Concours de l'été : Coquillages et Crustacés

Jacob n’a pas toujours eu 35 ans. En effet, il fut une période, pas si lointaine que ça à vrai dire, où il n’était qu’un simple lycéen comme les autres qui ne s’attendait pas à être, un jour, membre et même second d’une station spatiale protégeant la terre. Ses années lycées furent marquées certes par des études brillantes, des devoirs, des cours, des stages mais bien évidement également de vacances pendant lesquelles il pouvait se détendre comme il le souhaitait.


Nous sommes maintenant dans un des étés dont il se souviendra toute sa vie du fait du bonheur qu’il a pu vivre pendant les deux mois de grandes vacances séparant son année de première de celle de terminale dans son établissement studieux. Cette fois il avait décidé, un peu sur un coup de tête, non pas de partir quelques semaines sur la côte atlantique avec sa grand-mère maternelle mais de partir soixante longs jours avec son meilleur ami Daniel Adams et trois autres copains en camping en France, dans ce que l’on appelle la côte d’Azur, voyage qu’il mémorisera jusqu’à sa mort. Après un voyage relativement long en avion puis en autocar, le groupe d’ami arriva enfin sur le terrain du camping de qualité assez médiocre pour poser leurs tentes.

-Enfin, on y est, on va pouvoir passer de magnifiques vacances, dit Daniel

-Mouais, il n’empêche que deux mois, ça va être long, répondit-il.

-Il ne faut pas dire ça, les vacances ce n’est jamais assez long.

Et en effet, le jeune Jacob ne se doutait pas alors qu’il allait regretter de n’avoir pu partir que si peu de temps et comprendra rapidement la position de son meilleur ami.

Dès le premier jour, sur la plage, il remarqua une jeune fille de son âge magnifique, le teint éclatant, des cheveux roux flamboyants, telle une sirène sortie de nulle part et venu spécifiquement pour lui. Bien, sûr, il ne se faisait aucune illusion et savait bien qu’il n’avait aucune chance de plaire à une telle adolescente, lui, « l’intello » de la classe. D’ailleurs, il n’avait jamais tenté d’aborder une fille qu’il ne connaissait pas et ne voulait pas commencer ce jour, se sentant encore un peu jeune pour un amour qui pourrait lui gâcher ses études. Malgré cela, les deux trois jours qui suivirent, il resta dans ses rêves, stoïque, regardant le ciel en repensant à cette fille comme si celle-ci avait agi d’un enchantement pour s’insérer plus profondément que jamais dans son cœur d’adolescent. D’ailleurs son ami avait remarqué cette attitude et ne savait en rien d’où elle provenait.

- Qu’est-ce qui t’arrive ? Je te sens autre part ! Tu n’as pas envie de t’amuser et de rire avec nous ?

- Non ! non ! ce n’est pas ça ! et puis d’ailleurs tu n’as pas à t’en mêler !

- Oh ! allez, je suis quand même ton meilleur ami, tu pourrais bien me dire un peu ce que tu as !

- Bon ben…d’accord mais tu me promets de ne rien dire à personne et de garder ça pour toi !

- Pas de problème, tu peux me faire confiance, je ne trahi jamais une promesse !

- Ben, en fait, j’ai vu une fille sur la plage l’autre jour et je ne peux m’empêcher de penser tout le temps à elle depuis, elle était sublime…presque magique.

- Ça, ça s’appelle l’amour, il était temps que tu y goûte un peu toi aussi.

- Pfff, n’importe quoi. Non, je ne sais pas, c’est juste comme ça !

- Ben justement !

- Bonne nuit, je ne veux plus t’en parler.

Le lendemain, comme si le destin lui-même voulait qu’il en soit ainsi, il recroisa la jeune fille dans les rayons d’une supérette et cette fois, ce ne fut pas lui mais elle qui s’avança en première.

- Bonjour, je t’ai déjà vu à la plage, tu t’appelle comment ?

- Euh…Jacob, oui c’est ça Jacob !

- OK, c’est classe. Moi c’est Méggy. Tu es déjà venu ici ou c’est la première fois ?

- Non, c’est exceptionnel, je viens pour la première fois en France !

- Ah, tu n’es donc pas français. Pourtant tu parle super bien et sans accent !

- Mouais, j’ai eu des bons professeurs.

Il ne voulait pas dire où il étudiait, dans l’un des lycées les plus renommés d’Angleterre et que, du fait de cette éducation active, il était devenu parfaitement bilingue en quelques années.

- En tout cas, je suis ravie de te rencontrer, ce serait bien que l’on puisse se revoir, ça te dit, sur la même plage que lundi, demain matin vers huit heure ?

- Bien sûr, j’en serais enchanté !

- A demain alors !

- Oui, à demain !

Ils reprirent chacun leur chemin dans le magasin. Revenant, vers les tentes, Jacob était euphorique, il ne s’était jamais senti comme cela même quand tout petit, son père lui avait acheté son premier livre sur la physique. De plus près, Méggy était encore plus belle que ce qu’il avait vu sur la plage. Ses cheveux lançaient des rayons roux tels des éclairs et ses yeux verts semblaient remplis de gentillesse et d’innocence. Sa voix pure laissait aussi entrevoir une sagesse profonde.

De retour auprès de Daniel, il ne pu se retenir une seule seconde de lui avouer sa rencontre.

- J’ai recroisée la fille de je te parlait au supermarché. J’en ai été totalement euphorique.

- Ça ce voit, tu n’a rame né que des cornichons et du poivre alors qu’il fallait des tomates et des sardines en boites. Allez, raconte !

- Elle s’appelle Méggy, elle m’a remarqué sur la plage et elle m’a même donné un rendez-vous pour demain matin ! Je crois que tu avais raison, je suis amoureux !

- Tu vois, c’est super. C’est un signe du destin, c’est certain. Il est temps pour toi que tu rencontre quelqu’un.

Bien entendu, Jacob ne voulait rien dire à son père car même si celui-ci était indulgent, il risquerait de la prendre mal surtout depuis la disparition de sa mère alors qu’il était enfant. Cependant, il décida d’avertir sa grand-mère qui fut très heureuse pour lui et même qu’inquiète pour ses études, n’en fit rien paraitre, voulant le bonheur de son petit-fils.

Evidement, le lendemain, il était sur la plage à six heures du matin, soit deux heures plus tôt que l’heure prévue pour le rendez-vous. Son cœur bâtait à une vitesse telle qu’il avait l’impression qu’il allait sortir de son corps pour décoller vers les étoiles. Le jour commençait à poindre à l’horizon, sur l’eau bleutée de l’océan, apportant avec lui des myriades de couleurs allant du jaune au rouge en passant par l’orange et l’or. Alors, il la vit arriver sur le sable chaud de l’été, marchant lentement et gracieusement telle une sirène attirant les voyageurs dans son filet. Il en resta stupéfait, lui qui n’avait jamais vu une fille comme ça. Il l’analysa des pieds à la tête remarquant que la moindre partie de son corps était parfaite et sans défaut.

Elle s’approcha de lui, lui dit bonjour en l’embrassant sur la joue avant de commencer à parler.

- Alors, toi aussi tu es venu plus tôt ! Je ne t’ai pas fait trop attendre au moins.

- Non non, et puis, même si c’était le cas, ça valait le coup !

Il ne savait pas d’où il sortait une telle réflexion, digne d’un grand séducteur mais elle semblait fonctionner puisqu’il aperçut le rouge ce fixant peu à peu sur les joues de son interlocutrice.

Ils parlèrent longuement, racontant leurs vies respectives, se cherchant l’un l’autre, essayant de découvrir les réactions opposées. Puis vint le moment fatidique, celui que tout le monde a toujours attendu tant qu’il ne s’est pas produit, le geste de tendresse suprême, celui que tous souhaite recevoir un jour : le baiser. L’aspect romantique de la plage de fin de matinée, malgré les nombreux vacanciers qui s’y trouvaient ajoutaient encore à leurs sentiments si bien que petit à petit, leurs doigts se rapprochèrent pour se toucher puis  ce fut au tour de leurs bouches de s’effleurer avant d’entamer un baiser passionné et empli d’émotions. Le premier de Jacob et non le dernier il l’espérait.

Ainsi, toutes les vacances se déroulèrent sous le signe de l’amour que Cupidon semblait avoir envoyé sur les deux amoureux. De nombreux baisers s’échangèrent et, à chaque fois, l’émotion était plus forte, plus pure et plus précise. Malheureusement, ils n’avaient pas toute une vie devant eux, ils n’habitaient même pas le même pays et tout était là pour les séparer.

Le jour du départ des deux tourtereaux approchaient et tout deux étaient remplis de mélancolie de savoir qu’ils allaient se quitter. Certes, ils pourraient communiquer par le biais du téléphone mais tout serait différent. Ils seraient chacun chez eux, rencontreraient d’autres personnes, vivraient d’autres histoires et ne pourraient certainement ne plus jamais se revoir. Puis le jour arriva, ils durent se quitter dans la douleur et la tristesse marquant la fin d’une histoire de deux mois entre deux adolescents épris d’amour. Ils s’enlacèrent une dernière fois avant de se laisser partir chacun vers son avenir. Tout deux pleuraient mais aucun ne pouvait rien faire.

Et maintenant, Jacob était là, seul, célibataire, ayant encore une fois perdu l’amour de ses doigts quelques temps plus tôt lorsque la biologiste qu’il avait aimé fut enterrée. Il était à bord du JPS, dans ses quartiers, revivant le plus bel été qu’il n’avait jamais eu dans ses pensées, dans son cœur et dans son âme elle-même.