Fatigue

Max travaillait au laboratoire. Comme à peu près tous les jours, de probables trop nombreuses heures par jour depuis leur retour de mission.
Elle avait peu dormi ces derniers temps et son sommeil était toujours difficile, peuplé de rêves dérangeants ou parfois même écourtés par Charlie... sa main lui faisait mal ces derniers temps. Le médecin la suivait tous les jours à ce propos et refaisait son bandage qu'elle cachait ensuite sous un gant. Elle n'avait toujours pas dit à Ryan pour la blessure qu'elle s'était bêtement infligée en mission, elle avait elle même envie de l'oublier et n'était pas allée voir Charlie à ce propos de la journée, la douleur était pourtant particulièrement présente depuis quelques heures.

C'était une mauvaise journée et elle était de mauvais poil, sans arrêt agacée par tout ce qui l'entourait et seul la quiétude de son laboratoire lui semblait être supportable. Même la joie de vivre de Sarah souvent contagieuse lui était aujourd'hui insupportable et elle avait donc évité le mess ou tout autre endroit de réunion du personnel qui aurait pu lui faire croiser trop de monde. Elle avait à peine mangé un fruit mais n'avait pourtant pas vraiment faim non plus non ce n'était pas ça.

Il était à présent plutôt tard, un peu plus de onze heures du soir et personne n'avait eu à redire sur sa présence ici pour la simple et bonne raison qu'elle avait envoyé bouler les personnes qui avaient essayé de le faire. Cela faisait des jours qu'elle travaillait ici, absorbée par ses recherches afin de perfectionner ses connaissances en matière de technologie alien, étudiant des rapports de mission, des artefacts ramenés des différentes planètes visités,... Elle étudiait aussi tout ce qu'elle pouvait sur l'armure de Méta afin de pouvoir par la suite l'aider comme elle le pourrait, d'autant qu'elle avait des plans pour lui mais pour le moment la partie sociale de son travail était à mile lieues de ses pensées, elle avait chaud et se sentait mal à l'aise. Elle retira sa veste dont le contact lui semblait étouffant.

Aujourd'hui elle s'était concentrée sur un prototype de prothèse destinée à Alix Halles. Celle-ci devait aider à soulager sa jambe et donc réduire la douleur même si elle pensait que cette douleur était plus psychologique que physique. Elle en avait déjà parlé avec Charlie et ils avaient prévu de tenter quelque chose mais l'humeur de Max ne se prêtait pas à ce genre d'intervention pour le moment. Elle se concentrait donc sur l'aspect technique et testait à présent la résistance des matériaux qu'elle comptait employer à différents atmosphère qu'ils pourraient rencontrer, utilisant pour ce fait une chambre à vide et quelques produits chimiques.

Max se sentait de moins en moins bien, elle commençait à avoir vraiment chaud et sa main la grattait mais elle mit ça sur le compte de la fatigue, effaçant d'un revers de manche la transpiration qui se formait sur ses tempes sans prendre le partit raisonnable de cesser ses expériences instamment. Elle reposa pourtant ce qu'elle avait en main et s'appuya des deux main sur la paillasse.
Elle se mit à fixer la chambre sous vide sans vraiment la voir, un récipient chargé d'elle ne savait même plus quel produit se mettait à remuer sans qu'elle s'en aperçoive. Elle avait si chaud, elle secoua la tête et massa ses sinus, fermant les yeux un moment avant de comprendre son erreur.

"Oh merde n..."

Eructa t'elle avant d'aviser une poubelle proche pour y vomir le contenu frugal de son estomac. L'effort produit la laissa sur le carreau un moment et sa fièvre monta encore d'un cran, elle eut une brève absence avant de se ressaisir.

"Qu'est-ce que je fous, merde qu'est-ce qu'il m'arrive."

Commença t'elle à paniquer en retirant le gant. Son bandage était trempé. Etait-ce de la transpiration ou bien avait-elle par mégarde touché un produit avec ? Elle retira la bande. Sa main avait pris une teinte écarlate virant au violacé autour de la plaie pourtant propre la veille.
Elle commença de nouveau à tourner de l'oeil et se rendit compte que ce devait être du à une poussée de température, elle se précipita vers la douche de décontamination et l'activa, s'enfermant sous le jet d'eau, laissant la fraîcheur refroidir un peu son corps. La mort dans l'âme mais maintenant temporairement moins abrutie par l'infection elle tenta d'appuyer sur le bouton d'alerte... trop loin... sa vision se brouillait alors qu'elle écarquillait des yeux vitreux pour tenter d'y voir à travers le rideau d'eau... une silhouette ? N'avait-elle pas vue une silhouette se découper derrière la vitre de la porte ?

"Aidez..."

Max glissa le long de la parois et s'avachit sur le sol. Au même moment la chambre sous vide produisait un son suraigu en continu et de la fumée s'échappait du récipient rempli d'un produit chimique inconnu s'étant mis à bouillir.

Dernière édition par Max McLoyd le Jeu 10 Déc 2015 - 19:58, édité 1 fois

*Ting* c’est le bruit que fit le verre de vin français de Sarah en rencontrant celui de l’homme assis en face d’elle. Il était grand, avec un beau visage et une corpulence sportive. Ses traits lui rappelaient ceux de l’australien qu’elle avait rencontré sur Atlantis avec Max. Le cadre dans lequel ils se trouvaient était agréable. Un petit bar cosy et bien fréquenté de chicago, un bar où elle était déjà venue avec son père à l’occasion d’une soirée d’officiers de la marine, il y a de ça des années. Sarah se noyait dans le regard charmeur de son partenaire. Ce dernier dit quelque chose qui la fit rire et qu’elle oublia aussi vite. Son esprit était embrumé, elle n’avait pourtant presque pas touché à son verre. Elle se sentait étrange, cotonneuse et bien en même temps. Un moment de silence survint entre eux. Il n’y avait rien de gênant dans ce silence. Elle le vit lentement s’approcher d’elle, le cœur de Sarah s’emballa en anticipation. Elle pouvait presque sentir son souffle. La jeune femme ferma les yeux et...
…Les ouvrit grands comme des soucoupes en se redressant dans l’air froid de sa cabine. Elle était assise en angle droit dans son lit. Ses yeux étaient encore gonflés par la fatigue et ses cheveux en bataille défiaient presque les lois naturelles de la gravité. Sa bouche était pâteuse. Elle n’eut pas le temps de se soucier de tout cela. Une alarme résonnait dans le vaisseau. Sarah réagissait par conditionnement, elle sauta presque de son lit en projetant ses draps à travers la cabine. Elle enfila tout juste un gros pull d’entraînement de la navy pour couvrir son corps à demi nu. Elle ne portait en plus de ça qu’un shorty, le seul vêtement non réglementaire qu’elle avait dénié embarquer. De fausses applications de smartphones étaient imprimées dessus avec les inscriptions « very sensitive & tactil » dessus. C’était profondément idiot, mais l’ensemble l’avait amusé sur le moment. En moins de dix secondes Sarah avait atteint le couloir, la vive lumière de l’alarme agressait ses yeux et le sol métallique paraissait froid sous ses pieds. Elle piqua un sprint jusqu’au pont supérieur. D’autres membres d’équipage la suivaient plus ou moins dans le même état. Le cœur de la jeune femme tambourinait dans sa poitrine, l’adrénaline filait à travers son corps. Elle arriva au niveau de l’armurerie où du matériel était distribué.

« Alerte aux laboratoires ! Possible contamination biochimique ! » Cria le sous-officier de garde.

Il fallut quelques secondes à Sarah pour enfiler un masque à gaz, une paire de gants en caoutchouc et des surbottes de protection qu’elle enfila sur ses pieds nus. Elle attrapa l’arme qui lui était tendu, un fusil à pompe à priori, et repartit en courant jusqu’aux labos. Ses surbottes couinaient de manière comique au gré de sa course. Elle arriva finalement jusqu’au laboratoire. Au coin du mur attendaient trois scientifiques en combinaison intégrale qui observaient à demi amusé, à demi surpris le groupe disparate arriver jusqu’à eux. Sans s’arrêter l’ensemble du groupe pénétra dans le laboratoire. Sarah arriva en tête, elle traversa la douche de décontamination et arrive à l’intérieur du laboratoire. Un sifflement étouffé par le masque lui parvenait. Les cinq individus approchèrent de la chambre sous vide armes braquées. Que ce soit le stress du moment, la fatigue, leur sens diminués par le masque ou une combinaison de ses éléments, l’un d’entre eux émit l’idée paniquée qu’un appareil dangereux puisse être en charge. La réaction fut naturellement ce qu’on aurait pu attendre d’eux…
Quelques coups de feu, un contrôle scientifique en règle et une chambre sous vide inutilisable plus tard l’alerte fut levée. Sarah haletait sous son masque, une buée s’était formée sur ses lentilles. Elle inspectait encore le labo quand quelqu’un vint lui faire un rapport sur l’analyse des vidéos de surveillance. Le sang de Sarah ne fit qu’un tour, elle quitta le labo d’un pas précipité ruminant des mots incompréhensibles à travers son masque.

Sarah entra en hurlant un charabia incompréhensible à travers son masque. Fort heureusement pour la tranquillité des patients la majorité du bruit était retenu par le filtre à air de son masque. Un infirmier approcha en lui demandant de se calmer. Il eut pour tout retour une empoignade solide du col et trois mots :

« Où est S’Fallen ? »

Le pauvre bougre lui pointa un espace vers des rideaux tirés. Lawrence devinait plus ou moins la direction à travers l’épaisse buée de son masque. Elle le lâcha aussitôt et parcourut la distance la séparant du lit de Max en quelques enjambés. Sarah ouvrit le rideau et un grognement étrange s’échappa de son masque. Les deux lentilles de celui-ci se posèrent d’abord sur Max, puis Mei et enfin Ryan. Aussitôt Sarah se lança dans un monologue long de près de deux minutes. Il semblait très animés et à juger par ses intonations elle avait l’air fâchée. C’est également ce que laissait deviner ses grands gestes de bras et le doigt qu’elle pointait tantôt vers Max, tantôt vers Ryan. Pas un mot ne fut pour autant compréhensible et ceux grâce au filtre à air de son masque qui s’agitait avec ses lèvres. Quelques secondes s’écoulèrent avant qu’elle ne réalise tout cela.
La jeune femme arracha ses gants et releva le masque sur le haut de sa tête. Son visage était perlé de sueur, ses yeux encore rouges de fatigue et ses cheveux en bataille. Elle avait l’air proprement démente. Elle prit une grande inspiration :

« Vous ! » Elle s’interrompit et grogna entre ses dents « Est-ce que vous n’êtes pas devenu un peu con chef ? Le commandant en second est dans une douche de décontamination au labo et vous, vous l’embarquez dans votre cabine ?! Vous savez même pas si elle se trouvait là à cause d’une contamination bactériologique ! Vous avez idée de ce qui aurait pu se passer ? »

Sarah s’avança vers Ryan et son index vint percuter sa poitrine à plusieurs reprise à mesure qu’elle parlait : «Vous êtes notre chef ! Ce genre d’action débile c’est attendu de la part de jeune timbrée comme moi, pas de vous. »

La mâchoire de Sarah était contractée. Son regard trahissait son partage. Elle semblait à la fois comprendre la réaction du lieutenant et condamné son manque de réflexion. Sarah soupira en se détournant de Ryan. Si ça lui chantait le lieutenant avait tout le loisir de la coller en cellule pour cet écart. Elle baissa les yeux vers la main de Max puis s’adressa à Mei :

« Elle s’est fait ça à la dernière mission, un truc l’a coupé sur la planète, un morceau de métal ou de réplicateur… »

Sarah était véritablement en colère. En colère et frustrée par son impuissance à aider son amie qui avait fait un malaise. Sa poitrine se soulevait au rythme de sa respiration lourde et nerveuse. La plupart des sons l’entourant avaient été remplacés par un sifflement continu. Le regard de la jeune femme sauta de Ryan à Max tandis que sa conscience la retenait de justesse de faire un nouvel esclandre. Elle sentait son cœur marteler ses côtes et quiconque y aurait prêté attention aurait presque pu deviner son rythme cardiaque à travers les veines de ses tempes.
Elle remarqua une voix qui lui semblait d’abord lointaine et étouffée. Le docteur Theo s’adressait maintenant à elle pour lui intimer de cesser les remontrances qu’elle faisait à Ryan et de contrôler son volume sonore. La menaçant de prendre elle-même un savon. Au fond d’elle-même la jeune femme savait que le médecin avait raison. Mais il était beaucoup trop tard pour elle pour qu’elle parvienne à se calmer. Lawrence échangea un regard tout aussi agressif avec le docteur qu’avec les autres. Elle se mordit la langue et fit un effort considérable pour se retenir de dire quoique ce soit qu’elle regretterait amèrement par la suite. La poigne du sergent s’était resserrée sur la crosse de son fusil. Elle le tenait si fort désormais que les jointures de ses doigts se mirent à blanchirent. Pendant quelques secondes de flottement elle donnait l’impression d’être sur le point de s’en servir.
Au prix d’un effort considérable Sarah ferma les yeux et pris une grand inspiration. Sa prise sur son fusil se desserra. Elle ouvrit de nouveau les yeux en regardant directement Mei. Elle lui adressa un simple signe de tête pour lui signifier qu’elle avait compris le message. Sarah sentit subitement quelque chose lui pincer doucement les doigts. Max avait réouvert les yeux et semblait reprendre légèrement conscience. Elle demanda à Sarah de ne pas s’en prendre à Ryan indiquant que c’était de sa faute à elle. A nouveau la poitrine de Sarah se souleva, elle était sur le point de rabrouer Max à son tour avec un langage fleuri et coloré. Elle s’arrêta quand ses poumons furent pleins. Un simple regard échangé à nouveau avec le docteur lui indiqua que ce n’était même pas la peine d’y penser. Lawrence se pencha sur Max :

« On en reparlera plus tard… » Lui dit-elle dans ce qui semblait être presque un soupir.

Le calme revenait prendre laborieusement sa place chez la jeune femme. Elle écouta avec attention le diagnostic de Mei qui se voulait relativement rassurant. Les jours de son amie n’étaient pas en danger. Mais il faudrait encore du temps pour obtenir des résultats d’analyses et en avoir une parfaite confirmation. Max émergea encore pour complimenter Sarah sur sa tenue qui lui rappelait les excentricités que l’on pouvait retrouver dans un film de Tarantino. Cette dernière ouvrit de grands yeux ronds et haussa les sourcils en s’adressant à Mei :

« Mais elle est totalement défoncée ? »

Le docteur l’invita à aller rendre le masque qui lui servait de couvre-chef. Ce serait l’occasion pour Sarah de faire un tour et d’aller se calmer. A nouveau la jeune femme poussa un long soupir. Elle dégagea à contrecœur ses doigts de la prise de Max. Elle regarda tour à tour Mei et Ryan :

« Doc’, Lieutenant…je repasse sous peu pour voir comment elle va. »

Lawrence quitta l’infirmerie dans le même bruit de couinement caoutchouteux que celui avec lequel elle était arrivée. L’infirmier qu’elle avait croisé en arrivant fit presque un bond en levant les mains pour l’éviter quand elle passa à ses côtés. Elle arriva à l’armurerie avant long et y restitua son arme et le matériel de protection qu’elle portait. Lawrence ne revint pas immédiatement à l’infirmerie. Elle fit un détour par le mess, y grignota quelque chose en prenant tout son temps pour se calmer. Elle chipa un magazine à l’équipe de permanence de nuit. Il s’agissait d’une revue de type playboy. De son temps à la navy ces revues étaient courantes à bord des navires. Elles étaient surtout beaucoup plus nombreuses que celles destinées au public féminin. Sarah en avait lu à l’occasion, le contenu l’amusait plus qu’autre chose et ça avait participé à son intégration à l’escouade d’hommes avec laquelle elle servait.
Sarah revint à l’infirmerie sans un bruit. Elle marcha silencieusement jusqu’au lit de Max. Elle adressa un clin d’œil et un sourire espiègle à l’infirmier de garde en repassant non loin de lui. La jeune femme se promit de faire amende honorable en lui payant une tournée à l’occasion. Elle souleva et déposa deux chaises près du lit de la française et s’y installa en étendant ses jambes. Elle lisait distraitement un article tout en regardant Max de biais de temps à autre en quête d’une amélioration. Moins d’une heure s’était écoulée avant que le sergent ne s’endorme.

La nuit s’était passée sans rêve. Sarah ouvrit difficilement les yeux. Elle avait connu pire que son lit de fortune celui n’en offrait pas plus qu’un confort sommaire. Elle vit le docteur Hawkins s’éloigner du lit de Max et s’entretenir avec Mei. La jeune femme tourna la tête pour voir l’état de Max. Elle n’aurait su dire ce qu’il en était. Elle observa les environs à mesure que les souvenirs de la veille lui revenaient. Elle se rendit compte que certains membres du personnel médical la dévisageaient de même que son voisin alité. Sarah fronça les sourcils et baissa les yeux sur sa revue ouverte. Elle laissa quelques secondes s’écouler avant de se racler la gorge :

« C’est à elle… » Se contenta-t-elle de dire en désignant Max d’un signe de tête avant de reposer le magazine sur sa table de chevet médicale.