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descriptionUnder the Green Beret...in the heart behind the Silver Wings... EmptyUnder the Green Beret...in the heart behind the Silver Wings...

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La porte s'ouvrit et la voix d'un homme appela :

"Tu viens, ma chérie ?"

La petite fille d'environ quatre ans se leva, abandonnant les jouets avec lesquels elle passait le temps. Le visage de l'enfant exprimait la lassitude de l'attente à la fin d'une longue journée. La gamine était fatiguée. Elle rejoignit l'homme, à qui elle tendit la main, et entra avec lui dans la pièce remplie par un bureau et ses sièges, un lit d'auscultation et une table chargée de matériel médical, quelques jouets et divers autres instruments tels un mètre ou une balance. En blouse blanche, le pédiatre fit signe à l'homme de mettre la petite sur l'un des deux sièges face à son bureau. Quand ses visiteurs furent assis, il se pencha en avant, adressant un beau sourire à la petite fille. Le médecin était jeune, la première moitié de trentaine certainement : son cabinet était récent, mais essentiel dans ce coin perdu...

"Alors princesse, ton papa me dit que tu ne dors pas bien ? Tu veux en parler ?"

La petite fille, dont le regard témoignait jusqu'ici d'un intérêt placide et fatigué, se renfrogna et secoua la tête, faisant voler ses petits cheveux d'un blond très clair autour de sa tête. Puis, sans un mot, elle leva la tête vers sa droite et lança un regard courroucé à son père, qui soupira.

"Ne vous en faites pas, Monsieur...ce n'est pas très grave, et c'est bien normal."
"Docteur, je suis un homme occupé, et je vis seul avec elle. J'ai malheureusement peu de temps à lui accorder, si je veux pouvoir lui offrir ce que j'espère pouvoir être le meilleur pour elle. Je ne peux pas m'occuper de ça, et les babysitters que je prends commencent à s'en fatiguer également : c'est une petite ville loin du tout, comment ferai-je si personne ne veut la garder hors des horaires de l'école ?"
"Mais à cet âge, c'est normal quand même."
"Allons docteur, à chaque fois qu'elle s'endort, elle le fait ! Et ça dure depuis plus d'un an !"


L'enfant se renfrogna plus encore. Elle avait beau être petite et les adultes parler de façon détournée, elle savait de quoi il s'agissait. Et cela ne lui plaisait pas du tout...c'était déjà assez humiliant pour elle, qui était très "éveillée" et "intelligente pour son âge", comme disaient ces mêmes adultes. Le médecin s'en rendit compte.

"Allons, ma petite Siana...tu ne veux pas me parler des rêves que tu fais ? Moi et ton papa, nous aimerions t'aider à régler ton problème au lit, pour ton bien...et je pense que ce sont ces rêves qui te font faire pipi quand tu dors."
"'Veux pas !"
"Siana chérie, tu peux raconter au docteur tes mauvais rêves, il les fera partir pour ne laisser que les bons."
"'Veux pas !!"
"Allons, ma princesse..."
"'VEUX PAS !!!"


Monsieur Elemanquia soupira et tourna à nouveau son regard vers le docteur. Celui-ci semblait réfléchir intensément, les yeux rivés sur la petite, les sourcils froncés ; soudain, il s'anima :

"Monsieur, puis-je vous demander de me laisser seul un instant avec elle ?"
"Euh, oui, mais pourquoi donc ?"
"J'ai une petite idée, mais je pense qu'elle ne marchera que si vous êtes absent. Vous voulez bien patienter dans la salle d'attente ?"


Un peu interloqué, le père sortit tout de même. Le médecin fit le tour de son bureau, et vint s'asseoir face à la blondinette, qui, toujours renfrognée, fixait ses doigts, les mains posées sur ses genoux.

"Siana, pourquoi ne veux-tu pas me parler des rêves que tu fais ? Tu peux au moins me dire pourquoi tu ne veux pas les raconter, non ?"
"Hummm...je veux pas qu'ils partent..."
"Pourquoi, Siana ? Pourquoi ne veux-tu pas que ces méchants rêves qui te font faire pipi au lit partent ?"


La fillette tourna la tête vers le médecin, levant sur lui ses grands yeux verts aux teintes bleutées.

"Parce que dans les méchants rêves, il y a maman. Et je veux pas que maman parte."

La voix enfantine était ferme, mais le pédiatre vit bien que les larmes étaient aux bords des yeux. Et il savait.

"Maman n'est jamais dans les bons rêves ?"
"Pas beaucoup. Dans les bons rêves, c'est papa qui est là. Ou des endroits que j'aime. Mais maman elle est pas là, ou alors je vois pas son visage."
"Tu ne vois pas son visage ? Comment est-elle alors, dans les bons rêves ?"
"Elle me tourne le dos, ou son visage est tout blanc."
"D'accord..."


Le médecin lui adressa un petit sourire, mais il se forçait. Il se leva, fit descendre Siana et alla ouvrir la porte.

"Nous avons fini, tu peux aller jouer dans la salle...Monsieur, je vous en prie."

Sans un regard ni un mot pour le médecin ou son père, la fillette sortit, tête baissée et poings serrés, puis son père entra et les deux hommes s'assirent.

"Bon, écoutez...cela relève maintenant de la psychologie infantine, et je ne suis pas assez compétent pour cela. Il y a bien un spécialiste à Anchorage, mais évidemment, faire l'aller-retour...donc, je vais le contacter et lui parler de tout cela. Il devrait pouvoir me donner des conseils pour Siana."
"Merci docteur..."
"Monsieur Elemanquia...votre fille est perturbée par votre perte, et je pense que ça prendra du temps de l'aider à surmonter ça. Beaucoup de temps, comprenez-vous ? Je ne doute pas que cela s'améliore vite, et que la fréquence de ses mictions nocturnes baisse facilement, mais dans le temps ça perdurera. Elle a du mal à surmonter le décès de votre épouse, et craint de l'oublier. Le fait qu'elle urine au lit est avant tout le signe d'une souffrance, d'accord ?"
"Je m'en doutais...mais, je vous avoue ne pas savoir comment l'aider."


Le médecin fixa l'homme bien bâtit qui lui faisait face. Monsieur Elemanquia avait vite bâtit sa réputation de bosseur, et en moins d'un an de présence à Dilingham, il avait quasiment prit le contrôle du commerce de poissons de toute la région. Un instant, le disciple d’Hippocrate se dit que c'était probablement que le père lui-même ne se remettait pas de sa douleur : se perdre dans le travail était son anti-douleur. Il se promis d'en parler à son collègue aussi...

"Bon, écoutez, outre le fait que je vais joindre le spécialiste, je vais aussi vous donner ce conseil : levez le pied et sortez-la. Elle a besoin de se changer les idées, mais avec quelqu'un de sa famille, et vous seul pouvez actuellement lui apporter cela."
"La sortir ?"
"Je ne sais pas, moi : allez au cinéma, faites un tour en bateau, allez marcher dans les bois...ce genre de choses. Il faut qu'elle soit avec vous tout en s'occupant l'esprit avec des expériences positives."
"C'est vrai que je peux facilement l'emmener en bateau, et que notre maison est assez isolée, dans les collines boisées montant vers les montagnes..."
"Eh bien voilà. Je vous recontacte vite."
"Merci."


Ils se serrèrent la main, puis le négociant en poissons sortit.
Il fixa un instant sa fille, qui au lieu de se tourner à nouveau vers les jouets était debout, face à une affiche apposée sur l'un des murs de la salle d'attente. Le coeur du magnat se serra.


*Oui...notre famille aurait pu en être là, si souriante et complète, si elle n'était pas malheureusement décédée...*

L'affiche montrait deux parents et leurs deux enfants se brossant les dents devant leur glace en faisant de grands sourires. Le père saisit la main de sa fille.

"On y va ?"
"Hum."


A l'acquiescement de la petite, il l'entraîna pour sortir du cabinet et prit la direction de sa voiture, une grosse Jeep Defender, modèle Station Wagon 110, noire. Il fit monter Siana, l'asseyant dans le siège enfant à l'arrière. Il avait toujours été prudent, et l'était plus encore qu'avant, maintenant qu'il était seul pour veiller sa petite blondinette. Il démarra.

"Papa ?"
"Oui ma chérie ?"
"Je t'aime."
"...moi aussi, ma princesse."


Son cœur se serra, et le véhicule prit le chemin de la maison. Il devait absolument suivre le conseil du médecin, et prendre du temps sur son travail pour emmener son ange aux cheveux presque platines voir les beautés de ce monde...oui, demain même, il quitterait plus tôt et l’emmènerait voir les castors sur l'un des proches bras de la Wood, le grand fleuve local.

descriptionUnder the Green Beret...in the heart behind the Silver Wings... EmptyRe: Under the Green Beret...in the heart behind the Silver Wings...

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"Deux...deux...deux....section...HALTE !"

La trentaine de jeunes soldats en tenues BDU s'arrêta d'un seul et même mouvement, restant au garde-à-vous.

"A gauche, gauche !"

La section tourna d'un même mouvement, en appui sur le talon du pied gauche et la pointe du pied droit. Un claquement de talons marqua la fin du mouvement. Le Sergeant first class Nelson M. Douglass, surnommé par ses élèves "Douggy-Dog", vint se placer face à la troupe.

"Okay, il est 17-50, vous êtes libres jusqu'au "rasso" à 19-Zéro-zéro pour le mess. McBrian, White, Elemanquia et Ju-Tong, vous restez ici. Pour les autres, rompez les rangs !"

Les élèves saluèrent, et rabattèrent leurs mains à la cuisse sitôt que le sous-officier leur eut rendu le salut ; puis ils se dispersèrent en commençant à chuchoter : il leur était officiellement et explicitement interdit de "faire du boucan" en rentrant dans leurs chambres, mais la règle était généralement considérée comme respectée s'ils ne parlaient pas trop fort.
Siana, droite et le visage neutre, entendit pourtant quelques sifflements plus forts que d'autres, car plus d'un se demandait pourquoi McBrian, l'élève-chef de section, et leurs trois autres camarades, étaient restés. "Douggy-Dog", qu'on appelait "D-D" ou "Delta-Delta" en pensant qu'il ne devinerait jamais cette signification, n'était pas un trop mauvais cheval, pour un instructeur, mais il restait strict et le groupe savait déjà que ceux restés avec lui ne recevraient pas un bouquet de fleurs.


"Sur une ligne, tous les quatre."

McBrian se mis face à l'instructeur, le plus à gauche ; les trois autres enquillèrent en s'avançant, car ils étaient déjà côte à côte.

"McBrian, tu prends note et rendras compte au Sergent-chef du bureau de la discipline : White, Ju-Tong et Elemanquia, corvée de chiottes et de nettoyage gymnase pour les quatre prochains jours. Vous deux, ça vous apprendra à parler dans les rangs pendant une cérémonie : putain, j'étais de l'autre côté de la place d'armes, j'pouvais lire sur vos lèvres ce que vous disiez ! Un peu plus fort, et je crois que tout le bataillon vous entendait ! Elemanquia, la prochaine fois, puisque t'es entre eux, t'oublieras pas de leur dire de fermer leurs gueules. Clair ?"
"Aye aye, sir."
"J'entends rien !"


Effectivement, White et Ju-Tong, les deux grands déconneurs de la section, avait plus marmonné qu'autre chose...maintenant qu'ils étaient face à l'instructeur et qu'ils s'étaient faits avoir, forcément, ils n'osaient plus trop respirer ni parler.

"AYE AYE, SIR !"
"Bien mieux. Disparaissez, je veux plus vous voir ce soir. McBrian, avec moi pour les dispositions de la journée de demain."


Les trois punis saluèrent : "D-D" leur rendit le salut, et ils s'empressèrent de disparaître dans le bâtiments où les élèves de la 2ème compagnie de formation étaient logés.

"Désolé, Elemanquia."
"Ouais, désolé, on l'a pas fait exprès..."
"Ah, vous faites pas exprès d'ouvrir vos clape-merdes pendant une cérémonie ?"


White et Ju-Tong froncèrent les sourcils et s'arrêtèrent, bloquant leur camarade qui les suivait. Tous deux étaient les "déconneurs" de la 3ème section de la 2ème compagnie du bataillon de formation de la 82ème Division Aéroportée, mais pas seulement. White, un métis d'indien et d'anglais de vingt-et-un ans, était une montagne de muscles de presque deux mètres, dépassant la déjà très grande Siana, et bien plus large d'épaules qu'elle ; Ju-Tong, d'origine coréenne et âgé de dix-neuf ans, dont les grands-parents avaient immigrés depuis la Corée suite à la guerre de 1950-1953, était malgré ses origines à peine moins bien taillé que celui qui était son ami depuis qu'ayant débuté leurs classes ils s'étaient rendus compte qu'ils avaient le même humour.

"T'as plutôt intérêt à causer correctement, Elemanquia. Nous aussi on est punis."
"Tu peux apprendre à "causer" correctement avant moi, et vous êtes punis par votre faute. Ca fait déjà trois mois qu'on est en formation, vous devriez savoir à quoi vous en tenir, au lieu de continuer votre merde."


Les deux jeunes hommes haussèrent les sourcils. Il était rare que la jolie blonde d'à peine dix-sept ans aligne plus de trois ou quatre mots d'affilé, lorsqu'elle ne se contentait pas d'un simple "oui" ou "non". Cependant, son comportement les énervait : ils se crispèrent et prirent une attitude menaçante, qui ne fit pas tressaillir le moindre muscle sur le visage glacial de la jeune femme.

"Dis donc, sale pute, tu vas pas m'apprendre la vie ! Fermes ta gueule, sinon tu vas ramasser !"
"Fais gaffe à qui tu parles ! On va te mettre minable si tu continue !"


Le regard lourd et dédaigneux de la blonde les dévisagea l'un après l'autre.

"...ce serait marrant de vous voir essayer..."

Le visage de White vira au rouge : il leva le poing et le lança vers le ventre de la blonde. Une fraction de secondes plus tard, il s'étalait sur le dos contre le sol de couloir, avec un cri de douleur et de surprise.

"Salope !!"

Bien que surpris, Ju-Tong s'élança aussi vers la jeunette, qui l'envoya tout aussi facilement valser. White commençait déjà à se relever, mais Siana ne se remis pas en position de garde, continuant à leur adresser son regard chargé de dédain.

"Au moins, j'ai la preuve que t'as beau être d'origine asiatique, tu n'y connais rien en arts martiaux."
"Que...?"


Ju-Tong rejoignit son ami. Ils étaient toujours en colère, mais cette première manche les contraignait à se montrer plus prudents. Les bases du close-combat étaient déjà enseignées aux élèves, mais si la blonde s'en sortait très bien, nul n'avait jamais entendu dire qu'elle s'était vraiment battue. Il faut dire qu'à part le fait qu'elle venait d'Alaska et s'était engagée sitôt son diplôme du lycée en poche, peu de ses camarades savaient grand-chose d'elle, même les filles qui étaient dans la même chambre qu'elle.

"Comment...?"
"Vos vols planés ? Crétins, ce n'est pas parce que je suis à la lettre les consignes des instructeurs que je ne suis pas déjà à un niveau bien plus poussé que vous autres. C'est des trucs qui peuvent aussi s’apprendre dans le civil."


Un masque de surprise passa sur leurs visages. Cependant, ils restaient plus costauds qu'elle, et ils étaient deux...un échange de regards et ils bondirent sur la blonde, désireux de laver l'affront et le premier échange de coups.
Ju-Tong avait à peine bondit en avant qu'il se pris un coup de pied frontal dans le ventre : sous la force du coup, il repartit droit en arrière, atterrissant sur les fesses, le souffle coupé. En même temps, Siana passa sous le coup de poing que lui adressait White, et sauta vers Ju-Tong, le grand métis ne pouvant que s'arrêter et se retourner pour constater qu'elle était déjà sur lui et lui décochait un direct en plein ventre. Ju-Tong poussa un hoquet de douleur et bascula sur le dos. La blonde se retourna et passa à nouveau sous la garde du colosse qui, enfin arrivé, lui décochait une salve de crochets : elle lui envoya un coup de rangers sur le genou, et, alors qu'il s'effondrait au sol sous la douleur, lui saisit la main et la lui tordit cruellement.
White lâcha un cri de douleur, mais la utilisa son autre main pour le saisir aux joues, appuyant de chaque côté pour lui ouvrir les mâchoires tout en lui serrant les joues pour l'empêcher de hurler, et elle lui adressa, la voix toujours glaciale :

"La prochaine fois que tu veux que je "ramasse", penses bien à me tomber dessus avec dix de tes copains gorilles, par surprise, et pendant que je dors. Et même là, je suis pas sûre que t'as la moindre chance."

Elle accentua violemment la torsion du poignet, faisant gémir de douleur son adversaire, tandis que Ju-Tong, se relevant à quatre pattes, vomissait tout ce qu'il pouvait, c'est-à-dire surtout une bile acide en cette fin de journée fatigante. Puis, elle relâcha rapidement White et recula d'un bond.

"Je veux plus voir ta tronche face à moi, et je veux plus vous entendre dans les rangs. La prochaine fois que tu me cherche ou que tu me fais punir, je vous colle des traces sur la figure : si on apprend qu'une "gamine" comme moi vous a foutu la honte, vous serez la risée de toute la troupe, sans même parler de "D-D" et des autres instructeurs. Clair ?"
"R...reçu..."
"Nettoyez la merde de ton pote avant de vous barrer, ça ferait mauvais genre que quelqu'un tgrouve ça.


La jeune blonde se détourna et rejoignit la zone des chambres féminines, ses deux adversaires à moitié KO et humiliés, mais impuissants et abasourdis. Qui aurait pu croire que la plus grande des filles, la plus silencieuse et réservée des élèves, pouvait faire preuve de tant de force...

descriptionUnder the Green Beret...in the heart behind the Silver Wings... EmptyRe: Under the Green Beret...in the heart behind the Silver Wings...

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Elle avait pris une très longue douche, se frottant la peau au savon à n'en plus finir. Elle pouvait supporter la crasse autant que nécessaire ; mais le mot-clé était bien "nécessaire" : une fois la mission terminée et une douche accessible, elle procédait au premier débriefing, rendait ses armes, et fonçait se désaper pour se laver.
En sortant de la douche de campagne, rhabillée en propre de pied en cape, la blonde laissa son regard dériver par-dessus les tentes, les bâtiments en préfabriqués, les véhicules blindés et les fortifications de la base de Bagram. A l'Est, le soleil rougeoyant commençait à se lever.

Elle descendit les marches de la douche de campagne, ses rangers commandos venant fouler le sol sableux de l'Afghanistan, et elle se dirigea vers le mess de la zone des
Green Berets. Ceux-ci, comme la plupart des forces spéciales des différentes nations déployées en Afghanistan, avaient droit à leur propre camp bien délimité au sein du secteur de leur nation. Et ils ne manquaient de rien : c'était l'avantage d'être une "troupe d'élite".
Cependant, Siana se demandait combien allait durer encore son tour en Afgha. C'était déjà la quatrième fois qu'elle y venait, et pour les forces spéciales, les tours de service en déploiement à l'étranger dépendaient du besoin et n'étaient donc pas limités dans le temps, contrairement aux unités régulières qui pouvaient dès le premier jour commencer à compter le temps qu'il leur restait avant de retourner au pays. Une autre différence notable était que les forces spéciales comptaient surtout des militaires professionnels de longue durée, et pas, comme souvent pour les forces américaines et notamment les Marines et l'US Army, des engagés pour un ou deux tours seulement. L'armée américaine restait dans l'esprit une armée de conscription : elle se reposait sur des forces mobilisables selon les nécessités à travers le monde, avec une population très patriotique ; malheureusement pour les militaires "de carrière", cela les amenait à combattre aux côtés de jeunes gens qui n'avaient souvent d'autre expérience que l'entraînement, et qui ne "rempilaient" pas ensuite, d'où un grave manque de conservation de cette expérience. C'était franchement difficile d'opérer dans ces conditions, surtout que les engagés "courts" faisaient souvent les chiens fous avant de se faire défourailler par les talibans, pour alors passer leur temps à se pisser dessus à l'idée de sortir de leur chambre fortifiée pour seulement aller aux chiottes du camp, le risque de roquettes n'étant pas nul...ne parlons même pas des missions à l'extérieur !
Un profond soupir fit descendre les épaules de la blonde. Cette situation était à ses yeux assez compliquée, et elle aurait préféré une mission pour le compte de la CIA, quelque part dans un coin où elle aurait été sans assistance, sans moyen et sans couverture correcte, mais au moins seule et sans avoir à se soucier des petits crétins qui faisaient "gueuler" leur M16 à chaque ombre sous un caillou afghan. C'est pour cela qu'elle espérait que ce tour-ci ne durerait pas. Et puis, l'Afghanistan était un pays magnifique à ses yeux amoureux de paysages montagneux et sauvage, mais ce n'était pas les conditions idéales pour faire du tourisme, et puis le quatrième tour ici en deux ans, c'était un peu lourd.


"J'te jure..."

Elle ne pu se retenir de shooter dans un caillou qui traînait. A cette heure, nul n'était debout, hormis les sentinelles aux entrées, aussi pouvait-elle se permettre d'abandonner une fraction de seconde son masque et sa réputation de "reine des glaces".
Pourtant...

Lorsqu'elle pénétra dans le mess en préfabriqué et protégé à l'extérieur par des gabions remplis de sacs de sable, des applaudissements et des vivats s'élevèrent. Tout ce que Bagram comptait encore des forces spéciales US non déployées :
Green Berets, SEAL's, Delta Forces, était rassemblé dans le mess. En soi, c'était à peine une quarantaine de personnes, auxquelles venaient s'ajouter quelques gens des renseignements et des unités aériennes et médicales de support ; mais c'était symboliquement beaucoup.
Siana, les sourcils ayant rejoint les mèches qui lui tombaient sur le front, s'était figée, et serrait à présent sans comprendre les mains que lui tendaient son capitaine, deux lieutenants du bureau des renseignements, un sous-lieutenant des SEAL's et deux-trois autres sous-officiers.
Il lui fallut quelques secondes pour que ses oreilles habituées depuis plusieurs jours au silence absolues parviennent à comprendre ce que lui disait son officier supérieur.


"...fier de vous, "Ice".
- Pardon mon Capitaine ?
- Excusez-moi : je disais, bravo pour ce "one shoot" !
- ...désolée mon Capitaine, mais je ne saisis pas."


Ses sourcils revinrent à leur position habituelle, son regard vert faisant le tour de la pièce. Les applaudissements s'étaient éteints, et la plupart des assistants, qui avaient pris sur leur peu de sommeil ou leur travail, commençaient déjà à sortir, lui collant deux ou trois claques sur l'épaule en ajoutant un dernier "bravo".
Le capitaine "Bath"(1) lui adressa un nouveau sourire, et l'invita du geste à la suivre à une table. Elle s'assit juste à sa suite.


"On a organisé ça rapidement, donc c'est pour ça que ça ne dure. Mais, ce tir sur la HVT (2) de votre mission est un record ! "One shoot one kill" au M4 à 2.300 mètres, du jamais-vu, sergent ! On ne peut évidemment pas le faire homologuer, mais ça le mériterait !
- Merci mon Capitaine, mais je n'ai aucun mérite : j'avais une position élevée, une bonne lunette de visée, et il ne bougeait pas...
- Me la faites pas "Ice". Vous me prenez pour un officier du Pentagone, pour essayer de me faire oublier les caractéristiques du M4 et celles d'un tir à longue distance ?"


Siana ne répondit rien. Le capitaine retint un petit rire.

"Ne m'en veuillez pas. Je sais que vous n'aimez pas ce genre de démonstration, mais ça me paraissait bien de marquer le coup. Et puis, ça me permet de faire bisquer mes collègues des SEAL's et des Deltas."

Il hocha la tête d'un air satisfait.

"Sincèrement, mon capitaine, je n'ai aucun mérite...
- Attention, à la deuxième fois je vais croire que vous me prenez vraiment pour un con. Vous savez que c'était un tir magnifique, et je sais que vous êtes suffisamment professionnelle et perfectionniste pour en être vous-même satisfaite."


Ce n'était pas faux. Siana n'avait pas été certaine de réussir ce tir.
Mais, après dix-huit jours à planquer sous un buisson sans bouger, en surveillant le village en fond de vallée pour essayer de détecter leur cible et trouver un moyen de l'éliminer, l'occasion avait été trop belle. Le chef taliban, qui comptaient parmi ceux qui aimaient plus que tout l'attentat à la bombe sur les routes des convois de l'ISAF, avait pointé le bout de son nez alors que les huit Bérets Verts répartis en binômes autour du village pour le repérer commençaient à désespérer de leurs renseignements pourtant jugés absolument fiables et certains : il s'était défoulé sur le pas de tir d'entraînement de ses hommes avec une RPK-74, avant d'inspecter un peu son patelin, et d'enfin s'asseoir dans une chaise devant sa maison, surveillant ses hommes et leur gueulant dessus des ordres.
Siana avait hésité. La mission était de repérer la HVT pour confirmer sa présence et faire réaliser une élimination par un groupe d'assaut. Mais l'occasion, si elle était difficile, ne pouvait être plus belle : le taliban était face à elle, sans guère bouger, occupé à regarder son camp de guerriers et à fumer ce qui était certainement de l'opium plutôt qu'à se méfier. Elle ne pouvait pas risquer la vie d'un groupe d'assaut à si bon compte !

La jeune femme de vingt-deux ans, récemment nommée Staff Sergeant, avait demandé confirmation à"Duck", son équipier, de la distance et de la force du vent, et ajusté le réglage de sa lunette de grossissement sur son M4. Puis elle avait fait un tour radio à voix basse, pour demander l'avis des trois autres binômes, dont la vue était cependant moins bonne. Tous avaient confiance dans ses capacités de tireuse, mais la distance était grande. Le commandement n'était pas joignable, le matériel lourd, y compris la radio cryptée pour joindre Bagram, étant planqué dans la montagne ; et les radios d'urgence qu'ils avaient sur eux pour appeler la base n'étaient pas cryptées et pouvaient donc révéler leurs positions aux talibans en contrebas...
Elle avait pris la responsabilité. Un véritable pile ou face : soit elle tuait la cible, et tous pouvaient s'extraire sans difficulté, étant donné la distance qui les séparait du village ; soit elle ratait, et le travail de sept mois de recherches et de renseignement était à refaire, et il deviendrait bien plus difficile d'abattre la cible, qui se montrerait encore plus méfiante.
Le sang avait éclaboussé la chaise et le mur de la maisonnette. Les cris de stupeur puis de vengeance n'avaient même pas atteint les oreilles des membre du commando, qui s'étaient repliés et rassemblés vingt kilomètres plus loin, avant de rejoindre le point d'extraction.


"Je ferai un rapport. Reposez-vous "Ice", vous le méritez bien.
- Merci..."


Elle se releva pour saluer son supérieur, qui disparut traiter les missions qui allaient débuter. "Bath" était un vrai bosseur, dans la pure tradition des Bérets Verts.

Se retrouvant seule avec les deux cuisiniers planqués derrière leurs casseroles, les épaules de la blonde s'affaissèrent à nouveau. "Ice" était un pseudo logique pour la désigner. Elle avait toujours était comme ça. Mais là...
Le souvenir du crâne qui éclate, de la cervelle et du sang qui maculent le mur en torchis, à travers sa lunette de grossissement, lui revint en mémoire.

*Il pouvait pas fermer sa gueule, le 'pitaine ??*

Son poing fracassa la table en deux, et les deux cuistots rappliquèrent en entendant les morceaux brisés frapper le sol.


"Ça va "Ice" ?
- Ça va...je peux avoir un truc bien solide ?
- ....bien sûr, comme d'habitude ?"


Elle hocha la tête et changea de banc pour se mettre sur une table qui tenait debout. Aux cuisines, les deux hommes se lancèrent dans la confection d'un bon festin. Ils ne tenaient pas à être en face de la reine des glaces lorsqu'elle était en colère. Ils n'avaient même pas imaginé qu'elle puisse l'être ; mais aujourd'hui, cette perspective ne leur paraissait plus être un sujet de plaisanterie, comme cela l'avait déjà été avec des potes et d'autres membres des forces spéciales fréquentant le mess...

(1) "Bath" = baignoire. Les membres des forces spéciales se connaissent souvent plus par leur pseudo que par leur véritable identité
(2) HVT = High Value Target, cible de haute valeur

descriptionUnder the Green Beret...in the heart behind the Silver Wings... EmptyRe: Under the Green Beret...in the heart behind the Silver Wings...

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"Toutes mes félicitations pour votre promotion, chef !"

Le Master Sergeant Nelson M. Douglass leva la tête du dossier récapitulant la prochaine instruction qu'il allait dispenser à ses dernières recrues, et, surpris, cligna des yeux, avant de sourire et de se lever. Sa vis-à-vis le salua plus réglementairement, et du geste il l'invita à entrer après lui avoir répondu :

"Entrez, Elemanquia. Merci beaucoup, et toutes mes félicitations à vous. Vous vous êtes bien débrouillée, à ce que je vois...
- Vous en avez entendu parler ?
- On arrive toujours à avoir des échos concernant ses anciens élèves..."


"Douggy-Dog" émit un petit rire surprenant, et Siana, qui était entrée et lui avait serré la main avec une forme de chaleur bien rare chez elle, s'assit face à lui comme il l'y invitait. Le sous-officier la fixa avec un sourire avenant :

"Je pense que les "Greens" ont gagné un bon élément avec vous.
- Merci chef.
- Les tests se sont bien passés ?
- Oui...on en a bavé, mais c'est fait pour ça.
- Exact. Vous savez Siana, j'ai été dans les pathfinders du bataillon spécial de la division...j'ai une idée de ce que vous avez pris dans la tronche. Café ?"


La blonde secoua la tête négativement, tandis que D-D se levait pour se servir une tasse à la cafetière placée sur un meuble derrière son bureau. Il se rassit et prit une gorgée de la boisson fumante.

"Je suis content pour vous. Ca me change des crétins qui ont intégré la division et se sont fait mettre des rapports au cul au bout de deux semaines.
- Je peux deviner ?
- Vous le savez déjà : toujours les mêmes."


Il semblait décidément que White et ses potes gorilles n'étaient pas destinés à rester longtemps dans les parachutistes, voire dans l'armée tout court.

"Je suis cependant surpris de vous voir déjà avec des galons de sergent."

Siana donna un coup de tête de côté. Les trois chevrons à ses épaules étaient rares, surtout si jeune.

"Presque deux ans de formation continue en sortant de la formation de la 82e Airborne, ça en fiche dans les pattes. Néanmoins, ils n'ont pas l'air de beaucoup apprécier les simples militaires du rang...je suppose que ça y est pour quelque chose.
- Hum-hum..."


D-D fixait la blonde par-dessus le bord de sa tasse. Qui pouvait savoir ? Cela faisait presque trois ans qu'elle était sortie de la formation de la division, et les formations initiales des Special Forces duraient entre un et deux ans : elle avait bien eu le temps de faire des déploiements. Mais ce n'était certainement pas le genre de sujet que l'on pouvait aborder librement avec les gens de ce genre d'unité : motus et bouche cousue sur les opérations spéciales, c'était la règle ; par extension, tout ce qui y était lié, y compris le silence même, devait être évité. Une règle souvent difficile à suivre, mais nécessaire.


"Je suis ravi de vous voir en bonne forme en tous cas. Mais, vous n'êtes pas venue ici, faisant certainement un détour de quelques centaines de kilomètres au moins, juste pour saluer votre vieil instructeur ?
- Eh bien...je venais vous consulter..."


Il haussa les sourcils, interrogateur. La blonde semblait hésitante, et Douglass se souvenait bien assez d'elle pour savoir que ce n'était pas du tout son style.

"On m'a proposé un poste spécial. Une affectation "particulière" dont je ne peux rien savoir avant d'avoir donné ma réponse, si ce n'est qu'elle ne mène pas d'opérations spéciales. Je vous avoue ne pas savoir quoi en penser...
- Je vois..."


Enfin, D-D "voyait", mais pas beaucoup quand même. Une unité secrète mais ne menant pas d'opérations spéciales ? Un descriptif bien étrange. Il n'avait jamais entendu parler de quelque chose de tel, mais il comprenait immédiatement les interrogations de la jeune femme : visiblement, elle se demandait si elle devait faire ce pas vers l'inconnu, alors qu'elle venait juste d'intégrer une unité mythique et qui répondait à son besoin d'action.
Le sous-officier pris le temps de boire deux longues gorgées de café chaud, puis posa la tasse et se pencha en avant vers Siana, confident.


"Siana, vous savez, vous êtes brillante. Efficace, décidée, réfléchie et rapide. On peut difficilement vous faire des reproches, si ce n'est sur votre esprit de camaraderie ordinaire, bien que vous n'abandonniez personne. Je suppose que vous n'avez pas tourné en plus mal depuis votre entrée chez les SF, par rapport à cette analyse basée sur le temps que vous avez passé sous mes ordres en formation de parachutiste."


La blonde resta silencieuse...elle n'aimait pas les compliments, D-D le savait, mais elle ne dirait rien contre un supérieur.

"Siana...tu t'es engagée dans l'aéroportée, et tu fais partie d'une unité d'élite. Quand on saute sur un objectif, c'est le vide, l'inconnu, l'adversité. On ne sait pas sur quoi on va tomber : des alliés, rien, un fantassin ennemi, un tueur sans pitié, un blindé, une batterie anti-aérienne, le champ de tir d'une mitrailleuse ? Tout ça, c'est notre lot. Si tes chefs t'ont choisie, c'est qu'ils estiment que tu es capable de remplir cette mission. Toujours volontaire."


Les épaules de la blonde s'affaissèrent, et son front tiré par son regard toujours froid paru lui-même se détendre un peu. Une voix fluette, que D-D ne lui connaissait pas, lui répondit :

"Merci, chef...ça remet les pendules à l'heure."

Le Master Sergeant sourit et se leva, et la blonde l'imita.

"Ravi d'avoir pu vous aider."

L'instant un peu paternel était partit. "Douggy-Dog" n'était pas un mauvais cheval avec ses élèves, surtout les bons. Il ne leur demandait que d'être les meilleurs, pour eux-mêmes -et leur survie- comme pour leur pays : la carrière militaire ne se choisissait pas par hasard ou parce que l'on avait "vu la lumière" en passant devant une affiche de recrutement. Le retour au vouvoiement mettait un terme à la parenthèse de proximité un peu trop forte entre l'instructeur et son ancienne élève. Il lui tendit la main, que Siana serra avant de le saluer réglementairement.

"Allez, bon courage Sergeant Elemanquia. Et soyez fière de porter les Ailes de l'Aéroportée !
- Merci beaucoup chef ! Je ne vous décevrai pas."


Il hocha la tête avec un sourire et la regarda partir. L'instructeur restait souvent une figure parentale pour les élèves passés entre ses mains : c'était son devoir d'éclairer une ancienne élève à faire les bons choix, même s'il n'avait pas l’entièreté des clefs...

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