Le matin même, Aeryn avait reçu un e-mail qui l'avait occupé toute la journée. Elle avait soupiré en lisant le message de Noa Pakeha et l'avait relu plusieurs fois, ainsi que le rapport de mission. La jeune femme avait consacré le reste de sa journée à consulter les différents rapports et bandes de caméras de surveillance afin de se forger sa propre opinion sur le sujet. Finalement, il ne lui manquait qu'un seul élément : la version du principal concerné. L'irlandaise n'attendit plus et saisit son communicateur Bell.
"Lieutenant Hunter ? Pourriez-vous me rejoindre dans mon bureau je vous prie ?"
Lorsqu'Aeryn reposa son téléphone, elle se replongea une fois de plus dans ses dossiers. Elle ne voulait pas prendre de décision sans avoir tous les éléments mais il fallait régler ça au plus vite. Plus elle connaîtrait le dossier et plus le traitement serait rapide. Dans un sens comme dans l'autre.
Quelques minutes plus tard, des coups retentirent contre le porte. Alors qu'Aeryn amorçait un mouvement pour se lever et aller ouvrir, elle se cogna le bras gauche contre le bureau et étouffa un cri de douleur. La jeune femme n'était toujours pas habituée à son attèle et ne prenait pas assez garde à ses mouvements. Finalement, elle resta assise et se contenta de répondre oralement.
"Entrez !"
Le militaire pénétra dans la pièce et Aeryn lui désigna un siège.
"Merci d'être venu si vite. Je vous ai appelé parce que j'ai reçu un mail ce matin. Certain de vos collègues ne sont pas convaincus par vos méthodes. Pouvez-vous me dire ce qu'il s'est passé durant les évènements du JPS et de la zone 52 s'il vous plaît ? J'aime a entendre toutes les versions avant de me faire une opinion."
La jeune femme s'adossa à son siège et écouta attentivement le militaire.
S’il y a une chose qu’il détestait par-dessus tout dans l’armée, c’était le grade.
Avec le grade venait l’autorité, mais aussi les responsabilités. Après la dernière opération sur Terre, Jonathan savait clairement que quelqu’un allait faire un rapport sur ce qu’il avait fait. Et il s’y attendait.
Lorsque le communicateur Bell sonna, il n’eut que pour toute réaction de poser les dossiers des nouvelles recrues qu’il avait commencé ce matin avec Nedjma. Celle-ci leva un sourcil quand elle le vit se lever, mais Jonathan se contenta de répondre simplement « Je reviens. » avant d’empoigner sa veste noire habituelle. Comme à son habitude, il était habillé en civil, mais désormais, un petit insigne doré attirait le regard au niveau de sa poche droite sur la poitrine de sa chemise. Ses galons de Lieutenant reposait désormais, seule marque de son grade qu’il s’autorisait à mettre pour le moment.
D’un pas vif, le soldat passa dans le couloir avant de frapper à la porte du bureau de la chef de base.
Dès qu’il eut reçu l’indication nécessaire pour entrer, Jonathan s’assit sur la chaise qu’on lui indiqua, posant ses coudes sur les accoudoirs et croisant les mains devant lui.
Les paroles de la chef de base n’eurent aucune réaction de surprise venant de sa part. Il pouvait presque mettre les noms sur les personnes qui avaient effectués ce rapport. Lentement, le soldat ferma les yeux avant de s’asseoir plus au fond de son siège. Combien de fois avait-il revu les éléments dans sa tête ? Dix ? Quinze ? Il ne savait plus vraiment… Pendant un moment, Jonathan eu une pensée pour son mentor, Jacob Auditore. Il comprenait maintenant pourquoi « Le vieux » s’intéressait autant à la loi…
Avec un claquement de langue, Jonathan rouvrit les yeux et commença à raconter les faits.
« Je suis resté volontairement derrière après la fin de la réunion à la vue de notre implication possible avec le reso. Comme vous le savez, j’ai eu à ma disposition de nombreux contacts plus ou moins illégaux un peu partout dans le monde, mais ces contacts fonctionnent sous la loi de l’argent. Ma prise de contact avec le Lieutenant Lawrence était une sécurité capable de trouver ma trace si je devais disparaitre temporairement. Pendant notre discussion à ce sujet, la station à effectuer l’embardée nécessaire pour éviter les satellites illégaux, nous avons dû monter au premier étage afin de nous informer, le Lieutenant Lawrence et moi. »
Il s’arrêta pour recentrer ses pensées. Sa voix n’avait pas flanché et il n’avait montré aucun signe de stress ou de panique.
« En toute normalité, je serais restée en l’air afin d’assurer la présence du commandement sur la station sachant que j’avais envoyé mon second sur le terrain, Mademoiselle Leyvana maitrisait la situation et rien d’étrange se passait, ce qui me semblait trop suspect à mon gout. Ma présence étant en plus non apprécié considérant que je ne devais être en bas à exécuter les ordres de mes supérieurs, sans offense, je me suis permis de m’éclipser pour rejoindre l’équipe en bas. »
Sa main attrapa un stylo qui trainait dans sa poche de pantalon, avant de le faire tourner telle une toupie.
« Comme vous le savez ensuite, j’ai été envoyé capturer notre hackeur une fois que la menace d’autodestruction avait été écartée. A ce moment-là, je soupçonnais encore que celui-ci, ou celle-ci dans le cadre présent était un facteur dans l’autodestruction. Noa signala Monsieur Kouznetski au même niveau que nous, des suites du « Recall » de certains de nos hommes en zone 52. Les rapports audios vous indiqueront que j’ai demandé à Monsieur Palekah s’il pouvait me donner une position plus précise qu’un étage de base, mais je n’ai reçu que pour toute réponse qu’il était encore dans la même zone, zone indiquée précédemment lorsque je suis partit de la salle de contrôle. Sachant que l’intrus que je devais intercepter était complétement nue et dans une zone trop vaste, il était possible de le croiser au passage, à la vue des informations que j’avais il était plus profitable d’investiguer la zone d’habitation qui offrait plus de de chances de résultats. Comme indiqué dans mon rapport, je n’ai vu la grenade que trop tard, suffisant pour pouvoir subir qu’un perturbement de mon ouïe. »
D’une main, il tendit son communicateur Bell ou il avait pris soin de rassembler les enregistrements audios des évènements au cas où.
« Ce n’est qu’après la flashbang qu’on m’a informé de la véritable identité de notre fugitif nu. Noa étant en train de rechercher la trace du Hackeur dont les méthodes étaient de moins en moins conventionnelles des méthodes du RESO, je me suis donc mis à patrouiller à la recherche de notre V.I.P. »
Le soldat récupéra son communicateur avant de se rasseoir confortablement dans son siège.
« Monsieur Kuzetski était seul lorsque je l’ai trouvé, en position de se rendre. J’ai pris l’opportunité de tirée au Zaat en toute connaissance de cause, premièrement à la vue de la possibilité d’avoir été brainwasher par le Reso. Deuxièmement je ne savais pas si des renforts avait été envoyés à la vue de la situation du moment avec Monsieur Palekah. Si le but du Reso était de le faire participer à un plan quelconque, il n’y avait aucune raison de faire se « Rendre » notre homme à moins de nous faire perdre du temps. Zaater Monsieur Kuzetsky revenait à incapacité celui-ci pendant quelques minutes, amplement suffisant pour pouvoir l’empêcher d’effectuer du grabuge supplémentaire. »
Volontairement, il passa sous silence les paroles de Monsieur Parfait ainsi que Monsieur Sincet. Il n’avait pas à revenir là-dessus après tout, c’était des dissensions de travail, mais beaucoup oubliaient qu’il était un soldat, un tueur et un espion. Il faisait ce qu’il avait à faire, même s’il devait devenir un monstre.
« Le véritable suspect c’est alors révélé et nous l’avons pris en chasse jusqu’à l’ascenseur. J’ai volontairement mis de côté les discussions avec Monsieur Sincet et Parfait au vu du danger inconnue que nous faisions face. Vous connaissez la suite après. L’homme à menacer de se faire sauter avec une grenade, j’avais une possibilité d’agir mais je n’ai pas eu le temps… »
Son regard s’assombrissait en y repensant… Encore un cadavre à trainer dans son armoire…
« Voilà mon point de vue sur l’affaire. Toute les actions que j’ai prises ont été faite avec les informations que je disposais au moment des faits, malheureusement…. Je n’ai pas réussi à obtenir une cohésion du personnel du JPS présent… »
Il resta silencieux un moment sur ces mots de conclusions. Un sujet lui frôla les lèvres mais il se contenta de se taire. Ce n’était pas le moment.
Aeryn fronça les sourcils en voyant Hunter fermer les yeux et s'installer au fond de son siège. Est-ce qu'il se moquait tant que ça de ce qu'elle allait dire ? La jeune femme passa outre et poursuivit sa demande. Le militaire daigna alors ouvrir les yeux dans un claquement de langue qu'Aeryn eut tout le mal de monde à ne pas relever.
L'irlandaise décida de se concentrer sur le fond du discours plutôt que sur sa forme et resta silencieuse durant l'exposé de Hunter, prenant des notes tant bien que mal de sa main valide. Ce n'est que lorsqu'il termina son rapport que l'irlandaise reprit la parole.
"Merci pour ce récit. Vous avez agi comme vous le pensiez le mieux mais, si vous le permettez, je souhaiterai revenir sur quelques points."
Aeryn survola ses notes rapidement.
"Tout d'abord, je dois vous avouer que je suis déçue de la légèreté que vous semblez accorder à vos responsabilités et à vos collègues. Par deux fois vous avez parlé de monsieur Palekah et vous évoquez également une demoiselle Leyvana. Vous voulez sans doute parler de Noa Pakeha et Aynira Leyva. Ce sont des personnes que vous côtoyez depuis plusieurs années maintenant. Si vous voulez que l'on vous respecte et vous écoute, commencez par leur montrer que vous les prenez en considération. Cela passe par le fait de ne pas écorcher leur nom et de les prendre en compte. Sans parler des ordres de vos supérieurs. Je vous ai expressément demander de suivre l'équipe au sol pour les recherches. Vous avez des connaissances plus approfondies du RESO, suite à votre enquête et si je vous ai envoyé avec l'équipe de recherche c'était justement parce que vous étiez le plus à même de repérer une information intéressante. Au lieu de ça, vous avez ignoré mon ordre, laissant les autres fouiller dans des tonnes de dossiers sans savoir quoi chercher. Je ne sais pas si une autre action aurait changé l'issue des évènement et nous ne le saurons jamais, mais lorsque je suis partie, j'étais persuadée que vous étiez sur Terre ou sur le point de vous y rendre. Vous avez attendu presque une heure avant d'exécuter mon ordre."
Aeryn inspira profondément. Elle n'aimait pas cette partie de son travail.
"Mettez-vous à ma place. Lorsque vous donnez un ordre à un soldat, vous attendez-vous à ce qu'il l'exécute au moment où vous le demandez ou une heure après ?"
L'irlandaise lui laissa le temps de répondre avant de poursuivre.
"De plus, vous dites que vous n'avez rejoint la zone 52 que parce que Aynira Leyva semblait maitriser la situation. Vous étiez pourtant là lorsque j'ai placé Aynira à la tête du JPS en mon absence, non ? Avez-vous si peu confiance ne mes décisions pour ignorer un ordre direct afin de vous assurer du bon sens de l'une d'elle ? Vous dites que vous avez cru bon de rejoindre le sol parce que votre présence n'était pas appréciée. Vous rendez-vous compte à quel point ce raisonnement est hors de propos ? Encore une fois, vous aviez des ordres et vous devez agir en fonction d'eux, pas du sentiment des autres personnes présentes à votre égard. Si vous tenez à vous éclipser dès que vous n'êtes plus apprécié, je ne saurai que trop vous conseiller de changer de profession. Ici, nous avons un travail à faire. Pour cela, il y a une chaine hiérarchique à laquelle, je crois qu'en tant que militaire, vous devez être habitué. On n'agit pas pour se faire des amis, mais pour faire un travail."
L'irlandaise fit une nouvelle pause en relisant ses notes.
« Quand aux actions en zone 52, vous avez agi en fonction des informations que vous aviez et, sur le principe, vous avez parfaitement raison. Mais j'ai passé la journée à revoir les images des caméras de surveillances et écouté les bandes sonores. Par deux fois, Monsieur Pakeha vous a demandé de dépêcher des hommes à la recherche de Monsieur Kouznetski. Par deux fois, lieutenant, un haut gradé, spécialisé en informatique et surtout tactique vous as aiguillé sur une action que vous avez purement ignoré. Vous est-il venu à l'esprit qu'il avait peut-être d'autres informations ? Des informations qu'il ne pouvait peut-être pas donner étant donné le piratage évident de la base ? »
Aeryn avait l'impression de ne faire que des reproches grimaça. Elle détestait réellement ça.
« Ecoutez. Je ne cherche pas à vous enfoncer mais à vous faire comprendre que, vous n'êtes plus dans une de vos mission d'espionnage en solitaire. Ici, vous faites partie d'une équipe et, pour cela, vous devez considérez vos équipiers, leur montrer du respect et de l'écoute. J'ai reçu des plaintes sur la façon trop familière dont vous traitez certains membres du JPS qui se sentent mal à l'aise. Merci de veiller à ce qu'une personne que vous traite avec familiarité soit en accord avec cela. »
Aeryn arrivait à al fin de ses notes. Restait le cas Kouznetski. Elle soupira, ne sachant pas comment amener la chose.
« En ce qui concerne l'arrestation de Monsieur Kouznetski, … je n'étais pas sur place et aurait donc du mal à juger vos actions mais tirer sur un homme qui se rend, … Ce n'est pas notre façon de faire. De plus, d'autres témoins, présents à ce moment-là, et que j'ai interrogé, n'ont pas compris la raison de votre acte. Selon eux, la mesure était excessive. Comprenons-nous bien, je pense sincèrement que vous pensiez bien faire, tout du long mais comprenez que vos actions ne sont pas dans le champ de ce que je peux accepter d'un responsable militaire de ce qui est sans doute l'organisation terrestre la plus importante. »
Aeryn soupira légèrement, attendant de connaître la réponse de Hunter à tout ceci.
S’il y avait une chose que Jonathan savait faire avec précision, c’était garder son calme. Il avait toujours respecté Aeryn Sincet mais là, chaque mot attisait un énervement telle une fusée Ariane. Jonathan craqua sa mâchoire par pur reflexe.
« Permettez que je ramène quelque chose de mon bureau madame ? »
Il attendit à peine l’autorisation que l’homme était déjà sorti au pas cadencé. Quelques secondes plus tard, Jonathan revint dans le bureau avec un dossier important. Il se contenta de le poser à coté de sa chaise avant de se rasseoir sur sa chaise.
« J’aimerais clairement qu’on arrête de m’imaginer de fausses valeurs et que vous ne considérez pas que je respecte pas mes camarades. Vous êtes peut-être la seule à savoir la totalité de mon passé et comment j’opère, mais ne me demandez pas de prendre toute les casquettes que vous souhaitez ! »
Enervement, surtout d’entendre les mêmes paroles qu’il se répétait depuis presque 24h. Mais il repris rapidement un ton plus respectueux.
« Vingt minutes après que la première équipe soit partie sur le terrain, vous pouvez vérifier que je n’ai eu aucune réponse à ma demande de nouvelle pour pouvoir les aiguiller. Je suis descendu au bout de quarante minutes vu que personne ne répondait à mes messages. »
Il était énervé mais sa voix n’avait pas augmenté d’un ton. Il se contrôlait. Politesse. Respect.
« On m’envoie aider et brutalement je me retrouve sur le terrain, on me demande d’arrêter un criminel à moitié nu alors qu’un pirate informatique est infiltré dans une base ultrasécurisée ? A la différence de monsieur Pakeha qui est sous mon département, je ne me suis pas laisser guider par mes émotions dans une situation pouvant menacer la situation mondiale, j’ai choisi de rester le plus professionnel possible, va-t-on me juger pour ça ? Entre quelqu’un capable de faire sauter les défenses d’une des bases les plus sécurisées du monde et un complétement nue, vous vouliez que j’aille courir après un exhibitionniste ? Je suis resté en permanence sur le canal ouvert de communication afin d’être prêt à répondre à toute aide et je n’ai pas disparu de la circulation alors que la situation n’était pas résolue madame. »
Sa main se referma sur les dossiers qu’il déposa sur la table.
« Depuis 5 mois je travaille d’arrachepied en prévision de ce qui peut arriver. Remise en place du matériel technique, modification des exercices afin de se préparer aux possibles assauts, nous sommes clairement sous préparer et je n’aime vraiment pas ça. A chaque conflit nous subissons des dégâts, nous perdons des hommes et des femmes et vous croyez que ca me fait plaisir de voir la liste des morts s’allonger de plus en plus ? Prendre ce poste de responsable militaire veut dire réutiliser toute les défaites et avancée à l’aide de celle-ci, aussi bien au niveau des hommes qu’au niveau personnel. »
Il ne mentait pas. Il pensait et travaillait depuis 5 mois aussi bien au niveau personnel qu’au niveau de l’organisation du secteur militaire. Il s’agissait du document sur laquelle il travaillait depuis le début de son entrée en fonction. Tout un programme visant à effectuer des simulations tactiques d’invasions en utilisant un espace virtuel. Des propositions pour déployer des stations de surveillances avancées dans le système solaire. Des propositions de recherche pour des protection balistiques.
« Toute la journée d’hier a été bourrée d’erreur tactique et personnelles sans exceptions moi y compris et je serais le premier à l’admettre même si je ne l’indique pas ouvertement. Mais malheureusement les erreurs sont humaines et nous devront vivre avec. »
D’une main, il se contenta de tirer une feuille de la poche de sa veste avant de la déposer sur le tas.
« Théoriquement, je devais prendre une semaine de repos aujourd’hui, mais je m’attendais à devoir m’expliquer devant vous afin que vous puissiez avoir mon point de vue et j’ai choisis de me préparer en conséquence. Donc à moins que vous ne souhaitiez continuer à me parler de la journée d’hier ou d’autres choses correspondant à la manière d’agir d’hier, je vais allez prendre les vacances que j’aurais dû prendre il y a un moment. »
Avec un soupir fatigué, Jonathan se contenta simplement de se relever avant de faire demi-tour en direction de la porte duquel il s’arrêta.
« J’ai choisi de parler franchement Madame afin de vous montrer le fond de ma pensée sur la situation actuelle, dit-il d’un ton plus respectueux, j’ai l’intention de me battre pour cette station, mais c’est vous qui avez ma lettre de résignation du SDT sur votre bureau si je ne satisfais pas à votre idée d’un responsable militaire. Vous faites ce que vous voulez, dans tous les cas je suis déjà mort. » lâcha-t-il avec un petit rire à la fin.
« Sur ce je vous souhaite malgré tout une bonne journée, j’imagine que si je ne reçois pas de nouvelle je vais me faire oublier pendant quelques temps… »
Aeryn n'eut pas le temps d'ouvrir la bouche que Jonathan avait déjà ouvert la porte pour rejoindre son bureau. L'irlandaise le regarda sortir sans un mot en secouant doucement la tête, laissant échapper un soupire. Lorsqu'il revint, ce fut avec un dossier épais qu'il posa près de lui.
"Je ne vous parle pas de votre passé mais du présent, monsieur Hunter et j'apprécierai que vous baissiez d'un ton. Je suis encore la responsable, ici, aux dernières nouvelles."
Si le ton était plutôt calme, le regard qu'Aeryn lança au militaire était sans équivoque. Qu'il n'essaye pas de jouer au plus malin avec elle. Mais Hunter repris sur un ton plus posé. Il reparla alors de son départ décalé pour la zone 52. Aeryn inspira profondément.
"Ils avaient un travail à faire. Un travail que je leur avait confié autant qu'à vous. Mais, à la différence de vous, ils ont décidé de le faire, ce travail. Vous ne pouvez pas les blâmer pour ça. Au contraire, vous n'aviez pas à attendre leur demande pour faire le vôtre."
Aeryn cru rêver lorsque le militaire se plaignit d'avoir été envoyé sur le terrain. N'était-ce pas un comble pour un agent … de terrain, justement ? Aeryn le laissa finir avant de rebondir sur ses propos.
"Excusez-moi d'envoyer un lieutenant de l'armée sur le terrain, monsieur Hunter. Et, ce "criminel nu" comme vous le dites si bien est un ancien agent de l'ennemi. Il n'y a pas cinq minutes vous m'expliquiez que vous l'aviez zatté pour ne prendre aucun risque mais maintenant, il ne valait pas la peine de dépêcher deux ou trois hommes comme vous l'a plusieurs fois demandé monsieur Pakeha. Il faut vous mettre d'accord monsieur Hunter. Soit vous considérez cet homme potentiellement dangereux, soit non mais vous ne pouvez pas changer d'avis quand ça vous arrange. Vous séparer de quelques hommes ne vous aurait pas empêché de poursuivre le hackeur, si ? Vous êtes d'ailleurs moins qualifié pour combattre des attaques cybernétiques que physiques, il me semble."
C'est alors qu'il sortit son dossier.
"Je ne doute pas que vous ayez le bien de cette station à coeur et que vous travaillez en ce sens. Ce que je dis c'est qu'il faut clairement revoir votre rapport aux autres. La dernière fois qu'un membre du JPS a agit seul nous avons perdu un vaisseau, un soldat et avons presque livré l'un des nôtres aux tok'ras. Je ne tiens pas à ce que cela se reproduise. Nous avons besoin de cohésion, monsieur Hunter. Et vous semblez davantage agir en solo qu'en équipe. Vous ne connaissez pas le nom de vos coéquipiers, vous n'obéissez pas aux ordres et vous agissez sans tenir compte de l'avis ou des compétences des autres. je ne dis pas que vous êtes un mauvais soldat, seulement que vous n'êtes pas un espion ici et qu'il faut vous habituer à travailler en équipe."
Hunter continua en affirmant que la journée de la veille n'était qu'une succession d'erreurs de la part de tout le monde. Aeryn n'était pas d'accord, il y avait eu de bonnes actions effectuées par beaucoup de monde.
"Je peux accepter des erreurs, monsieur Hunter, mais pas des bavures. Personne n'est parfait et je ne mets pas toute la faute sur vous. Je voudrais simplement que vous acceptiez votre part de responsabilité et les erreurs que vous avez pu commettre au lieu de vous enterrer la tête dans le sable. J'ai eu de nombreuses discussions de debriefing avec beaucoup de monde mais il est nécessaire de comprendre et accepter ses erreurs pour ne plus les commettre."
Aeryn fronça les sourcils lorsque le militaire posa une feuille devant elle. Il lui parla de vacances et se leva pour se diriger vers la porte.
"Alors c'est comme ça ? Vous partez tout simplement ? Plutôt que de parler vous fuyez, …"
La jeune femme étouffa un rire en entendant l'ultimatum que lui posait le militaire.
"Si vous partez, c'est votre décision, monsieur Hunter, pas la mienne. Vous êtes un adulte alors agissez en tant que tel et prenez seul vos décisions. Si vous n'êtes pas capable de les assumer, peut-être que vous n'avez rien à faire ici, effectivement."
Aeryn soupira.
"Vous avez raison. Vous ne correspondez pas au profil d'un responsable militaire. Si vous souhaitez partir, vexé comme un gosse, alors je ne vous retiendrai pas. Mais sachez que vous avez une place dans nos rangs et que je serai vraiment déçu d'une telle décision."
Que rajouter de plus ? De toute façon, le militaire était déjà dehors.
Voilà ce qu’il gagnait à rester franc avec les gens.
« Cela fait 5 mois que je travaille d’arrachepied sans prendre de pause à avaler les informations telle une machine afin de rattraper mon retard Madame, les évènements d’hier m’ont montré que je commençais à faire beaucoup plus d’erreur mettant en danger les personnes de mon secteur sur cette station. Il y a deux solutions très simples pour la suite. Soit vous voulez que je reste en enchainant les bourdes sur les prochains mois jusqu’à ce que vous décidez de me virer complétement, soit vous me laissez une semaine pour repartir du bon pied après avoir réfléchis au calme et déconnecté de tout. Dans tous les cas je vais avoir de la paperasse à préparer en prévision de tout ca donc si vous voulez me faire passer des informations avant 15h, vous savez ou me trouvez. Autrement, quelqu’un saura où le faire. »
Et il se contenta de refermer la porte du bureau, ses dossiers à la main. Lentement, le soldat ferma les yeux juste après avant de respirer un bon coup. Well… Il savait très bien que ca pouvait se passer comme ca… Etonnement, cela ne l’étonnais pas…
Il commença à s’éloigner de la porte du bureau de la chef de base avant de passer le siens, son esprit préparant le planning de sa journée qui s’annonçait chargée… Discussion, Discussion, Discussion.
Si on lui laissait son poste cela allait être nécessaire afin de préparer la suite des évènements. La situation ne pouvait pas continuer comme ça, et même si son second pouvait s’adapter très vite personne n’était Superman. C’était ses erreurs et il n’allait pas les laisser comme un paquets pourris à d’autres.
Aeryn regarda le militaire partir et prit le temps d'inspirer profondément avant de se lever et de franchir la porte à son tour, le pas rapide. Elle ne frappa pas lorsqu'elle entra dans le bureau du militaire et n'attendit pas son autorisation pour parler.
"Vous vous fichez de moi ?! Ca va être de ma faute maintenant ?! Et puis, question respect, c'est vrai que vous avez la palme. Quitter une conversation en cours de la sorte c'est très cavalier, monsieur Hunter et j'apprécie très moyennement les libertés que vous prenez à mon égard. N'oubliez pas qui je suis."
Une fois sûre d'avoir captée l'attention du militaire, la jeune femme poursuivit.
"Cinq mois de travail ? Allez vous plaindre ailleurs, monsieur Hunter. Ca fait plus de trois ans que je dirige cette base. Je vous passe le nombre de dossiers que je traite par jour et l'heure à laquelle j'arrive le matin. En trois ans j'ai du prendre, en tout est pour tout, cinq fois des vacances. Et durant deux d'entre elles j'ai été rappelé d'urgence pour gérer une crise. J'ai à peine le temps de voir grandir mon fils et je passe mes journée à faire en sorte qu'il ne risque rien alors ne venait pas me parler de votre sommeil en retard. Vous avez merdé. Assumez-le et allez de l'avant !"
L'irlandaise grimaça lorsque la douleur de son bras se réveilla. Elle n'avait pas le temps pour ça.
"Vous voulez une semaine de vacances ? Demandez-la simplement au lieu de venir jouer les Caliméros et parler par sous entendus tordus. Je vous en donne deux. Non ! Prenez-en trois et revenez avec quelques décennies de plus, niveau maturité, je vous prie !"
Aeryn tourna les talons et s'apprêtait à quitter la pièce de la même façon que lui quelques instants plus tôt. Elle enleva d'un geste brusque la plaque qui désignait ce bureau comme le sien.
"Et merci de débarrasser vos affaires avant de partir. Votre successeur aura besoin de place."
Elle fit un effort pour ne pas claquer la porte en sortant et regagna son bureau en se tenant le bras gauche douloureux.