Stargate Zone
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

Stargate ZoneConnexion
-20%
Le deal à ne pas rater :
Drone Dji DJI Mini 4K (EU)
239 € 299 €
Voir le deal

La psychanalyse du vide

2 participants

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyLa psychanalyse du vide

more_horiz
Plume se tenait au milieu de la pièce. Droite et souriante, les mains écarlates du sang de sa victime. Enfin, elle ne serait plus une menace. Enfin, l'ultime raison de sa solitude n'était plus. Un grand soulagement envahit le coeur de la jeune femme avant qu'une silhouette ne se découpe dans l'embrasure de la porte. Son sourire s'agrandit en découvrant le retour d'Aynira qui, elle, n'avait d'yeux que pour le cadavre à ses pieds. La narisienne se jeta au sol dans la marre de sang et Plume fronça les sourcils en voyant des larmes dévaler ses joues. De rage, ses yeux s'illuminèrent de jaune lorsqu'elle entendit le cri qu'Aynira lui jetai à la figure.

"Monstre !"

∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞

Le souffle court, Plume ouvrit les yeux et se redressa dans son lit. Elle cacha son visage humide dans ses mains pour tenter de chasser ses images affreuses et l'écho du cri qui résonnait encore à ses oreilles.

Encore une mauvaise nuit. Plume avait travaillé jusque très tard dans la nuit pour s'empêcher de penser et se fatiguer suffisamment pour espérer dormir un peu. Cela avait à moitié fonctionné. Depuis plus de trois jours sans sommeil reposant, elle avait sombré dans l'inconscience à peine sa tête posée sur l'oreiller. Mais le répit fut de courte durée.

Elle n'avait qu'une envie, sortir de ces quartiers et se rendre au gymnase. Il fallait qu'elle tape. Qu'elle tape fort. Mais une vive douleur dans son bras droit lui rappela la triste réalité. Avec sa main, son poignet et son avant bras lacéré, elle ne pouvait pas évacuer sa frustration et sa colère comme elle le faisait d'habitude. Debout, à faire les cents pas entre les murs de ses quartiers, elle aurait tout donné pour qu'Aynira soit là et la prenne dans ses bras.

Mais elle n'était pas là. Et son retour n'était pas prévu avant plusieurs jours. Le calvaire n'était pas encore terminé.

*Accepte ce que tu es !*

Plume ferma les yeux en serrant les dents et ouvrit compulsivement son manuel de géologie.

*Et tu crois que ça va changer les choses ?*

"La métallogénie (ou gitologie ou encore géologie minière) s’intéresse à la genèse des gites minéraux et à la recherche de substances minérales utiles. L’hydrogéologie : c’est l’étude des eaux souterraines. Elle s’intéresse aux nappes d’eau emprisonnées dans des couches et des cavités. Les branches impliquées sont la pétrographie des roches sédimentaires et la stratigraphie. La géologie marine : Elle s’intéresse aux milieux marins…"

*Pathétique !*

Il n'était que cinq heure trente du matin. Plume avait dormi à peine une heure et tenait debout par la force de sa volonté. Mieux valait s'effondrer que se remettre à rêver.

∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞

Plusieurs heures plus tard, après une douche rapide, Plume prit la direction du bureau de Bressignac. Elle savait qu'elle n'avait pas le droit de manquer le rendez-vous mais le redoutait bien plus que d'habitude. Elle n'avait presque avalé que de l'eau depuis plus de trois jours. Dans cet état, elle ne risquait pas de faire du mal au psychologue. Du moins, elle l'espérait. La jeune femme avait revêtue une veste longue aux larges poches et y avait glissé sa main blessée. Elle n'avait aucune envie d'en parler alors mieux valait que Bressignac ne se rende compte de rien. Silver sur son épaule, elle toqua à la porte de sa main gauche et fit de son mieux pour garder l'esprit clair, sans penser à ce qu'il se déroulait au même moment dans une galaxie lointaine.

Aujourd'hui, pas de chocolat chaud. Juste une jeune femme fatiguée et résignée.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Pour Charles, la journée était plutôt ordinaire. Il s’était presque habitué à venir sur la station à présent. Presque. Il avait toujours cet émerveillement d’enfant devant la baie d’observation depuis laquelle il s’amusait à essayer de reconnaître les pays ou il avait servi. Jamais il n’aurait pu penser, à l’époque qu’une station orbitale au dessus de lui le protégeait d’une menace invisible mais pourtant terrible.

Pour un peu cela aurait rendu les conflit terrien petit et sans conséquences. Mals les victimes qu’il avait croisé alors n’aurait sans doute pas été de cet avis.

Son premier rendez-vous du matin était avec Plume. Depuis bientôt deux ans qu’il s’occupait d’elle, il était plutôt fier des progrès que la jeune femme avait fait. C’était encore loin d’être parfait bien sur, mais au moins venait-elle d’elle même aux séances et ne lui servait-elle plus de silences hostiles. Lentement, son comportement de bête traquée se lissait mais il restait encore beaucoup de chemin à parcourir.

Aussi fut-il particulièrement choqué de l’état dans lequel elle se présenta. Yeux dans le vagues, cheveux en batailles. Même ses vêtements étaient étrange et sa posture indiquait clairement qu’elle tentait de lui cacher quelque chose.


« - Mon dieu, Plume mais que vous est-il arrivé ? Asseyez-vous. Avez vous besoin de quelque chose ? »

Elle était visiblement épuisé et à bout de nerfs. Mais pourquoi une telle rechute ?

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Evidemment, Charles s'aperçut rapidement que Plume n'était pas dans son état normal. Après deux ans de rendez vous réguliers, le psychologue avait fini par la connaître. Il l'avait vu au mieux, comme au pire de sa forme mais, aujourd'hui, elle était particulièrement amorphe.

"Bonjour."

Il lui proposa rapidement de s'assoir et la jeune femme ne trouva pas la force de protester. Elle voulait en finir, vite, et retourner s'enfermer dans ses quartiers.

"Je suis fatiguée, … Je ne dors pas très bien."

Elle doutait fortement qu'il en reste là mais plus elle y pensait et plus entendait le cri qu'Aynira avait poussé dans son rêve. Plume ôta sa main gauche de Silver, qui venait de se lover sur ses genoux, de peur de lui faire mal. La droite était toujours enfouie dans sa poche pour ne pas que Charles ne remarque sa blessure.

Quant à ce dont elle avait besoin, il n'était pas en mesure de lui donner. Personne ne le pouvait. La jeune femme devait simplement prendre son mal en patience, attendre, et trouver un moyen de se rendre un minimum présentable pour le retour d'Aynira. Elle ne voulait pas que la narisienne la retrouve aussi faible et pathétique.

"J'ai besoin, … de rester calme."

C'était ce qui résumait le mieux la situation actuelle. Est-ce qu'il allait en prendre compte et la laisser partir ? Un espoir qu'elle redoutait malheureusement vain.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
« - Je vois ça, répondit Charles à la première réponse. Vous auriez dû venir plus tôt. Je vous aurais prescrit de quoi dormir, plutôt que de vous mettre dans un tel état. »

Il n’aimait pas jouer avec la pharmacopée, mais il y a des moments où il faut savoir utiliser toutes les armes à disposition. Il fouilla dans son bureau et en sorti rapidement deux boites qu’il posa devant lui.

« - Ca c’est une infusion relaxante. Buvez en avant de vous coucher. L’autre est un somnifère plus puissant. Si réellement vous ne parvenez pas à dormir, prenez-en un. Mais un seul, d’accord ? »

Evidemment, ce manque de sommeil n’était qu’un symptôme et il fallait découvrir la source du problème. Mais comme à son habitude, Plume s’était refermée comme une huitre. La faire se confier n’allait pas être une partie de plaisir.

« - Je comprends que vous ayez besoin de calme, et je ne peux qu’être d’accord, dit-il, presque à voix basse. Mais il doit bien y avoir une raison pour laquelle vous ne dormez pas. »

La question était directe cette fois mais il doutait que supporte une longue séance et s’il voulait l’aider, il devait progresser rapidement. Une fois de plus il se demanda pourquoi elle cachait sa main droite mais soupçonnait que cela soit un autre symptôme du mal qui la rongeait.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Si Plume avait voulu des médicaments, elle les aurait demandé à Tomson la veille mais, au contraire, la jeune femme refusait l'idée de somnifères. Se plonger, volontairement, dans un état où elle devrait supporter ses cauchemars sans avoir la possibilité de se réveiller, et se mettre ainsi en danger en cas de problème extérieur était loin de lui plaire. Non. Elle voulait être maîtresse de son réveil. Si jamais il se passait quelque chose et qu'elle était incapable de se réveiller, elle courrait un grand danger.

Alors que Bressignac sortait deux boîtes de son tiroir, la jeune femme porta les yeux sur la première, délaissant la seconde. Une infusion. Aynira lui en faisait boire régulièrement, pour l'apaiser, justement. Elles n'avaient jamais été très efficaces mais elle devait bien faire un effort pour contenter le psychologue. De sa main gauche, elle saisit donc la boîte et la posa à côté d'elle.

"Merci."

Alors qu'il lui demandait la raison de cette impossibilité de dormir, Plume le reprit d'une voix lasse.

"C'est pas de m'endormir, le problème. Je m'endors très bien. Très vite."

Elle soupira légèrement tritura nerveusement le bord de la boîte en carton de sa main gauche.

"Je fais des cauchemars. Dès que je ferme les yeux."

Bressignac connaissait sa propension aux cauchemars. Elle lui en avait déjà souvent parlé. Depuis qu'elle avait commencé à fréquenter Aynira, elle s'était aperçu que la présence de la narisienne diminuait fortement la fréquence de ces mauvais rêves. Mais elle n'était plus là depuis plusieurs jours et ne revenait pas avant plusieurs autres. De plus, la raison de son absence ajoutait tout un panel de possibilités pour ces terreurs nocturnes.

"Aynira est partie vendredi, … pour la semaine."

Cela devrait permettre au psychologue de comprendre la situation dans laquelle elle se trouvait mais, devait-elle lui parler de Méthis qui la hantait, même éveillée ?

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Plume ne prit qu’une des deux boites, la plus légères. C’était rassurant en un sens. Elle ne voulait pas s’abrutir et ne risquait pas de faire une grosse bêtise.

Étonnement, elle parla plus vite qu’il s’y attendait. Mais au final, elle savait comment se déroulait leur session et peut être, peut être, en voyait-elle le bénéfice. A moins qu’elle ne veuille simplement en finir plus vite.

Il leva un sourcil surpris en apprenant qu’elle s’endormait aisément mais compris ensuite immédiatement de quoi il retournait.

« - Ça n’est pas la première fois. Votre inconscient travaille et ressasse votre histoire. Ça n’a rien de surprenant, malheureusement. Mais vous arriviez à les contrôler jusqu’à maintenant. Quelque chose a changé ? »

Sa bouée de sauvetage avait disparue. Et elle se retrouverait seule face à ses démons. Mais cela semblait bien plus violent que tout ce dont elle lui jamais parlé.

« - Vous n’avez personnes d’autres ? Je veux dire : a qui parler, avec qui passer un moment. Comment occupez-vous vos journée ? »

Sa sa relation avec l’ambassadeur Leyva était à ce point exclusive qu’elle l’empêchait d’avoir le moindre contact amical, il faudrait qu’il lui en parle rapidement. Plume ne pouvait pas faire de telle crise à chaque fois qu’elle se retrouvait seule.

« - Souhaitez vous me parlez de vos rêves ? demanda-t-il finalement. »

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Plume soupira à la question de Charles. Ce n'était pas sa faute, à lui, mais la fatigue et la situation la rendait nettement moins patiente. Pourtant, elle savait qu'elle devait faire un effort, se maîtriser, et répondre à ses questions.

"Il y a Noa. Et Nadja, parfois, … on s'entraîne ensemble quand l'Achilles est arrimé. Mais, …"

La jeune femme avait visiblement du mal à s'expliquer.

"Quand je suis, … comme ça, … je, … ne me contrôle pas… Je ne veux pas les blesser, … Je préfère travailler. Dans mes quartiers."

Elle savait que ce n'était pas ce qu'il voulait entendre mais, lorsqu'on voyait ce qu'elle s'était infligée à elle-même dans un excès de rage, autant ne pas risquer de l'infliger aux autres. Elle s'en voudrait. De plus, elle serait sans doute réprimandée et enfermée pour ne pas blesser d'autres membres du SDT et elle savait qu'elle ne supporterait pas l'enfermement.

C'est alors qu'il lui demanda de parler de ses rêves. Plume, qui jusqu'à présent évitait son regard, leva les yeux pour croiser ceux cachés derrière les lunettes du psychologue. Toute sa détresse était visible dans ce regard.

"Est-ce que je suis obligée ?"

Evoquer les souvenirs de Méthis mêlés à ce qu'elle s'imaginait se passer sur Narisa au même instant était une perspective loin d'être réjouissante. Surtout lorsqu'elle entendait le rire malsain de la goa'uld résonner dans son esprit. Plume sentit son coeur s'emballer et sa respiration se fit irrégulière tandis qu'elle fournissait de gros efforts pour la contrôler au mieux.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Charles connaissait les deux personnes que citait Plume. Ils les avait tous les reçus dans ce même bureau dans des moments difficiles de leur vie. L’un et l’autre avait la tête sur les épaules, à leur manière et pouvait constituer une bouée de secours tout a fait valable à la jeune femme.

« - Si je comprend bien, votre solitude vous pèse, mais vous refusez de voir vos amis de peur de ne pas vous contrôler, ce qui renforce encore votre solitude. »

A croire qu’elle se complaisait dans cet état de déprime semi permanent pour y replonger à bras ouvert aussi facilement.

La réaction à sa proposition fut aussi verbale que physique. Elle était clairement terrifié par ces cauchemar et n’était pas prête à les affronter.

« - Non, absolument pas, répondit-il. Je vous l’ai déjà dit, vous n’êtes forcé à rien ici. Si vous ne vous sentez pas prête, ne le faite pas. Cela dit, je me fait beaucoup de soucis pour vous. Vous vous rendez bien comptez que vous ne pouvez continuez ainsi. Vous allez finir par blesser quelqu’un ou vous même dans une crise de colère ou tout simplement devenir folle seule chez vous. »

Pour tout autre patient, il aurait recommandé qu’elle passe la nuit en observation à l’infirmerie. Mais son inimitié avec le docteur Garett était de notoriété publique rendant cette option pour le moins compliqué. Rien n’était jamais simple ici bas… ou ici haut.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Plume grimaça légèrement à l'analyse de Charles.

"Ma solitude ne me pèse pas. J'ai l'habitude d'être seule."

Longtemps, cela avait constitué son unique moyen de rester en vie et d'accomplir sa mission. Non, ce n'était pas d'être seule, le problème, c'était la raison de cette solitude. Mais la jeune femme avait conscience de l'absurdité de sa situation. Elle soupira.

"Je suis ridicule, n'est-ce pas ?"

*Ridicule et faible ! Regarde-toi ! Pitoyable ! Ta vie étais tellement mieux quand j'étais toi !*

Plume porta instinctivement sa main gauche à sa tempe, comme si ce geste futile pouvait faire taire cette voix rauque. C'était, évidemment vain. Alors, lorsque Bressignac voulut connaître le contenu de ses cauchemars, elle le fixa d'un air paniqué. Il lui affirma qu'elle n'était pas obligée de parler mais avoua qu'il s'inquiétait. Quand il parla de la probabilité qu'elle blesse quelqu'un ou se blesse elle-même, elle ne put s'empêcher de soupirer.

"Trop tard, …"

Penaude, les yeux fixés au sol, elle sortit sa main droite de sa poche afin que Charles puisse voir le bandage. Elle n'était pas fière d'elle et, avant qu'il n'ait pu dire quoi que ce soit, Plume se leva et se planta devant la baie vitrée du bureau, prenant soin de passer le plus loin possible du psychologue. Là, elle resta silencieuse un long moment, fixant la silhouette bleue qui effectuait sa rotation devant elle comme si de rien n'était. Agaden y ressemblait beaucoup, vu de l'espace. Ronde, bleutée. Seules les découpes des côtes y étaient différentes. Ici, elle ne reconnaissait rien des continents qu'elle avait étudiés au pensionnat.

"Ce sont des souvenirs."

Bressignac avait vu juste au sujet de sa propension à se blesser et blesser les autres. Peut-être avait-il aussi raison pour le reste. Peut-être que raconter ses cauchemars pourrait réellement l'aider.

"Ceux de Méthis, pour la plupart."

Chacune de ses phrases était suivie d'un long silence alors que ses yeux ne quittaient pas la Terre sous la station.

"Mais, il y en a d'autres. Cette nuit, … j'étais debout, du sang plein les mains. A mes pieds il y avait un corps. Un cadavre. Alyara. C'est moi qui l'avait tuée."

Plume s'arrêta un long moment. Charles savait qui était Alyara. Elle lui avait déjà parlé de la compagne narisienne d'Aynira. Celle qu'elle allait voir régulièrement. Lorsqu'elle retournait chez elle. Celle avec qui elle était en cet instant. A des milliards d'années lumière.

"Quand Aynira est arrivée, …"

La jeune femme croisa les bras sur sa poitrine comme si cela pouvait la protéger de la suite de son récit.

"Elle n'a dit qu'un seul mot. Monstre."

Ses yeux, bien trop brillants, laissèrent échapper quelques larmes silencieuses qu'elle laissa dévaler sur ses joues sans bouger.

"J'entends encore son cri. Je revois son regard, …"

Et ce n'était qu'un cauchemar parmi d'autres. Comment Charles pourrait-il l'aider à gérer ça ? La jeune femme doutait qu'il puisse réellement faire quoi que ce soit.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Même si elle clamait son habitude d’être seule, sa souffrance était visible comme le nez au milieu de la figure.

« - Non, vous n’êtes pas ridicule, Plume. Vous avez peur de vous même et des réactions que vous pouvez avoir ce qui vous conduit à des mesures drastiques. C’est courageux de votre part, même si vous devriez accorder un peu plus de crédit à vos proches. »

Il soupira en voyant sa blessure mais, au moins, le bandage était bien fait, ce qui signifiait qu’elle était passé par l’infirmerie et avait donc été soignée correctement. Et vu qu’il n’avait pas entendu parler d’incident la-bas, cela avait du bien se passer.

Il la regarda se lever, se demandant si elle allait partir ainsi mais non. Sans le regarder, elle se mit à parler, lentement et lui rapporter ce qui l’empêchait de dormir. Charles n’aurait pas aimer être dans sa tête quand elle se souvenait des horreur que lui avait fait faire la chose qui l’avait possédé. C’en était presque un miracle si elle n’avait pas perdu totalement la raison après cela.

Elle avait rarement été aussi ouverte lors d’une session. L’épuisement sans doute qui abaissait ses défenses. Mais ce qu’elle disait révélait un malaise profond envers sa compagne, compagne qui était également sa seule bouée de secours.

« - Vous n’avez jamais parlé à l’ambassadeur Leyva d’à quel point sa polygamie vous pesait, n’est ce pas ? »

Il se demanda un moment si la narisienne comprenait à quel point sa façon de vivre pouvait être blessante pour Plume.

« - Votre cauchemar, aussi horrible qu’il soit, est révélateur d’un malaise bien humain. Et vous craignez qu’Aynira ne comprenne pas votre sentiment d’abandon à son retour. »


Il avait bien pris soin d’éviter le mot « jalousie » bien trop négatif à son goût. Et bien sur, Plume se blâmait pour cela plutôt que d’en chercher la cause plus profonde.

« - L’ambassadeur vous aime, Plume, c’est évident. Vous ne devez pas avoir peur de lui en parler à son retour. Je doute qu'elle voit jamais en vous un monstre»

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Plume garda son regard fixé sur l'extérieur en écoutant Bressignac affirmer qu'elle n'était pas ridicule. Elle avait du mal à y croire mais cela lui fit un peu de bien. Puis, il supposa qu'elle n'avait jamais discuté de sa gêne avec Aynira. Une supposition erronée mais comment aurait-il pu savoir ?

"Si. Une fois."

Plume avait très mal pris la première visite d'Alyara sur le JPS. Un endroit qu'elle pensait sécurisant pour elle, au moins sur ce point-là. Elle avait eu beaucoup de mal à se calmer et avait été parfaitement honnête avec la narisienne, la prévenant qu'elle ne voulait rien savoir de leurs activités et qu'elle ne voulait pas voir sa compagne. Depuis, une sorte de rituel s'était installé. La veille du départ d'Aynira, Plume s'enfermait, seule, dans ses quartiers. Elle ne voulait pas connaître l'heure du départ ni être présente. Elle savait qu'elle ne pourrait pas voir Aynira partir sereinement et ne voulait pas ajouter un malaise pour la narisienne. Lorsqu'elle revenait, en général, Plume finissait par la rejoindre, dans ses quartiers, sans un mot et s'endormait dans ses bras.

Elle ne lui demandait jamais ce qu'elle avait fait ni comment s'était passé son voyage. Elle ne disait jamais rien, en fait, profitant simplement du simple fait qu'une fois de plus, elle soit revenue. Car, même si Aynira le lui promettait à chaque fois, il subsistait toujours un doute chez Plume. Et si elle n'avait plus envie de revenir ?

"A quoi bon recommencer ? Ca ne changera pas. Je ne peux pas lui demander ça."

Lorsque Bressignac interpréta son cauchemar, une fois de plus, il se trompa. Elle n'avait pas peur qu'Aynira ne comprenne pas. Elle avait peur qu'elle la voie finalement telle qu'elle était réellement. Car le meurtre d'Alyara n'était pas une métaphore. Souvent, Plume se surprenait à désirer sa mort. Une chose qu'elle ne pouvait pas dire à la narisienne.

Mais ce fut la suite des paroles du psychologue qui mirent le feu aux poudres. Il la forçait souvent à se confronter au champ lexical de l'amour qu'elle redoutait. Si la jeune femme faisait de gros progrès dans ce domaine depuis quelques temps, aujourd'hui était un jour où elle n'avait pas la force de repousser ses souvenirs et la voix rauque, tapie au fond de son crâne, s'en saisit sans attendre.

*Oui. Elle t'aime comme t'aimait Calvin ! Tu t'en souviens, n'est-ce pas ? Ce qui lui manquait d'expérience, il le rattrapait en passion !*

Plume serra les dents autant que les poings et sa respiration se fit plus saccadée.

*Mais elle sait y faire, elle. Faut dire qu'elle a nettement plus d'expérience. Mais ne te fais pas d'illusion, elle te vendra elle aussi ! D'ailleurs, elle est probablement en train d'y songer à l'heure qu'il est. Ou alors elle s'exerce encore un peu, …*

Plume ferma les yeux, peinant à contrôler sa respiration de plus en plus bruyante.

*Faut dire que l'autre est plus avenante. Pas besoin de faire attention, pas de retenue ni de frustration. Pas comme avec toi. Pas étonnant qu'elle aille voir ailleurs. Qui voudrait…*

"Tais-toi ! TAIS-TOI !"

Le poing droit de Plume s'abattit sur la baie vitrée, heureusement très solide, qui lui faisait face, réveillant ainsi une vive douleur qui se propagea dans tout son bras et gagna son cerveau. Mais c'était presque salutaire puisque la voix finit par obéir alors que la jeune femme se laissait glisser au sol, le bras contre la poitrine et le front contre la vitre.

Silver sauta prestement du canapé sur lequel il était resté, se précipita vers elle et grimpa sur ses genoux repliés pour atteindre son visage.

C'était trop tard. Bressignac l'avait vue et entendue. Il allait forcément se poser des questions et il allait l'enfermer ou la bourrer de médicaments au point qu'elle ne puisse plus contrôler ses propres gestes. C'était la fin.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Le rendez-vous parti en eau de boudin plus vite qu’il ne lui fallait pour reciter un « notre père ». Plume le surprit en disant qu’elle avait déjà évoqué le problème avec sa compagne. Il aurait été curieux de savoir en quels termes. Mais la suite alla de toute façon trop vite pour qu’il envisage une thérapie de couple qui se serait annoncé franchement hors normes.

Soudain, après un silence un peu plus long que d’habitude, l’extraterrestre se mit à frapper la vitre et Charles craint un instant qu’elle ne al brise. C’était évidemment impossible mais elle y mettait toute sa force et sa rage.

Et puis elle hurla, s’adressant à quelqu’un qui n’était pas la. La main du psy passa sur le bouton d’alarme sous son bureau qui lui aurait permis d’appeler à l’aide mais il s’arrêta. Plume lui était arrivé, dans un état proche de celui d’aujourd’hui, après justement une altercation avec la sécurité. S’il la faisait enfermer maintenant, il perdrait tout le bénéfice de ces mois de travail. Il commençait enfin à gagner sa confiance, même s’il avait clairement sous-estimé l’ampleur de son trouble. C’était maintenant qu’elle avait besoin de lui.

Il se leva et vint se placer près d’elle, en prenant garde de ne pas la toucher. Il posa une boite de mouchoir en tissus entre eux et attendit qu’elle se calme avant de reprendre, d’un ton aussi calme que possible.

« - J’espère qu’il va finir par se taire, en effet, car il me semble de bien mauvais conseil. »

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Plume entendit et sentit Bressignac se déplacer doucement jusqu'à s'assoir à côté d'elle. Comment pouvait-il ne pas avoir peur ? Les yeux fermés, la jeune femme se contentait de carresser Silver le plus doucement possible de sa main gauche en tentant de calmer sa respiration.

Après ce qui lui sembla être une éternité, elle parvint à se retourner lentement pour s'assoir à son tour contre la baie vitrée et tendit la main vers la boîte de mouchoirs. Silver resta sur ses genoux pendant qu'elle essuyait ses joues humides.

"Pas il. Elle."

C'était admettre qu'elle était folle mais, après tout, pourquoi continuer à mentir ? Elle était tellement fatiguée.

"Vous allez m'enfermez, …"

Son bras droit la lançait toujours mais c'était bien le cadet de ses soucis. Il y avait une certaine résignation dans sa voix. Ses yeux se fermèrent d'eux-même alors que la jeune femme tachait de se convaincre intérieurement que c'était peut-être une bonne chose. Mais la simple idée d'être privée de sa liberté ravivèrent sa panique et de nouveaux sillons humides strièrent son visage.

"Je ne le supporterai pas. Je préfère mourir."

Et ce n'était pas des paroles en l'air. Un nouvel emprisonnement, quelque soit la forme qu'il prenait, était inenvisageable.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Elle… met ça dans un coin de ta tête, Charles. Inquiet, le psy regarda Plume se servir des mouchoirs et essayer de reprendre ses esprits.

Il sourit intérieurement quand elle lui demanda s’il allait la faire enfermer. Il avait sans doute pris la bonne décision en s’asseyant près d’elle. Encore fallait-il qu’il ait eu raison sur le long terme.

« - Pas si on peut l’éviter. Je sais à quel point cela serait dur pour vous. »

Elle le lui confirma en terme non équivoque et il hocha la tête, conscient qu’elle était sans doute littérale dans sa déclaration.

« - Je me dois de protéger la station, vous le savez mais vous êtes avant tout ma patiente Plume. Et je me refuse à prendre une décision qui aurait des conséquences à ce point dramatiques. Cela dit, il va vous falloir être totalement franche avec moi à présent. Vous sentez vous prête à cela ? »

Il la regarda avec un sourire bienveillant et lui désigna sa main.

« - Montrez-moi ça. Essayons de vous réarrangez ce bandage sans passer par la case infirmerie. »

Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas prodigué de premier soin mais la blessure de Plume n’avait rien de sérieux et avait déjà été pansé avec compétence. Il se contenta de vérifier qu’aucun élément étranger n’avait pénétré les plaies puis referma le bandage.

« - Voilà, ça devrait aller mieux. Je vais faire un peu de thé. Navré je n’ai pas de chocolat ici. »

Il prépara lui-même une théière et servit deux tasses devant elle avant de boire le premier.


« - Et si vous me parliez de cette voix que vous entendez ? Prenez le temps qu’il faut. »

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
La réponse de Bressignac était quelque peu rassurante mais ce n'était pas une franche dénégation non plus. Plume comprit parfaitement le sous entendu. Si elle ne coopérait pas, il l'enfermerait. Et il aurait sans doute raison. Comme il l'avait dit, son premier travail était de s'assurer qu'il n'arrive rien à la station ou à ses occupants. S'il fallait en neutraliser un pour sauver les autres, il le ferait. A sa question, la jeune femme ne put que soupirer.

"Non. Mais je n'ai pas vraiment le choix, …"

Avant de rentrer dans le vif du sujet, il voulut voir son bras blessé. En fixant ses chaussures, Plume le tendit vers lui et retint autant que possible ces grimaces et sursauts de douleurs lorsqu'il manipula le membre qu'elle venait de molester. Si elle n'apprécia pas d'être touchée ainsi, cela lui donnait au moins le temps de se faire à l'idée de ce qui se déroulait en suite et de gagner un peu de temps.

Elle ne retint pas le psychologue lorsqu'il alla faire du thé et tenta de rester le plus calme possible lorsqu'il revint vers elle pour servir deux tasses fumantes. Plume ne toucha pas à la sienne. Un liquide brûlant et un récipient potentiellement coupant n'était pas des plus conseillés pour l'instant. Pas alors qu'elle n'était pas entièrement sûre d'arriver à se contrôler.

"Merci."

Le mot, presque murmuré, franchit ses lèvres par réflexe. Si elle perdait le contrôle, au moins n'oubliait-elle pas ses manières. Mais voilà. Il fallait revenir au fond du sujet et Bressignac ne se priva pas de le lui rappeler. Il précisa qu'elle pouvait prendre son temps mais elle supposait qu'il voulait tout de même rentrer chez lui pour dîner. Elle ne pouvait pas non plus y passer la journée et, plus elle attendrait, plus ce serait difficile, pas vrai ? Après avoir inspiré profondément et s'être ravisée plusieurs fois, Plume finit par se lancer.

"C'est la voix de Méthis. Ma voix."

Elle inspira une foix de plus pour se donner le courage de continuer.

"Parfois, … je la vois aussi, …"

Plume sentit Silver se déplacer légèrement pour glissa sa tête contre son cou et le caressa d'une main, remerciant son soutien.

"Elle me rappelle, … tout ce que j'ai dit, … ce que j'ai fait, … ce qu'elle m'a fait, …"

La jeune femme luttait pour ne pas se remettre à pleurer. Se rappeler tout cela était des plus difficile et l'énoncer à voix haute était tellement humiliant. Elle se sentait faible et idiote. Exactement comme le lui répétait Méthis.

"Elle me rappelle combien je suis faible, … insignifiante, … perturbée, …"

Reniflant bruyamment, Plume leva soudainement les yeux vers l'homme d'Eglise.

"Je sais ce qu'il se passe. Je sais que tout ça, c'est pas réel, que je suis probablement, … non, totalement folle ! Je, …"

C'est alors qu'elle porta les deux mains à son visage en même temps que les larmes se mettaient à couler.

"Elle a raison de partir ! Elle mérite tellement mieux !"

Ce n'était plus de Méthis dont Plume parlait alors mais ça, Bressignac l'avait très bien compris tout seul.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
« - De rien, répondit le psychologue sur le même ton. »

Il ne fut pas réellement surpris qu’elle ne touche pas au thé mais cela donnait un certain sentiment de réalité à la scène, ce qu’il recherchait par-dessus tout pour qu’elle ne dérive pas plus.

Et bien cela sentait particulièrement bon et aidait à se détendre.

Il n’aurait pas dû être surpris quand elle évoqua Methis. Le traumatisme de Plume était profond et qu’elle voit ou entende son ancien bourreau n’était pas si étonnant. Qu’elle ne lui en ait jamais parlé, par contre, était légèrement vexant et il avait fallu une crise très forte pour qu’elle s’ouvre enfin.

« - Celui qui aurait la bêtise de vous considérer comme faible aurait, à mon avis, une très mauvaise surprise. Et non, vous n’êtes pas folle. Seulement traumatisé. Ce qui fait de vous une humaine à part entière, j’en ai bien peur. »

Mais cela voulait dire qu’il allait devoir changer de tactique avec elle et employer des méthodes beaucoup plus violentes pour l’aider.

« - Ecoutez, Plume. Si vous voulez allez de l’avant, il va vous falloir affronter vos démons. Ça ne se fera pas en un jour et ça ne sera pas agréable, évidement mais vous pouvez vous en sortir. »

Il allait devoir préparer ses séances EMDR avec grand soin pour ne pas la pousser trop loin, trop vite. Il n’était pas certain qu’un traumatisme aussi profond ait jamais été traité mais il ne pouvait pas ne pas essayer.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Plume ne bougea pas en entendant le discours de Bressignac. La tête dans les mains, elle avait du mal à s'empêcher de pleurer. Le constat était sans équivoque pour la jeune femme et ce n'était pas à son avantage. Mais le psy semblait résigné à la faire changer d'opinion. Lui aussi pensait qu'elle pouvait s'affranchir de son traumatisme et affirmait qu'elle n'était ni folle, ni faible mais la jeune femme avait beaucoup de mal à le croire.

De longues minutes passèrent avant qu'elle ne puisse lever légèrement la tête, le visage humide. Sans dire un mot, elle avança sa main valide vers le paquet de mouchoir et entreprit de sécher ses joues et ses yeux rougis en essayant de ne plus penser à Aynira et à la déception qu'elle ressentirait en la voyant ainsi.

Ce que Bressignac lui proposait, c'était d'accepter de souffrir davantage et longtemps et elle ne s'en sentait absolument pas la force. Pourquoi est-ce que tout devait être aussi compliqué ? Est-ce qu'il avait conscience de ce qu'il lui demandait ? Mais quel autre choix avait-elle ?

La jeune femme passa encore de longues minutes silencieuses, cherchant une alternative ou tâchant d'accepter la situation. Finalement, elle en vint à la seule conclusion logique. Elle n'avait pas le choix. Si elle ne faisait rien, elle finirait par blesser quelqu'un ou se blesser elle même. Et pire, elle risquait de perdre complètement le contrôle et Aynira s'éloignerait d'elle.

"Vous devrez être armé."

Parce qu'elle risquait fort de devenir violente et dangereuse.

"Et je veux que ce soit en extérieur."

Là où elle pourrait plus facilement s'éloigner pour ne pas risquer de le blesser.

Luttant pour ne pas se remettre à pleurer, Plume ferma les yeux. Elle venait d'accepter de vivre un calvaire.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Lentement, Plume se fit à l’idée de vivre une nouvelle thérapie. Elle avait compris que cela ne serait pas agréable mais elle voulait aller de l’avant à nouveau plutôt que se morfondre comme ces deniers jours. C’était une petite victoire dont elle ne prendrait conscience que plus tard.

Il fronça les sourcils quand elle lui recommanda d’être armé. Charles était un ancien militaire et formé au maniement des armes à feu. Il s’entrainait toujours d’ailleurs, à l’occasion même s’il reconnaissait avoir beaucoup perdu. Mais il n’en portait plus au quotidien depuis longtemps et cela lui convenait parfaitement. Il avait passé de longues séances à établir un lien de confiance avec Plume, ça n’était pas pour lui signifier maintenant qu’il avait peur d’elle.
Elle insista également pour que les séances se passe à l’extérieur. Voilà une requête qu’il pouvait accepter sans que cela lui pose de problèmes.

« - D’accord. Je nous trouverais un endroit discret et en plein air. Et je demanderai à Patrick d’être présent, si ça peut vous rassurer. »

Sa charge lui imposait un garde du corps en permanence. Il avait réussi à imposer que celui-ci ne soit pas présent lors des séances avec ces patients mais si cela pouvait contenter Plume sans qu’il se retrouve avec un pistolet à la ceinture, cela serait parfait.

« - Je souhaite commencer très vite. En attendant, je veux que vous vous reposiez. »

Il récupéra la boite de somnifère et en sorti une pilule qu’il posa devant lui.

« - Je doute que vous fassiez des rêves, si ça peut vous rassurer. Mais vous devez être en forme, car la prochaine séance sera éprouvante. »

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Bressignac accepta ses conditions, même s'il reléguait la partie armée à un tiers. Au fond, cela importait peu, pourvu qu'il ne soit pas sans défense dans le cas où elle perdrait le contrôle. Plume acquiesça doucement, pas du tout pressée de démarrer. Mais ce n'était pas le cas du psychologue. Lui voulait commencer rapidement.

"Quand ?"

La réponse fut sans appel. Dès le lendemain. Bien sûr, il lui laissait le choix mais plus elle tarderait et plus ce serait compliqué. Elle avait, il y avait bien longtemps, appris à faire ce qu'elle avait à faire quelque soit ses sentiments personnels. En soupirant, elle acquiesça de nouveau mais, lorsqu'il lui tendit la pilule de somnifère, elle se contenta de la fixer longuement.

Si elle avalait ce comprimé, elle dormirait, certes. Peut-être même que ça lui éviterait les cauchemars, aussi. Mais elle serait enfermée dans un sommeil chimique et ses réflexes seraient endormis avec elle. Et s'il se passait quelque chose ? Et si elle avait besoin de se réveiller mais qu'elle n'y parvenait pas ? Non. C'était une chose qu'elle n'était pas prête à faire.

"Je ne prendrai pas ça."

La jeune femme prit appui sur sa main valide pour se relever et s'approcha du canapé sur lequel elle avait laissé la boîte de tisane. Ca, elle pouvait essayer. Silver sauta prestement sur son épaule alors que Plume se dirigeait vers la porte.

"Alors à demain."

Elle quitta la pièce en traînant les pieds et regagna ses quartiers aussi sec. Elle soupira en voyant le désordre dans lequel ils étaient, alluma la chaine hifi sur une musique douce et se mit alors à tout ranger. Cela l'occupait calmement et de façon productive. Elle devait surtout rester calme. Profitant d'une heure qu'elle savait creuse au mess, la jeune femme traversa le couloir pour rapporter un grand mug d'eau chaude dans laquelle elle glissa un sachet de l'infusion que lui avait donné Bressignac. Une fois servit, Plume contempla ses quartiers désormais parfaitement rangés. Ses livres et cahiers reposaient à même le sol à l'endroit où aurait dû se trouver le bureau, dans une pile parfaitement droite. Le lit, contre le mur d'en face, centré, était fait au carré. Une commode occupait le mur du fond et sa guitare, ainsi que son agiel étaient posés dans un angle, sur des pieds prévus pour les instruments de musique.

Soudain, tout cela lui parut dérangeant. Cela n'allait pas. Prise d'une impulsion, la jeune femme déposa sa tisane sur la commode et commença à modifier l'emplacement du mobilier. Le lit finit dans un angle. Une seule table basse suffirait. L'autre lui servirait de table pour poser son matériel en attendant d'avoir un nouveau bureau. La commode prit l'ancienne place du bureau et les instruments trouvèrent leur place au pied du lit. Cela lui laissait davantage d'espace devant la porte.

Avec un bras blessé et sa dose de fatigue, ces petits déménagements prirent un moment à Plume et l'occupèrent une bonne partie de l'après midi. Elle avait siroté sa tisane tout le long et la playlist avait continué à défiler sans discontinuité. Maintenant, la jeune femme n'avait qu'une seule envie. Dormir. Mais l'angoisse la gagnait rien qu'en y pensant. Elle quitta alors ses quartiers pour rejoindre rapidement ceux d'Aynira. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle faisait là jusqu'à ce que ses yeux tombent sur un t-shirt reposant sur un lit défait. Plume le saisit et, dans un geste instinctif, le porta à son visage pour retrouver l'odeur qui lui manquait. Satisfaite, elle retourna alors dans sa propre chambre et se glissa dans les draps en serrant le t-shirt contre elle. Il lui manquait encore la chaleur de la narisienne et le son apaisant de son rythme cardiaque mais elle devrait s'en contenter. Laissant la musique sur un niveau sonore un peu plus faible, elle se laissa glisser dans un profond sommeil.



Lorsque Plume se réveilla le lendemain matin, elle se souvint d'images désagréables. Elle avait de nouveau rêvé de Méthis dans des souvenirs ou des scènes qu'elle redoutais mais, bien que cela lui laissait un sentiment d'angoisse profond, ils ne l'avaient pas réveillée. La jeune femme se sentait à peine plus reposée que la veille et constata en grimaçant qu'il n'était que quatre heures et demi du matin mais, au moins, avait-elle dormi d'une traite jusque là et ne s'était pas réveillée en sursaut.

Plume prit une longue douche brûlante, repassa à l'infirmerie pour refaire son bandage, et retourna prendre de l'au chaude pour se faire une nouvelle tisane avant de regagner de nouveau ses quartiers. Elle passa alors plusieurs heures à jouer comme elle le pouvait avec sa guitare et se dirigea vers le bureau de Bressignac, la boule au ventre, lorsqu'il fut l'heure du rendez-vous.

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
Charles non plus ne dormit pas vraiment bien cette nuit-là. Il y avait bien longtemps qu’il n’avait pas traité de symptôme post traumatique grâce à cette méthode et il n’était même pas sûr que cela fonctionne sur une non humaine comme Plume. Mais l’année écoulée à l’aider lui avait appris quelque chose, c’est que sur le plan de la psyché, elle se comportait comme tous les patients qu’il avait pu rencontrer.

Elle lui avait demandé de se retrouver à l’extérieur et il choisit le petit jardin attenant à sa maison. Il fallait au maximum limiter les influence extérieure pendant la séance. D’un autre côté, si cet environnement pouvait aider sa patiente a se relaxer, il ne fallait pas hésiter.

A l’heure exacte, Plume sonna et il alla l’accueillir lui-même. IL avait préparé du thé et une carafe d’eau, disposé sur une table devant eux, ainsi que du papier et de quoi écrire.

« - Installez Plume. Comme je vous l’ai dit hier, nous allons essayer aujourd’hui quelque chose de nouveau. Cela sera sans doute éprouvant mais c’est une méthode qui a fait ses preuves. On l’utilise beaucoup dans le cas de militaire traumatisé au combat ou d’abus sexuel. Si à un quelconque moment, vous vous sentez sur le point de perdre pied, nous interromprons la séance et reprendrons dans quelques jours. Certains moments vont surement vous paraitre un peu étrange mais vous n’y ferez bientôt plus attention, vous verrez. »

Il voyait bien que son niveau de stress atteignait toujours des sommets et essayait d’être le plus rassurant possible. Après quelques secondes il reprit.

« - Je vous poserais régulièrement des questions sur votre ressenti. A la différence de nos précédentes séances, une phrase ou bien un seul mot seront suffisant. »

Voilà qui devrait parfaitement lui convenir, vu que généralement il fallait lui arracher les mots.

« - Mais avant toute chose, je voudrais que nous évoquions le but de cette première séance. Je voudrais que vous vous concentriez sur un élément de votre passé sur lequel travaillez. Vous n’avez pas besoin de me le raconter en détail. Juste le résumer en quelques phrase afin que je puisse vous accompagner. Pouvez-vous faire cela ? »

descriptionLa psychanalyse du vide EmptyRe: La psychanalyse du vide

more_horiz
privacy_tip Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum