Une vague verdâtre et gluante vînt frapper le fond des toilettes pour hommes. Noa,  à quatre pattes devant la cuvette vomissait à grands bruits son repas de cette nuit. Lorsque les nausées finirent de secouer ses épaules, il cracha une dernière fois et se laissa tomber assis contre le mur de la cabine, la cuvette toujours à sa portée au cas où un nouveau reflux l’assaillerait.
Il le savait pourtant qu’il ne fallait jamais prendre une décision à 3 heuresdu matin. Cette vérité devait être gravée dans le marbre. Surtout si cette décision consistait à se faire livrer un plat chinois imprononçable d’un restaurant douteux ouvert 24h sur 24.
La veille, il avait travaillé d’arrache-pied toute la nuit depuis chez lui à Colorado Spring. Le climat mondial nauséabond actuel obligeait le SDT a revoir beaucoup de choses et la paperasse faisant partie intégrante de son poste de responsable, il ne pouvait y couper. Quoi qu’il en soit, ce n’est que vers 3 heures du matin qu’il s’était rendu compte que son estomac criait famine. Quinze minutes plus tard, un livreur fort aimable avait sonné à sa porte pour lui apporter un repas tant désiré, … et l’objet de sa présence ici ce matin.

L’image du plat baignant dans l’huile lui revint alors et Noa se redressa juste à temps pour vomir un bon demi-litres de restes méconnaissables. Son commutateur qui gisait au sol se mit à biper pour la troisième fois. Noa avait ignoré les deux premières, trop occupé à se vider les entrailles, mais il ne pouvait pas jouer les sourdes oreilles éternellement, surtout dans le contexte actuel. Il fallait soit qu’il se ressaisisse et qu’il assume la journée comme un grand, soit qu’il se avertisse quelqu’un de son état et qu’il se déclare malade.

Noa s’assit de nouveau contre le mur de la cabine, et se donna encore deux minutes. Il respira profondément, et sentant que les nausées s’étaient un peu calmées, il se leva et récupéra son commutateur.

Le jeune homme sortit de la cabine et se dirigea vers les lavabos. Il s’aspergea le visage abondamment et se rinça la bouche. Dix minutes plus tard, Noa était sortit des toilettes et prenait conscience des messages sur son commutateur.
Le premier était d’Aeryn qui l’informait d’une réunion à 10h.
Les deux autres étaient de Lena Fawkes, son bras droit.
Le premier message était concis, mais assez alarmant pour le faire tressaillir.
“ JP3 vient de rentrer de mission. Hilda Haraldsen serait porteuse d’un Goaul’d”.

Tout à coup une succession d’images affluèrent devant les yeux d’un Noa, pétrifié. Des images datant de 2 ans auparavant. Sarah, les yeux étincelant vociférant des horreurs avec cette voix rauque qui n’était pas la sienne. Sarah s’effondrant sous la balle que lui-même avait tiré. Sarah sur la table d’opération, entre la vie et la mort.
Noa secoua la tête. C’était il y a longtemps, mais il ne pouvait pas oublier, jamais.
Tout avait dérapé et ils avaient failli la perdre.

Et voilà qu’aujourd’hui cela recommençait !

Le deuxième message était un update de la situation.

“ Haraldsen est en cellule ”

Noa tapa une réponse rapide.
“ Merci, je vais à sa rencontre.”

Puis, il partit d’un pas rapide.