Uns fois arrivé, il s'aperçut qu'il était en nage, comme s'il avait couru dix kilomètres.

« Je vais me changer, je reviens. On choisira le repas de ce soir après. » fit-il en montant lentement les escaliers, ce qui se révéla une autre épreuve à laquelle il n'avait pas pensé.

Il n'était pas certain de ressortir plus tard faire une deuxième promenade, même si c'était ce qu'on lui avait recommandé. En fin de compte, il ne redescendit pas. Il avait enlevé son t-shirt et commis l'erreur de s'asseoir sur le lit. Quelques secondes plus tard, il dormait à poings fermés.

Il se réveilla plus tard en entendant des voix au rez-de-chaussée. Il se leva en baillant et s'étira avant de finir de se changer qui était la raison de sa venue dans la chambre à l'origine. Il s'arrêta en haut des escaliers et leur jeta un regard mauvais avant de se résigner. À moins de dormir sur le canapé dans le salon, il n'avait guère d'autres choix que de passer par là.

Arrivé dans la cuisine, il vit Ethan, une bière à la main en train de discuter avec Nadja. À n'en point douter, ces deux-là devaient être en train de concocter son programme de remise en forme. L'instructeur le vit et lui fit un grand sourire tandis que le pilote allait se servir un jus de fruits dans le frigo.

« - Tiens, voilà la Belle au bois dormant.
- Salut… Je ne pensais pas que tu viendrais ce soir, dit-il en voyant l'heure.
- Je passe juste en coup de vent pour voir comment s'était passé ton retour et comment tu allais, vu que c'est sur mon chemin pour rentrer.
- C'est pas la grande forme, mais je suis content d'être enfin sorti de l'hôpital.
- Je me doute, fit le sergent en le détaillant d'un œil critique. Ça ne t'a vraiment pas réussi. Tu fais peur à voir.
- Merci du compliment.
- De rien, ça fait plaisir. On va vraiment avoir du boulot pour te retaper. Mais pas tout de suite. D'abord, il faut que tu récupères, et je ne parle pas que d'énergie, car tu as l'air complètement à plat. Tu as aussi quelques kilos à remettre. Et il faut que tu sois surtout capable de marcher plus de quinze minutes… Et demain je t'emmène faire un triathlon aux aurores suivant d'un marathon, ça te va ?
- Ça m'a l'air parfait… répondit le pilote d'un air absent.»

Ethan secoua la tête en souriant. Il avait remarqué qu'il avait perdu Zander au milieu d'une phrase et sa réponse venait de confirmer que ce dernier n'avait pas entendu un traître mot de ce qu'il avait dit. Mais cela ne le surprenait pas. Son protégé avait l'air complètement ailleurs. Il regarda Nadja.

« Il n'a pas l'air d'être vraiment prêt à recevoir de la visite et à tenir une discussion non plus s'il n'arrive pas à rester concentrer plus de deux minutes. Je crois que je ferai mieux de vous laisser. Ma famille m'attend. Je repasserai peut-être demain, sinon après-demain. Je ne serai pas de service. N'hésitez pas à ma'ppeler si vous avez besoin de quelque chose » lui fit-il tout en observant l'Hébridien.

« - Il me semble qu’il y a pas mal de foret oui. Comme l’Alaska cet hivers, tu te souviens ? »

La ballade en raquette, bien qu’épuisante avait été un moment tees agréable dont ils gardaient un excellent souvenir. Plus que du ski en tout cas.

Revenir leur pris un temps fou et Nadja se demanda si elle allait devoir le porter. L’ego de Zander en aurait sûrement pris un coup mais à choisir entre ça et qu’il s’étale par terre… Finalement ils parvinrent à leur maison et il monta se changer pendant qu’elle récup »rait les fameux menus. Ne le revoyant pas descendre au bout de quelques minutes, elle pris le même chemin et le découvrit endormis sur leur lit. Un petit sourire aux lèvres, l’ex marine devenue mere poule le recouvrit d’une couverture, déposa un baiser sur front et redescendit sans bruit.

Elle passa un moment à dessiner tout en écoutant de la musique mais fut interrompue apr des coups léger à la porte.

« - Salut Ethan, dit-elle en ouvrant. Zander se repose. Tu veux une bière ?
- Ca me va ! »

Ils discutèrent un moment troquant des nouvelles du malade contre les derniers potins du SDT. Ça faisait du bien de retrouver un environnement normal et des conversations banales. Finalement, Zander dut les entendre et il descendit avec l’air aussi réveillé qu’une marmotte au printemps. La conversation dura d’ailleurs naturellement cours et leur visiteur prit congé rapidement.

« - A demain Ethan, merci d’etre passé. On se voit pour le marathon à dix heures ? »

L’instructeur reparti sur un éclat de rire et Nadja revint vers la cuisine pour récupérer les menus. Quelque chose lui disait que la soirée allait être courte. Comme promis, les cuisines du JPS leur téléporterent les plat directement et ils purent se mettre à table.

« - Je sais que t’es sans doute pas très faim mais essaye de manger un peu quand même. Après je te fiche la paix jusqu’à demain matin, promis. »

Zander sourit largement à la mention de l'Alaska. Les raquettes, les chiens de traineaux… Ça, c'était un séjour qui lui avait énormément plu et il pourrait s'accommoder du froid.

« Oui, je m'en souviens. Très bien, même. J'ai adoré et le climat est nettement plus facile à supporter que celui de la jungle. » fit-il.

*****

Ethan sourit à Zander et le salua lorsqu'il passa devant lui en partant.

« - À demain et repose-toi bien.
- Oui, à demain. Merci d'être passé. Bonne soirée. »

En entendant la dernière phrase de Nadja, il eut la sensation d'avoir raté quelque chose et fronça les sourcils.

« Un marathon, demain matin ? De quoi vous parlez ? » demanda-t-il, sa curiosité piquée au vif.

Il finit son jus de fruits et passa à table. Il regarda le plateau devant lui. Des spaghettis à la bolognaise. Au moins, ça ressemblait à quelque chose.

« Désolé de t'avoir fait faux bond pour choisir les plats. Je n'ai pas réussi à résister à l'appel du lit quand je suis allé me changer. Cette promenade m'a fatigué plus que je ne le pensais. C'est ridicule franchement… On est sortis quoi ? Même pas 15 minutes ? Et j'ai fini comme si j'avais fait une séance de sport intense... » soupira-t-il.

Ça l'agaçait d'être dans cet état ou de mettre du temps à se réveiller complètement. Dire qu'avant tout ça, il courait au minimum 5 kilomètres et faisait plusieurs longueurs dans la piscine.

« J'aimerais aller nager… Mais j'ai peur de ne pas être capable de faire plus d'une longueur. En plus, les médecins ont dit pas d'efforts physiques pendant la première semaine, juste de la marche. Mais peut-être que si je me contente de me mettre dans l'eau sur le dos, ça devrait le faire, non ? »

ll attaqua son plat sans grand enthousiasme, mais avec moins d'hésitation qu'à l'hôpital.

« C'est nettement meilleur que ce qu'on me servait jusqu'à maintenant, il n'y a pas à dire. Et surtout, il n'y a pas ce truc bizarre qu'ils appellent de la gelée en guise de dessert. »

Il mangea un peu plus que les jours précédents sans avoir à se forcer ou avoir envie de recracher chaque bouchée. Il passa rapidement au pain et au fromage avant de terminer par la salade de fruit et le biscuit.

« J'ai pas tellement envie d'aller dormir tout de suite, c'est un peu trop tôt. J'ai juste envie de profiter d'une soirée tranquille avec toi. Tu veux regarder un film ? Mais je préfère te prévenir que je pourrais m'endormir avant la fin malheureusement. » annonça-t-il de but en blanc

Après deux semaines sous surveillance constante, avec vérification de ses constantes vitales et autres examens à toute heure du jour et de la nuit, il voulait profiter de sa liberté retrouvée et du fait d'être rentré pour passer sa soirée comme il l'entendait et se coucher quand il voulait, sans être contraint de respecter de quelconques horaires.

Nadja éclata de rire quand Zander mentionna le marathon. Elle lui expliqua la plaisanterie pendant qu’il mangeait et haussa les épaules quand il s’excusa pour le repas.

« - Pas de soucis. J’ai une certaine pratique dans la commandes de repas. Et ce foutu virus t’as mis à plat, c’est tout. »

Il fallait bien admettre que ses défenses immunitaires renforcées étaient bien pratiques. Même si elle semblaient sur le déclin depuis quelques temps, ce qui inquiétait de plus en plus son amie médecin.

« - Bah on peut toujours aller dans la piscine. Tu reste prés du bord et barbote un peu. C’est pas vraiment un effort ça. Le fais juste pas sans moi, ok ? »

Elle avait supposé qu’il voudrait aller se coucher de suite mais Zander préféra passer la soirée avec elle devant un film. Ils se retrouvèrent donc installé tranquillement devant une histoire de nana en orbite terrestre à qui il arrivait des aventures rocambolesque. Quoi que pouvait en dire le titre du film les règles de gravité furent particulièrement maltraité durant le visionnage et Nadja dut se mordre la langue à plusieurs reprise pour en pas pester en permanence.

Comme il l’avait prévu, Zander s’endormit avant la fin et termina la séance sur son épaule. Elle le secoua légèrement à la fin et ils montèrent se coucher. Elle se leva it tôt le lendemain et reprendre le travail allait être compliqué.

Zander secoua la tête quand il apprit ce qu'il se cachait derrière le marathon. Il lui arrivait de temps en temps d'avoir une absence et de ne pas suivre la discussion, particulièrement après s'être réveillé ou quand au contraire, il tentait de rester éveillé.

« Non, je n'irai pas dans la piscine sans supervision, promis... » répondit-il, content à la perspective de pouvoir tout de même y aller.

Il se retint de dire "oui, maman", mais elle avait parfaitement raison. Tout pouvait aller bien une minute, mais celle d'après, il pouvait soudain être incapable de tenir debout, d'où la nécessité d'être accompagné. Cela pourrait rapidement virer au drame dans une piscine, même si Stella veillait sur lui de loin et interviendrait au moindre signe de problème.

« Il ne me viendrait déjà pas à l'idée d'aller marcher tout seul... Si je le fais, je risquerais fort de devoir demander à Stella de me rapatrier à la maison, parce que j'aurais surestimé mes forces ou que d'un seul coup, ça ne va plus du tout. » ajouta-t-il, conscient d'être incapable de jauger ses limites à l'heure actuelle.

Confortablement installé sur le canapé contre Nadja, il ne put s'empêcher de pouffer à chaque remarque qu'elle ne pouvait retenir, en en rajoutant généralement une couche sur l'invraisemblance de ce que les personnages faisaient dans cet environnement sans gravité. Ces gens n'avaient clairement jamais mis les pieds dans l'espace ou évolué en 0G. Il finit par s'endormir sur son épaule, ratant la fin du film. Quand elle le secoua gentiment, il ouvrit un œil et monta en mode zombie jusque dans la chambre où il alla s'écrouler dans le lit.

Il dormit d'un sommeil de plomb. Pour le première fois depuis deux semaines, sa nuit n'était pas perturbée par les bips des machines auxquelles il était branché, leurs câbles et autres perfusions, le brouhaha des couloirs et les visites permanentes des médecins ou infirmières dans sa chambre pour lui faire des prélèvements ou vérifier ses constantes toutes les heures puis toutes les quatre heures, ce qui le réveillait généralement aux aurores. Et il était chez lui, dans son lit, avec Nadja à ses côtés, ce qui changeait beaucoup de choses. En conséquence, il fit le tour de l'horloge.

Il se réveilla au son des oiseaux dehors, mais il mit un temps fou à émerger complètement. Quand il finit par se lever et descendre, l'heure du repas n'était pas si loin que ça.

« Salut, belle brune. » dit-il en bâillant lorsqu'il arriva dans le salon.

Nadja dormit d’un sommeil de plomb cette nuit-là. Sans doute inconsciemment avait-elle mal vécue l’absence de Zander. Qui avait dit qu’elle était une marine dure à la tâche et indépendante ? Elle se réveilla relativement tôt et se leva sans un bruit pour aller courir quelques kilomètres.

Quarante-cinq minutes plus tard, elle revint et s’attabla pour un solide petit déjeuner après être passée par la case douche. Elle avait réussi à dompter la machine à café depuis quelques semaines et les tartines emplies de confiture de fraise ou de cerise lui convenait parfaitement.

Ce n’est qu’après avoir vidé son second mug qu’elle se souvint qu’elle ne reprenait pas le travail aujourd’hui, mais le lendemain. Il fallait qu’elle soit vraiment perturbée pour se planter a ce point. Il allait falloir qu’elle se reprenne sérieusement en main si elle voulait faire correctement son boulot.

Zander ne descendant toujours pas, elle retourna dans la chambre pour vérifier que tout allait bien. Constatant qu’il dormait comme un nouveau-né, elle le laissa tranquille.
La matinée s’écoula tranquillement entre lecture, dessin et un petit épisode au supermarché pour refaire el pelin de certaines denrées, à commencer par la bière qui descendait décidément très vite.

Finalement, le pilote émergea un peu avant midi et descendit, les yeux encore embrumé de sommeil.

« - Salut beau gosse. Sacrée nuit dit donc. Mais t’as déjà un peu meilleure mine. Tu veux du café ? »

Elle n’exagérait pas. La nuit de presque douze heure lui avait visiblement fait du bien, même s’il restait affreusement pale et maigre.

Zander sourit quand elle dit qu'il avait meilleur mine. Ce n'était pas son impression. Il se sentait limite plus fatigué, mais c'était probablement dû au contrecoup d'être enfin sorti.

« Oui, je veux bien du café. Et tu trouves ? Parce que je ne me sens pas spécialement mieux qu'hier. Et c'est normal que j'ai dormi autant. C'est la première nuit depuis notre escapade dans la jungle que je passe dans notre lit et dans un endroit calme, sans que rien ni personne ne vienne me déranger à toute heure de la nuit pour me faire une prise de sang ou m'examiner. Et je ne parle pas des bips des machines que j'ai appris à surveiller maintenant que je bosse à l'infirmerie et que j'ai beaucoup de mal à ignorer. » dit-il en s'asseyant.

Il prit un morceau de pain qui traînait là et le grignota. Voilà ce qu'il avait envie de manger sans restriction.

« Puis, c'est comme ça à chaque fois que je suis malade. Je passe mon temps à dormir après. Tu te souviens au retour d'Harlan ? C'est comme ça depuis que je suis tout petit. D'ailleurs, je crois que j'aurai bien continué pendant plusieurs jours. Mais il faut bien que je bouge un peu et que je me nourrisse, sinon je vais avoir du mal à me remettre sur pied. »

Quand il vit l'heure, il retint un soupir. Il ne serait pas capable d'avaler un repas complet pour le moment.

« Si tu veux te commander à manger au réfectoire, vas-y. Je n'ai pas vraiment faim pour l'instant. Je me contenterai d'un petit-déjeuner normal, si je trouve de quoi dans le frigo. »

Il se leva et alla le fouiller. Il dénicha du jambon et du fromage ainsi qu'un pot de confiture. Avec du pain, ce serait parfait. Il allait vraiment falloir qu'il s'occupe de le remplir. Heureusement, c'est qu'il n'était pas du tout obligé de sortir pour ça. Il lui suffisait de passer sa commande sur Internet au supermarché du coin et de se faire livrer ensuite. Même s'il n'était pas forcément en état de cuisiner, il aurait forcément des fringales à un moment ou à un autre et il ne pouvait pas appeler le réfectoire à chaque fois qu'il voulait un fruit comme s'il s'agissait d'un service d'étage.

« Voilà un autre des avantages d'être rentré. Je peux manger ce que je veux, quand je veux. Enfin à condition d'en avoir. » fit-il en se rasseyant et en se mettant à manger.

« Je suggère d'aller faire un petit tour comme hier juste après juste qu'au même banc, tant que je suis encore à peu près dynamique et réveillé. Je prendrai une douche en revenant. Après, je sais pas. Ce n'est pas comme si je pouvais faire grand-chose… » soupira-t-il.

Il était très content d'être avec elle, mais ils n'allaient pas se regarder dans le blanc de yeux pendant des heures non plus.

« Des idées ? » lui demanda-t-il.

En apprenant que Zander avait attrapé une maladie tropicale, le premier réflexe de Nadira avait été de le faire rapatrier. On lui avait cependant fait comprendre que vu le climat actuel et l’intervention déjà musclée d’une équipe du SDT, il valait mieux faire profil bas.

Elle avait donc rongé son frein et regardant quotidiennement les résultats d’analyse qu’on voulait bien lui envoyer. Ça n’était guère brillant et les médecins locaux étaient de parfaits incapables. A deux reprises, elle fut à deux doigt d’aller demander à Gary de téléporter le pilote, séance tenante.

Finalement, son organisme finit par réagir et suivit son lent rétablissement avec soulagement. Lorsque son coéquipier fut autorisé à rentrer chez lui, elle dut se faire violence pour ne pas débarquer dans la minute. IL avait sans doute assez vu de médecin pour un moment et une soirée tranquille avec son épouse lui serait bien plus bénéfique.

Elle opta donc pour passer le voir le midi du jour suivant. Ce fut l’immense marine qui vint lui ouvrir et lui fit ce même sourire un peu crispé qu’a chaque fois ou elles se rencontraient.

« - Docteur Garett, entrez, soyez la bienvenue. Votre patient essaye désespérément d’avaler son petit déjeuner.
- Merci. Voyons si j’arrive à le décider en le menaçant de lui reproposer de la jelly à la place.
- Vous avez vos chances, je dirai. »

La militaire la précéda dans le salon *Xinan arrête de la mater comme ça, non d’un chien !* et lui proposa une tasse de café qu’elle accepta avec joie.

« - Bonjour Zander. Je ne te demande pas si ça va ? Je suis sûre que tu en ras le bol de voir des médecin, on va essayer de faire vite, ok ? »

Pas comme s’il avait el choix de toute façon et il le savait pertinemment. Mais elle supposait qu’il préférerait de loin que ca soit elle qui s’occupe de lui.

Zander prenait son temps pour manger, mais au moins il était un peu plus enthousiaste par ce qu'il y avait dans son assiette, tout en discutant de tout et de rien avec Nadja. Il en avait aussi profité pour jeter un coup d'oeil au menu du jour pour le repas du soir et avait opté le couscous puis avait décidé de prendre aujourd'hui le filet de poisson avec purée et petits légumes. Peut-être aurait-il faim un peu plus tard, alors mieux valait prévoir.

Quand il entendit frapper, il se demanda qui cela pouvait bien être. Il laissa cependant Nadja s'en charger finissant sa tartine de confiture. Il se renfrogna en entendant la voix de Nadira. Il avait espéré avoir un peu de répit avant sa première visite de contrôle et qu'il aurait la paix au moins jusqu'au lendemain, mais non. Voilà qui assombrissait un peu sa journée.

« Dire que j'en ai ras-le-bol est un euphémisme. » rétorqua-t-il sur la défensive avant de soupirer et de secouer la tête.

Il ne l'avait pas montré, mais garder le moral pendant son hospitalisation avait été difficile en raison de l'isolement, de la solitude et de l'ennui. Il avait joué les patients modèles et toujours d'humeur égale, sauf les derniers jours où son séjour avait commencé à vraiment lui peser et où son agacement avait parfois transparu face au personnel, mais jamais face à Nadja.

Elle avait été là autant que possible, ce qui l'avait aidé, mais il restait des moments où elle devait partir, notamment la nuit et certains moments de la journée réservés aux examens et autres traitements, pendant lesquels il n'avait pas grand-chose à faire. Et c'était sans parler des soins intensifs où les heures et la durée des visites étaient très limitées. Cela aussi avait laissé des traces et jouait tout autant que la maladie elle-même. Et était venu s'ajouter les nouvelles concernant ses papiers qui avait ajouté encore à la situation, le faisant se demander ce qu'il faisait toujours là et pourquoi il devrait rester et s'impliquer, ce qui avait un peu plus plombé les choses.

« Désolé, tu n'y es pour rien, mais je suis un peu en délicatesse avec le corps médical en ce moment et ils me sortent vraiment par les yeux. » ajouta-t-il sur un ton las.

Ce n'était pas sa faute et il n'avait pas à se défouler sur elle. Il avait été surpris de ne pas la voir une seule fois pendant son hospitalisation considérant qu'elle était non seulement la responsable médicale du JPS, mais aussi sa chef. Il supposait que cela avait un lien avec le contexte global et l'intervention peu appréciée de l'équipe du SDT qui les avaient récupérés dans la jungle. Ces derniers étaient justement en train de s'entraîner dans le secteur à ce moment-là, par un très heureux hasard, d'après ce qu'il avait entendu.

Ce dont il était certain, c'est que si elle avait été impliquée dans le dossier d'une manière ou d'une autre, il n'aurait pas été ignoré comme il l'avait été lorsqu'il avait demandé à ce que sa planète soit contactée et consultée. Il entendait d'ailleurs récupérer son dossier et toutes les informations disponibles sur la maladie pour les envoyer à Hébrida afin que département médical se penche malgré tout dessus. Peut-être devrait-il envisager de faire de même avec les maladies terriennes les plus graves et les plus courantes, juste par précaution...

« Alors, c'est quoi le programme des réjouissances ? » demanda-t-il, maussade et résigné.

Il n'allait pas feindre d'être enthousiaste à la perspective d'un énième examen médical et des recommandations de ce qu'il devait faire ou non, d'autant qu'il ne pouvait pas s'y soustraire. De toute façon, ce n'est pas comme s'il pouvait berner l'une ou l'autre des présentes. Il se demandait soudain ce qu'il se passerait s'il décidait de disparaître pendant les deux semaines et d'aller passer sa convalescence ailleurs, genre sur une planète paradisiaque sur laquelle il serait accueilli à bras ouverts, et sans supervision...